Intervention de Jean-René Lecerf

Réunion du 10 mars 2015 à 14h30
Formation aux gestes de premiers secours et permis de conduire — Article 1er

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf :

Les gouvernements de droite et de gauche peuvent se serrer la main : les uns et les autres ont totalement ignoré la volonté du législateur.

Par ailleurs, j’entends le fameux argument selon lequel cette compétence relèverait de l’éducation nationale. C’est formidable !

Il y a peu, j’ai travaillé avec Esther Benbassa à la rédaction d’un rapport relatif aux discriminations. À ce titre, nous avons examiné les responsabilités de l’éducation nationale, depuis la remise du rapport Debray portant sur l’enseignement du fait religieux dans l’école publique. À mon sens, l’enseignement aux gestes qui sauvent est à peu près aussi bien dispensé, à l’école publique, que l’enseignement du fait religieux…

Aujourd’hui, on affirme que 23 % des élèves de France suivent des formations de ce type. Si tel est le cas, ce n’est pas brillant… Pis, je crains fort que ce chiffre ne traduise un très large optimisme. J’ajoute une question : comment, dans les faits, des jeunes pourront-ils mettre en œuvre, à vingt ou vingt-cinq ans, des gestes qui leur auront été enseignés lorsqu’ils étaient en sixième, en cinquième ou en quatrième ?

De plus, on nous oppose le fait que ces formations coûtent trop cher – entre 25 et 60 euros. Rendez-vous compte de l’ampleur des sommes en jeu !

Mes chers collègues, les juristes suivent généralement le principe dit « du bilan coûts-avantages ». Que représentent 25 à 60 euros, si ces évaluations sont pertinentes, au regard de vies sauvées ? Cet argument semble tout à fait dérisoire. Au demeurant, lorsqu’un jeune roule à trente et un kilomètres à l’heure et non à trente, à soixante et un kilomètres à l’heure et non à soixante, on lui fait payer sans complexe des amendes d’un montant autrement plus élevé…

À présent, on nous oppose la judiciarisation de la société, face à laquelle il ne faudrait pas prendre de risques. Certains faits divers assez peu glorieux se sont récemment déroulés dans les transports en commun. Des femmes ont été agressées sans qu’aucun voyageur intervienne pour les défendre. Nous pouvons aller jusqu’à dire à nos concitoyens : « Surtout, n’agissez pas : en bousculant tel ou tel, vous risqueriez de le blesser et de subir un procès, à cause de la judiciarisation de la société. »

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