Intervention de Annick Billon

Réunion du 30 mars 2015 à 16h00
Prostitution — Discussion générale

Photo de Annick BillonAnnick Billon :

Ainsi, l’amendement déposé par M. le président de la commission spéciale tendant à supprimer l’article 13 emporte notre adhésion. Quoique conscients des imperfections de ce système, nous souhaitons, en la matière, le maintien du droit actuellement en vigueur.

Deuxièmement, l’article 16 du présent texte, adopté par l’Assemblée nationale puis supprimé par la commission spéciale du Sénat, a fait couler beaucoup d’encre. Quel était son contenu ?

Cet article modifiait l’actuel article 225-12-1 du code pénal qui pénalise les clients de pratiques prostitutionnelles avec des mineurs, par son premier alinéa, ou avec des personnes présentant une particulière vulnérabilité telle qu’une infirmité ou une déficience psychique, par son second alinéa. Il étendait la pénalisation des clients aux pratiques prostitutionnelles avec toute prostituée, l’extension du champ ainsi voulue permettant d’« assécher » l’offre. Craignant, au-delà de la contravention instituée, l’opprobre populaire, les clients cesseraient de se livrer à cette pratique et le monde s’en porterait beaucoup mieux.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, cette démarche m’inspire un certain nombre de réserves.

Certes, la rédaction retenue peut permettre d’appliquer le dispositif en question à des infractions commises sur internet. Mais il faut bien admettre que ces dispositions ont été conçues plus spécifiquement en vue d’une répression physique. Aussi, elles me semblent assez anachroniques : désormais, la grande majorité des « contrats de prostitution » sont conclus en ligne, via des sites spécialisés.

En outre, ce texte serait difficilement applicable sans une augmentation substantielle des effectifs chargés de la poursuite de ces infractions. Je doute que de tels moyens puissent être déployés pour une simple contravention. Dès lors, pour quelques clients sanctionnés, combien compterait-on d’impunis ? Je n’en dirai pas autant des réseaux mafieux qui sévissent sur notre territoire et qu’il faut combattre sans merci.

Cette proposition de loi assure des avancées notables en matière de lutte contre le système prostitutionnel, notamment en créant un parcours de sortie de la prostitution ou en instituant des mesures protectrices à l’égard de ces victimes et des dispositifs tendant à sensibiliser le jeune public aux réalités de la prostitution.

Toute initiative visant à améliorer la situation des personnes prostituées et la lutte contre le système prostitutionnel doit être soutenue.

La mesure que je viens d’évoquer se veut avant tout symbolique et dissuasive, je le comprends, mais je crains qu’elle ne soit inefficace. En conséquence, j’ai tendance à soutenir la suppression de l’article 16 et de son pendant, l’article 17, par la commission spéciale.

Cela étant, je le rappelle, je suis viscéralement hostile à la prostitution sous toutes ses formes. Je souhaite voir intensifier la lutte contre les réseaux de prostitution, les réseaux mafieux. Je souhaite également que les sanctions les plus sévères soient prises à l’encontre de ces groupes qui foulent au pied la dignité d’êtres humains qu’ils rabaissent au rang de marchandises.

Vous le savez, face à des sujets sociétaux comme celui-ci, même chez les centristes, l’unanimité est rarement atteinte, chacun votant selon ses convictions personnelles, lesquelles sont inflexibles à toute contradiction. La majorité du groupe UDI-UC votera cependant pour les progrès traduits par ce texte.

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