Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 7 mai 2015 à 9h30
Accord d'association union européenne et communauté européenne de l'énergie atomique–ukraine — Adoption d'un projet de loi en procédure accélérée dans le texte de la commission

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, c'est avec une très grande émotion que je prends la parole aujourd'hui, car je pense à ce qu’a vécu l’Ukraine depuis l’été 2013.

Lorsque le Président Ianoukovitch a finalement refusé de signer l’accord d’association, la population s’est mobilisée pour protester, malgré les pressions russes qui commençaient à peser sur l’économie du pays. Cette mobilisation populaire s’explique par l’évolution qu’a connue la société ukrainienne en vingt ans : elle ne supportait plus le système kleptocratique et elle voyait en l’Europe une garantie de l’État de droit.

Après le départ du Président Ianoukovitch, le pays a dû faire face, d’une part, à la plus grande violation du droit international en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale – l’annexion de la Crimée – et, d’autre part, à une déstabilisation majeure. La France et l’Allemagne se sont engagées aux côtés de l’Ukraine pour donner toute leur force aux accords de Minsk et prévoir une feuille de route qui mette fin à cette déstabilisation et permette à l’Ukraine de s’engager, dès la fin du conflit, sur la voie de la construction d’un État de droit. Aujourd'hui, la feuille de route issue de Minsk semble très difficile à respecter. En raison de la situation de guerre dans le pays, les promesses de Maïdan semblent bien loin.

L’État de droit est un but pour la population ukrainienne. Il faut les aider à l’atteindre – je pense en particulier aux parlementaires, élus à la fin du mois d’octobre 2014, qui veulent réformer leur pays. Or la situation de guerre empêche de faire ces réformes. La situation sociale est explosive, l’économie est totalement bloquée, l’oligarchie est toujours très présente et, en raison du conflit, les forces armées occupent une place très importante dans la société. Par ailleurs, il ne faut pas se le cacher, il y a des enjeux en termes de liberté d’expression.

J’ai néanmoins la conviction que l’accord que nous allons ratifier permettra d’aider l’Ukraine à relever ces défis pour construire l’État de droit que sa population a exigé au cours des manifestations de 2013 et 2014. Grâce à cet accord, le dialogue politique, la coopération judiciaire, la libéralisation des visas – j’appelle les gouvernements européens à faire en sorte qu’elle puisse être mise en œuvre le plus rapidement possible, car si l’on accueille les Ukrainiens dans la famille européenne, si l’on ratifie le traité d’association, la liberté de circulation doit être effective –, la zone de libre-échange, le rapprochement des législations et la reprise d’un certain nombre d’acquis communautaires seront des outils qui permettront à l’Ukraine de se réformer et d’assurer la stabilité du pays.

Cet accord s’inscrit dans l’esprit de 1989, de la chute du mur de Berlin, des combats menés durant toute leur vie politique par Charles de Gaulle, Willy Brandt ou François Mitterrand pour sortir l’Europe du joug de Yalta, du joug totalitaire et faire en sorte que les peuples décident de leur avenir. Cet accord marquera l’entrée de l’Ukraine dans la famille européenne et un système de valeurs partagées.

Il est important de dire que cet accord n’est pas dirigé contre la Russie. Je pense notamment à certains aspects, comme les accords commerciaux, le dialogue politique et la question des visas. Les nombreuses perspectives que nous offrons aujourd'hui à l’Ukraine pourraient l’être aussi à la Russie. L’histoire nous a montré que, lorsque la France et la Russie sont opposées, c'est l’ensemble de l’Europe qui est malade. Cette conviction historique ne doit pas nous empêcher de nous manifester quand la Russie commet l’inacceptable. À ce moment-là, nous devons montrer notre solidarité au pays qui en est victime.

À l’avant-veille des célébrations du 9 mai, n’oublions pas que c'est à Stalingrad que le totalitarisme nazi a marqué le pas. Je le redis, notre désir que l’Ukraine rejoigne l’Union européenne et partage ses valeurs n’est pas dirigé contre la Russie.

En hommage à nos collègues de la délégation ukrainienne présente dans les tribunes, je voudrais clore mon propos par quelques mots dans leur langue : Українo, ми знаємо, як ваші люди хочуть жити у вільній країні, у вільній Європі. Сьогодні ми говоримо, що ваша свобода є наша свобода. Ми говоримо, що ваше майбутнє це наше майбутнє.

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