Tout d'abord, un grand bravo aux forces spéciales pour leur superbe réussite dans l'Adrar des Ifoghas !
Je voudrais prolonger la question de Jacques Gautier sur le moral des troupes : la compression et la déflation des effectifs ont forcément contrarié certains plans de carrière. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Par ailleurs, les problèmes du logiciel Louvois sont-ils totalement réglés ?
Général Jean-Pierre Bosser. - Lorsque j'ai imaginé le pilier du territoire national, j'avais déjà pensé accorder un intérêt tout particulier à la réserve, ainsi qu'une place au service militaire civique ou volontaire, dans le sillage de ce que l'armée de terre fait dans le cadre du service militaire adapté (SMA) pour l'outre-mer. Je comptais travailler ces sujets à froid. L'actualité m'a malheureusement rattrapé.
La réserve, on le sait, a fait l'objet d'une réflexion particulière à chaque Livre blanc sur la défense. Sa difficulté majeure, en France, provient d'un problème culturel : tous les réservistes que je croise hésitent à dire à leur employeur qu'ils sont réservistes. Pour caricaturer, on dit parfois qu'un réserviste est un chômeur en puissance ! C'est un problème de citoyenneté.
Il existe plusieurs types de réserves. Beaucoup de jeunes réservistes se sont portés volontaires au lendemain des attentats ; ils ont tous regretté que le cadre soit juridiquement trop étroit. Aujourd'hui, le code de la défense stipule qu'un réserviste qui accomplit son engagement dans la réserve opérationnelle pendant son temps de travail doit prévenir l'employeur de son absence un mois au moins avant le début de celle-ci. On comprend bien que cela pose un problème de réactivité en cas de crise. Un délai de 15 jours paraitrait aujourd'hui plus adapté. En outre, lorsque les activités accomplies pendant le temps de travail dépassent cinq jours par année civile, le réserviste doit obtenir l'accord de son employeur. Afin d'améliorer la disponibilité des réservistes, il faut s'interroger sur ce délai.
Nous disposons d'une réserve bien administrée, mais en revanche très mal organisée. Les gendarmes, dans ce domaine, sont excellents. Nous allons travailler sur ce sujet, voire imaginer des unités de réserve dans les zones où il n'existe plus aucun régiment.
Je me suis rendu à Lille pour visiter l'état-major interarmées de zone de défense et de sécurité : celui-ci compte la moitié de réservistes ! Ils n'ont pas besoin de cartes : ils connaissent le terrain par coeur !
Nous avons là un potentiel humain d'une immense qualité dont on ne tire pas le meilleur parti. Aujourd'hui, on compte environ 15 700 réservistes. L'objectif est de passer à 22 000 et de pouvoir engager en permanence 1 000 réservistes sur le territoire national, dans la durée.