Nous savons pertinemment que la prostitution est un phénomène lié à une vulnérabilité sociale et économique.
Nous connaissons toutes et tous les raisons qui peuvent pousser telle ou telle personne à quitter son pays d’origine et surtout les difficultés qu’elle rencontre et les menaces auxquelles elle est exposée en arrivant dans un nouveau pays : elle constitue une proie idéale. Nous savons les chantages qui sont exercés sur elle lorsqu’elle veut obtenir ou récupérer ses papiers, son passeport, etc.
À cette précarité, à cette subordination économique, s’ajoutent les risques sanitaires qu’encourent les personnes prostituées. C’est une catégorie majoritairement bien plus exposée que le reste de la population aux maladies sexuellement transmissibles ou aux infections sexuellement transmissibles, sans parler des maladies chroniques et autres problèmes de santé souvent liés à des conditions de vie dégradées et à la perte de l’estime de soi. Or on ne le sait que trop bien, le cumul des difficultés est un obstacle à l’accès aux soins. Je vous renvoie, mes chers collègues, au rapport de Michelle Meunier ou au rapport d’information de Chantal Jouanno et Jean-Pierre Godefroy qui sont extrêmement éloquents et préoccupants à cet égard.
Au-delà de ces chiffres qu’il convenait de rappeler, la prostitution est une violence extrême, inhérente au système prostitutionnel, infligée tout aussi bien par les clients que par les proxénètes : violences sous toutes formes, chantages, humiliations, insultes, coups, viols répétés… Les témoignages de personnes prostituées ou qui sont sorties de la prostitution – je pense notamment à Rosen Hicher– sont tout simplement insoutenables.
Comment, à partir de là, continuer à banaliser la prostitution en la considérant comme étant le plus vieux métier du monde ? Je rappellerai l’expression de Brigitte Gonthier-Maurin qui, elle, parlait de « plus vieille violence du monde infligée aux femmes ». Comment accepter cette violence masculine s’exerçant sur des personnes plus vulnérables, au nom d’un rapport sexuel prétendument consenti car tarifé ?
On le voit à travers ces constats, les défis à relever sont importants et la présente proposition de loi vise à s’y attaquer par la mise en place d’une politique fondée sur quatre piliers, qui sont fondamentaux dans la mesure où ils prennent en compte le système prostitutionnel dans son ensemble, dans sa globalité, en intégrant tous les acteurs concernés, personnes prostituées, proxénètes et clients.
Nous le savons tous dans cette enceinte, le débat va tourner essentiellement autour des articles 13, 16 et 17 de la proposition de loi et les dispositions adoptées alors détermineront le vote final de chacun.
À l’instar de la majorité de mes collègues du groupe CRC, j’estime que nous devons réintroduire dans ce texte les articles 16 et 17 ayant pour objet la responsabilisation du client, au risque, sinon, de le vider de sa substance. De même, l’article 13 abrogeant le délit de racolage doit être maintenu en l’état.
Bien évidemment, il est important d’insister sur les moyens qui doivent être accordés pour que cette proposition de loi puisse être suivie d’effets et pour que l’on parvienne à lutter efficacement contre le système prostitutionnel.
Je conclurai mon propos en disant que la prostitution est une défaite non seulement pour les femmes, mais également pour les hommes et le vivre ensemble. Lutter pour son abolition est une question éminemment politique. C’est un combat mixte en faveur du respect et de l’universalité des droits humains qui rassemble de nombreux progressistes et la majorité des associations féministes, notamment celles qui composent le collectif Abolition 2012.
Notre responsabilité de parlementaire est de légiférer en ce sens, pour la majorité des prostituées qui sont contraintes d’exercer cette activité. Mes chers collègues, je vous remercie d’être attentifs à cet aspect de la question au cours de notre débat et de redonner à cette proposition de loi toute la portée qu’elle avait à l’issue des travaux de l’Assemblée nationale.