Je comprends que vous ne me disiez pas qu’il y en aura 10 000, mais on verra ce qu’il en sera après mercredi... Je vous demande seulement de m’indiquer quels moyens seront déployés pour faire face à ce quota supplémentaire.
La réalité, c’est, comme l’a souligné mon collègue François-Noël Buffet, entre 300 millions et 600 millions d’euros pour le coût direct et entre 1 milliard et 2 milliards d’euros si l’on tient compte des effets induits. Vous nous dites, monsieur le ministre, qu’on va réduire la voilure en raccourcissant les délais. C’est effectivement ce que vous prévoyez dans ce texte, mais, en même temps – l’équilibre est difficile à trouver ! –, vous augmentez les capacités de recours. Aussi, vous le savez, ces délais ne seront pas respectés. Des recours seront engagés. L’OFPRA et la CNDA n’auront d’ailleurs peut-être pas la capacité de tenir ces délais eu égard à leurs moyens en personnels face au nombre de demandes à traiter. Or, je le souligne, aucune sanction n’est prévue si le délai que vous avez fixé n’est pas respecté.
On dit qu’il faut aller plus vite. Je ne doute pas du fait que vous ayez envie, monsieur le ministre, que la procédure soit plus rapide, qu’il y ait moins de situations aberrantes, comme celles que nous avons connues dans les centres d’accueil de demandeurs d’asile, dans les centres d’hébergement d’urgence ou dans les centres provisoires d’hébergement où l’on a du mal à faire partir ceux qui étaient déboutés du droit d’asile et, donc, à intégrer les nouveaux arrivants. C’est pourquoi un certain nombre d’amendements visent à accélérer le départ de ceux qui sont déboutés, de ceux qui sont violents.
L’élément financier est, certes, important – un tel coût est énorme pour la collectivité nationale ! –, mais on a surtout le sentiment qu’il n’est pas maîtrisé. Ce n’est pas, je le répète, de votre fait, car je sais combien vous êtes attaché à la maîtrise des coûts, mais les conditions internationales ne vous aident pas. Vous n’y pouvez rien.
Que vous demandent la droite et le centre, monsieur le ministre ? Franchement, en tant que membre de la commission des finances, on me fait la même demande. Chaque fois, je réponds que je ne peux pas donner plus.
D’un côté, on donne beaucoup d’argent à l’OFPRA, à la CNDA, aux structures d’accueil, aux structures d’hébergement qui vont, enfin – c’est bien ! –, bénéficier d’un statut législatif. De l’autre, vous transférez à l’OFII la gestion de l’allocation temporaire d’attente. Je suis favorable à la barémisation de cette allocation, je l’ai d'ailleurs demandée dans les différents rapports d’information. Mais l’OFII se retrouve dans une situation particulièrement difficile : il récupère les indus de Pôle emploi, qui, soyons francs, distribuait l’allocation plus ou moins bien – tous les rapports montrent qu’il y aurait 20 % d’indus, ce qui est quand même considérable. Et, au-delà, Pôle emploi lui transfère 60 millions d’euros à régulariser. Comment va-t-on régler ce problème ?
Tout cela finit par coûter relativement cher – c’est même cher ! –, et tout cela est très difficile à maîtriser en raison des recours, des délais non sanctionnés, des problèmes pour créer davantage de places en CADA ou dans les centres d’hébergement. Vous le savez, la situation dans nos villes est extrêmement compliquée ; et je ne parle pas que de l’Île-de-France : les élus de gauche comme de droite sont nombreux à dire qu’ils ne parviennent plus à gérer ces situations.
Un autre élément me gêne depuis que je m’intéresse à ce dossier, c’est la faiblesse des moyens alloués à l’accompagnement de ceux qui obtiennent le statut de réfugiés.
Sincèrement, les personnes qui obtiennent ce statut sont appelées, à terme, à devenir citoyens français. Elles devraient donc être mieux traitées, mieux formées, davantage intégrées à la société.
Les moyens octroyés à l’OFII pour favoriser l’intégration au travers de l’instruction civique ou des cours de langue, par exemple, sont insuffisants. Voilà des années que je présente, en commission des finances, un amendement visant à renforcer les moyens dévolus à l’OFII. Mais, chaque année, pour une raison que j’ignore – tout le monde devrait adopter un tel amendement ! –, on le rejette.
Les 15 000 personnes qui, chaque année, obtiennent le statut de réfugiés vont un jour obtenir la nationalité française et devenir des citoyens français. Ces personnes doivent être traitées différemment, pour deux raisons principales : d’abord, parce qu’elles sont venues sur notre territoire, non par le détournement de filières d’immigration économique, mais en raison des persécutions ou des malheurs qu’elles subissaient et, ensuite, parce qu’elles sont capables d’intégrer la société française et d’acquérir la citoyenneté.
Monsieur le ministre, vous êtes confronté à une telle explosion du nombre de demandes que la situation, je le reconnais bien volontiers, surtout dans le contexte international insupportable que nous connaissons actuellement, est très difficile à gérer. Mais vous êtes aussi un parfait républicain. Obtenez donc de l’Europe un changement ou, en tout cas, une clarification de la politique d’immigration et du droit d’asile ! Et rassurez les Français, pas ceux de gauche ou de droite, mais tous les Français dans leur ensemble ! Les gens sont excédés, ils ont le sentiment que n’importe qui peut entrer en France et demander le droit d’asile.
Tous les républicains peuvent se retrouver sur un plan d’urgence, sur un nouveau plan européen. Quel bonheur ce serait alors de venir à cette tribune pour vous faire part de notre entier soutien !