Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a près de quarante ans, les partenaires sociaux s’accordaient sur la possibilité pour les salariés de s’absenter de l’entreprise pour faire face à des événements importants, heureux ou malheureux, de leur vie personnelle, sans effet sur leur rémunération, ni sur leurs congés.
Il y a près de neuf ans, le Sénat décidait, sur le rapport du président de la commission des affaires sociales d’alors, Nicolas About, d’allonger le congé accordé en cas de décès du conjoint ou d’un enfant.
Il y a près de trois ans et demi, l’Assemblée nationale, en adoptant une autre proposition de loi, déposée par Mme Michèle Delaunay, décidait à son tour d’allonger ces congés.
Tel est le parcours singulier du texte aujourd’hui soumis à l’examen du Sénat. Cette proposition de loi, adoptée en 2011 par l’Assemblée nationale, porte de deux à trois jours la durée du congé en cas de décès du conjoint ou du partenaire de PACS, et de deux à cinq jours la durée du congé accordé en cas de décès d’un enfant.
Quels sont les éléments qui motivent l’intervention du législateur ?
J’écarte d’emblée l’idée d’apporter une quelconque compensation à la douleur ressentie par les familles. Combien de temps faut-il pour affronter le deuil ? La loi ne peut donner de réponse à cette question.
Aussi notre commission n’est-elle pas entrée dans un débat pour établir une hiérarchie, pour le moins délicate, entre les épreuves qui peuvent affliger les salariés, tant elles touchent à leur histoire personnelle ou à leur intimité.
Elle a simplement considéré qu’un congé de deux jours était trop bref pour permettre au salarié de faire face, dans de bonnes conditions, aux conséquences du décès, pour assurer l’organisation des obsèques notamment.
Elle a, par ailleurs, noté que la durée du congé était moins élevée en cas de décès des plus proches qu’en cas d’événement heureux, mais surtout, le plus souvent, prévisible, comme un mariage ou une naissance.
Elle a surtout souhaité, selon la logique de socle minimal de droits que constitue le code du travail, rétablir une forme d’équité entre les salariés couverts par des accords collectifs souvent plus favorables – le ministère du travail évalue leur nombre à 9, 5 millions, soit 40 % – et ceux qui ne relèvent d’aucune branche professionnelle, ou d’une branche où le dialogue social est peu fructueux.
Naturellement, nous aurions pu souhaiter aller plus loin et apporter davantage de garanties aux salariés. La question du concubin, ou des parents, ou d’autres proches, s’est évidemment posée.
Au cours de notre réunion de commission ce matin, un débat s’est instauré, partageant nos collègues entre ceux qui étaient désireux d’assurer rapidement des garanties plus fortes aux salariés et ceux qui souhaitaient les élargir à l’occasion de l’examen de ce texte, quitte à en reporter la mise en œuvre.
À titre personnel, je pense que notre première responsabilité est de faire aboutir rapidement ce texte.
Tels sont donc les motifs de l’intervention du législateur.
Le texte qui nous est soumis a été amendé en commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale. À la différence de la proposition initiale, il ne distingue pas selon que l’enfant est à charge ou non et ne prévoit pas d’augmentation de la durée du congé en cas de décès d’autres parents proches, comme les parents, les beaux-parents, les frères et sœurs.
Ainsi modifié, le texte a fait l’objet d’un très large consensus qui a permis son adoption à l’unanimité à l’Assemblée nationale le 23 novembre 2011.
Notre commission soutient cette amélioration des droits des personnes affligées par le décès d’un proche et vous recommande d’adopter ce texte. Elle souhaite naturellement que, comme elle l’a fait le 25 mars dernier, le Sénat puisse le voter à l’unanimité.