Intervention de Philippe Kaltenbach

Réunion du 30 mars 2015 à 16h00
Prostitution — Discussion générale

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes appelés à débattre d’un texte important, visant à lutter contre le système prostitutionnel en France.

Je suis heureux de constater qu’un large consensus se dégage autour d’une action contre la prostitution qui soit efficace et qui permette de lutter contre les réseaux mafieux et les violences que subissent les personnes prostituées. Ce consensus concerne notamment le volet social du présent texte comme l’interdiction de l’utilisation d’internet.

À ce stade de la réflexion, le débat se focalise encore sur deux points : la question de la pénalisation du client et celle du délit de racolage, qui a resurgi à l’occasion d’une récente réunion de la commission spéciale.

Pour ma part, je suis complètement abolitionniste. Je ne crois pas à la fable de la prostitution libre et consentie. Songez que, de l’adhésion franche jusqu’à la résignation, le spectre du consentement est très large. À cet égard, 90 % des prostituées sont d’origine étrangère et sont liées à des réseaux de traite des êtres humains. Même si, parmi les 10 % restant, quelques personnes déclarent être libres et consentantes, nous constatons bien que ce consentement recouvre des situations très différentes.

Je ne crois pas non plus à la possibilité d’une prostitution sans risques. Les pays réglementaristes qui imaginent une prostitution contrôlée vont d’échec en échec. L’Allemagne en offre un exemple : les prostituées y sont dix fois plus nombreuses qu’en France, et les maladies, les violences, les difficultés y sont tout aussi présentes.

Enfin, je ne crois pas que la prostitution soit un métier comme un autre.

Sur ces points-là, nous devons renforcer clairement la tradition abolitionniste de la France. Je ne souhaite pas que mon enfant se prostitue ni qu’il aille voir une prostituée.

Cela étant, je remercie le Gouvernement d’avoir pris conscience de l’enjeu que représente aujourd’hui cette question en France. Il fallait agir. Nous constations, en effet, que les dispositifs législatifs, comme les systèmes visant à aider et à accompagner les prostituées, étaient complètement insuffisants et laissaient de côté trop de personnes démunies et en difficulté.

Certains députés ont pris l’initiative de cette proposition de loi, qui est en discussion maintenant depuis longtemps. Le débat a été large, à la fois au Parlement et dans la société. Aujourd’hui, la solution proposée, qui consiste à faire entrer le client dans le jeu, si je puis dire, et à le considérer comme un acteur susceptible d’être sanctionné s’il achète un acte sexuel, doit être regardée comme efficace. Elle l’est parce qu’elle envoie un message clair. Il faut être cohérent : on ne peut pas affirmer que la prostitution est la source de tous les maux, sans ajouter qu’il est illégal d’acheter un acte sexuel. Cela constitue en outre un outil efficace pour lutter contre les réseaux en tarissant leurs recettes financières, qui s’élèvent à 3 milliards d’euros chaque année. C’est en faisant en sorte qu’il y ait moins de clients, et donc en attaquant de front les réseaux, que l’on favorisera la diminution de la prostitution.

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