Intervention de Joël Guerriau

Réunion du 7 mai 2015 à 9h30
Octroi de mer — Article 5

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

Je ne suis absolument pas satisfait de ces explications.

En effet, nous nous trouvons dans une situation incroyable ! Vous nous répondez que les collectivités territoriales peuvent prendre l’initiative d’accorder des exonérations. Mais quel intérêt auraient-elles à le faire ? Elles objecteront qu’elles doivent faire face à des dépenses et que, si on les autorise à lever un impôt sur les services de l’État, elles vont le faire. Si les représentants de l’État demandent une exonération de cette taxe, on les renverra vers leurs ministères respectifs, en leur rappelant que l’État a réduit ses dotations. Pourquoi les collectivités locales accepteraient-elles de négocier une exonération avec ces responsables, puisque ceux-ci ne peuvent pas leur accorder de contreparties financières ?

Cette méthode n’est pas la bonne. Les outre-mer ont des besoins : faisons en sorte que les dotations qui leur sont versées soient à la hauteur de ces besoins et que le mode de financement soit plus direct.

En fait, le système actuel repose sur une forme de compensation : on sait que les collectivités d’outre-mer ont des besoins de financement et on les autorise à percevoir l’octroi de mer. Or les services de l’État, qui doivent faire face à la baisse de leur budget, doivent eux-mêmes assumer une augmentation énorme des taxes locales.

On finit par donner une image déplorable des services de l’État : quand vous montez sur la vedette de la gendarmerie, on vous explique que le projecteur défectueux ne pourra pas être remplacé parce que le budget ne le permet pas. On limite l’entraînement au tir des gendarmes, parce que l’on n’a plus les moyens d’acheter autant de munitions que dans le passé. On décide que l’hélicoptère volera moins souvent pour ne pas avoir à changer de pièces. Voilà la réalité !

Cessons d’appeler les collectivités locales à prendre leurs responsabilités en accordant des exonérations, puisqu’elles n’ont pas le moyen de le faire et qu’elles ont tout intérêt à prélever l’octroi de mer sur les services de l’État. Vraiment, nous mettons en place un montage financier qui n’est pas clair !

Si l'on considère que les fonctions de l’État exercées outre-mer sont essentielles, il faut qu’elles soient exonérées et que l’on verse des dotations suffisantes aux collectivités ultramarines pour exercer les missions qui sont de leur ressort. Il n’y a pas lieu de mélanger les missions des collectivités et celles de l’État ! Chacun doit financer son action avec les ressources les plus normales possible.

Le recours à l’octroi de mer me paraît inadapté et place les responsables des services de l’État dans une position très déplaisante, en les obligeant, par exemple, à aller négocier une exonération avec un président de conseil général. Ce type de démarche ne me paraît pas relever de leur mission, qui consiste à exercer les compétences de l’État et non pas à négocier avec les collectivités territoriales.

Il me semble que la loi devrait prévoir cette exonération et ne pas en renvoyer la responsabilité à d’autres. Nous représentons l’intérêt général, alors exerçons nos responsabilités en exonérant les services de l’État et demandons au Gouvernement d’assumer les siennes en finançant les collectivités ultramarines au niveau de leurs besoins. Nous devons refuser de cautionner ce montage financier de complaisance destiné à masquer le fait que l’on n’est pas capable de prendre des décisions.

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