Intervention de Xavier Pintat

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 10 février 2015 à 16h30
Exonération de droits d'enregistrement des acquisitions immobilières destinées à être utilisées par le cern en tant que locaux officiels — Approbation de l'accord entre la france et l'organisation européenne pour la recherche nucléaire cern - examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Xavier PintatXavier Pintat, rapporteur :

Monsieur le président, mes chers collègues, l'organisation européenne pour la recherche nucléaire, bien connue sous l'acronyme CERN, du nom du Conseil européen pour la recherche nucléaire, organe provisoire mis en place en 1952, est une organisation internationale intergouvernementale qui a été créée par la convention signée à Paris, le 1er juillet 1953, pour l'établissement d'une organisation européenne pour la recherche nucléaire. Cette convention a été ratifiée par douze Etats européens, le 29 septembre 1954.

Ce projet scientifique et technologique est un des grands projets européens de l'après-guerre et une vraie réussite. Le CERN est aujourd'hui le plus grand laboratoire de physique des particules du monde. Il compte 21 États Membres et environ 2 600 membres du personnel titulaires. Ses installations sont utilisées par environ 8 000 scientifiques, représentant près de 940 instituts et 87 nationalités. Il représente un exemple éclatant de collaboration internationale.

Le CERN est une organisation internationale située sur la frontière franco-suisse. Elle a son siège à Genève mais poursuit également son activité en France puisque l'anneau du grand collisionneur de hadrons (c'est l'accélérateur de particules le plus grand et le plus puissant du monde qui est le dernier maillon du complexe d'accélérateurs du CERN) LCH (Large Hadron Collider) s'étend sur 27 km de circonférence du canton de Genève à la partie française de la chaîne du Jura. Les détecteurs des expériences sont installés pour partie en France, pour partie en Suisse.

La France joue un rôle important dans la gouvernance du CERN. Elle apporte un peu plus de 15 % du budget annuel du CERN (soit un peu plus de 140 millions d'euros pour 2014). C'est le second contributeur parmi les 21 pays qui forment cette organisation. Un peu plus de 1 000 Français font partie des effectifs permanents du CERN, soit plus de 41 % du total. De nombreux scientifiques français participent aux collaborations qui réalisent des expériences au CERN, dont celles impliquées dans la découverte du nouveau boson, le boson de Higgs.

Le statut international de cette organisation est décrit dans l'accord du 16 juin 1972, signé entre le Gouvernement de la République française et le CERN, en vertu duquel notamment ses avoirs, revenus et autres biens sont exonérés de tous impôts directs.

L'accord que nous examinons aujourd'hui a pour objet de modifier cet accord de 1972, en vue d'y introduire une nouvelle exonération fiscale et ce, pour mettre fin à ce qu'il est convenu d'appeler « un irritant » en langage diplomatique.

L'irritant en question date de fort longtemps et résulte d'un échange de courriers qui a commencé en 1983. A cette date, le Service de la législation fiscale (SLF) a fait savoir au CERN que la Caisse des pensions du CERN n'ayant pas de personnalité juridique distincte, elle « serait exonérée des droits d'enregistrement de la taxe de publicité foncière » pour ses investissements immobiliers en France.

A la suite de modifications de ses statuts en 1986, puis en 1989, la Caisse a acquis la personnalité juridique et le Service de la législation fiscale lui a indiqué par deux lettres, dans le courant de l'année 1991, qu'elle ne pourrait plus prétendre à ce régime d'exonération partielle.

En juillet 1997, nouveau retour du balancier, le tribunal administratif de l'Organisation internationale du travail (OIT) a rendu un jugement dans lequel il a considéré que « la Caisse des pensions du CERN faisait juridiquement partie de la structure du CERN » et n'avait donc pas de personnalité juridique distincte. La Direction de l'administration fiscale a alors précisé que celle-ci pouvait bénéficier des mêmes exonérations fiscales que le CERN et donc de la seule exonération des impôts directs.

Tous ces échanges ont entretenu une certaine confusion quant à la position respective des parties, d'autant que le CERN avait effectué, depuis cette date, seize achats immobiliers qui avaient été exonérés des droits de mutation.

En 2008, l'incompréhension entre les deux parties s'est encore aggravée, lors de l'acquisition par le CERN de deux immeubles situés à Paris, sans que le montant des droits d'enregistrement, qui s'élevait au total à 1,2 million d'euros, ne soit acquitté.

Dans un souci d'apaisement, la France a proposé au CERN d'exonérer des droits d'enregistrement l'acquisition des futurs biens immobiliers que le CERN utiliserait en qualité de « locaux officiels » dont une définition serait agréée entre les parties. C'est l'objet de l'accord qui vous est soumis aujourd'hui.

A l'instar de ce qui prévaut pour les représentations diplomatiques et consulaires, cette exonération des droits d'enregistrement ne s'applique qu'aux acquisitions immobilières destinées à être utilisées en tant que « locaux officiels », en l'espèce aux biens immobiliers destinés à accueillir des activités à caractère administratif, scientifique et technique entrant dans le domaine de compétence du CERN.

Le CERN a l'interdiction expresse d'y « réaliser des activités liées à la satisfaction des besoins des personnes (restauration, hébergement et garde d'enfants) ».

En contrepartie, le CERN a accepté d'apurer le passé en s'acquittant des droits d'enregistrement exigibles pour les immeubles acquis en 2008. Ces stipulations font l'objet d'un second accord, signé simultanément à Genève le 11 avril 2013, qui porte règlement de la situation des immeubles acquis en 2008 et qui a déjà fait l'objet d'une publication au Journal Officiel, par décret du 5 juin 2013.

L'accord que nous examinons permet de mettre fin à un diffèrent remontant à plusieurs années, d'une manière satisfaisante pour les deux parties. La France souhaitait notamment éviter tout discrédit qui aurait pu porter atteinte à son image d'Etat-hôte de nombreuses organisations internationales.

Ce type d'exonération fiscale au bénéfice d'une organisation internationale ne pose aucune difficulté particulière, puisqu'il est d'usage dans de nombreux accords de siège signés, encore récemment, par la France.

Pour ces raisons et compte tenu de la renommée, du rayonnement scientifique du CERN qui accueille chaque année des chercheurs du monde entier, je ne peux, en conséquence, que recommander l'adoption du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN) sur l'exonération de droits d'enregistrement des acquisitions immobilières destinées à être utilisées par le CERN en tant que locaux officiels.

L'examen en séance publique est fixé au jeudi 19 février 2015 à 9 heures 30. La Conférence des Présidents a proposé son examen en procédure simplifiée.

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