La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.
La séance est reprise.
Nous reprenons la suite de la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements portant article additionnel après l’article 102.
Je suis saisi de quatre amendements portant article additionnel après l’article 102.
L'amendement n° 1321, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 102
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciements dont le motif doit être conforme aux dispositions de l’article L. 1233-3 concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l’article L. 1233-61 et s’intégrant au plan de sauvegarde de l’emploi n’est pas présenté par l’employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés.
La réalité et le sérieux du motif économique sont appréciés au niveau de l’entreprise ou, de l’unité économique et sociale ou du groupe.
La validité du plan de sauvegarde de l’emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l’entreprise ou l’unité économique et sociale ou le groupe.
Le respect des obligations en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ainsi que la nécessité d’informer le plus en amont possible les représentants du personnel doivent être également pris en compte.
La nullité du licenciement peut être prononcée par le juge dès lors que l’information et la consultation ne revêtent pas un caractère loyal et sincère ou lorsqu’elles ne comprennent pas un effet utile lié à la consultation.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Permettez-moi d’abord de regretter que cet hémicycle soit quasiment vide cet après-midi. Pourtant, nous allons aborder des sujets importants, comme c’était d’ailleurs le cas au début du projet de loi. J’espère simplement que nos concitoyens concernés par ces questions intégreront cette donnée, que je regrette, croyez-le bien.
L’amendement n° 1321 prévoit la possibilité pour le juge d’apprécier au fond, et non plus seulement sur la forme, les licenciements économiques attaqués. Il pourra ainsi juger du caractère réel et sérieux et, donc, de la loyauté du licenciement.
Cette appréciation se fera au niveau de l’entreprise, de l’unité économique et sociale ou du groupe auquel appartient l’entreprise et devra, en outre, s’assurer que l’employeur a respecté ses obligations en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et que l’information fournie aux représentants du personnel a été sincère et loyale.
Le non-respect de ces obligations ou l’insincérité de l’information pourront à eux seuls justifier la nullité du licenciement.
L'amendement n° 1322, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 102
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Est réputé dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d’emplois sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l’entreprise a constitué des réserves ou réalisé un résultat net ou un résultat d’exploitation positifs au cours des deux derniers exercices comptables.
Est également dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d’emploi sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l’entreprise a, au cours des deux derniers exercices comptables, distribué des dividendes ou des stocks options ou des actions gratuites ou procédé à une opération de rachat d’actions.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement définit comme licenciement sans cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique décidé par un employeur dont l’entreprise affiche un résultat net ou un résultat d’exploitation positif depuis au moins deux exercices comptables. Il en est de même pour les entreprises ayant constitué des réserves, distribué des dividendes, des stock-options ou des actions gratuites, ou procédé à une opération de rachat d’actions.
L’idée est claire : interdire la gestion d’une entreprise fondée sur la rentabilité à très court terme, au détriment de l’emploi et de son intérêt à moyen et à long terme.
L'amendement n° 1288 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 102
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1233-10 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les représentants du personnel disposent d’un droit de veto suspensif sur les plans de licenciements collectifs. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
À travers cet amendement, il est prévu que le droit de veto suspensif sur les plans de licenciements et les plans de restructurations permet au juge de suspendre le plan de licenciements s’il n’y a pas de motif économique. Il s’agit dans ce cas de faire prévaloir la recherche de propositions alternatives aux licenciements.
Cet amendement vise à responsabiliser plus fortement les grandes entreprises ou groupes – en particulier ceux qui usent et abusent de l’alibi de difficultés conjoncturelles sans qu’on puisse contester leurs choix de gestion ou ceux qui licencient avec des bénéfices –, à l’égard des salariés licenciés et des territoires dont l’activité économique d’ensemble est affectée par les décisions de ces entreprises.
L'amendement n° 1287 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 102
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1233-21 du code du travail est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement vise à abroger l’article L. 1233–21 du code du travail, qui permet, par accord d’entreprise, de groupe ou de branche, de déroger aux règles de consultation et d’information des instances représentatives du personnel applicables, lorsque l’employeur envisage de prononcer le licenciement économique d’au moins dix salariés dans une même période de trente jours.
Dérogation ne signifie certes pas suppression de l’obligation d’information et de consultation du comité d’entreprise. Pour des employeurs bien intentionnés, comme cela s’est vérifié dans quelques cas, ce dispositif a permis d’aller au-delà de l’obligation faite en la matière. Toutefois, une telle dérogation autorise aussi l’employeur à se situer en deçà du seuil minimal applicable en matière d’information et de consultation, ce qui peut être tentant, vous l’avouerez, pour des employeurs peu scrupuleux.
Je prendrai un exemple récent pour illustrer mon propos, celui de l’entreprise Sober ; exemple que ma collègue Annie David, qui a malheureusement dû nous quitter, connaît d’ailleurs mieux que moi. L’inspecteur du travail vient de prononcer un refus d’autorisation de licenciement d’une salariée protégée, compte tenu des manquements de l’employeur dans la procédure d’information et de consultation. Les motifs économiques du licenciement ayant également été épinglés par l’inspecteur du travail, je comprends que l’employeur ait voulu « simplifier » la procédure d’information et la consultation des salariés afin de pouvoir supprimer vingt-trois emplois.
Nul doute que nombre d’employeurs trouvent dans cette dérogation la possibilité d’organiser au mieux les procédures d’information-consultation du comité d’entreprise, cela afin de réduire les risques de recours lors d’un projet de restructuration. Or ce que fixent les règles de l’information-consultation, ce sont les conditions dans lesquelles le comité d’entreprise « est réuni et informé de la situation économique et financière de l’entreprise » et les conditions dans lesquelles il « peut formuler des propositions alternatives » et « obtenir une réponse motivée de l’employeur à ses propositions ».
Ces règles fixent également les délais à partir desquels les salariés pourront engager un recours en cas de contestation. Avouez, chers collègues, que ce n’est pas neutre !
Nous l’avons répété à plusieurs reprises au cours de nos débats, nous pensons que la loi et le code du travail ont pour objet de protéger les salariés et de les préserver de ce qui pourrait aller à l’encontre de leurs intérêts, fût-ce dans le cadre d’un accord collectif. Comme tout accord, en effet, l’accord collectif court le risque d’être soumis à diverses pressions de la part d’employeur.
J’ajoute que, pour nous, le dialogue social est bien évidemment un moteur de la croissance.
L’amendement n° 1321 vise à supprimer les acquis de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, qui réforme la procédure du plan de sauvegarde de l’emploi, ou PSE.
D’un côté, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE, est seule compétente pour valider un accord ou homologuer un document unilatéral de l’employeur qui définissent le PSE, sous le contrôle du juge administratif.
De l’autre côté, le conseil des prud’hommes reste compétent pour vérifier la cause réelle et sérieuse du motif économique.
L’amendement tend à supprimer cette répartition des rôles. La commission y est donc défavorable.
L’amendement n° 1322 s’inscrit dans la continuité de la proposition de loi tendant à interdire les licenciements boursiers déposée par le groupe CRC et rejetée le 16 février 2012 par le Sénat.
Son dispositif présente plusieurs difficultés.
La première est que la période de référence – deux ans – est longue. Une entreprise peut enregistrer un résultat net ou un résultat d’exploitation positif, ou distribuer des dividendes ou des actions gratuites, et devoir faire face l’année suivante à un bouleversement qui nécessite une restructuration.
La deuxième difficulté est que la formulation de l’interdiction qu’il tend à insérer semble trop large et imprécise, à savoir « toute suppression d’emploi, sous quelque forme que ce soit ».
La troisième difficulté est qu’il méconnaît la définition du licenciement économique, telle qu’apparaissant dans l’article L. 1233–3 du code du travail, définition qui concerne également le refus d’un salarié d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutive notamment à des mutations technologiques.
Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à l’amendement n° 1322.
L’amendement n° 1288 rectifié tend à donner aux représentants du personnel un « droit de veto suspensif » sur les licenciements collectifs.
Mais alors, que resterait-il du pouvoir de direction de l’employeur ? Quels seraient par ailleurs les représentants du personnel concernés ? Enfin, qu’est-ce qu’un « veto suspensif » ? Cela signifie-t-il qu’à l’expiration d’un certain délai les licenciements pourraient avoir lieu ?
Pour toutes ces questions, qui sont autant de raisons, la commission est défavorable à cet amendement.
Enfin, l’amendement n° 1287 rectifié tend à supprimer la possibilité de fixer, par accord collectif, des modalités spécifiques d’information et de consultation du comité d’entreprise en cas de PSE.
Cette disposition est présente dans le code du travail depuis 2005. Il s’agit de faire confiance au dialogue social dans l’entreprise. Si les délégués syndicaux ne sont pas d’accord avec les propositions de l’employeur en matière d’aménagement de la consultation du comité d’entreprise en cas de PSE, la négociation aboutit à un échec et le droit commun s’applique.
La commission est donc également défavorable à cet amendement.
Mêmes avis.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
I. –
Non modifié
« Lorsque le licenciement pour motif économique donne lieu à un plan de sauvegarde de l’emploi dans les conditions prévues aux articles L. 1233-24-2 et L. 1233-24-4, cette proposition est faite après la notification par l’autorité administrative de sa décision de validation ou d’homologation prévue à l’article L. 1233-57-4. »
II. –
Supprimé
Cette intervention vaudra défense des amendements n° 93 et 1323.
L’article 103 prévoit que la proposition de contrat de sécurisation professionnelle doit être faite au salarié concerné par le licenciement seulement après la notification par la DIRECCTE de sa décision de validation ou d’homologation du plan.
Nous y sommes opposés pour deux raisons.
La première est que nous sommes hostiles au contrat de sécurisation professionnelle, lequel permet aux licenciés pour motif économique dans les entreprises de moins de 1 000 salariés ou en redressement ou liquidation judiciaires de jouir d’un parcours de retour à l’emploi avec maintien de leur salaire à hauteur de 75 %. Nous estimons en effet que les salariés n’ont pas à faire des sacrifices sur leurs salaires tandis que les patrons continuent à percevoir leurs bénéfices.
La seconde raison porte sur les conséquences de la décision d’homologation ou de validation. Les entreprises non tenues d’établir un PSE, à savoir celles qui comptent moins de 50 salariés ou celles de plus de 50 salariés qui licencient moins de 10 salariés, ne seront plus soumises à l’intervention de l’autorité administrative, qui pour l’instant vérifie si les instances représentatives du personnel, les IRP, ont été consultées ou si des mesures de reclassement sont prévues.
Avec cet article 103, quand les juges du tribunal administratif se prononceront contre un plan social, cela n’aura aucune incidence pour les salariés concernés ; ils ne seront donc ni indemnisés ni réintégrés.
Nous ne pouvons qu’être opposés à cet article, qui prévoit de faire précéder les propositions de contrat de sécurisation professionnelle par la notification de l’autorité administrative et rend ainsi incontestable le plan de sauvegarde de l’emploi.
L’amendement n° 93, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 93 ?
Au préalable, je fais remarquer aux auteurs de l’amendement que son objet ne correspond pas à son dispositif.
La commission souhaite conserver l’article 103, qui apporte une précision importante sur le contrat de sécurisation professionnelle.
En effet, l’article oblige l’employeur à attendre la notification par l’autorité administrative de sa décision de validation ou d’homologation du PSE avant de proposer aux salariés de bénéficier d’un contrat de sécurisation professionnelle. Il protège ainsi les droits des salariés, car certains employeurs proposent très en amont de bénéficier d’un tel contrat.
La décision de l’administration autorisant le PSE peut alors intervenir après le délai de réflexion de trois semaines pour adhérer au contrat de sécurisation professionnelle, ce qui peut empêcher les salariés de bénéficier dudit contrat.
Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 1323, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – La section 2 du chapitre III du titre III du livre II de la première partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° L’article L. 1233-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les trois premiers critères sociaux doivent être privilégiés par l’employeur pour fixer l’ordre des licenciements. » ;
2° Il est ajouté une sous-section 5 ainsi rédigée :
« Sous-section 5
« Autorisation de l’inspection du travail
« Art. L. 1233 -7 -1. – Tout licenciement pour motif économique est soumis à l’autorisation de l’inspection du travail.
« Art. L. 1233 -7 -2. – La demande d’autorisation de licenciements dits boursiers , envisagés dans des entreprises dont les difficultés ne relèvent pas d’un motif économique au sens de l’article L. 1233-3, requiert un avis conforme des représentants du personnel.
« Art. L. 1233 -7 -3. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente sous-section. »
II. – La section 3 du chapitre III du titre III du livre II de la première partie du même code est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa de l’article L. 1233-15 est ainsi rédigé :
« Lorsque l’employeur, qui a obtenu l’autorisation de l’inspection du travail en application de l’article L. 1233-7-1, décide de licencier un salarié pour motif économique, qu’il s’agisse d’un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, il lui notifie le licenciement par lettre recommandée avec avis de réception. » ;
2° L’intitulé de la sous-section 3 est ainsi rédigé : « Autorisation de l’inspection du travail » ;
3° L’article L. 1233-19 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -19. – L’employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de moins de dix salariés dans une même période de trente jours adresse une demande d’autorisation à l’inspection du travail. » ;
4° La sous-section 3 est complétée par un article L. 1233-20-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -20 -1 – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente sous-section. »
III. – La section 4 du chapitre III du titre III du livre II de la première partie du même code est ainsi modifiée :
1° L’article L. 1233-39 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -39. – L’employeur qui a obtenu l’autorisation de l’inspection du travail en application de l’article L. 1233-7-1 notifie au salarié le licenciement pour motif économique par lettre recommandée avec avis de réception.
« La lettre de notification ne peut être adressée avant l’expiration d’un délai courant à compter de l’autorisation de l’inspection du travail. » ;
2° L’article L. 1233-40 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -40. – Le délai mentionné à l’article L. 1233-39 ne peut être inférieur à :
« 1° Trente jours lorsque le nombre des licenciements est inférieur à cent ;
« 2° Quarante-cinq jours lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ;
« 3° Soixante jours lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à deux cent cinquante. » ;
3° L’article L. 1233-41 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -41. – Une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais plus favorables aux salariés que ceux mentionnés à l’article L. 1233-40. » ;
4° L’intitulé de la sous-section 4 est ainsi rédigé : « Autorisation de l’inspection du travail » ;
5° L’article L. 1233-46 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -46. – L’employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours adresse une demande d’autorisation à l’inspection du travail.
« Lorsque l’entreprise est dotée de représentants du personnel, la demande d’autorisation est faite au plus tôt le lendemain de la date prévue pour la deuxième réunion prévue aux articles L. 1233-29 et L. 1233-30.
« La demande d’autorisation est accompagnée de tout renseignement concernant la convocation, l’ordre du jour et la tenue de cette réunion. » ;
6° À l’article L. 1233-47, au premier alinéa de l’article L. 1233-48, à la première phrase des articles L. 1233-49 et L. 1233-50, aux articles L. 1233-51 et L. 1233-52, au premier alinéa de l’article L. 1233-53, à la première phrase des premier et second alinéas de l’article L. 1233-56 et aux premier et dernier alinéas de l’article L. 1233-57, les mots : « autorité administrative » sont remplacés par les mots : « inspection du travail » ;
7° À la première phrase des articles L. 1233-49 et L. 1233-50 et à l’article L. 1233-52, les mots : « notification du projet de licenciement » sont remplacés par les mots : « demande d’autorisation de licenciement » ;
8° L’article L. 1233-54 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -54. – L’inspection du travail dispose, pour procéder aux vérifications et adresser sa décision, d’un délai courant à compter de la date de demande d’autorisation de licenciement. » ;
9° L’article L. 1233-55 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1233 -55. – Le délai mentionné à l’article L. 1233-54 ne peut être inférieur à :
« 1° Vingt et un jours lorsque le nombre des licenciements est inférieur à cent ;
« 2° Vingt-huit jours lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ;
« 3° Trente-cinq jours lorsque ce nombre est au moins égal à deux cent cinquante.
« Lorsqu’il existe une convention ou un accord collectif de travail, ce délai ne peut être inférieur au délai conventionnel séparant les deux réunions de représentants du personnel, prévu à l’article L. 1233-30, augmenté de sept jours.
« Le délai dont dispose l’inspection du travail peut être prolongé pour une durée égale si les nécessités de l’enquête le rendent nécessaire. » ;
10° Les deux dernières phrases du deuxième alinéa de l’article L. 1233-56 sont supprimées.
Cet amendement a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
L’autorisation administrative de licenciement pour motif économique a été supprimée en 1986 ; ne demeure que l’autorisation préalable de l’inspection du travail avant licenciement d’un salarié protégé. La commission pense qu’il ne faut pas modifier cet équilibre.
En outre, l’amendement tend à imposer un avis conforme des représentants du personnel pour toute demande d’autorisation de licenciements dits « boursiers ». Il nous a semblé difficile de concilier cette disposition avec le principe de valeur constitutionnelle de liberté d’entreprendre.
Enfin, l’amendement vise à imposer de privilégier les critères sociaux parmi les critères à prendre en compte pour fixer l’ordre des licenciements pour motif économique. Or le droit en vigueur permet déjà de privilégier certains critères légaux, à condition de ne pas écarter les autres.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’article 103 est adopté.
L’amendement n° 1336, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1221-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1221 -1. – Le contrat de travail est soumis aux règles de droit commun. Il est obligatoirement écrit. Il précise la durée et les horaires de travail, le niveau et les modalités de la rémunération, la qualification, l’emploi tenu, le lieu de travail. Le contenu de ces clauses ne peut être modifié unilatéralement par l’une ou l’autre des parties au contrat. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement tend à rendre plus précis l’article L. 1221–1 du code du travail, dont la rédaction actuelle ne peut satisfaire le groupe CRC. Elle comporte en effet deux écueils majeurs.
Le premier est que la constitution et la forme du contrat de travail n’obéissent pas réellement à un cadre bien établi. Aucun élément ne vient en effet préciser de nomenclature exacte. Il semblerait pourtant de bon sens, pour ne pas dire de bon ton, qu’un contrat liant un employeur et un employé soit suffisamment complet pour que chacune des parties sache dans quoi elle s’engage. Notre amendement vise donc à contraindre les rédacteurs des contrats de travail à insérer dans ces derniers des éléments capitaux : la durée et les horaires de travail, le niveau et les modalités de la rémunération, la qualification, l’emploi tenu et le lieu de travail.
Cette exigence de transparence est une nécessité pour les travailleurs mais aussi pour les employeurs, qui s’en trouveraient sécurisés. Comment pourraient-ils faire l’objet de recours si le salarié signe le contrat ainsi complété en son âme et conscience ?
Que l’on accepte ou non l’existence d’un lien de subordination dans la passation d’un contrat de travail, notre revendication nous semble légitime. De deux choses l’une : soit on considère qu’un contrat de travail est un engagement mutuel entre deux parties égales, et dans ce cas l’insertion de ces clauses ne sert qu’à assurer un choix libre et éclairé ; soit on pense qu’il existe bien un lien de subordination, et dans ce cas l’insertion de ces clauses vise à restreindre cette domination du rédacteur du contrat et à assurer des droits aux travailleurs en cas de non-respect des clauses de l’engagement.
Le second écueil concerne la modification des clauses. À l’heure actuelle, rien n’indique les conditions permettant la modification des termes d’un contrat. Encore une fois, il nous paraît sain d’ajouter que toute transformation des clauses d’un contrat ne doit être que le résultat tout à la fois d’une négociation et d’un accord entre toutes les parties engagées, soit l’employeur et l’employé. Il s’agit ainsi d’éviter les mutations brusques des conditions de travail sans accord de l’une ou de l’autre des parties.
Si certaines périodes tendues exigent des changements dans les conditions de travail des salariés, il nous paraît profondément injuste d’autoriser des employeurs à modifier unilatéralement les clauses d’un contrat.
Ce sont donc l’exigence de transparence, le respect du dialogue social et le souci de la justice sociale qui motivent notre amendement.
Les auteurs de cet amendement souhaitent apporter une précision au contenu du contrat de travail.
On ne peut pas vraiment dire que le contrat de travail soit soumis aux règles de droit commun. Historiquement, le code du travail s’est construit comme une exception par rapport au code civil, avec des règles spécifiques au monde du travail.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L’article L. 1221–1 du code du travail laisse la rédaction des contrats de travail à la libre appréciation des parties. Les précisions que Mme Assassi préconise sont déjà largement présentes dans les contrats de travail.
Lorsque ce n’est pas le cas, certaines de ces clauses ainsi que d’autres clauses considérées comme essentielles sont réputées avoir existé ; il peut s’agir de la clause d’objectifs, de la clause d’exclusivité, de la clause de mobilité géographique, de la clause de confidentialité, de la clause liée à la rupture du contrat, de la clause de non-concurrence ou de la clause de dédit-formation... Le juge n’hésite pas à réinterpréter un contrat de travail jugé trop déséquilibré.
Le contrat est réputé exister même en l’absence d’un écrit dès lors que le salarié prouve qu’il est en situation de travail. Il est à craindre qu’une telle proposition ne puisse pas suffire à régler la problématique complexe et fortement encadrée par le juge de la rédaction des contrats de travail.
Je veux bien que nous examinions ensemble avec précision si la jurisprudence reste floue. Comme nous avons eu l’occasion de le souligner, elle nous paraît très protectrice des salariés partout où elle est appliquée. Je crains que l’adoption d’un tel amendement n’ait pour conséquence d’en restreindre la portée. Le juge a actuellement une interprétation extensive des clauses essentielles du contrat de travail, même sur la base du fameux article L. 1221–1.
Certes, madame la sénatrice, si vous nous apportez la démonstration que telle ou telle clause n’est pas couverte par la jurisprudence et qu’il faut la mentionner dans la loi, je suis prêt à considérer votre demande ou à solliciter les partenaires sociaux.
Mais, encore une fois, la jurisprudence actuelle nous paraît très protectrice des salariés. Il n’est pas question d’y revenir ou de dégrader les règles relatives au contrat de travail.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
J’ai bien entendu les arguments de M. le ministre ; je pourrais presque y souscrire. Mais l’article L. 1221–1 du code du travail n’est pas clair du tout, et je ne suis pas une spécialiste du code du travail.
Notre amendement a le mérite d’ouvrir un débat. Par conséquent, je le maintiens, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1333, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1221-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il respecte la durée légale du travail. » ;
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Toute autre modalité constitue une exception aux principes prévus au premier alinéa qui est fixée limitativement par la loi. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
À travers cet amendement, il s’agit de nouveau de revenir sur les régressions constatées dans la protection des salariés au regard du droit du travail.
Nous souhaitons réaffirmer que le droit du travail fait du contrat à durée indéterminée le contrat « normal » et marquer ainsi notre grande circonspection à l’égard des contrats précaires qui ont pullulé depuis une vingtaine d’années. Ainsi que nous pouvons le constater, ces contrats n’ont pas fait leurs preuves en termes de sécurisation des parcours professionnels et de lutte contre le chômage.
En fait, il faut nous interroger sur ces contrats, qui servent finalement seulement d’artifices comptables permettant de faire baisser le nombre de chômeurs sans aucune activité. Car c’est bien la vraie question : comment peut-on réellement prétendre que le chômage baisse alors que l’on a d’abord baissé les exigences de ce que l’on appelle un emploi ? En réalité, c’est une redéfinition de la notion de travail, en acceptant le sous-emploi et le précariat, qui permet au Gouvernement de ne pas présenter la statistique crue et drue : 5 millions de personnes sont aujourd’hui ou au chômage ou en situation de sous-emploi, sans parler des millions de personnes radiées et même plus inscrites à Pôle emploi.
Une telle évolution n’est tout simplement pas acceptable. Notre pays reste l’un des plus riches du monde, et nos travailleurs sont parmi les plus productifs de la planète ; ils figurent dans le peloton de tête européen. Rien ne peut justifier que l’on ait attaqué la protection des salariés et renforcé la lutte de tous contre tous avec des contrats de plus en plus précaires.
Il existe aujourd’hui près d’une dizaine de contrats de travail « alternatifs » au contrat à durée indéterminée. Tous ont la particularité d’être d’abord précaires et moins protecteurs pour les salariés. Aujourd’hui, l’extrême majorité des embauches s’effectuent par le biais de l’un de ces contrats. Le CDI apparaît bien souvent comme inaccessible, malgré l’implication des travailleurs dans l’entreprise, comme en témoigne leur niveau extrêmement élevé de productivité.
Par conséquent, il faut réaffirmer dans la loi que le CDI doit rester la règle et les contrats précaires l’exception.
Cet amendement vise à réaffirmer que le CDI à temps plein constitue la règle en matière de contrat de travail. La commission a estimé que sa portée normative était faible. L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1327, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° de l’article L. 1243-10 du code du travail est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Nous proposons de supprimer le deuxième alinéa de l’article L. 1243–10 du code du travail, pour mettre fin à une injustice : les travailleurs saisonniers ne bénéficient pas de la prime de précarité à la rupture de leur contrat.
Cette injustice est contestée par les associations et les syndicats. Elle a été encore rappelée lors du colloque organisé au Sénat par notre groupe le 1er avril ; ce n’est malheureusement pas une blague si, pour les saisonniers, travail rime avec « précarité » !
À cette occasion, nos collègues Annie David, Michelle Demessine et Michel Le Scouarnec, ainsi que le Forum social des saisonniers et l’Association des lieux d’accueil des travailleurs saisonniers, ou ALATRAS, ont interpellé Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger, sur l’importance de mettre un terme à une telle injustice.
Nous demandons donc l’alignement du contrat des travailleuses et travailleurs saisonniers sur le CDD de droit commun, afin que ces derniers bénéficient de la prime de précarité.
Cette indemnité – la prime de précarité – trouve son origine dans le fait que les relations de travail ne se poursuivent pas sous la forme d’un CDI à l’issue d’un CDD ou d’une mission d’intérim. Or un contrat saisonnier n’a pas vocation à se transformer en CDI.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1331, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1244-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1244 -2. – Les contrats de travail à caractère saisonnier comportent une clause de reconduction pour la saison suivante.
« Tout employeur ayant occupé un salarié dans un emploi à caractère saisonnier lui propose, sauf motif réel et sérieux, un emploi de même nature, pour la même saison de l’année suivante. Le salarié fait savoir s’il fait acte de candidature par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise en main propre contre décharge auprès de l’employeur au moins trois mois avant le début de la saison.
« La non reconduction du contrat de travail à l’initiative de l’employeur est possible pour un motif réel et sérieux. Elle entraîne application de la procédure de convocation à un entretien préalable prévue aux articles L. 1232-2, L. 1232-3 et L. 1232-4. Cet entretien intervient avant la fin de la saison. Si, à la fin de cet entretien, l’employeur décide de ne pas reconduire le contrat, il en informe le saisonnier par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, en lui en indiquant le ou les motifs, au plus tard à la fin du contrat saisonnier. La non reconduction du contrat pour la saison suivante entraîne le versement au salarié d’une indemnité de non-reconduction au minimum égale à la prime de précarité de 10 % prévue à l’article L. 1243-8.
« Pour calculer l’ancienneté du salarié, les durées des contrats de travail à caractère saisonnier successifs dans une même entreprise sont cumulées. L’arrêt ou la rupture de la succession des contrats saisonniers d’une saison à l’autre entraîne la caducité définitive de la reconduction. Toutefois, le droit à la reconduction est conservé si la succession des contrats saisonniers est suspendue pendant une ou plusieurs saisons pour cause de congé de maternité, de congé parental d’éducation, de congé individuel de formation, de congé pour la création ou la reprise d’entreprise, de congé sabbatique, et dans les conditions prévues par le présent code. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
La question des travailleurs saisonniers est très importante. Il convient d’y apporter des réponses concrètes.
Les contrats saisonniers dont les taux de cotisation ne seront pas majorés doivent néanmoins pouvoir être sécurisés. La reconduction par accord collectif des accords des CDD saisonniers ne concerne qu’une trop faible partie des saisonniers, faute de dynamique de négociation par branches professionnelles sur ce point. C’est au législateur qu’il revient de créer une clause de reconduction automatique, afin que les saisonniers cessent d’être exclus des avancées du droit du travail. Les salariés doivent cependant faire acte de candidature avant chaque nouvelle saison : ils sont libres de retravailler pour le même employeur ou non. Dans tous les cas, ils sont prioritaires.
Afin de permettre l’égalisation des droits, une prime de « non reconduction » du CDD saisonnier équivalant à la prime de précarité des CDD non saisonniers est alors versée par l’employeur s’il ne respecte pas la clause de reconduction.
Les employeurs ont la possibilité de ne pas respecter la clause de reconduction s’il existe des motifs réels et sérieux pour cela, comme un désaccord professionnel ou un manque de motivation du salarié, en respectant alors les formalités prévues en cas de rupture de CDI et le versement de cette indemnité de non reconduction.
Cet amendement vise à définir un statut des travailleurs saisonniers.
À nos yeux, cette question nécessiterait une concertation au sein des branches professionnelles particulièrement concernées par ce type d’emplois saisonniers.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1326, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2242-5-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 2242 -5 -1. – Les entreprises d’au moins vingt salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale et professionnelle mentionné à l’article L. 2242-5. Les modalités de suivi de la réalisation des objectifs et des mesures de l’accord sont fixées par décret.
« Le montant de la pénalité prévue au premier alinéa du présent article est fixé au maximum à 5 % des rémunérations et gains au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et du premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours des périodes au titre desquelles l’entreprise n’est pas couverte par l’accord mentionné au premier alinéa du présent article. Le montant est fixé par l’autorité administrative, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, en fonction des motifs de sa défaillance quant au respect des obligations fixées au même premier alinéa.
« Le produit de cette pénalité est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Nous proposons une nouvelle rédaction de l’article L. 2242–5–1 du code du travail. Nous avions déjà défendu cette idée lors de l’examen du projet de loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes l’année dernière.
La mesure introduite en 2010 lors de la réforme des retraites nous semble insuffisante pour permettre de contrebalancer réellement les inégalités existant en défaveur des femmes.
Malgré l’adoption de dispositions légales censées favoriser l’égalité salariale, un écart significatif demeure entre les femmes et les hommes, écart qui reste quasiment stable depuis le début des années quatre-vingt-dix. En 2009, il était évalué à 25 % sur la base du revenu salarial moyen pour l’ensemble des salariés du secteur public et du secteur privé.
À en juger par l’actualité de ces derniers jours, la situation ne devrait pas aller en s’améliorant…
Nous proposons d’augmenter de manière significative la pénalité due par les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale et professionnelle et de prévoir une pénalité financière non plus de 1 % maximum, mais de 5 % maximum des rémunérations versées aux travailleurs au cours des périodes au titre desquelles l’entreprise n’est pas couverte par l’accord ou par un plan d’action.
Selon nous, cela aurait un effet bien plus incitatif sur les entreprises. D’ailleurs, force est de le constater, l’annonce par Mme Vallaud-Belkacem voilà environ deux ans que les sanctions seraient réellement appliquées a eu des conséquences sur la signature d’accords.
Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, de 2009 indiquait à l’époque qu’à peine 7, 5 % des entreprises disposant d’un délégué syndical avaient signé un accord sur l’égalité professionnelle.
Ce chiffre a aujourd’hui sensiblement progressé. Au 15 juillet dernier, 34, 4 % des entreprises assujetties étaient couvertes par un accord d’entreprise ou un plan d’action. Ce chiffre cache néanmoins une situation très inégale en fonction de la taille des entreprises.
À travers cet amendement, nous souhaitons en quelque sorte maintenir, voire intensifier la pression.
Cet amendement a pour objet de modifier le champ et le montant de la pénalité pour les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale et professionnelle.
Il est proposé de soumettre toutes les entreprises d’au moins vingt salariés à cette obligation, contre cinquante aujourd’hui, et de faire passer le plafond de la pénalité de 1 % à 5 % de la masse salariale.
À nos yeux, cet amendement n’entre pas forcément dans le champ du projet de loi, qui, certes, est très vaste. En plus, cela ne nous semble pas correspondre à la logique incitative en matière d’égalité professionnelle qu’il faudrait développer.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Mme Assassi propose de porter à 5 % de la masse salariale le montant de la pénalité pour les entreprises qui ne sont pas couvertes par un tel accord.
La lutte contre les inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes est une priorité majeure pour le Gouvernement. D’ailleurs, François Rebsamen apportera toutes les clarifications nécessaires sur son projet de loi.
C’est ce à quoi vous faisiez référence en creux dans votre propos, madame la sénatrice.
Je pense qu’une augmentation du taux de pénalité serait contre-productive, pour deux raisons.
Premièrement, aujourd'hui, le dispositif de sanctions joue pleinement son rôle. En effet, à ce jour, 78 % des entreprises de plus de 1 000 salariés et 64 % des entreprises de plus de 300 salariés sont couvertes par un accord ou, à défaut, un plan d’action.
Deuxièmement, l’objectif de la pénalité est avant tout d’amener les entreprises à respecter leurs obligations en matière d’égalité professionnelle. À ce titre, le dispositif porte ses fruits puisque la grande majorité des mises en demeure aboutit aujourd'hui à une régularisation de l’entreprise avant l’arrivée du terme, et ne donne pas lieu à une telle pénalité.
Vous proposez, de plus, de supprimer la prise en compte des efforts de l’entreprise en matière d’égalité professionnelle constatée par l’autorité administrative pour définir le taux de la pénalité. En la matière, comme nous l’avons vu sur d’autres sujets, il est important de prendre aussi en compte, secteur par secteur, le taux d’effort réalisé par l’entreprise pour se conformer à la loi.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Monsieur le ministre, j’avoue ne pas très bien comprendre.
Avec ce projet de loi, vous entendez, entre autres choses, développer davantage le travail le dimanche, qui concerne majoritairement les femmes. Cet amendement vise simplement à renforcer l’égalité salariale. Il nous paraît donc être le pendant logique de ce que vous entendez mettre en œuvre, même si nous ne le partageons pas vraiment.
Par ailleurs, vous souhaitez développer la croissance et l’activité. Or l’égalité salariale est source de croissance et d’activité puisqu’elle renforce le pouvoir d’achat des ménages. Je rappelle que l’égalité salariale procurerait 52 milliards d’euros de ressources supplémentaires à la sécurité sociale.
Pour toutes ces raisons, je maintiens cet amendement, étant rappelé, mes chers collègues, que l’égalité professionnelle est un principe constitutionnel depuis 1946.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1324, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3123-8 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 3123 -8. – Il est interdit à une entreprise de procéder au recrutement d’un salarié à temps plein pour un type d’emploi lorsque au sein de cette entreprise un ou plusieurs salariés à temps partiel exercent déjà un emploi équivalent ou un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement mettrait en place un frein à l’embauche, alors que les salariés à temps partiel bénéficient déjà d’une priorité pour l’accès aux postes à temps complet disponibles dans l’entreprise.
Par ailleurs, la commission estime que le travail à temps partiel n’est pas toujours subi. C’est parfois, voire souvent, un choix du salarié.
L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1262 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 1243-8 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le contrat de travail est à temps partiel, l’indemnité est égale à 20 % de la rémunération totale brute versée au salarié. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement a pour objet de porter à 20 % la prime de précarité que perçoit un salarié à l’issue de sa période de contrat, dès lors qu’il s’agissait d’un contrat à temps partiel.
La commission émet un avis défavorable. Tout d’abord, sur la forme, parce que, comme d’autres amendements, il n’est pas forcément en lien avec l’objet du projet de loi. Ensuite, sur le fond, parce que cela renchérirait le coût du travail.
Le salarié à temps plein dont le CDD n’est pas transformé en CDI percevrait une indemnité de précarité égale à 10 % de sa rémunération totale brute et le salarié à temps partiel percevrait alors une indemnité égale à 20 %. Si je comprends votre souhait de rendre moins attractifs les contrats à temps partiel et d’augmenter l’indemnité lorsque la précarité est plus importante, il me semble que l’option que vous retenez n’est pas la bonne. À tout le moins, elle est paradoxale par rapport à l’objectif visé.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable, pour les raisons invoquées par Mme le rapporteur.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1332, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5411-6 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le demandeur d’emploi bénéficie, entre la rédaction de son projet personnalisé d’accès à l’emploi et la signature de celui-ci, d’un délai de dix jours ouvrés durant lequel il bénéficie d’un droit à rétractation et peut demander à rencontrer son conseiller afin de procéder à la rédaction d’un nouveau projet personnalisé de retour à l’emploi. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Estimant que le rôle du législateur n’est pas de s’immiscer dans les relations entre Pôle emploi et les demandeurs d’emploi, la commission a émis un avis défavorable.
Je rappelle par ailleurs que le projet personnalisé d’accès à l’emploi, ou PPAE, est actualisé tous les trois mois. Le demandeur d’emploi peut donc, à cette occasion, demander que des modifications y soient apportées.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1293 rectifié, présenté par M. Vergès, Mmes Assassi, David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le sixième alinéa de l’article L. 5312-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Procéder à une expertise approfondie des compétences et profils des personnes sur le bassin d’emploi, notamment outre-mer, avant de procéder à des appels à candidatures extérieures ; ».
La parole est à Mme Éliane Assassi.
En l’occurrence, je serai un peu plus longue car c’est un amendement auquel notre ami Paul Vergès, sénateur de La Réunion, tient beaucoup et dont il est le premier signataire.
Il s’agit d’accroître le rôle de Pôle emploi pour le recrutement dans le secteur privé dans le but de ne recourir à une main-d’œuvre dite « extérieure » qu’après constat avéré de carence sur le bassin d’emploi concerné.
En effet, dès lors que les compétences existent, il est préférable que les postes soient pourvus par des personnes implantées dans le bassin d’emploi, notamment dans ceux où le taux de chômage est important. Sinon on arrive parfois à des situations ubuesques et, surtout, inacceptables.
Je donnerai des exemples pour illustrer ces propos : cela s’est passé à La Réunion.
Dans les années quatre-vingt-dix, 110 Indiens sont recrutés pour la construction des chaudières de l’usine de canne à sucre de Saint-André. Pas besoin d’une haute technicité pour la construction.
En 2005, La Réunion voit arriver 150 soudeurs thaïlandais pour travailler sur le chantier de l’extension de la centrale thermique de Gol, à Saint-Louis. Cela a, bien évidemment, provoqué un véritable tollé. La direction du travail avait pourtant souligné que 650 soudeurs réunionnais étaient au chômage.
En 2009, l’État lance la construction d’une nouvelle centrale thermique au Port Est. Coût de l’opération : 500 millions d’euros. En tant que maître d’œuvre, EDF choisit son entreprise. Selon l’évolution du chantier, entre 150 et 300 travailleurs sont présents sur le site, le plus souvent pour des tâches ne nécessitant pas de compétences particulières. Des compétences qui existent à La Réunion. Une entreprise avait même envisagé de faire venir des peintres italiens.
Les syndicats avaient légitimement parlé de « provocation », de « dumping social » et, dans certains cas, de non-respect de la durée légale de travail. Leur indignation était légitime, le taux de chômage à La Réunion étant l’un des plus forts de France. Il n’était pas question de protester contre la venue de travailleurs européens, mais de se battre pour l’emploi des Réunionnais.
Sur le plan économique, on peut aussi se demander à quel salaire étaient payés les ouvriers, puisqu’il a fallu que les entreprises paient également leur billet d’avion et leur hébergement sur place. Le chiffre de 200 euros par mois était avancé.
Ces trois exemples se situent dans le domaine du BTP. Mais c’est aussi le cas dans la fonction publique où, malgré leurs compétences, les Réunionnais voient des postes – à responsabilité ou non – leur échapper, ce qui a fait l’objet d’une séquence télévisée ce week-end.
Nous reprenons l’affirmation des syndicats : il n’est pas question de dénoncer les travailleurs européens ou étrangers, seulement de se battre pour l’emploi des Réunionnais. Rappelons que La Réunion compte plus de 155 000 demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi.
Pour lutter contre ce chômage de masse, des décisions politiques ont été prises. La région Réunion, alors présidée par le sénateur Vergès, avait signé une convention-cadre pour la construction de la route des Tamarins, avec Pôle emploi, le Carif-Oref et l’État. Il s’agissait de définir les besoins sur les chantiers et de mettre en œuvre des formations adéquates pour que les Réunionnais occupent les postes créés.
L’idée de cet amendement est donc simple : il faut ajouter une nouvelle compétence à Pôle emploi afin qu’il puisse répondre à des préoccupations locales. Tout poste mis sur le marché doit passer par Pôle emploi. C’est lorsque, dans le bassin d’emploi concerné, il n’y a pas les compétences que la zone de recrutement s’élargit. Tel est le sens de cet amendement.
L’amendement a pour objet de prévoir que Pôle emploi examine les compétences disponibles dans les bassins d’emploi avant de chercher, pour des offres d’emploi, des candidats extérieurs, notamment en outre-mer.
Aux yeux de la commission, il semble que c’est bien naturellement le cas et que la loi n’a pas à entrer dans de tels détails sur les méthodes de travail de Pôle emploi. S’il existe une difficulté locale avérée – vous avez cité l’exemple de La Réunion –, la commission espère que le ministre pourra y apporter une réponse ou faire en sorte qu’elle soit traitée par la direction générale de Pôle emploi.
L’avis est donc défavorable.
Il s’agit d’instaurer une priorité locale en matière d’emploi en favorisant les demandeurs d’emploi du bassin d’emploi dans lequel l’offre est émise. S’il est normal de contrôler le recours à la main-d’œuvre étrangère en France – nous avons eu l’occasion d’en débattre à plusieurs reprises –, je ne peux qu’être défavorable à cette disposition, qui aboutirait in fine à créer une inégalité de traitement dans l’accès à l’emploi entre Français en fonction du lieu de résidence et à porter une atteinte injustifiée à la liberté d’entreprendre.
Par ailleurs, l’ajout de cette disposition dans le code du travail serait incompatible avec l’une des missions que le législateur a déjà confiée à Pôle emploi, à l’article L. 5312–1 du code du travail, qui est la facilité de la mobilité géographique et professionnelle des personnes. Nous le savons, c’est une de nos faiblesses.
Ici, la défense de l’amendement s’est focalisée sur le territoire de La Réunion, ce que je comprends parfaitement. Mais si l’on arrivait, à la lumière de l’expérience réunionnaise, à introduire une telle disposition, le risque serait de contrevenir à un objectif fixé par ailleurs sur notre territoire à Pôle emploi. En effet, lorsque l’on examine la situation française, on s’aperçoit que de nombreux travailleurs ont un problème de mobilité géographique. Il ne me paraît pas pertinent de procéder ici de la sorte.
En revanche, il serait utile que l’administration en charge se montre vigilante à ce qu’il y ait une expertise approfondie des compétences adaptées, afin de permettre, dans le bassin d’emploi concerné, la prise en compte des besoins et la meilleure allocation des compétences. Mon collègue François Rebsamen, qui a bien sûr pris connaissance de cet amendement, est pleinement conscient de la difficulté. C’est une préoccupation sur laquelle les services seront mobilisés. Quoi qu’il en soit, la réponse ne doit pas être législative, comme vous le proposez ici, car cela aurait des conséquences à la fois disproportionnées, voire contraires à votre intention.
Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Comme je l’ai précisé, M. Vergès est le premier signataire de cet amendement. Je ne peux donc me permettre aujourd'hui de le retirer sans son accord, même si j’ai bien entendu les propos de M. le ministre. Je maintiens donc l’amendement, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1325, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le VII de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« VII. – Lorsque l’employeur, durant l’année civile, n’a pas conclu d’accord salarial dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-5 et L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, la réduction est supprimée. »
II. – Le dernier alinéa de l’article L. 2242-5 du code du travail est supprimé.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement vise à supprimer la réduction générale de cotisations patronales lorsque l’employeur ne s’engage pas à supprimer les écarts de salaire. Un employeur qui ne respecte pas la loi en matière d’égalité salariale ne doit pas pouvoir bénéficier d’argent public.
Aujourd’hui, un tel employeur a l’obligation d’ouvrir la négociation salariale, mais pas de la conclure. Si son entreprise n’est pas couverte par un accord ou un plan d’action relatifs à l’égalité professionnelle au 1er juillet 2013, il pourra être sanctionné financièrement, mais les critères et le montant de la sanction ne sont que peu dissuasifs.
Aussi, cet article vise à imposer aux employeurs une obligation de résultat en matière de négociation, dont le non-respect sera lourdement sanctionné sur le plan financier. Bénéfique pour les comptes sociaux, cette mesure, dont les effets devraient se faire sentir de manière immédiate, renforcerait les syndicats dans leur action contre le recours au temps partiel subi, pour l’augmentation des salaires et sur tous les autres leviers permettant de réduire les écarts salariaux.
L'amendement n° 1330, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le VII de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« VII. – Lorsque l’employeur, durant l’année civile, n’a pas conclu d’accord salarial dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-5 et L. 2242-8 du code du travail dans les conditions prévues aux articles L. 2242-1 à L. 2242-4 du même code, la réduction est supprimée. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
À travers cet amendement, nous entendons de nouveau défendre – en matière d’égalité salariale et professionnelle – une obligation de résultat de la part des employeurs.
Il s’inscrit dans la même logique que la disposition qui a permis d’introduire dans la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes l’interdiction de soumissionner aux marchés publics pour les entreprises n’ayant pas mis en œuvre l’obligation de négocier sur l’égalité professionnelle. Cela est une réelle avancée.
Mais nous souhaitons avec cet amendement aller un peu plus loin.
Toujours dans une logique de résultats, nous avons ainsi prévu que l’employeur ait l’obligation non pas seulement d’ouvrir une négociation salariale, mais bien de conclure un accord sur le fondement de l’article L. 2242–5 du code du travail, qui concerne spécifiquement la négociation annuelle sur les objectifs d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l’entreprise. Cet amendement s’appuie également sur l’article L. 2242–8 du code du travail, qui porte sur « les salaires effectifs », « la durée effective et l’organisation du temps de travail, notamment la mise en place du travail à temps partiel ou l’augmentation de la durée du travail à la demande des salariés ».
À défaut, l’employeur se verrait privé de réduction de cotisations patronales.
Ces amendements, qui sont proches dans leur rédaction, le sont également par leur objet.
Sachant qu’il existe déjà une pénalité dont le montant peut atteindre 1 % de la masse salariale pour les entreprises d’au moins cinquante salariés qui ne seraient pas couvertes par un tel accord, la commission n’a pas souhaité aggraver la sanction.
Elle a donc émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1328, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L’article L. 741–16 du code rural et de la pêche maritime exonère les employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles de cotisations patronales dues au titre des assurances sociales pour les travailleurs occasionnels qu’ils emploient.
Nous souhaitons donc, d’une part, supprimer les exonérations des contrats de saisonniers qui justifient un contrat atypique et, d’autre part, toujours dans un souci de justice, faire contribuer les employeurs pour les travailleurs même occasionnels qu’ils emploient.
La commission a estimé que cet amendement aurait davantage sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que dans le présent projet de loi. Il avait d’ailleurs été examiné et rejeté par l’Assemblée nationale dans le cadre du PLFSS.
L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L’article L. 1233-69 du code du travail est ainsi modifié :
1° Après le mot : « partie », la fin du cinquième alinéa est ainsi rédigée : « affectent aux mesures de formation prévues à l’article L. 1233-65 une part des ressources destinées aux actions de professionnalisation et au compte personnel de formation, selon des modalités définies par décret. » ;
2° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’une entreprise a conclu un accord en application du premier alinéa de l’article L. 6331-10, elle reverse à l’organisme collecteur paritaire agréé tout ou partie de la contribution prévue au même premier alinéa afin de financer des mesures de formation prévues à l’article L. 1233-65. » –
Adopté.
Mes chers collègues, à la demande de M. le ministre, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures.
L'amendement n° 1266 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 6322-7 du code du travail, après le mot : « différée », sont insérés les mots : «, après avis conforme du comité d’entreprise, ».
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement a pour objet de soumettre à l’avis du comité d’entreprise le report des demandes de congé individuel de formation formulées par les salariés. En l’état actuel de la rédaction de cet article, le report du CIF ne dépend que de la décision du chef d’entreprise. Afin de permettre au plus grand nombre de salariés d’accéder à la formation professionnelle, nous proposons que le report soit conditionné à la consultation et à l’approbation du comité d’entreprise.
Le projet de loi ne porte pas sur la formation professionnelle, qui a fait l’objet d’une profonde réforme il y a un an. À cette occasion, les partenaires sociaux n’avaient pas souhaité modifier les règles d’accès au CIF. L’avis est donc défavorable.
Madame la sénatrice, vous voulez soumettre à la validation par le comité d’entreprise le report des demandes d’ouverture d’un congé individuel de formation formulées par les salariés.
Le comité d’entreprise est déjà consulté pour avis dans le cas où l’employeur estime que l’absence d’un salarié sollicitant un CIF pourrait avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.
Par ailleurs, si les conditions d’accès du salarié au CIF, c'est-à-dire – je le rappelle – l’ancienneté et le délai de franchise, sont réunies, les textes prévoient que l’employeur peut non pas refuser le CIF, mais simplement le reporter de neuf mois au maximum.
Il ne paraît donc pas utile de prévoir une nouvelle consultation du comité d’entreprise. Je souligne le fait que, dans le projet de loi relatif au dialogue social que présentera dans quelques semaines mon collègue François Rebsamen, l’objectif est de recentrer les obligations de consultation sur les décisions stratégiques.
Si l’employeur avait pu bloquer totalement l’accès au CIF, j’aurais compris que l’on soumette sa décision à validation. Dans le système actuel, si les conditions sont remplies, le CIF est dans la plupart des cas accordé et, au pire, reporté au maximum de neuf mois. Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1267 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 6322-7 du code du travail, le taux : « 2 % » est remplacé par le taux : « 5 % ».
La parole est à Mme Éliane Assassi.
En l’état actuel du droit, l’employeur peut s’opposer à ce que le salarié puisse bénéficier d’un congé individuel de formation si 2 % au moins de l’effectif de l’établissement est déjà en CIF. Ainsi, dans les entreprises de 200 salariés, seules quatre personnes peuvent simultanément bénéficier d’un CIF.
Or le congé individuel de formation est la faculté offerte au salarié de s’absenter de son poste de travail afin de lui permettre de suivre, sur son initiative et à titre individuel, des actions de formation. Dès lors, il peut constituer un atout dans le parcours professionnel du salarié, qui peut décider de suivre une formation lui permettant de prévoir, en amont et en dehors de toute situation d’urgence ou de crise, les évolutions de sa vie professionnelle.
Pour toutes ces raisons, nous proposons que le taux de 2 % soit porté à 5 %, afin de permettre à davantage de salariés d’accéder simultanément au CIF, sans pour autant déstabiliser l’organisation de l’entreprise.
Comme tous les amendements portant sur le congé individuel de formation, l’avis est défavorable, pour les raisons précédemment exposées.
L’accès au CIF ne peut pas être bloqué. Le seuil de 2 % est l’un des éléments qui permet de justifier le report d’un CIF, pour éviter que plus de 2 % de l’effectif soit en formation en même temps. Il s’agit d’une règle saine pour le bon fonctionnement de l’entreprise. Je m’oppose à ce que ce taux soit augmenté.
Par ailleurs, ce seuil a été défini dans le cadre de l’accord national interprofessionnel, qui ne peut être modifié par voie d’amendement. Une renégociation de cet accord serait nécessaire si l’on voulait relever ce taux.
Pour ces deux raisons, je demande le retrait de l’amendement ; sinon, l’avis sera défavorable.
Je maintiens cet amendement, que nous avions déjà déposé dans le cadre du débat sur l’ANI.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1265 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l’article L. 6322-27 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les périodes de stages sont intégralement prises en compte dans les durées d’ancienneté prises en compte pour l’ouverture du droit au congé individuel de formation. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Si, théoriquement, tous les salariés d’une entreprise peuvent bénéficier d’un congé individuel de formation, cette faculté est réduite par l’existence de délais d’ancienneté. En effet, le salarié qui souhaite bénéficier d’un CIF doit, pour ce faire, justifier d’une ancienneté de vingt-quatre mois consécutifs ou non en tant que salarié, dont douze mois dans l’entreprise, ou de trente-six mois dans les entreprises artisanales de moins de dix salariés. Il est expressément fait référence au salariat.
Or, avec la multiplication des stages en entreprise, on sait que de nombreux jeunes sont appelés à travailler dans les entreprises, parfois pendant une longue période, sans pour autant être considérés comme des salariés de celles-ci. Cette situation n’est pas acceptable, car elle retarde le droit à la formation des jeunes salariés recrutés. Aussi proposons-nous que les périodes de stages soient assimilées à des périodes d’activité salariée dans l’entreprise.
Comme tous les amendements portant sur le congé individuel de formation, l’avis est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1269 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 123-4 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les salariés qui ont arrêté leur formation initiale avant le premier cycle de l’enseignement supérieur ou qui n’ont pas obtenu de qualification professionnelle reconnue, et qui souhaitent poursuivre ultérieurement des études en vue d’une promotion sociale, ont un accès prioritaire à une formation diplômante ou qualifiante. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement vise à créer un droit de priorité, dans l’accès à la formation, pour les salariés de notre pays qui ont arrêté leur formation initiale avant le premier cycle de l’enseignement supérieur ou qui n’ont pas obtenu de qualification professionnelle reconnue. Nous entendons ainsi permettre à ces personnes de bénéficier de la possibilité de reprendre des études en vue d’une promotion sociale, alors qu’elles sont déjà entrées dans la vie active et travaillent peut-être depuis plusieurs années.
Cette question de la promotion sociale est au cœur de notre conception de la formation professionnelle. Je rappelle que, en 2009, lors de l’examen du projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, nous avions déjà défendu cet amendement, porté lui aussi à l’époque par nos collègues du groupe socialiste.
Depuis, la situation s’agissant de l’accès à la formation professionnelle des personnes les moins qualifiées n’a guère évolué et les personnes peu formées ou mal qualifiées ne constituent toujours pas les principaux bénéficiaires du système de formation.
Si un peu plus d’un titulaire de BTS ou de DUT sur cinq bénéficie d’une formation continue dans les trois ans qui suivent les études, le taux est de un sur quinze pour les non-diplômés et d’un peu plus de un sur dix pour les titulaires de CAP.
Par ailleurs, notre amendement s’inscrit dans la même logique que la disposition adoptée dans le cadre du projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, qui a inscrit, dans le code de l’éducation, le droit pour tout jeune sortant du système éducatif sans diplôme de bénéficier d’une durée complémentaire de formation qualifiante. Cette période peut consister en un droit au retour à une formation initiale sous statut scolaire.
Notre amendement, s’il était adopté, permettrait d’assurer une réelle continuité de prise en charge des personnes les moins qualifiées et de donner une véritable effectivité à la notion de formation continue. Une étude du CEREQ, le Centre d’études et de recherches sur les qualifications, d’octobre dernier sur les freins à la formation vus par les salariés montre que « les freins à la formation des salariés […] les moins qualifiés et/ou les plus jeunes se heurtent plus souvent à des problèmes de coût auxquels s’ajoutent pour les ouvriers la non-maîtrise des prérequis et pour les employés un problème de conciliation entre vie familiale et formation continue ».
Les nouvelles dispositions adoptées dans la loi du 5 mars 2014, dont le compte personnel de formation, sont loin de lever toutes ces hypothèques ; je pense aux difficultés de conciliation entre la vie familiale et une formation continue. Quid, par exemple, de la prise en charge des frais liés à la formation des salariés sur l’organisation familiale ? Je pense aussi au coût parfois trop élevé des formations, notamment celles qui sont d’une durée longue. Le dépassement des 150 heures sera-t-il pratiqué autant que nécessaire ?
Notre amendement vise donc à lever les freins à la formation des salariés les moins qualifiés.
La préoccupation exprimée dans cet amendement est satisfaite par la loi du 8 juillet 2013, qui a consacré l’existence d’un droit à la formation initiale différée à tout jeune sorti du système éducatif sans diplôme, notamment par le biais d’une durée complémentaire de formation qualifiante.
La commission a donc émis un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1334 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2323-34 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 2323 -34.- Le comité d’entreprise émet chaque année, à l’occasion de deux réunions spécifiques, un avis sur l’exécution du plan de formation du personnel de l’entreprise de l’année précédente. Le projet de plan pour l’année à venir lui est soumis pour avis conforme.
« En cas de rejet par le comité d’entreprise, l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour présenter un nouveau plan dans les mêmes conditions.
« Si le plan est de nouveau rejeté par le comité d’entreprise, il est tenu d’élaborer un document unilatéral qu’il soumet pour homologation à l’autorité administrative. Celle-ci dispose d’un délai d’un mois pour le valider. Le silence vaut refus de l’administration.
« Dans une telle situation, l’employeur encourt la sanction prévue dans le cas de délit d’entrave aux attributions du comité d’entreprise. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
La loi relative à la formation professionnelle a considérablement réduit la part de financement de la formation professionnelle des salariés par les entreprises. Il s’agit pourtant d’un enjeu de croissance essentiel auquel nous ne pouvons qu’être toutes et tous sensibles : enjeu de développement industriel, de productivité, de compétitivité, de capacité de développement de chaque entreprise. C'est également un enjeu pour la dynamisation et la sécurisation des parcours de professionnalisation des salariés, par l’élévation de leur niveau de qualification et de compétences. Ces enjeux indissociables doivent être promus en prenant en considération le fait que la formation est un intérêt partagé.
Il est utile de rappeler que les fonds collectés pour la formation professionnelle ne sont qu’une sorte de salaire socialisé, dont l’utilisation doit répondre en priorité aux besoins des salariés. À ce titre, ils doivent être gérés principalement par leurs représentants, et la formation professionnelle doit être l’objet d’un dialogue social renforcé non seulement dans l’entreprise, mais aussi dans les branches et dans les régions.
Le plan de formation de l’entreprise doit, lui, être décidé par la négociation, et sa mise en œuvre, pour l’ensemble des salariés de l’entreprise, contrôlée par le comité d’entreprise. Chaque année, lors de deux réunions spécifiques dont le calendrier est défini par accord collectif ou, à défaut, par décret, le comité d’entreprise est invité à émettre un avis sur l’exécution du plan de formation de l’année passée et celui de l’année en cours.
Un simple avis des représentants des salariés nous paraît inadapté aux enjeux que je viens de rappeler. Nous considérons qu’il est indispensable de faire évoluer cette procédure et de dépasser la simple consultation. C’est pourquoi nous proposons cet amendement, qui a pour objet de modifier l’article L. 2323-34 du code du travail, afin de renforcer les prérogatives des comités d’entreprise. Il s’agit de leur permettre de rendre un avis conforme sur le plan de formation pour l’année à venir et de s’opposer à un plan de formation qui serait manifestement insuffisant.
En cas de rejet par le comité d’entreprise, l’employeur disposera alors d’un délai d’un mois pour présenter un nouveau plan. En cas de nouveau rejet, l’employeur sera tenu d’élaborer un document unilatéral soumis pour homologation à l’autorité administrative. En cas de refus de validation par l’administration, l’employeur encourra la sanction prévue dans le cas de délit d’entrave aux attributions du comité d’entreprise.
La commission a jugé que, en vertu du pouvoir de direction dont il dispose et de l’obligation qu’il a d’assurer l’accès de ses salariés à la formation professionnelle, le plan de formation est l’une des responsabilités majeures de l’employeur.
L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1335 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6331-9 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 6331 -9. – Les entreprises employant au minimum dix salariés doivent consacrer au financement des actions de formation professionnelle au moins 2, 5 % du montant des rémunérations versées pendant l’année en cours.
« Ce taux est porté à 4 % pour les entreprises de travail temporaires quelles que soient la nature et la date de la conclusion des contrats de mission.
« Les rémunérations sont entendues au sens des règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou au chapitre II du titre II et au chapitre Ier du titre IV du livre VII du code rural et de la pêche maritime pour les employeurs des salariés mentionnés à l’article L. 722-20 du même code.
« Les modalités de versement de cette participation sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Un cinquième au moins de ce budget est consacré au financement d’un fonds d’assurance formation prévu à l’article L. 6332-7 du présent code.
« Deux cinquièmes au moins de ce budget sont consacrés au financement des actions de formation au bénéfice des travailleurs privés d’emploi, organisées dans des centres de formation conventionnés par l’État ou par les régions.
« Le solde du budget finance les actions prévues dans le plan de formation de l’entreprise au bénéfice de ses salariés. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement a pour objet de modifier de manière importante la rédaction actuelle de l’article L. 6331-9 du code du travail. En effet, il tend à augmenter, de manière notable, mais toujours supportable par les entreprises, la part de financement que les petites entreprises consacrent à la formation professionnelle des salariés, ainsi que celle due par les entreprises d’intérim. En outre, il vise à préciser l’utilisation des ressources prévues dans cet article : un cinquième des sommes collectées sera dédié au fonds de formation des salariés, deux cinquièmes au financement des actions de formation des salariés privés d’emploi et le solde aux formations prévues dans le plan de formation de l’entreprise.
L’adoption de cet amendement permettrait de renforcer les financements à destination de la formation professionnelle, tout en permettant d’en orienter une partie, par la mutualisation et de manière solidaire, vers les salariés privés d’emploi, pour qui la formation professionnelle constitue un atout considérable pour renouer avec l’activité professionnelle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes parvenus à la fin de notre série d’amendements tendant à insérer des articles additionnels. Notre concision sur ces amendements, que vous aurez tous notée, va de pair avec notre volonté de les défendre. Chacun de ces amendements était en effet porteur de propositions. Nous voulions qu’elles soient entendues, même si nous savions, bien évidemment, qu’elles ne seraient acceptées ni par la commission ni par le Gouvernement.
Il y a un an à peine, nous avons procédé à une réforme structurelle des mécanismes de financement de la formation professionnelle en France et nous ne souhaitons pas remettre l’ouvrage sur le métier. La commission a donc émis un avis défavorable
Vous avez raison, madame Assassi, il était important que le groupe CRC présente ces amendements – je le remercie d’ailleurs de l’avoir fait de manière synthétique –, parce qu’ils portent sur des sujets majeurs pour la vie des salariés.
La loi du 5 mars 2014 vise à corriger les écarts dans l’accès à la formation à travers la mise en place de deux nouveaux droits effectifs à compter du 1er janvier 2015 : le compte personnel de formation et le conseil en évolution professionnelle. Elle met en place des mécanismes permettant d’accentuer l’effort de formation au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin, notamment à travers la mobilisation du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.
On peut considérer que cette loi ne va pas assez loin ; sans doute faudra-t-il la compléter au cours des années à venir, en particulier pour améliorer la formation des chômeurs. Reste qu’elle représente une amélioration de la formation professionnelle pour toutes et tous, notamment pour les chômeurs, et de la transparence des règles de financement.
Laissons à ce dispositif le temps de monter en charge. Il serait en outre plus pertinent de chercher à concentrer les financements sur les salariés les plus fragiles et les chômeurs, plutôt que d’accroître les contributions des employeurs. En effet, lorsque l’on fait la comparaison avec d’autres pays, on s’aperçoit que celles-ci sont déjà relativement élevées en France.
On peut rendre l’utilisation de l’argent versé plus transparente et plus efficace, mais, à ce stade, la volonté du Gouvernement est de s’en tenir à la réforme introduite par la loi du 5 mars 2014, même si cela ne doit pas exclure tout débat – vous le faites vivre à travers tous vos amendements. Je vous demande donc de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 269 rectifié bis n'est pas soutenu.
En conséquence, le sous-amendement n° 1783 n’a plus d’objet.
L'amendement n° 1805, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis,
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 6111-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle est destinée prioritairement aux personnes les plus éloignées de l’emploi. »
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
La commission avait émis un avis favorable sur l’amendement n° 269 rectifié bis, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 1783, qui, sans en dénaturer le sens, améliorait son insertion dans l’article L. 6111-1 du code du travail. L’amendement n° 1805 vise à reprendre le texte de cet amendement, qui n’a pas été soutenu, et de ce sous-amendement.
Selon l’article L. 6111-1 du code du travail, l’objectif de la formation professionnelle tout au long de la vie consiste à « permettre à chaque personne, indépendamment de son statut, d'acquérir et d'actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle ». Il s’agit d’un droit universel, propre à chaque actif et qui ne saurait être modulé en fonction de son statut ou de sa situation.
Il convient par ailleurs d’assurer le respect du principe d’égalité d’accès à la formation professionnelle ; or il existe des disparités fortes, comme cela avait été souligné au moment du débat sur la loi du 5 mars 2014. Ces disparités ont trait à la taille de l’entreprise, aux catégories socio-professionnelles – 56, 5 % des ingénieurs et des cadres ont accès à la formation professionnelle, contre 32, 4 % des ouvriers – et au statut, puisque le taux d’accès des demandeurs d’emploi à la formation professionnelle reste faible, même si leurs formations sont en moyenne plus longues. La loi de 2014 vise donc à corriger ces écarts par la création de nouveaux droits, que j’ai cités à l’instant – je n’y reviens donc pas. Elle met aussi en place des mécanismes de nature à accentuer l’effort de formation au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin, à travers notamment la mobilisation du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.
La concentration prioritaire des crédits de la formation professionnelle sur les personnes les plus éloignées de l’emploi est exactement au cœur de la loi du 5 mars 2014. Même si je reconnais que l’on pourrait sans doute faire mieux, l’amendement n° 1805 est donc satisfait. Je ne suis pas hostile à son esprit, mais, dans la mesure où il ne crée pas de droit supplémentaire, son adoption rendrait la loi bavarde, si vous me permettez cette expression. C’est pourquoi j’en demande le retrait.
Compte tenu des explications de M. le ministre et pour ne pas surcharger la loi, je retire l’amendement.
L'amendement n° 1805 est retiré.
L'amendement n° 1804, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 103 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 1233-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « ou à des réorganisations destinées à sauvegarder la compétitivité de l'entreprise » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le motif économique se justifie au regard de la situation de l'entreprise ou, le cas échéant, de celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient. »
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Cet amendement vise à apporter des précisions à la définition du motif économique de licenciement, qui figure à l'article L. 1233-3 du code du travail.
Tout d’abord, il tend à inscrire dans la loi un motif de licenciement économique reconnu de longue date par la Cour de cassation, depuis son arrêt Vidéocolor du 5 avril 1995 : la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise. La jurisprudence, constante depuis lors, confirme le caractère réel et sérieux de licenciements prononcés dans le cadre d'une réorganisation rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ou du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient, même en l'absence de difficultés économiques immédiates ou de mutations technologiques. Il s'agit ici, dans un souci de sécurité juridique, de mettre en conformité la définition du licenciement économique figurant dans le code du travail avec cette jurisprudence.
Ensuite, l’amendement vise à énoncer le périmètre d'appréciation par l'employeur, puis, en cas de litige, par le juge, du motif économique de licenciement, afin d'éviter que des interprétations restrictives ne limitent ce périmètre au niveau du secteur d'activité sans prendre en compte la situation de l'entreprise. Le motif économique peut donc reposer sur la situation du secteur d'activité, au niveau national ou international, mais il peut également résulter de la situation de l'entreprise elle-même.
Concernant la notion de « secteur d’activité » d’un groupe, le choix a été fait de ne pas en donner une définition figée dans la loi, car, en la matière, le législateur aura toujours un temps de retard sur l’activité économique. Est-ce pour autant une notion inconnue et nouvelle ? Non, puisque la Cour de cassation l’utilise depuis plus de vingt ans en s’appuyant notamment sur un faisceau d’indices ayant trait à la nature des produits, à la clientèle à laquelle s’adresse le groupe et aux modes de distribution auxquels il recourt. En cas de contentieux, une analyse au cas par cas est nécessaire ; elle est la seule qui soit à même de garantir à la fois le droit des salariés et la sécurité juridique des actes des employeurs.
Votre amendement vise à élever au niveau de la loi ce que la jurisprudence reconnaît depuis 1995. Je voudrais toutefois en réponse bien clarifier les termes du débat, car ils sont importants.
Premièrement, des licenciements économiques sont aujourd'hui reconnus par le juge dans le cas de difficultés économiques ou de mutations technologiques auxquelles une entreprise est confrontée. Depuis vingt ans, la jurisprudence considère en effet que la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise peut fonder le caractère économique d’un licenciement. S’il faut être vigilant en la matière, la rédaction de cet amendement ne me semble pas poser de problème, dans la mesure où elle a les mêmes objectifs que la jurisprudence. Il faut en tout cas bien préciser que cet amendement ne vise pas autre chose que la retranscription explicite dans la loi de cette jurisprudence relative au motif légitime de licenciement économique. En tout état de cause, je précise que l’adoption de cet amendement n’apporterait pas de changement substantiel aux cas récents auxquels nous avons assisté – je pense par exemple à celui de Vallourec – puisqu’il s’agit de difficultés économiques déjà reconnues par la jurisprudence.
Deuxièmement, je vois dans cet amendement une articulation entre, d’une part, la définition du champ du licenciement économique et, d’autre part, le recours possible à l’accord de maintien dans l’emploi, ou AME, défensif. Ce dernier a été mis en place par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi et fera l’objet d’une discussion dans les prochaines semaines avec les partenaires sociaux pour en tirer tous les conséquences.
Il est donc primordial, s’agissant de cas de sauvegarde de la compétitivité des entreprises, de bien clarifier le cadre normatif – il me semble que vous le faites en élevant la jurisprudence au niveau de la loi – et de donner les moyens aux entreprises d’éviter autant que possible les PSE pour recourir plutôt à l’AME. L’intention du Gouvernement est de favoriser cette seconde voie, et je crois que ce texte permettra de le faire ; ma lecture de cet amendement est qu’il ne s’agit que d’une clarification et non d’un ajout.
Troisièmement, vous proposez d’apprécier le motif économique du licenciement au regard de la situation de l’entreprise ou, le cas échéant, du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient. Pour prévenir tout débat ultérieur sur l’application des critères ainsi énoncés, notamment concernant les groupes, je tiens à préciser un dernier point, pour que nous soyons certains d’avoir la même compréhension. Cet amendement précise, selon moi, que la réalité de la situation de l’entreprise ou du secteur d’activité concerné – qu’il soit national ou international – nécessitant des réorganisations destinées à sauvegarder la compétitivité de l’entreprise peut être constituée dès lors que l’entreprise elle-même le justifie ; la réalité de ces difficultés peut donc résulter d’une appréciation d’ensemble des deux situations. Ma compréhension, c’est que vous voulez éviter une situation dans laquelle une entreprise confrontée à des difficultés réelles mais dont le secteur se trouve dans une situation régionale favorable ne puisse pas faire qualifier d’économiques ses licenciements.
Ces précisions étant apportées – il s’agit d’une simple élévation de la jurisprudence au niveau de la loi et le Gouvernement souhaite favoriser les accords de maintien dans l’emploi –, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le ministre vient d’évoquer la société Vallourec, qui s’est développée à l’origine notamment dans le Nord. Moi qui viens de cette région, je peux vous dire que ce genre de dispositif y est très souvent mis en œuvre. Dans ce territoire industriel, nous avons par exemple connu, avec le groupe PSA, l’accord de compétitivité pour le site de Sevelnord, pour lequel il a fallu batailler. Aujourd’hui, on constate que, pour cette usine, qu’on avait l’intention de fermer, la machine est repartie. Nous avons connu d’autres exemples de cette nature sur notre territoire, et il y en aura encore d’autres !
Pour ma part, je suis favorable à tout ce qui améliore la compétitivité. Je suis plutôt sensible aux arguments en faveur de la flexibilité, mais à condition que celle-ci soit mesurée, que lorsqu’une entreprise – nationale ou internationale – cherche à développer son activité, cela ne se fasse pas au détriment de l’emploi en France. Transposer cette jurisprudence dans la loi ne doit donc pas permettre aux entreprises de franchir trop rapidement un cran supplémentaire, même si un tel dispositif peut semblerêtre a priori la solution à une situation difficile. En prenant le temps de la réflexion, on se rend compte parfois que la négociation et la voie contractuelle peuvent mener à des solutions permettant de traverser une période difficile tout en conservant les emplois.
Vous comprendrez sans doute que, à ce stade j’ai des réserves sur cet amendement visant à préciser que le motif économique d’un licenciement peut se justifier au regard de la situation de l’entreprise ou de celle du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient. Concernant le cas de la société Vallourec, encore une fois, je pense qu’il faut envisager tous les moyens possibles, qu’il ne faut s’interdire aucune option.
Monsieur le ministre, vous vous en êtes remis à la sagesse du Sénat sur cet amendement. Personnellement, je m’abstiendrai, parce que j’ai besoin d’avoir davantage de précisions ; j’estime ne pas disposer aujourd'hui de suffisamment de garanties sur les conséquences qu’aura la transcription de la jurisprudence dans la loi.
Mes chers collègues, j’en appelle à notre responsabilité collective. Qu’entraînera, demain, l’adoption d’un tel amendement ? Que changera-t-elle, concrètement, pour les entreprises industrielles ? En outre, comment pourrons-nous assurer à l’ensemble des salariés de notre pays que notre volonté de maintenir et de développer une entreprise, sur le plan national, sans pour autant négliger le plan international, de favoriser la flexibilité et la compétitivité ne conduira pas à privilégier systématiquement les licenciements, sans que les voies et moyens préalables aient été épuisés ?
L’amendement de la commission spéciale vise à prendre en compte non seulement la situation propre de l’entreprise, mais aussi le « secteur d’activité » du groupe auquel l’entreprise appartient, alors que celui-ci, jusqu’à présent, n’était qu’un élément de contexte.
Dans son objet, l’amendement fait référence à l’arrêt Vidéocolor. Mes chers collègues, cet arrêt a été rendu le 5 avril 1995. C’était il y a vingt ans ! En vingt ans, le monde a changé et la mondialisation a fait son œuvre. Beaucoup d’entreprises qui sont encore sur le territoire national font désormais partie de grands groupes internationaux, qu’ils soient situés outre-Atlantique ou en Asie.
M. le ministre a apporté des précisions qui me semblent très utiles. Premièrement, il est ici question de « secteur d’activité » national ou international et non de « territoire ».
Pour ce qui me concerne, j’aurais préféré que le mot « européen » figure dans la loi, mais je sais que c’est juridiquement impossible.
Deuxièmement, M. le ministre fait de cet amendement un miroir de l’accord de maintien dans l’emploi défensif. Nous avons évoqué, ce matin, la rencontre qui doit avoir lieu avec les organisations syndicales. Cette précision est très importante pour la compréhension du débat.
Troisièmement, M. le ministre est revenu sur la philosophie générale du plan de sauvegarde de l’emploi : celui-ci doit être évité chaque fois que possible, car prévenir est toujours mieux que guérir, surtout lorsque la guérison se passe mal. Cela me paraît également être la philosophie de cet amendement, qui n’est pas rédactionnel ni de précision – du reste, Mme la rapporteur n’en a pas parlé ainsi. Il importe que le législateur connaisse la portée de ce qu’il vote !
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 103 bis.
(Non modifié)
Les articles 98 à 103 sont applicables aux procédures de licenciement pour motif économique engagées, en application des articles L. 1233-8 ou L. 1233-30 du code du travail, après la publication de la présente loi.
L'amendement n° 1780, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
après la publication
par les mots :
à la date d'entrée en vigueur
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
L'amendement n° 1780 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 512 est présenté par M. Lenoir.
L'amendement n° 741 rectifié est présenté par Mme Imbert et MM. D. Laurent, Milon, Morisset, Vasselle, Laufoaulu, Laménie, Lefèvre et Husson.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par les mots :
, ainsi qu’aux procédures pour lesquelles aucune décision définitive des juridictions compétentes n’est intervenue à la date de publication de la présente loi
La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour présenter l’amendement n° 512.
Nous le savons, un plan de sauvegarde de l’emploi peut être remis en cause du fait de l’annulation de la décision de validation ou d’homologation prise par l’autorité administrative. Cet amendement vise à lever cette insécurité juridique.
L’amendement n° 741 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 512 ?
Cet amendement revient à modifier les règles en cours de route.
Si la commission ne méconnaît pas les difficultés qu’a pu entraîner la réforme des PSE issue de la loi de sécurisation de l’emploi de 2013, auxquelles le présent projet de loi apporte des réponses, elle a jugé que l’on ne pouvait pas remettre en cause la sécurité juridique des recours actuellement pendants devant le juge administratif.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2013-366 QPC du 14 février 2014, a renforcé son contrôle des lois de validation, en exigeant notamment un motif « impérieux » d’intérêt général, et non plus un motif « suffisant » d’intérêt général.
La commission a considéré que l’amendement ne présentait pas les garanties suffisantes pour éviter une censure du Conseil constitutionnel. Elle en sollicite donc le retrait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. Jean-Claude Lenoir. Non, monsieur le président ; je ne voudrais pas être tenu pour responsable du retard dans l’examen du texte et puis, surtout, je devine le bonheur qui sera le vôtre, monsieur le ministre, de m’entendre dire que je retire l’amendement.
M. le ministre s’esclaffe.
L'article 104 est adopté.
L'amendement n° 1338, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début du code du travail, il est rétabli un chapitre préliminaire ainsi rédigé :
« Chapitre préliminaire
« Utilité sociale et collective des entreprises
« Art. L. 1A. – L’activité économique des entreprises de production de biens ou de services, qu’elles soient privées ou publiques, à but lucratif ou non, a pour finalités le bien-être des producteurs, la sécurité de l’emploi et de la formation, la satisfaction des besoins des citoyens, la préservation de l’environnement. Les choix de gestion des entreprises sont guidés par ces buts qui priment toute autre considération. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement vise à rééquilibrer, dans la loi, les principes fondamentaux que sont la liberté d’entreprendre et le droit pour chacun d’obtenir un emploi, en précisant les finalités de l’activité économique.
La jurisprudence du Conseil constitutionnel vise à l’équilibre entre deux principes antagonistes ayant la même valeur juridique : la liberté d’entreprendre et le droit à l’emploi. En l’occurrence, ces deux principes ont valeur constitutionnelle, et toutes les normes inférieures doivent s’y conformer. Or, paradoxalement, si une seule clause du bloc de constitutionnalité consacre indirectement la liberté d’entreprendre, plusieurs dispositions protègent et constitutionnalisent nos droits sociaux, au point que l’on peut évoquer un véritable droit constitutionnel social. C’est pourquoi nous pensons que le législateur doit apporter une précision sur l’utilité sociale et collective des entreprises.
Dans ces conditions, il ne serait pas incongru de prévoir, à l’article 1er du code du travail, que l’activité économique des entreprises de production de biens ou de services, qu’elles soient privées ou publiques, à but lucratif ou non, a pour finalités le bien-être des producteurs, la sécurité de l’emploi et de la formation, la satisfaction des besoins des citoyens, la préservation de l’environnement et que les choix de gestion des entreprises sont guidés par ces buts, qui priment sur toute autre considération.
Nous pensons que ce débat n’est pas seulement de nature constitutionnelle et que cette précision est bienvenue, voire indispensable.
La commission est défavorable à l’amendement, dont la rédaction est finalement assez proche de celle retenue à l’article 1er de la loi du 31 juillet 2014, qui définit l’économie sociale et solidaire.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 627 rectifié, présenté par Mme D. Gillot, M. Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour la préparation directe d’une épreuve, un étudiant justifiant d’une inscription valide et en cours au sein d’un établissement préparant à l’obtention d’un diplôme d’enseignement supérieur, a droit à un congé supplémentaire de cinq jours ouvrables par tranche de soixante jours ouvrables travaillés prévus par son contrat de travail.
Ce congé donne droit au maintien de son salaire. Il est situé dans le mois qui précède les épreuves. Il s’ajoute au congé payé prévu à l’article L. 3141-1 du code du travail et s’il y a lieu, au congé annuel pour les salariés de moins de vingt et un ans prévu à l’article L. 3164-9 du même code.
La parole est à Mme Dominique Gillot.
Cet amendement vise à accorder un « crédit congé formation » de cinq jours ouvrables par semestre universitaire aux étudiants salariés justifiant d’une inscription en cours valide au sein d’un établissement préparant à l’obtention d’un diplôme d’enseignement supérieur. Ce congé, pouvant être pris dans le mois précédant les épreuves et donnant droit au maintien du salaire, s’ajouterait aux congés payés et au congé annuel pour les salariés de moins de vingt et un ans.
Dans son enquête triennale publiée dernièrement, l’Observatoire de la vie étudiante affirme que 25 % des étudiants se déclarent en difficulté financière. C’est ce qui pousse 46 % d’entre eux à exercer une activité rémunérée pendant leur année universitaire. Parmi ceux-ci, la moitié déclarent que cette activité leur est « indispensable pour vivre » – et donc pour étudier – et 19 % qualifient cette activité de « concurrente » ou de « très concurrente » à leurs études. Les étudiants les plus concernés par les activités rémunérées concurrentes à la réussite de leurs études ne perçoivent souvent pas de bourses sur critères sociaux ou en touchent une d’un montant peu élevé, sans avoir les moyens financiers d’éviter le salariat.
Dans certains cas, les régimes spéciaux d’études à destination des étudiants salariés leur permettent d’aménager leur temps d’étude et de choisir prioritairement la répartition horaire de leurs enseignements. Malheureusement, cette possibilité n’est pas généralisée. Il n’existe donc aucune disposition permettant à un étudiant de faire valoir un droit à la préparation de ses examens, ce qui frappe l’étudiant d’une double peine : devoir travailler pour financer ses études et n’avoir aucun moyen de combiner ces deux emplois du temps différents, particulièrement pendant les périodes d’examens.
Cependant, les étudiants en alternance bénéficient de l’article L. 6222-35 du code du travail, lequel instaure un congé de cinq jours pour permettre la préparation des examens. Cette disposition répond à la nécessité de laisser un temps suffisant aux étudiants pour réviser, en vue de leur examen. Le présent amendement vise à étendre ce droit à tous les étudiants en mesure de justifier d’une inscription effective à une formation d’enseignement supérieur et d’un contrat de travail. Cette proposition permettra ainsi d’améliorer concrètement la réussite des étudiants qui sont contraints d’être salariés pour étudier.
Il est vrai qu’un nombre croissant d’étudiants travaillent pendant leurs études, souvent pour payer leur loyer et les dépenses de la vie courante, lorsqu’ils ne peuvent bénéficier d’aucune forme de solidarité familiale, même si rares sont ceux qui travaillent à temps plein. La situation de ces étudiants n’est pas tout à fait comparable à celle des apprentis, qui sont en alternance à temps plein dans l’entreprise, puis en formation en centre de formation d’apprentis, ou CFA.
La commission avait jugé important de connaître la position du ministre chargé de l’enseignement supérieur et du ministre du travail sur cette question. N’ayant pas obtenu de réponse, elle a émis un avis défavorable sur l’amendement. Reste que nous allons maintenant pouvoir entendre le Gouvernement sur ce point !
Madame Gillot, vous proposez de créer un nouveau congé, d’une durée de cinq jours par semestre universitaire, pour permettre aux étudiants salariés de se rendre à leurs examens. L’objet de votre amendement est en cohérence avec ce que nous avons pu faire par ailleurs. C’est pourquoi j’y suis favorable, même si nous devrons évidemment préciser les modalités de ce congé d’ici à la fin de l’examen du projet de loi par le Parlement. Il faut permettre aux étudiants salariés de préparer au mieux leurs épreuves universitaires.
Comme le Président de la République l’a rappelé mercredi dernier dans un discours consacré à la jeunesse, l’université doit être « la condition de notre réussite collective ». Il faut plus d’étudiants mieux orientés, mieux formés, et il doit y avoir, pour ces étudiants, les conditions pour réussir leurs études – les bourses, les conditions de travail, de logement, la prime d’activité… Comme l’a également déclaré le chef de l’État, tout cela permettra aux jeunes de France de pouvoir accéder davantage qu’aujourd'hui à des études de qualité et à l’autonomie.
Dans ce contexte, je considère que votre amendement apporte une pierre à l’édifice. Je répète qu’il faut encore en clarifier les modalités et en améliorer la rédaction. En tout état de cause, son adoption serait importante et cohérente avec les efforts entrepris aujourd'hui.
Sur le fond, je suis favorable à cet amendement, même si l’on ne peut pas assimiler un étudiant qui travaille à un étudiant en alternance. Dans ce dernier cas, l’entreprise sait au moment de la signature du contrat qu’elle devra lui donner des journées de congé pour lui permettre de préparer ses examens.
Cela étant, le droit au maintien du salaire me gêne. Autant je pense qu’il est important que l’étudiant ait droit à ces cinq jours de congé, autant je crains que le droit au maintien du salaire pendant ces cinq jours ne conduise les entreprises à embaucher moins d’étudiants. Gardons-nous, une fois de plus, de vouloir trop bien faire !
Dans ces conditions, ma chère collègue, je m’abstiendrai sur votre amendement, à moins que vous ne supprimiez le droit au maintien du salaire. La commission mixte paritaire pourra encore faire évoluer la rédaction si nous l’adoptons aujourd'hui.
Je ne peux qu’être favorable à cet amendement, qui apportera un peu plus de confort aux étudiants qui travaillent… y compris le dimanche !
Les arguments de Mme Procaccia sont justes : l’adoption de cet amendement risquerait de pénaliser certains étudiants. Comme nous tenons beaucoup à ce dispositif, Mme Gillot sera sans doute d’accord pour procéder à la rectification suggérée par notre collègue.
Vous aurez remarqué que je n’ai pas l’habitude de défendre des positions extrêmes. J’ai mes convictions, mais je pense qu’il vaut mieux avancer d’un petit pas que de ne pas avancer du tout. En outre, au regard de l’application de la règle de l’entonnoir – souvent évoquée par la commission – par le Conseil constitutionnel, il est important d’adopter cette disposition, quitte à en améliorer l’assise juridique par la suite.
Je remercie Mme Procaccia d’avoir suggéré cette rectification à laquelle je souscris tout à fait.
Cette proposition fait son chemin depuis déjà quelques mois. Nous avons travaillé avec les organisations étudiantes, ainsi qu’avec certaines filières professionnelles qui embauchent des étudiants. Ces dernières ont fait un pas pour améliorer les conditions d’études de leurs salariés. Certaines vont même jusqu’à l’annualisation et accordent aux salariés étudiants, dans le contrat de travail, des congés rémunérés pour la préparation de leurs examens.
Comme l’ont dit M. le ministre et Mme Bricq, nous pourrons mettre à profit le temps de la navette pour parvenir au bon équilibre et améliorer la qualité de vie et les chances de réussite des étudiants obligés d’exercer une activité salariée pour financer leurs études. Il ne s’agit d’ailleurs pas nécessairement d’un handicap : si l’emploi est en rapport avec les études poursuivies, ce peut être un stimulant intéressant. Il s’agit surtout d’éviter que les emplois salariés ne concurrencent ces mêmes études.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 627 rectifié bis, présenté par Mme D. Gillot, M. Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, et ainsi libellé :
Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour la préparation directe d’une épreuve, un étudiant justifiant d’une inscription valide et en cours au sein d’un établissement préparant à l’obtention d’un diplôme d’enseignement supérieur, a droit à un congé supplémentaire de cinq jours ouvrables par tranche de soixante jours ouvrables travaillés prévus par son contrat de travail.
Ce congé est situé dans le mois qui précède les épreuves. Il s’ajoute au congé payé prévu à l’article L. 3141-1 du code du travail et s’il y a lieu, au congé annuel pour les salariés de moins de vingt et un ans prévu à l’article L. 3164-9 du même code.
Quel est l’avis de la commission ?
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 104.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 554 rectifié ter, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 124-5 du code de l’éducation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les stages ou périodes de formation en milieu professionnel effectués au cours d’une année de césure, cette durée ne peut excéder douze mois.
« Une année de césure est une période de douze mois d’interruption accordée par l’établissement à l’usager au cours d’un cycle licence ou master sur la base d’un projet pédagogique. L’année de césure ne peut être effectuée en fin de cursus. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Nous avons adopté voilà peu une proposition de loi tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires dans laquelle figurent beaucoup de mesures déclaratives et de bonnes intentions, mais qui ne correspond pas à la réalité du terrain.
Un certain nombre des amendements que je vais présenter avaient déjà été défendus soit dans le cadre de cette proposition de loi, soit dans celui de la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, dite « loi ESR », ou s’inspirent de la loi Cherpion. L’objectif est de faciliter la vie des étudiants.
Cet amendement, qui vise à introduire une exception à l’année de césure, étant précisé que cette dernière ne pourra excéder douze mois, et les suivants ont été rédigés bien avant qu’interviennent un certain nombre de déclarations. Je ne songe pas, cette fois, à la commission Combrexelle, mais au Président de la République, qui a déclaré, mercredi ou jeudi dernier, être favorable aux années de césure. J’en suis heureuse : lors du débat sur la loi ESR, le rapporteur Jean-Pierre Godefroy et moi-même estimions que la vision par trop catégorique de l’année de césure allait beaucoup gêner les étudiants qui souhaitaient en bénéficier.
Le sous-amendement n° 1785, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement n° 554 rectifié ter
I. – Alinéa 4
Supprimer les mots :
ou périodes de formation en milieu professionnel
II. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
accordée par l’établissement à l’usager au cours d’un cycle licence ou master
par les mots :
d’un cursus accordée par l’établissement d’enseignement à un étudiant au cours du premier ou du deuxième cycle de l’enseignement supérieur
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Ce sous-amendement tend à apporter plusieurs modifications d’ordre rédactionnel à l’amendement que vient de présenter notre collègue Catherine Procaccia, auquel la commission est très favorable.
Il ne s’agit pas d’une modification de fond, mais de supprimer la référence aux périodes de formation en milieu professionnel, qui ne concernent que les lycées et pas l’enseignement supérieur, et de préciser la rédaction de la définition de l’année de césure. La conférence des grandes écoles, que nous avons reçue, a confirmé l’importance que revêt cette année de césure, laquelle ne pourra dépasser douze mois.
La durée maximale de stage de six mois, inscrite dans la loi, est particulièrement rigide – nous aurons la même discussion tout à l'heure à propos des stages de fin de master. C’est pourquoi nous souhaitons l’étendre à douze mois. La limite actuelle pénalise pour l’essentiel les étudiants de nos grandes écoles, mais aussi ceux de nos universités.
On voit l’importance de l’année de césure dans d’autres pays ; elle fait partie intégrante de la formation et participe du développement professionnel et estudiantin des jeunes.
Depuis 2011, la durée des stages effectués dans le même organisme d’accueil ne peut excéder six mois par année d’enseignement. La loi du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires a renvoyé à un décret la liste des formations pour lesquelles il peut être dérogé à cette durée pour une période de transition de deux ans. Le décret du 27 novembre 2014 a ainsi prévu une mesure dérogatoire pour les formations diplômantes de niveau master en cas d’interruption temporaire de la formation.
Vous proposez de revenir sur cet édifice pour traiter le cas particulier des grandes écoles d’ingénieur. Or le dispositif que j’ai évoqué fait l’objet d’un consensus de la part des partenaires sociaux et de nombre de représentants d’étudiants. En outre, certaines grandes écoles de commerce ainsi que les Instituts d’études politiques n’utilisent pas la formule du stage, mais celle du contrat d’apprentissage.
Les écoles d’ingénieurs seraient bien inspirées de suivre cet exemple. Rouvrir la question des stages nous conduirait à des débats sans fin sur la nature du stage, la validation du stage, le stage déguisé… Il s’agit d’un sujet à forte sensibilité politique – pour de bonnes raisons –, alors que le contrat d’apprentissage répond parfaitement à la problématique de l’année de césure.
À la lumière de ces explications, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
Un apprentissage et un stage sont différents. Leur statut juridique et les rémunérations ne sont pas les mêmes.
En 2009, j’ai présidé la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. C’est sur l’initiative du Sénat qu’a été introduite la rémunération obligatoire des stages de plus de deux mois. Depuis, j’ai toujours défendu les stagiaires. Or défendre les stagiaires, c’est aussi défendre le droit des étudiants à avoir un stage.
Les présidents d’université ont refusé d’établir des conventions de stage tant que le décret en question n’était pas pris. Résultat : près de 500 stages ont été annulés par les entreprises ! Cette situation n’est pas satisfaisante. C'est la raison pour laquelle nous préférons réintroduire ce dispositif dans la loi.
Par ailleurs, quid des étudiants qui voudraient d’eux-mêmes, en cours de scolarité, profiter d’une année de césure qui ne serait pas prévue dans le cursus scolaire ? Ils ne pourraient en bénéficier.
Je vous ai suivi à de nombreuses reprises, monsieur le ministre, mais cette fois, je ne le ferai pas.
L'amendement n° 552 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
A. - Après l'article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 124-5 du code de l'éducation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il peut être dérogé à cette règle, dans des conditions fixées par décret, au bénéfice des stagiaires qui interrompent momentanément leur formation afin d'exercer des activités visant exclusivement l'acquisition de compétences en liaison avec cette formation, ainsi que dans le cas des stages qui sont prévus dans le cadre d'un cursus pluriannuel de l'enseignement supérieur, ou encore compte tenu des spécificités des professions auxquelles destine la formation. »
II. - Le VI de l'article 1er de la loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires est abrogé.
B. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section ...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Cet amendement tend à revoir les cas de dérogations possibles à la durée maximale de six mois de stage qui seront précisés par décret. Il s’agit en fait de rétablir la rédaction de la loi Cherpion de 2011.
L'amendement n° 553 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au VI de l’article 1er de la loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014 tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Le délai de deux ans pour permettre aux établissements d’ajuster les maquettes de formation nous paraît un peu court. C'est la raison pour laquelle nous proposons de l’étendre à trois ans.
L’amendement n° 552 rectifié propose de revenir à la rédaction de la loi Cherpion de 2011, préférée à celle de la loi du 10 juillet 2014. Or le décret auquel renvoyait la loi Cherpion pour la fixation des conditions de dérogation à la durée de six mois n’a jamais été pris.
Cet amendement devrait être satisfait par l’adoption de l’amendement n° 232 rectifié, lequel sera présenté dans quelques instants. Dans ces conditions, madame Procaccia, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
La commission étant favorable à l’amendement n° 554 rectifié ter, qui tend à proposer une définition juridique de l’année de césure et à reconnaître une dérogation permanente au plafond de six mois par stage, et à l’amendement n° 232 rectifié, l’amendement n° 553 rectifié me semble avoir perdu sa raison d’être. C'est la raison pour laquelle je vous demande également de bien vouloir le retirer.
Par cohérence, le Gouvernement est défavorable à ces amendements
La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote sur l’amendement n° 554 rectifié ter.
Je partage l’avis de Mme Procaccia, et je voterai l’amendement n° 554 rectifié ter.
En pratique, il semble que la loi a mis en place un cadre rigide qui sape la confiance des établissements d’enseignement supérieur. Je parle d’« établissements d’enseignement supérieur » à dessein, car je ne crois pas que seules les grandes écoles soient gênées. Les universités, qui avancent dans la formation professionnelle, les contrats d’apprentissage et l’alternance sont également soumises à cette pression. Tout ce qui permettra d’assouplir le dispositif tout en garantissant que stage et apprentissage ou stage et emploi déguisé ne seront pas confondus favorisera le parcours préprofessionnel des étudiants.
Par contre, je pense que les établissements n’ont pas besoin d’une année supplémentaire pour se mettre en ordre de marche. Les choses ont déjà bien avancé, raison pour laquelle je ne voterai pas l’amendement n° 553 rectifié.
Madame Procaccia, les amendements n° 552 rectifié et 553 rectifié sont-ils maintenus ?
Les amendements n° 552 rectifié et 553 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 1785.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 104.
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
Je demande que les amendements n° 232 rectifié et 904 rectifié quater soient examinés par priorité.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
La priorité est de droit.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 232 rectifié, présenté par MM. Adnot, Karoutchi, Doligé, Bizet, P. Leroy, Laménie, Türk et Falco, est ainsi libellé :
Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 124-5 du code de l’éducation est complété par les mots : « et un an par année d'enseignement pour ceux effectués par les étudiants préparant des diplômes de grade de master ».
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Pour ne pas perdre de temps, je dirai simplement qu’il est défendu. Il sera, j’en suis certain, soutenu par la commission comme par le Gouvernement.
Sourires.
L'amendement n° 904 rectifié quater n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 232 rectifié ?
La conférence des grandes écoles nous a expliqué que les étudiants de master rencontraient parfois des difficultés à mener à bien leur travail en entreprise en six mois. Ils ont souvent besoin de deux ou trois mois supplémentaires, plus rarement d’un an, mais cette possibilité leur sera offerte. Notre objectif est que les étudiants sortent de leur cursus universitaire avec les meilleures armes.
La commission a donc émis un avis favorable.
Par cohérence, je demande le retrait de cet amendement.
L'amendement est adopté.
Sourires.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 104.
L'amendement n° 1264 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 8221-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Soit de pratiquer un recours abusif aux stages mentionnés à la section 4 du chapitre II du titre Ier du livre VI de la troisième partie du code de l’éducation. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement vise à définir l’abus de stage par une entreprise comme du travail illégal.
Nous proposons de réunir au sein de la notion de « recours abusif » l’ensemble des comportements qui sont aujourd’hui d’ores et déjà considérés comme des abus par la jurisprudence : recourir à un stage sur un vrai poste de travail, prévoir un stage d’une durée excessive, ne pas offrir de gratification au stagiaire, avoir recours à un nombre de stagiaires trop important par rapport à l’effectif de l’entreprise ou encore offrir un stage sans lien avec la formation par ailleurs suivie par l’étudiant.
La loi du 10 juillet 2014 a donné compétence aux inspecteurs du travail pour constater les infractions à la législation relative aux stages, notamment pour vérifier qu’aucune convention de stage n’a été conclue pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent. Considérant qu’il n’était pas nécessaire d’aller plus loin, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 1264 rectifié.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1263 rectifié, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre Ier du titre Ier du livre VI de la troisième partie du code de l’éducation est complété par un article L. 611-… ainsi rédigé :
« Art. L. 611-… - Aucune formation de l’enseignement supérieur ne peut prévoir une durée de stage supérieure à la durée de formation délivrée par l’établissement évaluée en semaines. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement tend à encadrer les abus constatés concernant la pratique de certains diplômes universitaires d’insertion professionnelle au sein des universités ou de certains organismes de formation privés qui délivrent des conventions de stage sans que ce stage soit accompagné d’un réel support de formation au sein de l’établissement.
Il convient d’interdire le conventionnement de stage dès lors que la durée prévue du ou des stages serait supérieure à la durée totale de la formation délivrée par l’université ou l’organisme de formation.
La loi du 10 juillet 2014 a également rendu obligatoire un volume pédagogique minimal et significatif de cours en accompagnement de tout stage. Elle devrait donc faire grandement diminuer la possibilité, pour les établissements d’enseignement, de créer des diplômes au contenu pédagogique nul visant simplement à délivrer des conventions de stage. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 1263 rectifié.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 557 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
A. – Après l'article 104,
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le troisième alinéa de l'article L. 124-6 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le montant de la gratification versée par l’organisme d’accueil dépasse le montant fixé en vertu du premier alinéa du présent article, la gratification versée est exonérée des cotisations patronales de sécurité sociale. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section ...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Il est souvent fait mention, avec raison, des problèmes financiers rencontrés par les étudiants. Or les stagiaires sont le plus souvent rémunérés au montant minimum, montant que le Sénat a d’ailleurs contribué à augmenter.
Certaines entreprises, compte tenu de la durée du stage ou de la compétence des stagiaires, pourraient pourtant envisager de proposer une meilleure rémunération. Cet amendement vise à les inciter à le faire en supprimant le coût supplémentaire qu’entraînerait une telle décision. Il me semble qu’un amendement similaire avait été adopté de concert avec nos collègues socialistes lors de l’examen de la loi de 2014.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Si elle comprend l’intérêt d’une telle exonération pour favoriser les stages, la commission s’est fixée comme ligne de conduite la responsabilité budgétaire. Certains de nos collègues, parmi lesquels M. Karoutchi
M. Karoutchi fait un signe de regret.
Nous préférons que les amendements de ce type soient examinés dans le cadre du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est pourquoi nous en demandons le retrait.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 555 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier, Cazeau et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 124-8 du code de l’éducation, après le mot : « fixé », sont insérés les mots : « par accord de branche ou, à défaut, ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
La loi fixe un plafond au nombre de stagiaires par entreprise. Ce nombre ne saurait pourtant être identique pour une grande société, pour une PME, voire pour une TPE. En outre, une start-up accueille beaucoup plus de stagiaires qu’une grande entreprise.
Au lieu de fixer un nombre rigide, fruit d’une approche idéologique, cet amendement vise à privilégier le dialogue social en laissant aux accords de branche le soin de se prononcer sur les capacités d’accueil d’un secteur économique.
La commission a émis un avis favorable. Il lui paraît en effet opportun d’autoriser les branches à fixer leur propre quota de stagiaires.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 104.
L'amendement n° 556 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 124-10 du code de l’éducation, les mots : « décret en Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « accord de branche ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Cet amendement vise à ce que le nombre maximum de stagiaires suivis par un même tuteur soit déterminé par un accord de branche plutôt que par un décret en Conseil d’État. L’encadrement d’un stagiaire dépend en effet du type de travail, du type de stagiaire et du type d’entreprise.
Comme le quota de stagiaires par entreprise, le quota de stagiaires par tuteur issu de la loi du 10 juillet 2014 devait être déterminé par un décret, qui est toujours attendu.
Toutefois, il existe des limites au nombre de stagiaires qu’une personne peut encadrer et accompagner dans des conditions garantissant le succès pédagogique et professionnel du stage. Peu importe le secteur d’activité ou le métier concerné, nul ne peut transmettre ses connaissances à un trop grand nombre de stagiaires simultanément, sauf à n’exercer aucune autre activité professionnelle. C’est pourquoi introduire une différenciation par branche sans conserver le recours subsidiaire au décret est susceptible de poser des difficultés. La commission demande donc le retrait de cet amendement.
Faire référence à un accord de branche plutôt qu’à un décret, dont on n’a effectivement toujours pas trouvé la trace, c’est peut-être pousser votre avantage un peu loin, ma chère collègue ! Dans certaines branches – cela concerne votre amendement précédent – comme les services, la publicité ou l’informatique, les stages sont renouvelés et multipliés.
Avec cet amendement, on change de secteur, mais je ne comprends pas la position de la commission : elle était favorable au précédent et elle est défavorable à celui-ci. Pour ma part, je suis défavorable aux deux : c’est simple, rigoureux et cohérent, dans la mesure où il s’agit du même sujet !
L'amendement n° 556 rectifié est retiré.
L'amendement n° 558 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
I. – Après l'article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 124-14 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « à l'organisation du temps de travail » ;
2° Les 1°, 2° et 3° sont abrogés.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section ...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Cet amendement concerne le temps de présence dans l’entreprise.
Il me semble préférable de renvoyer à la convention de stage la fixation des horaires, parce qu’elle est le fruit d’un accord tripartite et prend donc en considération la situation du stagiaire comme celle de l’entreprise. C’est par cet accord, et non par un statut rigide qui ne tiendrait pas compte des préoccupations respectives du stagiaire et de l’entreprise, que le temps de travail doit être fixé.
Depuis la loi du 10 juillet 2014, l’article L. 124-14 du code de l’éducation dispose que le stagiaire est soumis aux mêmes règles que les salariés de l’organisme d’accueil en matière de durées maximales quotidienne et hebdomadaire de présence, de présence de nuit, de repos quotidien, de repos hebdomadaire et de jours fériés.
Cet amendement, dans son objet, précise vouloir « renvoyer à la convention de stage la fixation de ces horaires ». Toutefois, son dispositif confirme que ce sont les règles relatives à l’organisation du temps de travail des salariés de l’organisme d’accueil qui doivent s’appliquer aux stagiaires, ce qui étend le champ des dispositions existantes. Ce seront bien ces règles qui s’appliqueront, et non celles de la convention de stage.
La commission ne saisit donc pas l’articulation entre le droit existant et la modification proposée. Dans cette incertitude, elle demande le retrait de l’amendement.
Puisqu’il n’est pas clair, je le retire. J’entendais simplement préciser que le temps de travail en vigueur dans l’entreprise peut être trop élevé pour un stagiaire, qui est là pour apprendre, et non pour travailler comme un salarié.
L'amendement n° 558 rectifié est retiré.
L'amendement n° 559 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Milon, Forissier et Longuet, Mme Cayeux et MM. Savary, Cambon et J. Gautier, est ainsi libellé :
A. – Après l’article 104
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 2° du I de l’article 1609 quinvicies du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … Les jeunes de moins de vingt-six ans effectuant un stage en entreprise tel que défini à l’article L. 124-1 du code de l’éducation et qui sont, à l’issue de leur stage, embauchés en contrat à durée indéterminée par cette même entreprise. »
II. – La perte de recettes résultant, pour les centres de formation d'apprentis et des sections d'apprentissage, du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section ...
Dispositions tendant au développement des stages
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
L'article 1609 quinvicies du code général des impôts institue une contribution supplémentaire à l'apprentissage au profit du Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage. Cette contribution est due par les entreprises de 250 salariés et plus, dont le nombre annuel moyen de salariés en contrat de professionnalisation ou d'apprentissage est inférieur à un seuil de 4 %.
Le présent amendement vise à favoriser la formation et l'embauche de jeunes en prenant en considération la situation des entreprises contraintes de verser la contribution supplémentaire à l’apprentissage parce qu’elles ne trouvent pas d’apprentis en raison de l’absence de filières de formation en alternance dans leur secteur d’activité. Il tend donc à permettre aux entreprises qui embauchent des stagiaires à l'issue de leur stage de les compter dans le calcul du quota de 4 % d’apprentis ouvrant droit à l'exemption de contribution.
Lors de l’examen de la loi de 2014, notre groupe s’était montré favorable à une telle prise en compte. La commission spéciale, pour sa part, n’est pas convaincue que l’on puisse assimiler un stagiaire, c’est-à-dire un étudiant de l’enseignement supérieur poursuivant une première expérience professionnelle dans le cadre de la préparation de son diplôme, à un jeune apprenti qui suit une voie de formation professionnelle initiale par alternance et apprend ainsi un métier.
Par ailleurs, plusieurs questions se posent : combien de temps le stagiaire embauché en CDI serait-il pris en compte parmi les alternants ? Durant l’année suivant son embauche ? Pendant deux ans ?
Enfin, l’adoption de cet amendement aurait un impact budgétaire sur le financement des CFA. En effet, depuis l’an dernier, le produit de la contribution supplémentaire à l'apprentissage n’est plus versé à l’État, mais directement à des CFA par l’entreprise insuffisamment impliquée dans le développement de l’alternance.
La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement. À titre personnel, je le voterai.
À la lecture de nos débats, on pourrait croire que nous ne procédons qu’à des ajustements techniques, que le dispositif fonctionne bien et qu’un jeune qui veut effectuer un stage dans le cadre de sa formation ne rencontre aucune difficulté. Or nous connaissons malheureusement beaucoup de cas où des jeunes que leur formation, notamment en BTS ou en bac professionnel, oblige à effectuer un stage ne trouvent pas d’entreprise pour les accueillir. Leur cursus de formation tout entier est compromis quand ils peinent à obtenir la conclusion d’une convention de stage.
Il est important de le souligner, sinon nos débats risquent d’être incompréhensibles pour quelqu’un d’extérieur, en particulier un jeune qui pourrait se dire : finalement, pourquoi est-ce que je ne trouve pas de stage ?
Cela étant, le problème est plus général, j’en conviens, et ce n’est pas maintenant que nous allons le régler. Je pense néanmoins qu’il va falloir se pencher sur le sujet, car il se présente à chaque rentrée.
Cet amendement vise des secteurs très ciblés : le conseil et l’audit. Or leurs conventions collectives sont celles qui sont le moins favorable aux salariés. Cela obère quand même la volonté de Mme Procaccia de favoriser les stages !
Ces entreprises seraient mieux inspirées d’organiser des formations en alternance de qualité en partenariat avec les régions. Ce serait le meilleur moyen de développer ces secteurs et d’avoir un personnel compétent. Je doute en tout cas que le recours aux stages améliore la situation.
Pour toutes ces raisons, je suis opposée à cet amendement.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 104.
TITRE IV
DISPOSITIONS FINALES
(Supprimé)
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 827 rectifié bis, présenté par MM. Cornano, Antiste, Desplan, J. Gillot, Karam, S. Larcher, Mohamed Soilihi et Patient, est ainsi libellé :
Après l’article 105 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le sixième alinéa de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° La première phrase est complétée par les mots : « et du territoire des collectivités régies par l’article 73 de la Constitution » ;
2° À la deuxième phrase, les mots : « des départements d’outre-mer, de Mayotte, » sont supprimés ;
3° À la dernière phrase, après le mot : « métropolitain », sont insérés les mots : « du territoire des collectivités régies par l’article 73 de la Constitution ».
La parole est à M. Jacques Gillot.
Cet amendement a pour objet, dans une logique comparable à l’article L. 711-22 du code monétaire et financier créé par l’article 16 de la loi relative à la régulation économique outre-mer, d’imposer des tarifs postaux équivalents pour le transport de colis compris entre deux et vingt kilos dans les départements régis par l’article 73 de la Constitution et le territoire hexagonal.
Une telle mesure a pour vocation de permettre, dans une logique de continuité territoriale, aux entreprises des départements d’outre-mer d’exporter plus facilement vers le territoire hexagonal et d’importer à moindre frais leurs intrants ainsi que de faciliter les échanges entre personnes physiques sur le territoire français.
L'amendement n° 1339 rectifié, présenté par M. Vergès, Mme Assassi, M. Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 105 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la deuxième phrase du sixième alinéa de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques, les mots : « des départements d’outre-mer, de Mayotte » sont supprimés.
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2016.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement, dont le premier signataire est M. Vergès, vise à réduire la discrimination dont souffrent aujourd’hui les populations d’outre-mer quant à l’accès au service postal universel.
Aux termes de la loi, « le service universel postal concourt à la cohésion sociale et au développement équilibré du territoire. Il est assuré dans le respect des principes d’égalité, de continuité et d’adaptabilité en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. Il garantit à tous les usagers, de manière permanente et sur l’ensemble du territoire national, des services postaux répondant à des normes de qualité déterminées. Ces services sont offerts à des prix abordables pour tous les utilisateurs ».
Or le principe d’égalité est balayé à l’alinéa 6 de l’article L. 1 du code des postes et des communications électroniques. Alors que les envois postaux à l’unité fournis par le prestataire du service universel postal sont proposés au même tarif sur l’ensemble du territoire métropolitain, cet alinéa cautionne les inégalités vis-à-vis des outre-mer. Ainsi, « le tarif appliqué aux envois de correspondance à l’unité en provenance et à destination des départements d’outre-mer, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, des îles Wallis et Futuna et des Terres australes et antarctiques françaises est celui en vigueur sur le territoire métropolitain lorsque ces envois relèvent de la première tranche de poids. Il en va de même des envois de correspondance à l’unité relevant de la première tranche de poids en provenance du territoire métropolitain ou des collectivités précédemment mentionnées et à destination de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie ».
Concrètement, à destination de l’outre-mer, les prix sont les mêmes qu’en France métropolitaine pour les lettres de moins de vingt grammes, mais il en revient beaucoup plus cher au-dessus de ce seuil. La Poste désigne ce surcoût du nom de « complément d’affranchissement aérien ».
Le fait d’utiliser l’avion pour transporter un courrier de la métropole vers les outre-mer et réciproquement représente-t-il un surcoût pour La Poste ? On peut en douter à la lecture de l’avis n° 2012-0206 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes : « S’agissant de l’offre outre-mer, l’Autorité prend note des évolutions constatées en ce qui concerne la marge brute, mais constate que cette dernière reste 2, 5 fois supérieure à celle de l’offre métropole en 2010. Cet écart de marge brute apparaît d’autant plus inapproprié que les tarifs de l’offre outre-mer sont sensiblement plus élevés que ceux de l’offre métropole. […], l’Autorité estime qu’une stabilité des tarifs de l’offre outre-mer est souhaitable, dès lors qu’elle contribuerait à réduire l’écart entre les tarifs de l’offre outre-mer de ceux de l’offre métropole. »
Pourtant, les tarifs postaux vers ou depuis les outre-mer ont évolué de la même manière que les tarifs postaux à l’intérieur du territoire hexagonal. L’amendement vise donc à faire disparaître cette injustice.
Ces deux amendements ont quasiment le même objet, à savoir l’accès au service postal universel.
L’amendement n° 827 rectifié bis tend à aligner les tarifs postaux pour les plis et les colis jusqu’à vingt kilos entre les départements et régions d’outre-mer, d’une part, et le territoire hexagonal, d’autre part. Son coût serait toutefois loin d’être négligeable pour La Poste : de l’ordre de 70 millions d’euros. Comme la mission de service universel n’est pas compensée par l’État, ce coût pèserait in fine sur l’entreprise, sauf à ce qu’elle le répercute sur les usagers à travers une augmentation des tarifs métropolitains. C’est la raison pour laquelle, d’une façon générale, la péréquation tarifaire entre l’outre-mer et la métropole, si elle existe pour les lettres, n’a jamais été mise en place pour les colis. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 1339 rectifié vise à « réduire la discrimination dont souffrent aujourd’hui les populations d’outre-mer quant à l’accès au service postal universel ». Or il nous semble que son dispositif va complètement à l’encontre de cet objectif très légitime. En effet, il supprime l’égalité tarifaire qui existe aujourd’hui pour les envois de correspondance à l’unité en provenance et à destination des départements d’outre-mer relevant de la première tranche de poids. Même si l’amendement était rédigé différemment, la commission ne pourrait y être favorable pour les raisons déjà exposées précédemment.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Non modifié
I. –
Supprimé
II. – Au 5° de l’article L. 910-1 du code de commerce, les références : « et L. 751-1 à L. 761-11 » sont remplacées par les références : «, L. 751-1 à L. 752-26 et L. 761-1 à L. 761-11 ». –
Adopté.
I. – Le chapitre III du titre II du livre III du code du travail applicable à Mayotte est ainsi rétabli :
« CHAPITRE III
« AUTRES CONTRATS DE TRAVAIL AIDÉS
« Section 1
« Contrat relatif aux activités d’adultes-relais
« Sous-section 1
« Objet
« Art. L. 323-1. – Le contrat relatif aux activités d’adultes-relais a pour objet d’améliorer, dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les autres territoires prioritaires des contrats de ville, les relations entre les habitants de ces quartiers et les services publics, ainsi que les rapports sociaux dans les espaces publics ou collectifs.
« Il donne lieu :
« 1° À la conclusion d’une convention entre l’État et l’employeur dans les conditions prévues à la sous-section 2 ;
« 2° À la conclusion d’un contrat de travail entre l’employeur et le bénéficiaire de la convention dans les conditions prévues à la sous-section 3 ;
« 3° À l’attribution d’une aide financière dans les conditions prévues à la sous-section 4.
« Sous-section 2
« Convention
« Art. L. 323-2. – L’État peut conclure des conventions ouvrant droit au bénéfice de contrats relatifs à des activités d’adultes-relais avec :
« 1° Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale, ainsi que leurs établissements publics ;
« 2° Les établissements publics de santé ;
« 3° La société immobilière de Mayotte ;
« 4° Les organismes de droit privé à but non lucratif ;
« 5° Les personnes morales de droit privé chargées de la gestion d’un service public.
« Sous-section 3
« Contrat de travail
« Art. L. 323-3. – Le contrat de travail relatif à des activités d’adultes-relais peut être conclu avec des personnes âgées d’au moins trente ans, sans emploi ou bénéficiant, sous réserve qu’il soit mis fin à ce contrat, d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi et résidant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ou dans un autre territoire prioritaire des contrats de ville.
« Art. L. 323-4. – Le contrat relatif à des activités d’adultes-relais est un contrat de travail de droit privé à durée indéterminée ou à durée déterminée conclu en application du premier alinéa de l’article L. 122-1-1 dans la limite d’une durée de trois ans renouvelable une fois.
« Les collectivités territoriales et les autres personnes morales de droit public mentionnées à l’article L. 323-2, à l’exception des établissements publics industriels et commerciaux, ne peuvent conclure que des contrats de travail à durée déterminée, dans les conditions mentionnées à la présente section.
« Le contrat à durée déterminée comporte une période d’essai d’un mois renouvelable une fois.
« Art. L. 323-5. – Sans préjudice des cas prévus à l’article L. 122-10, le contrat de travail relatif à des activités d’adultes-relais peut être rompu, à l’expiration de chacune des périodes annuelles de son exécution, à l’initiative du salarié, sous réserve du respect d’un préavis de deux semaines, ou de l’employeur, s’il justifie d’une cause réelle et sérieuse.
« Dans ce dernier cas, les dispositions relatives à l’entretien préalable au licenciement, prévues aux articles L. 122-27, L. 320-11 à L. 320-13 et L. 320-38, et celles relatives au préavis, prévues à l’article L. 122-19, sont applicables.
« Art. L. 323-6. – L’employeur qui décide de rompre le contrat du salarié pour une cause réelle et sérieuse notifie cette rupture par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Cette lettre ne peut être expédiée au salarié moins de deux jours francs après la date fixée pour l’entretien préalable. La date de présentation de la lettre fixe le point de départ du préavis.
« Art. L. 323-7. – Le salarié dont le contrat est rompu par son employeur dans les conditions prévues à l’article L. 323-5 bénéficie d’une indemnité calculée sur la base de la rémunération perçue.
« Le montant retenu pour le calcul de cette indemnité ne peut cependant excéder le montant perçu par le salarié au titre des dix-huit derniers mois d’exécution de son contrat de travail. Son taux est égal à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié.
« Art. L. 323-8. – La méconnaissance par l’employeur des dispositions relatives à la rupture du contrat de travail à durée déterminée prévues à la présente sous-section ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi.
« Il en est de même lorsque la rupture du contrat intervient à la suite du non-respect de la convention mentionnée à l’article L. 323-2 ayant entraîné sa dénonciation.
« Sous-section 4
« Aide financière
« Art. L. 323-9. – Les employeurs mentionnés à l’article L. 323-2 bénéficient d’une aide financière de l’État.
« Cette aide n’est pas imposable pour les personnes non assujetties à l’impôt sur les sociétés.
« Cette aide ne peut être cumulée avec une autre aide de l’État à l’emploi.
« Sous-section 5
« Dispositions d’application
« Art. L. 323-10. – Un décret détermine les conditions d’application de la présente section. »
(nouveau). – À l’article L. 5134-102 du code du travail, les mots : « soit d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi, soit d’un contrat d’avenir » sont remplacés par les mots : « d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi ». –
Adopté.
II §
(Non modifié)
Pour chaque ordonnance prévue par la présente loi, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de cinq mois à compter de la publication de l’ordonnance. –
Adopté.
L'amendement n° 1511, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 711-8 du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au 1°, le mot : « applicable » est remplacé par les mots : « régionale et le schéma régional d’organisation des missions ayant valeur contraignante » ;
2° Au 4°, après les mots : « schémas sectoriels », sont insérés les mots : « et le schéma régional d’organisation des missions » ;
3° Le 6° est ainsi rédigé :
« 6° Assurent, au bénéfice des chambres de commerce et d’industrie territoriales qui leur sont rattachées les fonctions d’appui et de soutien, ainsi que toute autre mission mutualisée figurant dans le schéma d’organisation, dans des conditions et des domaines précisés par décret en Conseil d’État ; ».
II. – Au second alinéa du 2° du I de l’article L. 711-10 du code de commerce, les mots : « une partie des fonctions de soutien mentionnées au 6° de l’article L. 711-8 » sont remplacés par les mots : « tout ou partie des fonctions mentionnées au 6° de l’article L. 711-8, à l’exception de la gestion des agents de droit public sous statut ».
La parole est à M. le ministre.
Les amendements que je vais présenter tendent à réformer les réseaux consulaires, à savoir les chambres de commerce et d’industrie, les CCI, et les chambres de métiers. Ils poursuivent deux objectifs : tirer les conséquences de la réforme territoriale, tout particulièrement de la création des nouvelles régions, et renforcer le mouvement de régionalisation des réseaux en levant un certain nombre d’obstacles juridiques.
Lors de l’examen du projet de loi de finances, nous avons eu ici un débat compliqué sur les efforts budgétaires demandés aux réseaux consulaires, en particulier aux chambres de commerce et d’industrie. Ces efforts étaient justifiés au regard de la situation d’ensemble des finances publiques. Une fois que les CCI se seront restructurées – certaines en ont déjà pris l’initiative –, ces efforts seront beaucoup moins importants. Il importe donc ici de clarifier les règles.
Ces amendements font consensus au Sénat, comme en témoignent les sous-amendements déposés tant par l’opposition que par la majorité. Il n’y a rien d’étonnant à cela, puisque nous avons été largement inspirés par le rapport Bérit-Débat-Lenoir rédigé en 2014. Je parle donc sous le double contrôle de ses auteurs.
Sourires.
L’amendement n° 1511 vise à rendre obligatoire et prescriptif un schéma d’organisation des missions par CCI de région, ou CCIR. Un tel schéma doit être élaboré pour préciser et organiser clairement les missions à vocation régionale, en fonction des besoins de chaque région. Il aura pour objet de définir les mutualisations mises en œuvre, les économies escomptées et les conditions d’exercice des missions.
Le schéma d’organisation que cet amendement vise à instaurer sera prescriptif, au sens où il s’imposera à toutes les chambres rattachées à une même CCIR. Cette dernière pourra déléguer tout ou partie de ses missions d’appui et de soutien, ainsi que toute autre mission mutualisée, et mieux se concentrer ainsi sur sa dimension politique de définition de la stratégie régionale.
L'amendement n° 1514, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Le 2° de l’article L. 711-8 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « schéma directeur », est inséré le mot : « obligatoire » ;
b) Après la première occurrence des mots : « chambres territoriales », est inséré le mot : «, locales » ;
2° Le sixième alinéa de l'article L. 711-1 est ainsi rédigé :
« À l'initiative de la chambre de commerce et d'industrie de région ou à leur propre initiative, des chambres de commerce et d'industrie territoriales peuvent être réunies en une seule chambre territoriale dans le cadre des schémas directeurs mentionnés au 2° de l'article L. 711-8. Elles disparaissent au sein de la nouvelle chambre territoriale ou peuvent devenir des délégations de la chambre territoriale nouvellement formée et ne disposent plus dans ce cas du statut d'établissement public. » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 711-1-1, le mot : « Les » est remplacé par les mots : « À l’initiative de la chambre de commerce et d’industrie de région, ou à leur propre initiative, des » ;
4° À l’article L. 711-22, le mot : « Une » est remplacé par les mots : « À l’initiative de la chambre de commerce et d’industrie de région, ou à sa propre initiative, une » et les mots : « à sa demande et en conformité avec le » sont remplacés par les mots : « dans le cadre du » ;
5° L’article L. 712-4 est abrogé.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à rendre obligatoires et prescriptifs les schémas directeurs adoptés par les CCIR.
Les fusions de CCI ou la transformation de leur statut sont décidées par décret pris sur le fondement d’un schéma directeur régional. Ce schéma directeur a pour objet de fixer la carte régionale des CCI, leur nombre, leur circonscription et leur statut. Il est adopté par chaque CCIR à la majorité des deux tiers de ses membres et fait ensuite l’objet d’une approbation par voie d’arrêté ministériel. Toutefois, en l’état actuel du droit, ce processus de fusion ou de transformation peut être entravé par des CCI, y compris lorsque celles-ci sont minoritaires au sein de leur région. Le code de commerce prévoit notamment que seules les CCI qui le souhaitent peuvent fusionner.
L’amendement tend à modifier le code sur ce point afin de préciser le caractère obligatoire du schéma directeur et de le rendre opposable à tous les établissements concernés, à la condition que les deux tiers des membres de la CCIR l’adoptent.
Par coordination, les dispositions relatives aux modalités de création d’une CCI territoriale, de fusion d’une CCI territoriale avec sa CCI de région, de rattachement et de transformation d’une CCI territoriale en CCI locale dépourvue de personnalité morale sont également modifiées.
Enfin, toujours par souci de coordination, l’interdiction d’emprunter opposée aux CCI territoriales qui n’adoptent pas ou ne mettent pas en œuvre le schéma directeur doit être supprimée, ces formalités devenant sans objet.
L'amendement n° 1509, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les trois premières phrases du second alinéa du III de l’article L. 713-12 du code de commerce sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Chaque chambre de commerce et d’industrie territoriale, locale ou départementale d’Île-de-France est représentée au sein de la chambre de commerce et d’industrie de région à laquelle elle est rattachée à due proportion de son poids économique. Lorsque le nombre de chambres de commerce et d’industrie territoriales, locales ou départementales d’Île-de-France rattachées à une même chambre de commerce et d’industrie de région est égal à deux, il peut être dérogé à cette règle par décret. »
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement a pour objet de supprimer le plafond de représentation d’une CCI au sein de la CCIR. En effet, chaque CCI dispose d’un nombre de sièges au sein de la CCIR qui est fonction de son poids économique dans la circonscription régionale. Il est calculé sur le fondement des bases fiscales, du nombre de ressortissants et du nombre de salariés. Jusqu’à présent, aucune CCI ne pouvait disposer de plus de 40 % des sièges de la CCIR, sauf dans le cas où une même région ne comportait que deux CCI, comme pour la Corse.
Il est apparu que cette limitation constituait un frein à certains projets de regroupements ambitieux de CCI, projets qui étaient susceptibles d’entraîner des économies grâce à un effort de rationalisation rendu possible par la réduction du nombre de CCI. Dans cette perspective, et en considération des efforts budgétaires demandés par ailleurs aux CCI, cette limitation doit être supprimée afin de permettre aux CCI d’être représentées au sein de leur CCIR à leur juste poids économique.
Dans sa sagesse, si je puis dire, le Gouvernement n’a souhaité maintenir qu’une seule exception à cette mesure pour les CCIR auxquelles ne seraient rattachées que deux CCI. Pour ces CCIR, il peut en effet être nécessaire d’écarter le seul critère du poids économique de chaque chambre et, par suite, de fixer la répartition des sièges par décret. Ainsi, le même nombre de sièges a été attribué à chacune des deux CCI rattachées à la CCIR de Corse.
L'amendement n° 1516, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par dérogation aux articles L. 713-1 et L. 713-5 du code de commerce, les assemblées générales des chambres de commerce et d’industrie de région et territoriales créées par décret après l’entrée en vigueur de la présente loi et avant le 31 décembre 2015 peuvent, à la demande du ou des présidents des chambres de commerce et d’industrie de région concernées, être installées sans procéder à des élections à une date fixée par leur décret de création qui ne peut aller au-delà du 1er janvier 2016. Les établissements ainsi fusionnés sont dissouts à cette même date.
Les assemblées générales des établissements ainsi installés sont composées, par dérogation aux dispositions du II et du III de l’article L. 713-12 du code de commerce et jusqu’au prochain renouvellement général des membres des chambres de commerce et d’industrie, des membres élus en exercice des établissements dissouts ci-dessus. Au sein de la nouvelle chambre, chaque membre dispose d’un nombre de voix calculé proportionnellement au poids économique résultant de l’étude économique réalisée à l’occasion du dernier renouvellement de la chambre dans laquelle il a été élu. Les membres des chambres de commerce et d’industrie territoriales fusionnées, siégeant également à la chambre de commerce et d’industrie de région, conservent leur siège au sein de l’assemblée générale de la chambre de commerce et d’industrie de région.
Le taux annuel de taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises voté, dans les conditions prévues à l’article 1600 du code général des impôts, par les chambres de commerce et d’industrie de région créées à l’issue d’une fusion, ne peut excéder le taux moyen, voté l’année précédente, de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises des chambres de commerce et d’industrie de régions fusionnées pondéré par leurs bases de taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement tend à permettre aux CCI qui ont prévu de fusionner de mettre en place leur nouvelle organisation dès le 1er janvier 2016, si elles le souhaitent, sans attendre les élections consulaires prévues à la fin de l’année 2016. Il s’agit d’une faculté offerte aux CCI de s’organiser librement pour anticiper lesdites élections et pour réaliser, là encore, des économies et procéder aux réorganisations qui auraient été, de toute façon, décidées avant ces élections.
L'amendement n° 1508, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Toutes les chambres de commerce et d’industrie de région adoptent avant le 31 octobre 2015 leur schéma directeur mentionné au 2° de l’article L. 711-8 du code de commerce qui comporte, le cas échéant, les regroupements de chambres de commerce et d’industrie de région rendus nécessaires suite à l’entrée en vigueur de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
La parole est à M. le ministre.
L’objet de cet amendement est d’imposer l’adoption d’un nouveau schéma directeur avant le 31 octobre 2015. En effet, la réduction à treize du nombre des régions à compter du 1er janvier 2016 entraînera nécessairement une modification de la carte consulaire régionale. La circonscription des CCI de région est la même que celle des régions administratives. Seize CCIR sur vingt-deux sont ainsi appelées à fusionner entre elles pour ne plus former qu’une CCIR par nouvelle région. Dans cette perspective, les CCIR doivent adapter leur organisation et envisager, le cas échéant, le regroupement des CCI territoriales qui leur sont rattachées.
Or les fusions de chambres ou la transformation de leur statut sont décidées par décret pris sur le fondement du schéma directeur régional adopté par chaque CCIR, dont l’objet est de fixer la carte, le nombre de CCI et la circonscription. Dans cette perspective, et afin d’être opérationnelles dès le 1er janvier 2016, les réorganisations de CCI doivent être fixées dans les schémas directeurs qui devront être adoptés avant le 31 octobre 2015.
L'amendement n° 1669, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’artisanat est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article 5-1, après les mots : « chambres de métiers et de l’artisanat départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » ;
2° À l’article 5-4, après les mots : « chambres de métiers et de l’artisanat départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » et les mots : « à la chambre de métiers et de l’artisanat de région ou » sont supprimés ;
3° L’article 5-5 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « chambre de métiers et de l’artisanat de région ou la » sont supprimés ;
b) Au 2°, après le mot : « répartit », sont insérés les mots : «, en fonction notamment des projets de budget départementaux et interdépartementaux qui lui sont soumis, » et après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » ;
4° Au second alinéa de l’article 5-7 après les mots : « chambres de métiers et de l’artisanat départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » et le mot : « sections » est remplacé par les mots : « délégations départementales », et après les mots : « du III », sont insérés les mots : « et du III bis » ;
5° À l’article 7, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » et les mots : « aux chambres de métiers et de l’artisanat de région ou » sont supprimés ;
6° Au premier alinéa de l’article 8, les mots : « des sections » sont remplacés par les mots : « des délégations départementales » et après les mots : « des chambres de métiers et de l’artisanat départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales ».
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement a deux objets principaux : d’une part, il tend à introduire les chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales dans le code de l’artisanat et, d’autre part, il vise à supprimer la possibilité de rattachement d’une chambre de métiers et de l’artisanat départementale à une chambre de métiers et de l’artisanat de région. En effet, la nouvelle délimitation des régions nécessite une adaptation du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat. Ainsi, lorsque des circonscriptions administratives régionales sont regroupées, il ne doit plus subsister qu’une seule chambre de niveau régional.
Pour comprendre notre démarche, il faut rappeler que trois schémas d’organisation régionale coexistent aujourd’hui au sein du réseau : tout d’abord, la chambre régionale de métiers et de l’artisanat aux côtés de laquelle coexistent les chambres départementales dotées de la personnalité morale – il y a alors plusieurs établissements publics dans une région – ; ensuite, la chambre de métiers et de l’artisanat de région avec des sections départementales qui ne sont pas dotées de la personnalité morale – dans cette configuration, on n’a alors qu’un seul établissement public dans une région – ; enfin, un mélange des deux premiers schémas avec une chambre de métiers et de l’artisanat de région qui coexiste à la fois avec des sections départementales et des chambres de métiers et de l’artisanat départementales qui ont conservé leur personnalité morale.
Afin de respecter la volonté des élus des chambres, le présent amendement prévoit que si leur choix s’exprime en faveur d’une chambre régionale et que l’une des régions regroupées comporte une chambre de région, cette dernière devient une chambre interdépartementale rattachée à la nouvelle chambre régionale de métiers et de l’artisanat. Le but que vise notre amendement est donc de sortir du triptyque que je viens de décrire, car il s’agit d’un élément de complexité qui augmenterait l’hétérogénéité au sein des régions fusionnées, en particulier en ce qui concerne les personnalités morales.
Enfin, les dispositions du présent amendement favorisent la réduction du nombre d’établissements au sein du réseau, les économies d’échelle et les mutualisations qui l’accompagnent.
Les amendements n° 1511, 1514, 1509, 1516 et 1508 visent à apporter un certain nombre de précisions et de correctifs à la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services pour tenir compte, d’une part, des retours d’expérience et des enseignements tirés de cinq ans d’application de la réforme et, d’autre part, pour prendre en compte l’évolution plus générale du paysage institutionnel, en particulier le changement de la carte des régions.
Les mesures qui figurent dans ces cinq amendements semblent aller dans le sens des préconisations du rapport faisant le bilan de l’application de la loi du 23 juillet 2010, qui a été élaboré l’an dernier par nos deux collègues, MM. Jean-Claude Lenoir et Claude Bérit-Débat. L’une de leurs principales recommandations consistait à demander que soient apportées des précisions aux textes relatifs à la définition et à la mise en œuvre de la stratégie régionale du réseau des chambres de commerce et d’industrie pour en accroître la cohérence et l’efficacité. En particulier, nos deux collègues demandaient que soit précisés, par voie réglementaire, la forme et le contenu de la stratégie régionale, ainsi que le contenu des schémas sectoriels, de façon à leur donner toute leur portée prescriptive.
Ces préconisations étaient fondées sur un double constat.
Premièrement, dans un contexte général de crise des finances publiques, le durcissement des conditions de financement des chambres de commerce et d’industrie les contraint à exploiter tous les gisements d’économies possibles, ce qui implique une capacité accrue à travailler ensemble à l’échelon régional.
Deuxièmement, l’analyse des modèles de régionalisation réussie qui se sont mis en place dans certaines régions, comme le Nord, la Normandie ou la Champagne-Ardenne, montre qu’il est possible de concilier les gains d’efficience liés à la définition de stratégies régionales avec le maintien d’une représentation et d’une action consulaire de proximité. Le renforcement des compétences des chambres de commerce et d’industrie de région ne se traduit pas fatalement par l’absence de prise en compte des spécificités des territoires les moins influents dans les instances régionales ou par une répartition régionale inéquitable ou inefficace de la ressource fiscale.
Pour toutes ces raisons, la commission spéciale a émis un avis favorable sur ces cinq amendements.
Quant à l’amendement n° 1669, qui concerne les chambres de métiers, la commission spéciale s’en remet à la sagesse du Sénat.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 106.
Je mets aux voix l'amendement n° 1514.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 106.
Je mets aux voix l'amendement n° 1509.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 106.
Je mets aux voix l'amendement n° 1516.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 106.
Je mets aux voix l'amendement n° 1508.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 106.
Je mets aux voix l'amendement n° 1669.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 106.
L'amendement n° 1670, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La fusion des chambres de métiers et de l’artisanat de niveau régional résultant des nouvelles circonscriptions instituées par les dispositions de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, intervient dans les conditions définies par le présent article.
Le choix de la forme de chambre de métiers et de l’artisanat de région ou de chambre régionale de métiers et de l’artisanat est décidé, au plus tard le 15 octobre 2015, par les établissements de niveau régional de la région constituée conformément aux dispositions du I de l’article 1er de la loi précitée.
Pour l’expression de ce choix, il est procédé au vote, à bulletin secret, des élus au sein de chaque représentation départementale de chaque assemblée générale régionale. La décision de cette chambre est prise à la majorité des représentations départementales représentant la majorité de leurs ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par l’article 1601 du code général des impôts. En cas d’égalité, le choix s’effectue à la seule majorité des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par l’article 1601 du code général des impôts. L’absence de choix au 15 octobre 2015 vaut décision d’instituer une chambre régionale de métiers et de l’artisanat.
II. – Dans les régions où le choix s’est exprimé en faveur du regroupement en chambre régionale de métiers et de l’artisanat et où l’une des régions regroupées comportait une chambre de métiers et de l’artisanat de région, il est substitué à cette dernière une chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale rattachée à la nouvelle chambre régionale de métiers et de l’artisanat. Cette chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale se compose d’autant de délégations départementales que de sections de la chambre de métiers et de l’artisanat de région à laquelle elle se substitue.
Les chambres de métiers et de l’artisanat départementales rattachées à la chambre de métiers et de l’artisanat de région à laquelle est substituée une chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale, ainsi que celles rattachées à la chambre régionale de métiers et de l’artisanat regroupée sont rattachées à la nouvelle chambre régionale de métiers et de l’artisanat.
Le nouvel établissement devient l’employeur des personnels des chambres régionales de métiers et de l’artisanat regroupées, y compris de l’ensemble des personnels qui occupent les fonctions exercées au niveau régional en application du IV de l’article 5-2 du code de l’artisanat.
III. – Dans les régions où le choix s’est exprimé en faveur d’une chambre de métiers et de l’artisanat de région, les chambres de métiers et de l’artisanat départementales des chambres régionales de métiers et de l’artisanat et des chambres de métiers et de l’artisanat de région regroupées, ainsi que les sections des chambres de métiers et de l’artisanat de région, deviennent des délégations départementales de la nouvelle chambre de métiers et de l’artisanat de région.
Le nouvel établissement devient l’employeur des personnels employés par les anciens établissements de la circonscription régionale.
IV. – Lorsque les circonscriptions des chambres de métiers et de l’artisanat de région et des chambres régionales de métiers et de l’artisanat sont maintenues dans leurs limites territoriales en vigueur au 31 décembre 2015, les chambres régionales de métiers et d’artisanat ont la faculté d’opter pour le choix de la chambre de métiers et de l’artisanat de région dans les conditions mentionnées au troisième alinéa du I du présent article. Il ne peut être institué une chambre régionale de métiers et d’artisanat en lieu et place d’une chambre de métiers et de l’artisanat de région. Les chambres de métiers et de l’artisanat de région sont exclusivement composées de délégations départementales à compter du 1er janvier 2016.
V. – Pendant la période allant du 1er janvier 2016 à la date du renouvellement électoral des chambres de métiers et de l’artisanat :
1° Le nombre d’élus régionaux par département des chambres de métiers et de l’artisanat de région ou des chambres régionales de métiers et de l’artisanat de Bretagne, Centre, Corse, Île-de-France, Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur reste inchangé ;
2° Dans les régions suivantes, le nombre d’élus régionaux par département est ainsi fixé :
- Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine : 9 ;
- Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes : 7 ;
- Bourgogne et Franche-Comté : 11 ;
- Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées : 7 ;
- Basse-Normandie et Haute-Normandie : 18 ;
- Nord - Pas-de-Calais et Picardie : 18 ;
- Auvergne et Rhône-Alpes : 7 ;
3° Le nombre d’élus régionaux par département des chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales est fixé sur ces mêmes bases.
VI. – Par dérogation aux dispositions du III de l’article 5-2 du code de l’artisanat, les dispositions du présent article sont applicables aux établissements du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat jusqu’au prochain renouvellement général des membres de ces établissements suivant la publication de la présente loi.
VII. – L’assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat coordonne la mise en œuvre de la réforme des chambres de métiers et de l’artisanat en apportant notamment l’appui nécessaire au bon fonctionnement du réseau, jusqu’au prochain renouvellement général des membres de ces établissements.
VIII. – Les établissements résultant des choix exprimés au présent article sont créés à compter du 1er janvier 2016 par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l’artisanat.
Les modalités d’organisation et de fonctionnement des établissements institués en application de cet article sont fixées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d’État.
La parole est à M. le ministre.
Il s’agit de définir les mécanismes d’adaptation du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat à la nouvelle carte régionale, qui implique la fusion de plusieurs chambres à l’échelon régional.
L’amendement n° 1669 visait à rationaliser les personnalités juridiques au sein des nouvelles régions. Le présent amendement prévoit un mécanisme fixant les modalités de choix de la forme juridique des établissements de niveau régional du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat. Ces choix interviendront selon le principe du libre choix des élus, préalablement à l’organisation des élections consulaires qui sont prévues à la fin de l’année 2016.
En outre, par souci de coordination, cet amendement adapte le nombre d’élus des chambres issues des regroupements jusqu’aux élections consulaires, confie à l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat, l’APCMA, la compétence de coordonner la mise en œuvre de la réforme jusqu’au prochain renouvellement général des membres du réseau et précise les conditions d’application de ces dispositions transitoires dans le temps. Il permet enfin de coordonner ces dispositions avec les autres modifications, pérennes celles-ci, du code de l’artisanat qui font l’objet des amendements n° 1669 et 1671. Les mesures proposées ici sont donc de nature exceptionnelle et transitoire.
Je suis saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 1798 rectifié bis est présenté par MM. Lenoir, Karoutchi et Longuet et Mme Gruny.
Le sous-amendement n° 1801 rectifié est présenté par Mme Bricq et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
Amendement n° 1670
1° Alinéa 4
Remplacer les mots :
par les établissements de niveau régional
par les mots :
par les élus des chambres de métiers et de l’artisanat départementales et des chambres de métiers et de l’artisanat de région
2° Alinéa 5, deux premières phrases
Remplacer ces phrases par un alinéa ainsi rédigé :
Il est procédé au vote, à bulletin secret, des élus de chaque chambre de métiers et de l’artisanat départementale et de l’ensemble des sections de chaque chambre de métiers et de l’artisanat de région, le choix exprimé par l’ensemble des sections étant pondéré du nombre de départements correspondant. La décision est prise à la majorité des choix exprimés représentant la majorité des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par l’article 1601 du code général des impôts.
3° Après l’alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Pour l’application du III à la région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, le choix exprimé par les chambres de métiers régies par les articles 103 à 103l du code professionnel local du 26 juillet 1900 pour l’Alsace et la Moselle, maintenu en vigueur par la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, est pondéré du nombre de départements et des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Le regroupement choisi est opéré sous réserve des dispositions régissant les chambres de métiers des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
4° IV, dernière phrase
Remplacer les mots :
à compter du
par le mot :
au
La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour présenter le sous-amendement n° 1798 rectifié bis.
Tout d’abord, je tiens à préciser que j’avais déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40. Je remercie donc le Gouvernement de l’avoir ressuscité.
Ensuite, à titre d’observation, je souhaite exprimer un doute quant à l’opportunité de créer une situation transitoire en attendant les élections consulaires de 2016. N’aurait-il pas mieux valu attendre tout simplement ces élections pour mettre en œuvre le nouveau dispositif ? Je me contente de poser cette simple question après avoir entendu un certain nombre de représentants de chambres de métiers.
Par mon sous-amendement, je ne souhaite pas « calamistrer » l’amendement du Gouvernement mais y apporter quelques précisions d’ordre juridique, qui, à mon avis, ne peuvent que l’enrichir.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter le sous-amendement n° 1801 rectifié.
Il s’agit d’adapter le dispositif proposé, notamment pour la grande région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine.
L’amendement n° 1670, tout comme les amendements n° 1671 et 1672 qui viendront ensuite en discussion, ne soulève a priori guère d’objections, d’autant que l’on nous a assuré que le dispositif était non seulement consensuel, mais qu’il avait en outre suscité une approbation unanime au sein du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat. Reste que l’on nous a également indiqué que l’adaptation du réseau des chambres de métiers avait suscité des objections et des doutes sur les conséquences directes ou indirectes d’un tel dispositif.
Je résumerai ainsi les deux interrogations principales qui subsistent : d’une part, comme l’a dit M. Lenoir à l’instant, nous restons très attachés aux garanties de pluralisme. Or nous voudrions obtenir la certitude que ce regroupement, qui doit intervenir avant les prochaines élections consulaires, ne s’accompagnera pas d’une atteinte portée à cette dimension essentielle. Comme vous le savez, un regroupement peut s’apparenter à un redécoupage. Il est donc légitime de s’interroger sur ses effets électoraux. Par conséquent, la commission spéciale souhaite que ces doutes soient levés.
D’autre part, si l’on souhaite aller au bout de la logique d’adaptation à la nouvelle architecture territoriale, on pourrait réfléchir à la prise en compte des nouvelles compétences conférées aux métropoles en matière de développement économique et social dans l’organisation des réseaux consulaires.
Pour l’ensemble de ces raisons et compte tenu de ces interrogations, la commission spéciale s’en remet à la sagesse du Sénat.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les sous-amendements identiques n° 1798 rectifié bis et 1801 rectifié ?
Ces deux sous-amendements identiques visent, en premier lieu, à faire participer l’ensemble des élus du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat au choix de la forme juridique des nouvelles chambres régionales, que l’amendement n° 1670 réserve aux seuls élus des établissements de niveau régional. Compte tenu de l’ampleur de la réforme territoriale en cours et de ses répercussions sur l’ensemble du réseau, l’élargissement à l’ensemble des élus consulaires du choix de la forme juridique de la future chambre régionale est de nature à renforcer le caractère démocratique et la légitimité des décisions qui seront prises par les élus.
Les sous-amendements visent, en second lieu, à tirer les conséquences du statut particulier des chambres de métiers et de l’artisanat d’Alsace et de Moselle, régies par des dispositions dérogatoires issues du droit local ; il s’agit de faire participer au choix de la forme juridique de la future chambre régionale d’Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne les élus des trois chambres de métiers et de l’artisanat du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
Je ne puis que souscrire à ces propositions et encourager le Sénat à adopter les sous-amendements identiques : prévoir dans le régime temporaire et exceptionnel que nous mettons en place l’association au processus de décision de tous les élus consulaires de chaque région assurera une transition aussi démocratique et transparente que possible, étant entendu que ces dispositions transitoires ne gêneront en rien la mise en place du futur dispositif pérenne.
Je mets aux voix les sous-amendements identiques n° 1798 rectifié bis et 1801 rectifié.
Les sous-amendements sont adoptés.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 106.
L'amendement n° 1671, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 5-2 du code de l’artisanat est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du I, les mots : «, après avis des chambres départementales rattachées, » sont supprimés ;
2° Au II, le mot : « devient » est remplacé par les mots : « est une » et les mots : « et exerce ses fonctions à une date fixée par décret » sont supprimés ;
3° Le III est ainsi rédigé :
« III. – Si la majorité des chambres de métiers et de l’artisanat d’une région représentant la majorité des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par l’article 1601 du code général des impôts le décide, elles se regroupent en une chambre de métiers et de l’artisanat de région.
« Pour l’expression de ce choix, il est procédé au vote, à bulletin secret, des élus au sein de chaque chambre de métiers et de l’artisanat départementale et de chaque chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale. Cette dernière dispose d’autant de voix que de délégations départementales qui la composent. En cas d’égalité, le choix s’effectue à la seule majorité des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par l’article 1601 du code général des impôts.
« La chambre de métiers et de l’artisanat de région se substitue à la chambre régionale de métiers et de l’artisanat et à l’ensemble des chambres de métiers et de l’artisanat départementales et interdépartementales qui y étaient rattachées. Elle est constituée d’autant de délégations départementales que de départements dans la région.
« Le nouvel établissement devient l’employeur des personnels employés par les anciens établissements de la circonscription régionale.
« Les chambres de métiers et de l’artisanat de région sont instituées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l’artisanat. » ;
4° Après le III, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Si des chambres de métiers et de l’artisanat départementales d’une même région le décident, elles se regroupent en une chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale. Pour l’expression de ce choix, il est procédé au vote, à bulletin secret, des élus au sein de chaque chambre de métiers et de l’artisanat départementale. Cette chambre se substitue aux chambres de métiers et de l’artisanat départementales qu’elle regroupe et est constituée d’autant de délégations départementales que de départements regroupés.
« Le regroupement entre chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales ou entre chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale et chambres de métiers et de l’artisanat départementales d’une même région intervient sur décision prise à la majorité des élus des établissements concernés. Pour l’expression de ce choix, la chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale dispose d’autant de voix que de délégations départementales qui la composent.
« Le nouvel établissement devient l’employeur des personnels des chambres de métiers et de l’artisanat départementales regroupées, à l’exclusion des personnels qui occupent les fonctions exercées au niveau régional en application du IV de cet article et qui relèvent de la chambre régionale de métiers et de l’artisanat. » ;
5° Au IV, le mot : « administratives » est supprimé.
La parole est à M. le ministre.
Je suis saisi de deux sous-amendements identiques.
Le sous-amendement n° 1799 rectifié quater est présenté par M. Lenoir, Mme Gruny et MM. Karoutchi et Longuet.
Le sous-amendement n° 1802 rectifié est présenté par Mme Bricq et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux sont ainsi rédigés :
Amendement n° 1671
Après l'alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Pour l’application du III à la région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, le choix exprimé par les chambres de métiers régies par les articles 103 à 103 l du code professionnel local du 26 juillet 1900 pour l’Alsace et la Moselle, maintenu en vigueur par la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, est pondéré du nombre de départements et des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Le regroupement choisi est opéré sous réserve des dispositions régissant les chambres de métiers des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour défendre le sous-amendement n° 1799 rectifié quater.
Je n’aurai pas beaucoup d’efforts à faire pour que ce sous-amendement soit bien compris. Il me paraît inspiré par le bon sens et, du reste, il est identique à celui que Mme Bricq a déposé. Il semble qu’un bel élan d’unanimité se profile !
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour défendre le sous-amendement n° 1802 rectifié.
Puisque nos collègues Jean-Claude Lenoir et Claude Bérit-Débat ont rédigé ensemble le rapport d’information que M. le ministre a mentionné, il ne surprendra personne que le groupe socialiste présente un sous-amendement identique à celui qui vient d’être défendu par M. Lenoir. Nous terminerons donc cet après-midi dans le consensus.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1671 et les sous-amendements n° 1799 rectifié quater et 1802 rectifié ?
Quel est l’avis du Gouvernement sur les sous-amendements n° 1799 rectifié quater et 1802 rectifié ?
Je me suis tenu coi lorsque M. le ministre a signalé le travail important accompli par notre collègue Claude Bérit-Débat, qui ne peut pas prendre part à notre débat puisqu’il le préside… Je tiens à souligner que nous avons été l’un et l’autre particulièrement sensibles à l’intérêt porté à nos travaux et aux suites qu’ils ont entraînées.
Je mets aux voix les deux sous-amendements identiques n° 1799 rectifié quater et 1802 rectifié.
Le s sous-amendement s sont adopté s .
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 106.
L'amendement n° 1672, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 106
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 45 de la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services est abrogé.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement de coordination vise à abroger l’article 45 de la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l’artisanat et aux services, rendu caduc par le nouveau dispositif qui a été adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 106.
Nous allons maintenant examiner les amendements précédemment réservés.
L'amendement n° 1743, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article 39 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Lorsqu’un projet bénéficie d’une autorisation d’exploitation commerciale en cours de validité obtenue avant le 15 février 2015 pour tout projet nécessitant un permis de construire, cette autorisation vaut avis favorable des commissions d’aménagement commercial. »
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à compléter le dispositif transitoire relatif à la procédure du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale pour couvrir les projets nécessitant un permis de construire qui bénéficient d’une autorisation en cours de validité obtenue avant le 15 février dernier. Quoique technique, la disposition proposée est importante pour des personnes qui connaissent aujourd’hui une situation d’incertitude juridique.
Le présent amendent a pour objet de limiter les risques juridiques consécutifs au retard avec lequel est intervenue, le 15 février dernier, l’entrée en vigueur d’un décret d’application de la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises.
Plus précisément, il s’agit de sécuriser les projets d’implantation ayant obtenu une autorisation d’exploitation commerciale entre le 18 décembre 2014, date d’entrée en vigueur de l’article 39 de cette loi, et le 15 février dernier. L’adoption de cet amendement dispenserait les porteurs de projet de redéposer un dossier pour obtenir une nouvelle autorisation. Cette mesure s’appliquerait dans une quarantaine de cas menacés par un risque de contentieux.
La commission spéciale s’interroge sur les conséquences d’une sorte de validation rétroactive des autorisations, en particulier sur le nombre de dossiers potentiellement concernés. En outre, j’ai été interrogée sur le sort des dossiers déposés à la commission d’aménagement commercial avant le 15 février dernier, mais sur lesquels cette commission n’a pas encore statué : sous quel régime juridique devra-t-elle se prononcer, et combien de dossiers ce cas de figure recouvre-t-il ?
Sous réserve que M. le ministre lui apporte les éclaircissements nécessaires, la commission spéciale s’en remettra à la sagesse du Sénat.
Je ne puis pas vous communiquer le nombre exact de dossiers concernés, puisqu’ils sont disséminés entre toutes les commissions d’aménagement commercial, mais les services de mon ministère évaluent leur nombre à une centaine.
Les porteurs de ces projets doivent-ils, lors du dépôt de leur demande de permis de construire, solliciter de nouveau une autorisation d’exploitation commerciale, conformément à la nouvelle procédure ? Une interprétation du décret du 12 février 2015 relatif à l’aménagement commercial conforme à l’esprit de la loi du 18 juin 2014 plaide en faveur d’une dispense de nouvelle demande d’autorisation. Reste que, dans le silence des textes, une incertitude subsiste, qui ne pourrait être levée que par le juge administratif ; l’incertitude juridique qui en résulte est indéniablement préjudiciable au pétitionnaire. C’est pourquoi le Gouvernement, répondant à la demande des organisations professionnelles représentatives, propose de clarifier la situation en confirmant les droits associés aux autorisations d’exploitation commerciale obtenues avant le 15 février dernier pour les demandes de permis de construire déposées postérieurement.
Si la détermination précise du nombre de dossiers concernés, qui est de l’ordre de la centaine, demeure difficile – je ne manquerai pas de communiquer cette donnée à la commission spéciale si mes services parviennent à l’établir –, les organisations professionnelles représentatives estiment que toutes les enseignes de la grande distribution pourraient bénéficier de cette mesure favorable à la sécurité juridique, donc à l’activité économique.
L'amendement est adopté.
L'article 10 ter est adopté.
L'amendement n° 1757, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 21
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le premier alinéa de l’article L. 612-2 du code de la sécurité intérieure est complété par les mots : « à l’exclusion du transport par les personnes exerçant l’activité mentionnée au 2° de l’article L. 611-1, dans les conditions des articles L. 613-8 à L. 613-11, des objets placés sous main de justice ».
II. – Le présent article est applicable en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.
La parole est à M. le ministre.
Grâce à la collaboration entre mon ministère, le ministère de l’intérieur et la commission spéciale, la rédaction initialement prévue pour l’article additionnel que cet amendement vise à insérer dans le projet de loi a été clarifiée. Cet article est destiné à permettre le transport d’objets placés sous main de justice dans des véhicules blindés et avec un équipage armé.
Je ne m’attarderai pas sur cette question dont nous avons déjà débattu ; je rappellerai simplement qu’il était jusqu’ici impossible de faire appel à une entreprise de transport de fonds pour le transport sécurisé de tout autre bien que ceux mentionnés à l’article L. 611-1 du code de la sécurité intérieure.
L’adoption de cet amendement de clarification permettra aux sept entreprises de transport de fonds qui opèrent des transports en véhicules blindés avec des équipages armés, et qui emploient au total 5 000 convoyeurs armés, de répondre à des sollicitations de plus en plus fréquentes, ce qui accroîtra leur activité, créera des emplois et libérera les agents publics, en particulier les gendarmes, qui sont aujourd’hui chargés d’accompagner le transport d’objets placés sous main de justice.
Le sous-amendement n° 1789 rectifié, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement n° 1757
Après l’alinéa 3
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
... . – Après le 4° de l’article L. 645-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Au premier alinéa de l’article L. 612-2, les références : “L. 613-8 à L. 613-11” sont remplacées par les références : “L. 613-8, L. 613-9 et L. 613-11” ; ».
... . – Après le 5° des articles L. 646-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Au premier alinéa de l’article L. 612-2, la référence : “à L. 613-11” est remplacée par la référence : “et L. 613-9” ; ».
... . – Après le 4° de l'article L. 647-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … Au premier alinéa de l’article L. 612-2, la référence : “à L. 613-11” est remplacée par la référence : “et L. 613-9” ; ».
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 1757.
Le sous-amendement n° 1789 rectifié opère une coordination avec le droit applicable en outre-mer.
Lorsqu’a été présenté, après l’article 9 quater, un premier amendement relatif au convoyage de fonds, nous avions déploré le manque d’informations sur les raisons et les conséquences du dispositif proposé, qui autorisait de manière générale le cumul d’activités de sécurité privée très différentes ; je rappelle que l’objet de cet amendement se résumait à une seule phrase.
Je pense que nous avons eu raison de prendre cette position, au vu de la précision beaucoup plus grande du présent amendement, qui se concentre sur le transport des scellés judiciaires. Compte tenu de ce ciblage, et puisque les conditions de droit commun applicables au convoyage de fonds sont préservées, la commission spéciale a émis un avis favorable sur l’amendement n° 1757, qui lui a paru utile et cohérent.
Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 1789 rectifié ?
Je remercie les services de M. le ministre pour le travail qu’ils ont accompli depuis le retrait par le groupe socialiste de son amendement n° 1467, qui méritait en effet d’être amélioré. Preuve que nous pouvons arriver à coproduire quand la cause est bonne.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.
L'amendement n° 1797, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 58 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le 6° de l’article L. 721-6 est complété par les mots : «, et exclut tout opérateur dont la certification a été non octroyée, suspendue ou retirée par l’organisme certificateur mentionné à l’article L. 721-9 » ;
2° Le 7° de l’article L. 721-7 est ainsi rédigé :
« 7° Les modalités et la périodicité des contrôles, le type d’organisme mentionné à l'article L. 721-9 en charge de leur réalisation, ainsi que les modalités de financement de ces contrôles. Les modalités comportent notamment les points de contrôle du produit et des éléments spécifiques de l’étiquetage ; »
3° L’article L. 721-9 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « d’évaluation de la conformité, », sont insérés les mots : « qui peuvent être soit des organismes d’inspection, soit des organismes de certification, » ;
b) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les organismes d’inspection effectuent les opérations de contrôle et transmettent leur rapport à l’organisme de défense et de gestion, qui décide des mesures sanctionnant les manquements.
« Les organismes de certification décident de l’octroi, du maintien ou de l’extension de la certification, ainsi que des mesures sanctionnant les manquements. »
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à clarifier, dans le dispositif de protection des indications géographiques portant sur les produits industriels et artisanaux, la possibilité pour les opérateurs de recourir à des organismes de certification ou d’inspection pour les contrôles du respect des cahiers des charges visés par l’article L. 721-9 du code de la propriété intellectuelle.
Cette clarification est nécessaire à la bonne mise en œuvre des indications géographiques et lève un blocage dans le dispositif issu de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation. En effet, elle laisse explicitement aux organismes de défense et de gestion la possibilité de choisir entre un contrôle effectué par des organismes d’inspection et un contrôle effectué par des organismes de certification, pour un cahier des charges d’indication géographique déterminé.
Cette clarification permet de s’aligner avec les pratiques existantes en matière d’indications géographiques protégées portant sur les produits agricoles, dans un souci de cohérence et d’harmonisation des dispositifs.
Sourires.
Cet amendement vise à clarifier la possibilité pour les opérateurs de recourir à des organismes de certification ou d’inspection pour ce qui concerne les contrôles du respect des cahiers des charges des indications géographiques du secteur non alimentaire, comme pour les appellations d’origine contrôlée.
La commission spéciale est très heureuse de donner un avis favorable sur cet amendement.
Exclamations sur les travées de l'UDI-UC.
Mme Nicole Bricq. Notre collègue Roger Karoutchi ne semble pas avoir compris cet amendement, mais il y est favorable…
Sourires.
Cet amendement est très important dans la procédure du contrôle des cahiers des charges, et Mme le corapporteur a très pertinemment établi un parallèle avec les indications géographiques alimentaires.
Comme vous le savez, la France a toujours défendu fermement ses indications géographiques ;…
… elles ont d’ailleurs été étendues dans le cadre de la loi relative à la consommation.
Les indications géographiques, qui constituent une notion européenne, ont d’ailleurs été reprises par d’autres pays, et nous y sommes très attachés dans les négociations commerciales – c’est toujours un point très délicat ! –, et nous les défendons avec acharnement. Aussi, je remercie le Gouvernement d’avoir proposé cet amendement.
Monsieur le président, au terme de l’examen de ce projet de loi – les explications de vote auront lieu demain, mais le temps sera contraint et le climat différent
Sourires.
À cette occasion, je veux remercier les services affectés à la commission spéciale, ainsi que les corapporteurs, qui ont tenu la même ligne – nous en parlerons demain ! – : ceux-ci n’ont pas toujours réussi à contenir les velléités des sénateurs de droite, …
… mais ils ont essayé de construire un texte, et nous verrons demain ce qu’il en adviendra.
Je remercie également nos collègues qui ont assisté, dans la mesure de leurs possibilités, à tous nos débats, ainsi que M. le ministre et les services de son ministère pour le travail important réalisé, mais j’aurai l’occasion d’y revenir demain.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que les explications de vote auront lieu demain après-midi. Pour l’heure, nous en sommes aux explications de vote sur l’amendement n° 1797.
La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je me sens obligé de dire à notre collègue Nicole Bricq, qui pense que je n’ai pas compris l’objet de cet amendement – elle sait au fond que tout cela n’est qu’un jeu !
Sourires.
Même si les explications de vote sur l’ensemble du projet de loi auront lieu demain, je tiens, moi aussi, à remercier M. le président de la commission spéciale, les corapporteurs et M. le ministre, car cela fait des semaines que nous sommes présents nuit et jour, parfois contraints…
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Si peu !
Sourires.
M. Roger Karoutchi. Toutefois, je tiens à dire que nous n’avons pas souvent vu un débat parlementaire de cette durée et de cette qualité. En effet, nos échanges ont toujours été respectueux. D’ailleurs, les corapporteurs et le président de la commission spéciale ont été héroïques !
Mme Dominique Estrosi Sassone rit.
Ils ont toujours tenu la même ligne, même si les membres de leur groupe politique les invitaient parfois à aller plus loin. Leur position a été cohérente avec la mission qui est la leur de réécriture d’un projet de loi, même si ce fut parfois à mes dépens : nombre des amendements que j’ai présentés n’ont pas été adoptés, surtout lorsque je les ai défendus brillamment, tandis que ceux que je n’ai pas défendus l’ont été… Voilà qui en dit long sur mes talents d’orateur !
Sourires.
Quels que soient nos conceptions et nos avis, je tiens à souligner que j’ai rarement vu un ministre aussi présent pendant trois semaines, nuit et jour – vous n’avez été que très rarement remplacé, monsieur le ministre ! –, avec une volonté d’expliquer et de convaincre, tout en ayant le souci permanent de la pédagogie. Vous n’avez pas toujours réussi à convaincre, monsieur le ministre, mais cela fait partie de la vie publique !
Les débats que nous avons eus honorent le Sénat, la commission spéciale et le Gouvernement. Si nous pouvions toujours avoir des discussions de cette qualité, cela honorerait, à mon avis, la classe politique, au sens large, et le Parlement.
M. Jean-Claude Lenoir. Je m’exprimerai, d’abord, sur l’amendement du Gouvernement.
Sourires.
En tant que représentant du monde rural, cet amendement me semble important. Comme je l’ai indiqué en commission, le recours aux indications géographiques protégées permet la valorisation et la protection des produits de l’agriculture. La France est, en effet, très attachée aux indications géographiques protégées, comme l’a souligné notre collègue Nicole Bricq, et ce, notamment, dans le cadre de l’accord conclu entre l’Union européenne et le Canada et dans le cadre de celui qui sera bientôt discuté entre l’Union européenne et les États-Unis. La volonté de la France de faire respecter les indications géographiques protégées l’a finalement emporté, et nous sommes d’ailleurs le pays européen à en avoir le plus à défendre.
Cela dit, je ne veux pas être un personnage malitorne. Aussi, je ne manquerai pas de formuler quelques observations au terme de ces débats qui nous ont réunis pendant plusieurs semaines.
Comme l’a déjà souligné mon collègue Roger Karoutchi, qui a traduit l’essentiel de mes sentiments, j’ai, moi aussi, beaucoup apprécié la qualité de nos débats, notamment le respect avec lequel les uns et les autres ont exprimé leur position, ce respect mutuel qui caractérise la Haute Assemblée.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.) Je ne veux pas minimiser les mérites des autres corapporteurs, mais je tenais à le souligner, d’autant que cette sénatrice est, je le rappelle, membre de la commission des affaires économiques !
Sourires.
J’ai une grande admiration pour le président de la commission spéciale et les corapporteurs, qui ont assumé leur charge non seulement dans l’hémicycle, mais aussi, en amont, en commission, dans le cadre des travaux préparatoires, qui sont inévitables et essentiels. Nos collègues ont vraiment été à la hauteur de la tâche. Je ne voudrais pas singulariser les mérites de l’un d’entre eux, mais l’une de nos collègues, élue depuis quelques mois seulement, a montré à quel point elle méritait la confiance des grands électeurs du département des Alpes-Maritimes. §
Nouveaux sourires.
Monsieur le ministre, je tiens à vous dire combien nous avons apprécié à la fois votre disponibilité, la patience dont vous avez fait preuve et votre souci de la pédagogie, qui a marqué l’essentiel de vos interventions.
Permettez-moi, en marge de ces débats, de vous adresser un autre compliment, qui vous surprendra : je vous remercie de ne pas avoir hésité à faire usage du latin !
Exclamations.
C’est une initiative tout à fait opportune au moment même où l’enseignement du latin est remis en cause. Vous avez voulu afficher, j’en suis persuadé, non seulement votre conviction, mais aussi la volonté que le latin continuât d’être enseigné dans nos établissements scolaires, fût-elle une langue morte.
M. Emmanuel Macron, ministre.In cauda venenum !
Sourires.
M. Jean-Claude Lenoir. Pour conclure, permettez-moi de reprendre cette adresse de Cicéron à Catilina : « Quae cum ita sint, Catilina, perge, quo coepisti... » Cela signifie : « Persévérez ! »
Mmes Valérie Létard et Elisabeth Doineau applaudissent.
Monsieur le ministre, non pas que nous nous soyons ennuyés avec vous – loin de là ! –, mais s’il était possible, à l’avenir, d’éviter d’examiner des textes regroupant une quinzaine de projets de loi différents, cela simplifierait l’organisation de nos travaux et encouragerait l’intérêt et la passion de chacun. Il me semble que tout le monde y gagnerait.
Je ne connais pas encore les statistiques – le service de la séance nous les communiquera –, mais le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques est l’un des textes ayant le plus occupé le Sénat, non pas en nombre d’heures, mais en nombre de semaines, à savoir presque quatre semaines. Certes, je ne suis pas le plus ancien, mais je n’avais encore jamais connu une telle situation.
C’est pourquoi il aurait été plus pertinent de scinder le texte en plusieurs volets thématiques ou en plusieurs parties différenciées : c’est la principale critique que l’on peut formuler à l’encontre de ce projet de loi.
Cela dit, j’ai, moi aussi, apprécié votre sens de la pédagogie, monsieur le ministre. En disant cela, je ne vous demande pas de nous proposer un nouveau projet de loi pour battre votre record ! §On vous connaît maintenant… À l’avenir, les textes pourront être plus courts !
Vous vous êtes toujours montré à l’écoute et, comme l’ont souligné mes collègues, vous avez toujours été présent. Par ailleurs, vous avez fait preuve de cohérence, ce qui est appréciable, car, parfois, certains ministres répondent un peu à côté, si je puis dire, même si ce terme est un peu exagéré. La passion et la technicité dont vous avez fait preuve sont rares.
Je remercie aussi les corapporteurs et le président de la commission spéciale, qui ont tout autant fait preuve de pédagogie. Encore ce matin, M. le président de la commission spéciale nous a explicité une situation un peu difficile, et, à sa façon, chaque corapporteur a toujours pris le temps de l’explication, même si, sur le fond, je ne peux être en accord avec toutes les positions défendues. Toutefois, je ne peux que souligner le dialogue instauré avec l’ensemble des sénateurs.
Enfin, je remercie les présidents de séance d’avoir animé les débats pendant ces quatre semaines, en nous laissant le temps de la discussion et en nous permettant d’achever l’examen de ce projet de loi un jour…
Sur le fond, on discutera de la loi Macron, mais, sur la forme, nous sommes satisfaits.
Le groupe UDI-UC est également satisfait de la tenue de nos débats. Je tiens, bien entendu, à saluer le travail et la mobilisation de l’ensemble des services du Sénat.
Je salue également l’important travail réalisé par le président de la commission spéciale et les corapporteurs, comme cela a déjà été souligné par mes collègues. C’est particulièrement remarquable eu égard à la densité du projet de loi et à la façon dont s’est construit le débat avec vous, monsieur le ministre, en vue d’améliorer le texte. Le travail préparatoire et les points de consensus, qui ont été nombreux, ont permis de faire évoluer ce projet de loi dans l’intérêt général. Même s’il subsiste, bien sûr, des différences de vision et des motifs d’insatisfaction de part et d’autre, une voie a été tracée au Sénat, qui ne peut que satisfaire chacun.
Comme cela a été souligné, un travail de cette qualité et l’état d’esprit ayant présidé à nos débats doivent nous inspirer pour la suite : chacun d’entre nous peut défendre ses idées, différentes et complémentaires, dans un débat de fond, très nourri. C’est à l’honneur du Parlement, et il n’est de meilleure défense du bicamérisme.
Sourires.
Nous n’avons jamais abusé de notre temps de parole, mon cher collègue, s’agissant de la défense de nos amendements ou des explications de vote.
Je ne reviendrai pas sur le fond, car nous aurons l’occasion d’en parler demain après-midi, d’autant que je ne créerai pas la surprise…
Néanmoins, pour avoir, comme d’autres ici, participé à la quasi-totalité des débats du début à la fin, je dois dire que, moi aussi, j’en ai apprécié la teneur. J’aime le débat d’idées, et celles-ci n’ont pas manqué durant ces trois semaines, même si nous n’aboutissons pas au texte que nous souhaitions. Mais cela fait partie de la bataille d’idées.
Je tiens à remercier particulièrement l’ensemble du personnel du Sénat, qui a dû faire face aux mêmes contraintes que les nôtres, en manifestant une grande disponibilité, quelle que soit la mission de chacun.
Je remercie également Mmes les corapporteurs qui m’ont épatée chacune à leur façon, ainsi que M. le corapporteur, sans oublier M. le président de la commission spéciale, qui a fait preuve d’un certain talent en la matière.
Mes remerciements s’adressent aussi à vous, monsieur le ministre. Nous ne sommes pas d’accord sur un certain nombre de points, mais j’ai particulièrement apprécié votre disponibilité, votre sens de la répartie, vos colères aussi – étant moi-même capable de colères, la balle est au centre ! –, qui font aussi partie du débat d’idées, dès lors que cela s’accompagne du respect des individus. Pour ma part, je vous respecte, et je pense que la réciproque est vraie.
Ce débat a été long et, comme l’a dit notre collègue Pierre-Yves Collombat, il s’agissait d’un pari osé eu égard à la multitude de mesures très importantes qui nous sont proposées – je ne parlerai pas de texte « fourre-tout » – et qui auraient pu faire l’objet de plusieurs textes, nous donnant ainsi l’occasion de vous revoir, monsieur le ministre. §Je remercie, enfin, l’ensemble de vos collaborateurs.
Pour conclure, je me tournerai vers M. le ministre de l’intérieur qui vient de nous rejoindre pour l’inviter à relever un nouveau défi.
Mme Catherine Procaccia et M. Roger Karoutchi. Pas pendant trois semaines !
Sourires.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 58 quater.
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
Permettez-moi de dire quelques mots maintenant, car, conformément à la procédure, la commission spéciale ne pourra pas s’exprimer demain, et j’associe mes collègues corapporteurs à mes propos.
Monsieur le ministre, nous arrivons au terme de l’examen des articles et des amendements, avant le vote final qui interviendra demain.
Pour répondre au souhait de certains de nos collègues, je commencerai par vous livrer, comme de coutume, quelques éléments de statistique.
Nous avons passé quinze jours entiers, avec 130 heures de débat. Nous avons adopté en séance publique 280 amendements, qui s’ajoutent aux 347 amendements adoptés par la commission spéciale. C’est dire, monsieur le ministre, si le Sénat s’est emparé de votre texte pour y apporter sa marque. L’ensemble de nos débats se sont concrétisés par l’adoption de 627 amendements.
Je veux également rappeler que la commission spéciale s’est réunie vingt-sept fois et a débattu exactement quarante-neuf heures et cinquante-cinq minutes.
Je saisis cette occasion pour saluer le travail important accompli par les trois corapporteurs, en rappelant que l’Assemblée nationale avait choisi de nommer neuf corapporteurs. Mais la commission spéciale a convenu de l’intérêt de prévoir un nombre plus resserré au Sénat. Nos trois corapporteurs ont donc été triplement talentueux, sans établir aucune comparaison avec ceux de l’Assemblée nationale : je veux tout de même louer leur finesse, leur sagacité, leur résistance aussi, car, au fil des heures et des sujets, dont la très grande variété a fait le charme de votre texte, monsieur le ministre, …
Sourires.
… ils ont dû faire preuve d’une grande pertinence pour s’adapter. Ils ont d’ailleurs été magnifiquement soutenus par les personnels affectés à la commission spéciale et, plus globalement, par tous ceux qui ont contribué au déroulement de nos travaux. Qu’ils soient tous salués, car chacun – et pas seulement le sommet de la pyramide ! – contribue au travail de précision législative que nous réalisons.
Monsieur le ministre, il n’est pas simple de faire la loi. Il est encore plus compliqué d’y parvenir quand l’ambition affichée est celle que vous avez bien voulu donner à ce texte. Lorsque nous avons commencé nos travaux, nous avons souhaité rendre cette ambition un peu plus concrète, en veillant à atteindre l’objectif initial, à savoir relancer la croissance et l’activité.
Nous y avons largement contribué ; et quand je dis « nous », j’y associe les présidents et les membres de l’ensemble des groupes de la Haute Assemblée, qui ont tous apporté à ce débat la hauteur qui convenait.
En partant d’un texte dont j’avais déclaré qu’il était parfois un peu irritant, mais aussi enthousiasmant, on pouvait y voir des motifs d’insatisfaction ou d’engouement. Les échanges que nous avons eus ici avec vous, monsieur le ministre, ont toujours été courtois, parfois passionnés, mais toujours utiles et animés, je veux le dire, par le souci de l’intérêt général et la volonté de contribuer à écrire la loi le mieux possible, en vue de l’enrichir pour la rendre applicable.
Je remercie tous nos collègues ayant participé à ces discussions, particulièrement ceux qui ont siégé avec nous quelques nuits durant, dont une jusqu’au petit matin.
Monsieur le ministre, dans ce texte, vous avez sans doute apporté beaucoup de vous-même. La Haute Assemblée s’honore de la qualité de nos échanges, car vous avez peu posé le débat – je dirai même que vous ne l’avez pas fait du tout ! – en termes politiciens ou en opposant la majorité de l’Assemblée nationale et celle du Sénat. Vous avez très largement cherché, me semble-t-il, à adapter notre pays à la nouvelle donne internationale, la mondialisation et le développement des nouvelles technologies. Notre pays a besoin d’être dans le train de tête et d’abandonner des règles datant d’un autre siècle, car la compétition a changé ailleurs. Ce point a constitué l’essentiel de nos débats, et nous nous réjouissons que vous ayez été au rendez-vous.
Avec François Pillet, nous avons cherché à apaiser et à ressouder les professions du droit, en leur apportant des solutions juridiques ; je pense en particulier aux professions réglementées. Vous le savez, monsieur le ministre, nous aurons à cœur demain de voir comment vous pouvez évoluer plus encore sur ce sujet.
Avec Dominique Estrosi Sassone, nous avons veillé à avancer sur le terrain économique et celui de la mobilité, et ce de manière constructive.
Avec Catherine Deroche, nous avons cherché, sur le terrain social notamment, le bon compromis – nous y œuvrons encore aujourd’hui –, celui qui permet aussi à nos entreprises et à nos salariés de s’adapter, en adoptant des mécanismes de prévention, avant l’apparition de difficultés graves.
Ce texte sera, je le souhaite, utile à notre pays. Encore faut-il que nous réussissions les étapes qui vont maintenant se présenter à nous. Le travail ne s’arrête d’ailleurs pas là pour la commission spéciale et pour vous, monsieur le ministre, car chacun des corapporteurs et moi-même entretiendrons avec nos homologues de l’Assemblée nationale un dialogue pour voir de quelle manière toutes ces mesures peuvent prospérer.
En conclusion, la sérénité, la volonté de réaliser un travail commun sur le fond, auquel chacun a contribué, et la détermination d’aller plus loin pour passer des mots aux actes ont été les marqueurs de nos débats. En effet, notre pays doit bien avoir à l’esprit que, dans un système bicaméral, la Haute Assemblée peut formuler des propositions qui dépassent parfois ce qui était attendu, mais qui vont toujours dans le sens de l’intérêt général. À cet égard, je remercie tous ceux d’entre vous qui sont intervenus.
Enfin, je remercie les présidents qui se sont succédé pour permettre le bon déroulement de nos travaux. Demain, lors du vote final, je souhaite que nous ayons à l’esprit ce sens de l’intérêt général, qui a animé nos travaux.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, de l'UMP et du groupe écologiste, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.
Nous voici parvenus au terme de nos débats, auxquels nous avons consacré un peu plus de 130 heures, réparties en quinze journées pleines, ainsi que vient de le rappeler M. le président de la commission spéciale.
Durant ces heures et ces journées, nous avons bien sûr partagé des accords et des désaccords, mais, je crois pouvoir l’affirmer à mon tour, le débat en sort grandi, et ce texte s’en trouve amélioré sur le fond. En effet, les dispositions adoptées reflètent des sensibilités différentes, et certains des aspects du texte ont été examinés avec un regard nouveau.
Bien entendu, nous ne sommes pas toujours sur la même ligne, je n’en fais pas mystère, mais nous avons systématiquement parlé de nos désaccords. Selon moi, c’est ainsi que l’on éclaire un débat démocratique.
Sur le plan méthodologique, on peut se demander s’il est préférable d’avoir de nombreux petits textes ou un projet de loi plus volumineux. Quoi qu’il en soit, cette odyssée que nous venons d’accomplir au travers de l’économie française, au cours de ces quelques semaines, a au moins une vertu : avec un regard et une détermination que vous avez tous faits vôtres – et je vous en remercie –, nous nous sommes demandé comment recréer de l’activité en France. À cette fin, nous avons revisité des normes et des secteurs entiers à la lumière de la pertinence de la règle existante, en établissant une comparaison entre le droit et le réel et en analysant des situations concrètes, et cela a apporté quelque chose de nouveau.
Ce constat vaut pour mon ministère comme pour beaucoup d’autres : lorsqu’un texte est traité pour lui-même – c’est surtout vrai eu égard à la nature du projet de loi qui vous était soumis – par ses propres acteurs, ou ceux qui en ont l’habitude, on ne peut se défaire de certains réflexes ; on ne revisite pas des choses bien établies, on n’accorde pas des droits ou des opportunités supplémentaires à ceux qui ne se sont jamais entendus, tout simplement parce que l’on n’observe pas ces régulations avec un regard extérieur.
A contrario, nous avons, collectivement, porté un regard souvent neuf sur des réglementations existantes, sans nier les raisons pour lesquelles elles étaient en vigueur, mais en veillant à chaque fois à nous interroger sur leur fondement, pour voir de quelle façon nous pouvions concrètement les améliorer. Les débats du Sénat ont donc permis de mieux prendre en compte certains aspects du texte qui, peut-être, restaient trop peu détaillés. Je pense, notamment, à l’avenir des territoires et de la ruralité. Nous avons consacré un beau débat à la couverture téléphonique fixe et mobile, qui a fait ici l’objet d’un ajout particulièrement consensuel. Il importait de le faire.
Au sujet des professions juridiques ou des transports, une position différente de celle du Gouvernement s’est fait jour, mais en préservant les équilibres du texte, du moins pour partie.
Les avancées opérées en matière de droit du travail ou d’investissement appellent, de ma part, le même constat : un cœur de réformes a été préservé, même si la Haute Assemblée a souhaité aller plus loin. Eu égard au temps du dialogue social, j’ai parfois été conduit à émettre certaines réserves. Toujours est-il que nous avons défini les contours d’une réforme concrète, que le Gouvernement appelle de ses vœux !
Ce texte doit encore franchir plusieurs étapes, à commencer par le vote solennel, dès demain, au Sénat ; puis viendra l’examen par la commission mixte paritaire, à propos duquel nous pouvons légitimement nourrir beaucoup d’espoirs. Le travail que nous avons collectivement mené doit trouver là sa concrétisation. Si un accord n’était pas atteint à ce stade, une nouvelle lecture serait engagée devant chaque assemblée.
Désormais, il est urgent que ces dispositions entrent en vigueur, pour devenir des éléments concrets dans la vie de nos concitoyens. En effet, nos débats tiennent leur crédibilité, non seulement de leur richesse, de la liberté laissée à chacun de s’exprimer, mais aussi de notre capacité à traduire dans les faits les avancées que ce texte contient, à les faire advenir. Tel est, à présent, l’objectif que je m’assigne.
Je l’ai dit, nous avons passé beaucoup d’heures à débattre, à confronter nos convictions mutuelles, et j’en remercie sincèrement les membres de la Haute Assemblée.
Tout d’abord, monsieur le président de la commission spéciale, je tiens à saluer la qualité du travail réalisé bien avant ces quatre semaines de séance publique, au travers des auditions notamment. J’ai été, vous le savez, très frustré de ne pouvoir assister aux travaux de la commission spéciale. Néanmoins, je sais que l’usage en vigueur au Sénat l’imposait.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Cela vous a plutôt réussi !
Sourires.
Au reste, cela ne m’a pas empêché d’apprécier l’action menée, en amont, par la Haute Assemblée.
Le président l’avait annoncé dès le début, le Sénat a tenu à démontrer sa valeur ajoutée, en coproduisant la loi avec le Gouvernement et l’Assemblée nationale. Le travail que vous avez orchestré s’est constamment inscrit dans cette perspective, et, je ne puis manquer de le saluer, cet objectif a été atteint.
Ensuite, je tiens à remercier tous les corapporteurs, qui, concernant la partie qui leur était soumise, ont œuvré en faisant valoir leur sensibilité propre, ce qui est tout à fait respectable. Ils ont cherché non pas à faire table rase des dispositions prévues, mais à prendre celles-ci pour base. Cette méthode a pu, certes, susciter certaines frustrations chez M. Karoutchi §– vous l’aurez compris, je plaisante, monsieur le sénateur ! -, mais elle a donné beaucoup de crédibilité à la démarche de la commission spéciale.
En outre, mes remerciements s’adressent à tous les sénateurs présents, qui ont enrichi nos débats, comme l’a souligné Mme Assassi. Nous avons souvent constaté des désaccords. Toutefois, en nous écoutant les uns les autres, en nous opposant des arguments, nous sommes parfois parvenus à nous convaincre.
Je remercie tout particulièrement celles et ceux qui ont siégé sans discontinuer – M. Desessard, Mme Bricq, M. Karoutchi, Mme Assassi, Mme David et tant d’autres encore – : ils ont vraiment passé leurs jours et leurs nuits dans cet hémicycle, sans être nécessairement membres de la commission spéciale. Ils ont donné de leur temps et déployé leur conviction, sans jamais laisser leur esprit s’assoupir… Même lorsque les amendements étaient examinés très tard dans la nuit, les réactions restaient toujours aussi vives ! §C’est ce qui a fait la richesse de ce débat.
Mesdames, messieurs les sénateurs, eu égard à la qualité des discussions qui se sont déroulées dans cette enceinte, la Haute Assemblée a fait honneur à sa réputation. Je n’en ai jamais douté, mais, vous m’en avez pleinement convaincu, grâce à vous et au rôle qui est le vôtre, on fait bien la loi.
Enfin, je tiens à remercier vivement les collaborateurs des sénateurs, ainsi que l’ensemble des personnels du Sénat, les conseillers de tous mes collègues du Gouvernement qui ont été sollicités et mes propres équipes, qui, souvent, sont restés tard le soir et ont poursuivi leur tâche au fil des jours. Nous leur avons imposé notre rythme. Ils ont assumé une mission essentielle, …
… quoique invisible, pour permettre aux uns et aux autres de défendre leurs convictions dans les meilleures conditions, en disposant de toutes les informations nécessaires. J’ai été très sensible à leur disponibilité et à la qualité du travail accompli par leurs soins.
Avant que mon collègue Bernard Cazeneuve ne présente le projet de loi relatif à la réforme de l’asile, pour une durée de quatre semaines, vient-il de me dire à l’instant ! §
Sourires.
M. Emmanuel Macron, ministre. … permettez-moi, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous offrir le verre de l’amitié à la buvette du Sénat pour fêter la fin de nos débats !
Applaudissements.
Les explications de vote sur l’ensemble du projet de loi auront lieu demain mardi 12 mai, à quatorze heures trente.
Avant d’aborder la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la réforme de l’asile (projet n° 193, texte de la commission n° 426, rapport n° 425, avis n° 394).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, comment ne pas songer, au moment où s’ouvre notre discussion sur la réforme du droit d’asile, au drame qui se joue actuellement en Méditerranée ? Plus de 1 700 hommes, femmes et enfants y ont déjà perdu la vie en 2015, victimes de trafiquants et de passeurs, qui n’hésitent pas, après les avoir rançonnés, à envoyer ces migrants à la mort sur des embarcations de fortune.
Comme vous le savez, le Conseil européen, réuni en urgence le 23 avril dernier, a dégagé de premières orientations pour répondre à cette crise migratoire, secourir les migrants en détresse et répartir l’effort entre les États membres. Le triplement des moyens de secours dédiés à l’agence Frontex, l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, et le renforcement de notre coopération avec les pays d’origine et de transit, tout comme la lutte contre les filières de passeurs, traduisent cette volonté européenne.
La France, conformément à sa vocation, s’est portée aux avant-postes de cette mobilisation et continuera à le faire. D’ailleurs, l’agenda pour les migrations que la Commission européenne adoptera mercredi prochain devrait s’inspirer en grande partie des propositions de la France sur le renforcement des moyens de Frontex, celui de la coopération avec les pays de transit et d’origine – je me rends d’ailleurs au Niger mercredi et jeudi prochains pour traiter de ce sujet –, la mise en place d’une véritable politique européenne commune de l’asile, combinant responsabilité et solidarité des États membres de l’Union européenne, l’instauration d’un programme-pilote de réinstallation des réfugiés syriens au niveau européen et un soutien renforcé aux États membres les plus concernés par les afflux de migrants, afin qu’ils puissent plus efficacement protéger les personnes en besoin de protection et éloigner, dans des conditions de dignité et de respect des droits, les personnes relevant de l’immigration irrégulière.
Le projet de loi dont vous êtes saisis, mesdames, messieurs les sénateurs, s’inscrit parfaitement dans cette initiative européenne. Mieux, il l’anticipe. Face à la grave crise migratoire que rencontre l’Europe, la France joue tout son rôle en adoptant une réforme qui vise à rendre soutenable la demande d’asile en France. Elle contribuera efficacement à l’initiative européenne conduite par Jean-Claude Juncker, à laquelle nous apportons tout notre soutien.
Je veux, à cet effet, rappeler les choses très clairement. Nous avons collectivement, je vous le dis à tous, une exigence de vérité et d’action pour faire taire les fantasmes sur lesquels prospèrent tous les extrémismes.
L’augmentation brutale des flux en Méditerranée n’est pas née du hasard. Elle résulte très directement du chaos libyen. La Libye n’est plus en mesure de contrôler ses frontières. C’est de ses côtes que partent les migrants, qui croient trouver en Europe le rêve que d’autres leur ont vendu en leur mentant.
Je veux, toujours au titre de cette exigence de vérité, dissiper une confusion qui a prospéré dans le tumulte médiatique. La France est loin d’être le pays le plus concerné par ces flux migratoires en provenance de la Méditerranée. Elle est loin aussi d’être le pays le plus concerné en Europe par la demande d’asile.
Elle est – cela doit d’ailleurs conduire tous les démagogues affirmant que notre pays serait la proie de migrants résolus à capter je ne sais quelle aide que nous octroierions trop généreusement à s’interroger ! – le seul pays de l’Union européenne à avoir connu une baisse de 2, 34 % des demandes d’asile en 2014. Et les chiffres concernant les premiers mois de l’année 2015 sont, pour l’instant, stables. Cela signifie une chose : la France est, pour ces migrants, un pays de transit et non d’installation. Pour autant, cela pose des problèmes très difficiles, notamment à Calais.
Mais, de grâce, n’exploitons pas les drames en Méditerranée, comme j’ai pu le lire çà et là, pour faire peur aux Français ou, soudain, inviter le Gouvernement à je ne sais quel changement de cap !
Comprenons bien l’urgence de ce texte. Les migrants qui traversent la Méditerranée ne relèvent pas tous de l’asile. Mais certains, à l’évidence, les Syriens, les Érythréens, les Irakiens, en relèvent. Leur arrivée sur les côtes européennes impose à chaque État membre de l’Union européenne, et donc à la France, d’avoir des procédures d’asile efficaces, rationnelles, réactives et conformes aux meilleurs standards européens. Cette exigence de transposition de nos règles communes fait d’ailleurs partie intégrante des conclusions des 28 chefs d’État et de gouvernement et de la communication sur l’agenda des migrations, qui sera présentée mercredi prochain par la Commission européenne.
Or – c’est un point d’accord entre tous les républicains – l’exercice du droit d’asile est fragilisé en France. Notre dispositif en la matière est au bord de l’embolie.
Le texte qui vous est présenté est donc en prise avec une actualité brûlante. Et, je dois le dire, c’est pour moi une fierté particulière de présenter dans ce contexte si difficile un texte répondant aux urgences du moment et ayant recueilli un large assentiment à l’Assemblée nationale, lors de sa première lecture.
Toutefois, avant d’entrer dans le détail du texte, je veux insister sur l’esprit dans lequel il a été rédigé.
Je sais que la volonté de réformer notre système d’asile rassemble tous les républicains, quelle que soit la formation politique à laquelle ils appartiennent, et ce pour une raison simple : l’histoire du droit d’asile et celle de la République et de la démocratie sont intimement liées l’une à l’autre.
Voilà pourquoi le projet de loi déposé par le Gouvernement est d’abord un texte de rassemblement, fruit d’une réflexion et d’une mobilisation de longue haleine, à laquelle nous sommes nombreux à avoir contribué.
En juillet 2013, mon prédécesseur Manuel Valls avait organisé une concertation nationale sur le droit d’asile, qui a rassemblé l’ensemble des acteurs concernés : l’État, bien sûr, qui doit prendre ses responsabilités – et il les prend ! – ; les collectivités locales ; les associations ; le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, le HCR ; l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA ; la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, et l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII. Votre collègue Valérie Létard et le député Jean-Louis Touraine ont coordonné ces travaux. Je voudrais, une fois de plus, saluer leur travail remarquable. C’est sur ces bases que le texte qui vous est aujourd’hui soumis a recueilli une large majorité à l’Assemblée nationale, à l’issue d’un débat de qualité, débarrassé des postures partisanes.
Je sais aussi que, sur de nombreuses travées de cette assemblée, des sénateurs se passionnent pour l’asile. Je pense bien sûr au rapporteur, François-Noël Buffet, que je veux remercier pour sa contribution à l’élaboration de ce texte, à Roger Karoutchi, auteur d’un rapport d’information consacré aux centres provisoires d’hébergement et au coût de notre politique d’asile d’une manière générale, à Jean-Yves Leconte et à Jean-Pierre Sueur, toujours mobilisés sur ces questions qui mêlent intimement République et humanité. Nous aurons sans doute des échanges riches avec Esther Benbassa ou Éliane Assassi, qui ont eu, je le devine, une lecture critique et fine de ce texte.
Si un consensus fort s’est dégagé à l’Assemblée nationale, c’est parce que nous avons pris le temps de réaliser un diagnostic. Celui-ci a été fait et refait ; il est établi et largement partagé. Le récent relevé d’observation provisoire de la Cour des comptes, dont la presse s’est opportunément fait l’écho, n’a fait que confirmer, parfois en ajoutant de la confusion ou de l’imprécision, les dysfonctionnements que des parlementaires de tous bords, des associations et des institutions avaient dénoncés.
Ces dysfonctionnements, je veux les redire simplement en quelques phrases. Notre système d’asile souffre de graves carences. Alors que la demande d’asile a presque doublé entre 2007 et 2012, passant de 35 000 à 62 000 demandes, aucune mesure n’a été prise pour gérer cette augmentation. La demande a continué à s’accroître en 2013, avant que l’année 2014 ne soit marquée par un léger retournement de tendance, paradoxal d’ailleurs, dans le contexte international actuel : selon les données collectées par l’OFPRA, plus de 64 536 demandes ont été déposées l’année dernière, soit une diminution, je le redis, de 2, 34 % par rapport à l’année précédente.
Les délais à l’OFPRA comme à la CNDA se sont allongés considérablement, pour atteindre jusqu’à deux ans. Les hébergements se sont trouvés saturés. Les inégalités de traitement entre les demandeurs d’asile ont été accrues et les droits minimaux qui leur sont dus au titre des règles européennes n’ont plus été assurés. Le coût budgétaire de l’ensemble a cessé d’être maîtrisé. La gestion locale de la demande d’asile a été rendue plus difficile, puisque deux tiers des demandeurs sont concentrés dans deux régions.
C’est à ces dysfonctionnements, incontestables, connus et insoutenables à court terme que le projet de loi veut répondre.
Derrière sa technicité apparente, ce texte a trois objectifs simples, que je veux rappeler ici.
Il vise, d’abord, à réduire drastiquement les délais d’examen d’une demande d’asile. Il prévoit, ensuite, d’améliorer les conditions d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile en mettant en place un hébergement directif. Il tend, enfin, à accroître les droits des demandeurs d’asile, en transposant exactement les directives applicables.
Nous entendons, tout d’abord, réduire à neuf mois en moyenne la durée totale de l’examen d’une demande. À l’heure actuelle, celle-ci peut facilement excéder deux ans, contre moins d’un an, en moyenne, chez nos principaux partenaires européens.
Ce premier objectif constitue un préalable à toute amélioration de la situation que vivent les demandeurs d’asile. Des procédures trop longues freinent l’accès au statut de réfugié pour les demandeurs qui sont fondés à l’obtenir, mais rendent également notre dispositif plus vulnérable aux tentatives de détournement à des fins d’immigration irrégulière. En outre, elles compliquent l’éloignement des déboutés.
La priorité est donc d’accélérer les délais d’examen devant l’OFPRA, chargé des demandes en première instance, mais aussi devant la CNDA, cour spécialisée que le projet de loi entend maintenir et renforcer.
En effet, à chaque étape, les délais sont excessifs, sans parler du temps que prennent les échanges d’informations entre toutes les institutions concernées, ni même des délais « cachés », tels que celui de l’enregistrement de la demande en préfecture. Il n’est donc pas acceptable de laisser si longtemps dans une telle situation d’incertitude ceux qui font confiance à la France pour les protéger.
Voilà pourquoi l’OFPRA et la CNDA seront dotés en 2015 d’importants moyens humains supplémentaires : 55 équivalents temps plein ont d’ores et déjà été attribués et recrutés par l’OFPRA. C’est un effort exceptionnel, jamais encore réalisé, qu’a consenti le Gouvernement. De tels renforts permettront à l’OFPRA, dès 2016, d’accélérer ses procédures, afin de limiter à trois mois la durée moyenne d’examen d’une demande d’asile.
La CNDA, quant à elle, bénéficiera d’un renfort de magistrats et de rapporteurs, afin d’accompagner la réforme de ses procédures. Les demandes en procédure accélérée devront être examinées en moins de cinq semaines par un juge unique, et les demandes en procédure normale en moins de cinq mois par une formation collégiale. Pour ce faire, nous prévoyons, en outre, de simplifier un certain nombre de règles devant la Cour, notamment celles qui concernent l’aide juridictionnelle.
Nous devons également simplifier nos procédures d’asile en amont. Les délais d’enregistrement des demandes par les préfectures sont beaucoup trop longs ; ils devront être ramenés à trois jours grâce à la création de guichets uniques de l’accueil du demandeur d’asile, qui regrouperont sur un même site les agents de l’OFII et ceux des préfectures.
Enfin, nous devons savoir distinguer entre les demandes d’asile qui méritent un examen approfondi et celles pour lesquelles la réponse semble évidente, qui peuvent donc être traitées plus rapidement. C’est aussi de cette façon que nous réduirons sensiblement les délais de procédure : l’OFPRA sait traiter rapidement des demandes qui sont manifestement fondées, telles celles des Syriens ou des chrétiens d’Irak. À l’inverse, d’autres demandes ne nécessitent pas un examen approfondi, dans la mesure où elles ne reposent sur aucun motif sérieux. Pour cette raison, le texte vise à réformer les placements en procédure prioritaire, celle-ci devenant la procédure accélérée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte qui vous est soumis exploite toutes – je dis bien toutes ! – les possibilités offertes par les directives de placement en procédure accélérée. Quand on souhaite réduire les délais, on utilise tous les moyens disponibles entre les mains de l’administration pour y parvenir.
Par ailleurs, et parce qu’il s’agit d’un texte d’équilibre, le projet de loi enregistre aussi deux avancées essentielles.
Il tend, d’abord, à confier à l’OFPRA, qui a seule accès au contenu de la demande, le soin de dire en dernière instance si un dossier doit faire l’objet ou non d’un placement en procédure accélérée.
Il vise, ensuite, à garantir au demandeur d’asile en procédure accélérée les mêmes droits – un hébergement, une allocation, un recours suspensif – qu’à un demandeur en procédure normale. Sa demande est certes examinée plus vite, mais ses droits – tous ses droits ! – sont intégralement respectés.
Notre deuxième objectif est d’améliorer l’accueil et l’hébergement des demandeurs d’asile.
Actuellement, notre système est bien trop inégalitaire. Pour cette raison, il n’honore pas la République. Certains demandeurs sont hébergés dans des centres d’accueil de demandeurs d’asile, les CADA. Ils bénéficient à ce titre d’un accompagnement administratif, social et juridique dont chacun, jusqu’aux milieux associatifs les plus engagés, loue la qualité. Ce n’est, en revanche, pas le cas des deux tiers des demandeurs d’asile, qui sont soit pris en charge dans des structures d’hébergement d’urgence, soit tout simplement livrés à eux-mêmes et survivent tant bien que mal dans des campements de fortune. Cette différence de traitement n’est pas tolérable ; elle doit donc cesser.
D’ici à 2017, l’hébergement en CADA doit devenir la norme, et l’hébergement d’urgence l’exception. Pour ce faire, nous allons augmenter le nombre de places en CADA : nous avons déjà créé 4 000 places supplémentaires en deux ans, et nous avons l’ambition d’en ouvrir encore 5 000 d’ici à l’année prochaine, par créations nettes ou bien en transformant certaines places d’hébergement d’urgence.
Nous devons, ensuite, en finir avec les allocations éclatées dont bénéficient les demandeurs d’asile. L’allocation temporaire d’attente et l’allocation mensuelle de subsistance seront fondues en une allocation unique, qui prendra en compte la situation familiale de chaque demandeur.
Enfin, nous allons mettre en place – et c’est un point indissociable des deux précédents – un véritable hébergement directif.
Comme vous le savez, l’accueil des demandeurs d’asile peut être difficile à gérer sur le terrain, lorsqu’un trop grand nombre d’entre eux convergent en même temps vers un même point du territoire.
Aujourd’hui, deux territoires – la région parisienne et la région lyonnaise, François-Noël Buffet le sait bien – concentrent plus de la moitié des demandes. L’Île-de-France concentre à elle seule 42 % des demandeurs d’asile. Je n’ignore pas non plus les difficultés rencontrées en Alsace, en Bretagne ou en Lorraine. C’est la République qui offre l’asile à ceux qui en ont besoin, et non tel ou tel territoire.
Par conséquent, afin de mieux répartir l’effort, nous prévoyons de mettre en place une orientation directive des demandeurs. Mieux orienter leur accueil permettra également de mieux les accompagner et de leur offrir de meilleures conditions d’hébergement.
Concrètement, le versement d’une allocation dépendra de la sollicitation, puis de l’acceptation d’un hébergement. Si un demandeur ne souhaite pas bénéficier des conditions d’accueil prévues par la République, ou s’il ne souhaite pas aller là où une place est disponible pour le recevoir, il aura naturellement droit à un examen de sa demande d’asile, mais il ne pourra pas jouir de l’hébergement ni des allocations prévues. J’y insiste, il s’agit là d’un point crucial, qui conditionne le succès de la réforme.
Le troisième objectif de cette réforme concerne le renforcement des droits des demandeurs d’asile, dans un souci d’égalité et de juste transposition des normes européennes.
Cet élément est essentiel, car il est la démonstration que le raccourcissement des délais et l’augmentation des droits des demandeurs d’asile sont deux objectifs que l’on peut chercher à atteindre simultanément.
Ainsi, le demandeur d’asile pourra désormais bénéficier à l’OFPRA d’un conseil de son choix, de même qu’il pourra, s’il le souhaite, accéder de plein droit à l’aide juridictionnelle devant la CNDA. Les demandeurs d’asile en situation de vulnérabilité pourront également bénéficier d’un examen et d’une prise en charge adaptés à leur situation. Je pense, bien sûr, aux mineurs, mais aussi aux femmes victimes, en tant que femmes, des pires atrocités.
La loi permettra également à tous les demandeurs d’asile – en procédure normale comme en procédure accélérée – de jouir d’un droit au maintien sur le territoire pendant l’examen de leur demande, à savoir l’ensemble des droits aujourd’hui reconnus aux demandeurs en procédure normale.
Je ne peux aborder la question de l’asile sans avoir une pensée pour l’outre-mer, notamment Mayotte et la Guyane.
Ces départements sont confrontés à une pression migratoire exceptionnelle, dont je sais qu’elle peut être déstabilisante. La demande d’asile peut y être perçue, en raison de l’éloignement, de la longueur des procédures, comme une difficulté supplémentaire. Je veux devant vous prendre l’engagement que le Gouvernement veillera à ce que ce projet de loi, dans sa mise en œuvre, apporte dans ces territoires des solutions concrètes.
Pour conclure, je dirai un mot sur un point qui a subitement inquiété, me suis-je laissé dire, la commission des lois du Sénat ; je veux parler des déboutés du droit d’asile.
Le Gouvernement n’a pas attendu le relevé d’observation provisoire de la Cour des comptes pour prendre la mesure des difficultés sur ce sujet.
Je veux dire les choses très simplement et très clairement : un débouté de l’asile est, sauf s’il bénéficie d’un droit au séjour pour un autre motif, un étranger en situation irrégulière. Il doit donc – c’est la démarche du Gouvernement – quitter le territoire et regagner son pays d’origine, comme tout étranger en situation irrégulière. La lutte contre l’immigration irrégulière est, je le répète, une priorité de ce gouvernement et de mon ministère.
Je ne suis pas certain, en la matière, que ceux qui se posent en conseilleurs sur ces sujets aimeraient que je livre les résultats chiffrés auxquels ont pu mener d’autres politiques. Nous avons confié la comptabilisation des éloignements à un service statistique indépendant, du ressort de l’INSEE. C’était, comme en matière de délinquance, une décision destinée à créer les conditions de la transparence et de la fiabilité des données.
Quand nous avons fait ce choix, il est apparu que, une fois que l’on enlevait les retours aidés de Roumains et de Bulgares, c’est-à-dire de ressortissants de l’Union européenne, la politique d’éloignement de la France, au sens des normes européennes, celles qui doivent servir de référence, s’était en vérité effondrée entre 2007 et 2011. En effet, les retours étaient provisoires et, donc, fictifs : après avoir perçu à Noël la prime qui leur était accordée pour repartir dans leur pays, ceux-ci ne tardaient pas à revenir pour toucher la prime octroyée à Pâques pour repartir, avant de revenir. Tout cela alimentait des comptabilisations avantageuses, qui n’avaient pourtant absolument rien à voir avec la détermination à mener une politique en la matière.
Remettre sur pied une politique d’éloignement efficace et respectueuse des droits, c’est l’engagement que nous avons pris ; et c’est l’engagement que je veux tenir devant la représentation nationale.
Pour ce faire, nous avons pris deux mesures.
En premier lieu, nous avons remobilisé l’ensemble des services, qui en avaient besoin. Quatre circulaires traitant de la lutte contre l’immigration irrégulière ont été publiées entre 2013 et 2015. Des plans d’action ont été élaborés par chaque préfecture. Les aides au retour ont également été retravaillées, à ma demande, par l’OFII, qui a ajouté à ce dispositif un véritable volet en matière de réinsertion dans le pays d’origine.
Nous n’avons pas ménagé nos efforts parce que la République, je le dis là encore clairement et fermement devant la représentation nationale, ce sont des règles, qui doivent être rigoureusement respectées.
Quels sont les résultats de cette politique ? Les retours contraints, notamment vers un pays tiers à l’Union européenne, qui s’étaient effondrés entre 2007 et 2011, repartent à la hausse depuis trois ans. Je veux donner ici des chiffres précis, vérifiables par la commission comme par certains observateurs ayant écrit des articles, certes, percutants sur le sujet, mais qui n’étaient pas toujours, selon moi, honnêtement et convenablement documentés.
Les retours contraints ont augmenté de 13 % en 2013 et de 25 % environ l’année dernière. En 2014, la France a connu le plus haut niveau d’éloignements contraints depuis 2007, avec 15 161 éloignements contraints recensés. Je ne dis pas que nous réussissons là où d’autres ont échoué ; je dis simplement que tout le monde doit faire preuve de la plus grande humilité dans le cadre de cette politique difficile.
Par ailleurs, mes services sont également pleinement mobilisés dans la lutte contre les filières d’immigration irrégulière, de véritables filières de traite des êtres humains qui tirent profit de leur misère.
Là aussi, notre action porte ses fruits. L’année dernière, nous avons démantelé près de 230 filières clandestines – 226, très exactement ! –, un record historique, car cela représente 25 % de plus qu’en 2012. La détermination n’est pas toujours accompagnée des discours visant à l’instrumentalisation de ces questions, ces discours étant oublieux des chiffres, des réalités des actions, et usant d’artifices pour atteindre des objectifs qui, d’ailleurs, ne correspondent pas toujours aux nécessités de l’urgence.
En second lieu, je tiens à rappeler que nous avons inclus dans le projet de loi sur le séjour, dont la discussion au Parlement débutera dans les prochaines semaines, l’ensemble des dispositions qui apparaissent nécessaires à l’amélioration de nos dispositifs, dans le respect du droit et des droits. Je le précise, car il m’est arrivé de me demander si cet élément avait bien été compris.
Un débouté du droit d’asile, je le disais, c’est un étranger en situation irrégulière. Il n’y a aucune raison juridique de créer des dispositifs spécifiques d’éloignement, c’est-à-dire spécifiquement réservés aux déboutés de l’asile, sauf à prendre, justement, des risques juridiques. Personne, aucun gouvernement, ne l’a jamais fait. Ce serait d’ailleurs une bien étrange application des garanties constitutionnelles qui entourent le droit d’asile si un étranger en situation irrégulière, parce qu’il a fait une demande d’asile, se voyait appliquer des règles plus rigoureuses qu’un autre étranger en situation irrégulière qui ne l’aurait pas faite.
C’est la raison pour laquelle les réformes concernant l’ensemble des étrangers en situation irrégulière, déboutés de l’asile ou non, trouvent leur place dans le texte sur le séjour, lequel sera débattu, non pas à la Saint-Glinglin, mais en juillet à l’Assemblée nationale et en septembre ou, au plus tard, en octobre au Sénat. Il y a donc une véritable continuité dans l’examen des textes en ce domaine par le Parlement.
Si nous voulons être pragmatiques et efficaces, si nous voulons faire montre d’humanité, de responsabilité et de fermeté quand c’est nécessaire, si nous sommes désireux de ne pas instrumentaliser une telle question à des fins politiques, partisanes, voire électorales, nous serons en situation d’avoir adopté l’ensemble de ces dispositions d’ici à la fin de l’année. La France affirmera ainsi la vocation qui a historiquement toujours été la sienne en matière de droit d’asile et pourra, dans le même temps, procéder à la reconduite à la frontière des déboutés du droit d’asile, ceux qui n’ont pas eu accès à l’asile en France, car ils ne relèvent pas de ce dispositif.
Le Gouvernement propose au Sénat une approche globale. Il s’agit de renouer avec l’asile, mais également d’avoir une politique apaisée à l’égard de l’immigration, tout en renforçant la lutte résolue contre l’immigration irrégulière.
Là encore, le Gouvernement est dans l’action, et non dans le commentaire, et il se refuse à être dans l’approximation. D’ailleurs, j’aurai l’occasion, soit pendant cette discussion générale, soit lors de l’examen des amendements adoptés en commission, de démontrer que le Gouvernement prend bien en compte l’ensemble de vos préoccupations, mais en ayant en permanence le souci, d’une part, du respect des normes européennes et internationales et, d’autre part, de l’efficacité.
Par exemple, la commission des lois, en adoptant un amendement visant à priver le débouté d’une demande d’asile de toute possibilité d’admission au séjour à un autre titre, commet, à mon avis, une double erreur juridique.
D’une part, cette mesure aboutirait à une inégalité de traitement entre les demandeurs d’asile déboutés et les autres étrangers en situation irrégulière, qui est à la fois inexplicable et contraire au droit constitutionnel de l’asile.
D’autre part, les admissions au séjour obéissent le plus souvent à des contraintes résultant de normes européennes. Les interdire, c’est nous exposer à une condamnation certaine de la France par les juridictions nationales et européennes.
Ce n’est qu’un exemple, mais il est révélateur. Je ne pense pas une minute que ces arguments juridiques de bon sens soient inconnus des membres éminents de la commission des lois. Dès lors, pourquoi adopter des amendements dont on sait pertinemment qu’ils nous conduisent dans des impasses juridiques ? Pourquoi réclamer des choses dont on sait l’inconstitutionnalité ou l’inconventionnalité ?
Pour sa part, le Gouvernement contribuera à ce débat dans un esprit républicain, c’est-à-dire un esprit de responsabilité. Votre commission des lois a réalisé un travail important, que je tiens à saluer ; je pense notamment au travail du rapporteur François-Noël Buffet, dont les apports améliorent parfois le texte. Néanmoins, certaines des modifications proposées ne reflètent pas les orientations du Gouvernement et posent de réels problèmes constitutionnels. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen des amendements. Outre certaines dispositions relatives aux déboutés dont j’ai déjà parlé, je pense aussi à certaines dispositions en matière de compétence contentieuse ou d’hébergement directif. Le Gouvernement entend aborder chacune de ces questions avec la plus grande rigueur et la sérénité qui caractérise toujours les débats au sein de la Haute Assemblée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ne nous trompons pas de débat ! Compte tenu des drames humanitaires auxquels le monde est confronté, il y a urgence à réformer nos procédures d’asile. La réforme que nous proposons est, j’en suis convaincu, à la fois globale et équilibrée.
Avec l’amélioration de nos dispositifs d’intégration, l’accueil des étudiants et des talents étrangers, la lutte contre l’immigration irrégulière, la réforme du droit d’asile est l’un des quatre piliers, le plus symbolique sans doute, de notre politique à l’égard des étrangers en France. Cette politique globale fait l’objet de deux projets de loi. Tous deux seront discutés et, je le souhaite, adoptés avant la fin de l’année.
Au demeurant, en élaborant deux lois dans la même séquence parlementaire, l’une sur l’immigration et l’autre sur l’asile, ce gouvernement n’innove pas. C’est exactement ce qui avait été proposé à la représentation nationale en 2003, et personne, à l’époque, n’avait estimé que cela fût irresponsable…
Aujourd’hui est venu le temps du débat sur la réforme de l’asile. C’est un débat indispensable, eu égard à l’ampleur des dysfonctionnements que j’ai rappelés. La réforme est urgente si la France veut tenir son rang dans la gestion des flux migratoires auxquels l’Europe est confrontée.
Je n’ignore évidemment pas les contingences politiques. Je n’ai aucune forme de naïveté à cet égard. Je comprends parfaitement les positionnements et les tactiques, ainsi que leurs motivations. Mais je forme le vœu que, sur un sujet aussi fondamental, lié à notre identité républicaine, nous sachions ensemble faire honneur à la réputation de la République, …
M. Bernard Cazeneuve, ministre. … à la longue tradition de débats apaisés et de qualité, qui ont toujours caractérisé la Haute Assemblée. Nous pourrons ainsi aller sereinement au fond des choses. C’est en tout cas le souhait profond du Gouvernement.
Applaudissementssur les travées du groupe socialiste. – Mmes Élisabeth Doineau et Valérie Létard applaudissent également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte dont nous sommes saisis aujourd'hui est important. Bien sûr, tous les textes sont importants, mais celui-ci l’est particulièrement, car la politique de l’asile concerne non pas des marchandises, mais des personnes. À ce titre, nous avons l’impérieuse nécessité et le devoir d’être extrêmement vigilants quant à nos décisions.
Mais cette exigence et notre préoccupation collective de doter notre pays des instruments lui permettant de mener ses politiques ne doivent pas nous empêcher de regarder la réalité en face. Nous sommes confrontés à la triste actualité de ces populations victimes de réseaux mafieux, qui leur font miroiter un Eldorado en Europe, et plus particulièrement en France, pour s’enrichir sur leur dos !
Certains ont parfois tendance à confondre la question de l’asile avec celle de l’immigration. Rappelons d’emblée que les deux sujets sont distincts !
L’asile est une chose et l’immigration en est une autre. Il y a une immigration régulière, et il est bien normal que notre pays se dote d’une politique migratoire – ce n’est pas le sujet qui nous occupe aujourd’hui : peut-être est-ce dommage ? – ; il y a une immigration clandestine, contre laquelle nous devons lutter fermement.
La politique de l’asile découle avant tout de l’application de la convention de Genève de 1951. La France a le devoir d’accorder une protection à ceux qui sont menacés dans leur pays. L’objectif, ce n’est pas de répondre systématiquement par la négative ; c’est de pouvoir accorder rapidement l’asile à ceux qui en ont besoin. La difficulté qui est la nôtre aujourd’hui dans notre droit et dans la situation de fait tient au fait que la procédure a été dévoyée, et ce pour plusieurs raisons.
Sous le précédent quinquennat, j’ai eu à connaître, avec d’autres collègues, de ces politiques. Je peux témoigner, et je ne pense pas être démenti à cette tribune, que les moyens financiers de l’OFPRA, alors erratiques, ont été sanctuarisés. Nous étions parfaitement conscients de l’instabilité de certains pays et de la nécessité de permettre à cette instance, à laquelle nous sommes très attachés, de pouvoir travailler correctement.
Nous avons institué la Cour nationale du droit d’asile. Je suis intervenu à de multiples reprises sur le sujet dans cet hémicycle. Le dispositif que nous avions mis en place doit évoluer, car des insuffisances sont apparues.
Aujourd'hui, un demandeur attend en moyenne entre dix-sept mois et vingt-quatre mois pour savoir si la France lui accorde ou non la protection.
Les demandes ont augmenté, passant de 61 468 en 2012 à 66 251 en 2013, avant de redescendre en 2014, comme l’a souligné M. le ministre, à 64 811, ce qui est tout de même un chiffre élevé. Dans le même temps, les demandes en stock atteignaient, en 2012, 24 498, contre 30 197 en 2013. En 2012, les admissions s’élevaient à 10 000, contre 11 428 en 2013 et 14 512 en 2014. Il y a donc environ 40 000 déboutés du droit d’asile chaque année.
Cette situation est liée tout particulièrement à la longueur des délais et au fait que certains – cela ne concerne pas seulement des filières – utilisent la procédure de demande d’asile comme s’il s’agissait d’une procédure d’immigration. Cela ne peut évidemment pas fonctionner.
Le présent projet de loi aurait pu être examiné par le Sénat en même temps que le texte sur l’immigration, mais ce n’est pas le choix qui a été retenu. On peut le comprendre, car les deux sujets sont distincts, mais c’est tout de même un peu regrettable, et je m’en explique.
Lorsque les 40 000 déboutés du droit d’asile rejoignent la clandestinité, leur cas relève de la politique d’immigration. Il faut en avoir conscience quand on légifère sur l’asile.
Le texte dont nous sommes saisis transcrit trois directives dans notre droit. La première, la directive « Qualification », qui date de 2011, devrait déjà avoir été transcrite depuis le mois de décembre 2013. Les deux autres sont la directive « Accueil », qui porte particulièrement sur la vulnérabilité et l’accès au marché du travail, et la directive « Procédures », qui crée un certain nombre d’instruments pour essayer de réduire les délais d’instruction des demandes d’asile.
Permettez-moi d’évoquer la création des procédures d’irrecevabilité ou de clôture d’instruction des dossiers par l’OFPRA. Jusqu’à présent, cela n’existait pas. Les conditions sont parfaitement définies. Je mentionnerai également la procédure accélérée, qui remplace la procédure dite « prioritaire ». Il s’agit de traiter dans un délai bref, deux semaines, les demandes adressées à l’OFPRA qui ont le moins de chances d’aboutir.
Le projet de loi prévoit également de renforcer les pouvoirs de l’OFPRA, de modifier son conseil d’administration et de changer les conditions d’établissement de la liste des pays d’origine sûrs.
La CNDA devra décider en cinq mois. Elle pourra siéger non seulement en formation collégiale, mais également en juge unique. Même si cette procédure est contestée par un certain nombre de nos collègues, elle paraît tout à fait pertinente au regard des besoins. Il est nécessaire de traiter rapidement des dossiers dont on sait que l’issue ne sera pas positive. Les droits des demandeurs sont préservés : à chaque niveau de la procédure, les magistrats peuvent décider de confier le dossier à la formation collégiale.
Le projet de loi prévoit également des adaptations de notre droit, compte tenu notamment du règlement « Dublin III ». L’objectif est de pouvoir déterminer le plus rapidement possible le pays responsable de l’examen de la demande d’asile du demandeur, aux fins de son transfert dans ce pays.
J’en viens à un autre volet, celui de l’hébergement.
L’hébergement est l’un des sujets majeurs de préoccupation puisque la commission s’est rendu compte, depuis longtemps déjà, de la difficulté devant laquelle se trouvent les CADA, à la fois occupés par les demandeurs dont la procédure est en cours et par ceux qui ont été déboutés.
Il est également nécessaire, compte tenu des pressions migratoires – plus de 50 % d’entre elles s’exercent sur deux régions particulières : l’Île-de-France et la région Rhône-Alpes –, de disposer d’un dispositif plus efficace et de mettre en place le schéma directif des demandeurs d’asile. Cette disposition que la commission des lois a validée est positive. Aussi, nous souhaitons qu’elle soit maintenue, même si de nombreux amendements visant à la supprimer ont été déposés.
Ce texte vise aussi à donner plus de pouvoir à l’OFII, non seulement pour ce qui est de la gestion de l’hébergement, mais également pour ce qui est de la capacité d’allouer ou non un certain nombre d’aides en fonction de l’hébergement.
Je le dis sincèrement, en ce qui concerne la partie « Procédures », la retranscription des directives et les amendements adoptés par la commission des lois du Sénat, après examen du texte par l’Assemblée nationale, vont plutôt dans le bon sens puisqu’ils visent à assurer que la demande des demandeurs d’asile sera bien traitée dans un délai de neuf mois. Le délai sera de cinq mois pour la CNDA. Nous avons souhaité qu’il soit de trois mois pour l’OFPRA. Ainsi, la durée du processus ne fera plus opter en faveur de cette procédure à des fins étrangères à sa vocation.
Plus la procédure sera rapide, tout en respectant évidemment le droit de chacun – nous verrons que le texte comporte de nombreuses mesures en ce sens –, moins il y aura d’intérêt à l’utiliser à d’autres fins que l’asile.
Je rappelle également qu’au cours de nos discussions nous avons été informés d’un relevé d’observation provisoire de la Cour des comptes, qui a éveillé notre intérêt, à tel point que j’ai demandé un délai supplémentaire pour prendre connaissance de ce document et, éventuellement, auditionner les représentants de la Cour des comptes.
Malheureusement, pour des raisons de réglementation interne de la Cour des comptes, il n’a pas été possible d’auditionner le président de la quatrième chambre notamment. Néanmoins, un entretien a pu avoir lieu en présence du président de la commission des lois. Nous savons aujourd'hui que le rapport définitif de la Cour des comptes sera vraisemblablement communiqué à la fin du mois de juin. Il a été avancé que le coût de l’asile s’élevait à 2 milliards d’euros par an et que seulement 1 % des déboutés quittaient le territoire français. Nous aimerions obtenir des éclaircissements sur la réalité de ces affirmations.
Sincèrement, je dois dire ce soir que nous n’avons aucune information à ce sujet puisque la Cour des comptes nous a fait savoir qu’il lui était impossible de nous répondre en l’état ; elle attendait encore la réponse des services qu’elle a interrogés sur ce point. Quoi qu’il en soit, c’est un point sur lequel il faudra revenir pour savoir ce qu’il en est précisément. La Cour des comptes indique elle-même dans son relevé d’observation provisoire que le système est « au bord de l’embolie », qu’il ne fonctionne pas et qu’il faut donc le modifier.
Cependant, la commission des lois a estimé qu’il n’était pas possible de réformer singulièrement la procédure de demande d’asile sans traiter le cas des personnes déboutées. Il faut impérativement avancer sur nos deux pieds, je le dis sans volonté de polémique. Il s’agit uniquement de constater une réalité et d’apporter des réponses. À tout le moins, j’espère que, sur le fond, nous visons tous les mêmes objectifs.
Voilà pourquoi la commission a adopté plusieurs mesures.
La première d’entre elles consiste à prévoir que la décision définitive de rejet prononcée par l’OFPRA, le cas échéant après que la CNDA aura statué, vaut obligation de quitter le territoire français. Loin de nous l’idée de jeter de l’huile sur le feu. Il s’agit simplement de gagner du temps entre la décision définitive de l’OFPRA et le moment où le préfet en a connaissance et formule l’obligation de quitter le territoire français.
Sur le plan juridique, nous avons prévu un certain nombre de précautions. En particulier, il reste possible au demandeur, qu’il soit clandestin ou débouté, de contester cette obligation de quitter le territoire français. Ce point est clair.
La deuxième mesure prise par la commission est la suivante : l’étranger débouté de sa demande d’asile ne peut solliciter un titre de séjour à un autre titre, sauf circonstances particulières. Pourquoi ? Tout simplement pour répondre à un constat partagé par tous : certains demandeurs d’asile savent par avance qu’ils seront déboutés et solliciteront alors un autre titre de séjour pour tenter de rester sur le territoire national. Telle est la réalité ! L’idée est de « tenir », si je puis dire, afin de profiter de la circulaire du mois de novembre 2012, qui permet l’ouverture de la régularisation au bout de cinq ans sur le territoire. Le demandeur essaie donc beaucoup de procédures et nourrit finalement l’ensemble du dispositif.
Voilà pourquoi la commission des lois a considéré que, sauf circonstances particulières, dès lors que le demandeur a choisi l’asile, il ne lui est pas possible de demander un titre de séjour à un autre titre.
Enfin, la commission a souhaité faire droit à une proposition de notre collègue Valérie Létard qui, sur la base de son rapport d’information rédigé en collaboration avec Jean-Louis Touraine, estime qu’il convient d’assigner à résidence les personnes déboutées de leur demande d’asile dans des centres dédiés, en vue de les accompagner à l’éloignement et au retour dans leur pays d’origine. La commission des lois a accepté bien volontiers cette proposition, estimant qu’elle était tout à fait pertinente.
Quelques autres points viennent conforter ces éléments. Il s’agit tout particulièrement de restreindre l’inconditionnalité de l’hébergement dès lors que l’on est débouté du droit d’asile. Les étrangers qui ne sont plus dans la procédure n’ont nulle raison de solliciter ce dispositif. En tout état de cause, la commission a globalement essayé de parvenir à une solution qui soit la plus équilibrée possible.
Certes, cette mesure peut être discutée, et elle le sera. Mais il convient cependant de garder à l’esprit que le législateur se doit d’envoyer des messages clairs.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je le dis en toute sincérité, si nous ne prenons pas les mesures qui s’imposent, nous tuerons la procédure d’asile et nous nous trouverons dans une situation extrêmement difficile. Il ne nous sera plus alors possible de répondre rapidement, ou suffisamment rapidement, à ceux qui ont besoin de cette procédure, qui est l’honneur de notre pays.
C’est dans cet esprit que la commission a tenté de rééquilibrer ce projet de loi. Même si le texte proposé par la commission peut paraître quelque peu rigoureux, nos propositions me semblent suffisamment réalistes pour permettre à notre pays de traiter correctement les demandes de ceux qui méritent la protection de la France.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – Mme Evelyne Yonnet applaudit également.
Monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, que puis-je ajouter de plus ? Mon collègue François-Noël Buffet a dit l’essentiel.
Monsieur le ministre, j’ai bien noté au début et à la fin de votre propos liminaire un peu d’agacement : ce texte méritait mieux, notamment d’autres propositions, plus républicaines...
Avant d’aborder les points liés plus particulièrement au financement de la réforme, permettez-moi de dire en toute sincérité que nous n’avons pas travaillé dans une ambiance partisane ni empreinte de sectarisme. J’ai toujours pensé que vous étiez un grand républicain. Je l’ai encore affirmé après les attentats de janvier dernier, lorsqu’il s’est agi de faire l’unité nationale. Ici aussi, sur le droit d’asile, pourquoi ne pas essayer de faire preuve d’unité ?
Lorsque j’ai été réélu sénateur en 2011, je me suis montré extraordinairement critique à l’égard du gouvernement de l’époque sur les questions liées au droit d’asile. Déjà, je pensais que tout cela était bel et bon, mais qu’il était important de préserver le droit d’asile. Car ce droit d’asile constitutionnel, lié à la convention de Genève, qui a fait l’honneur de la France lorsqu’elle a accueilli les persécutés des régimes militaires sud-américains, du bloc soviétique, du Cambodge ou d’Afrique, après bien des massacres et des guerres civiles, ce droit d’asile, nous y tenons ! Nous y sommes profondément attachés, car c’est l’honneur de la France que des personnes menacées du fait de leurs convictions, de leurs modes de vie ou de leur personnalité puissent se tourner vers notre République. Et je sais que tel est aussi votre sentiment, monsieur le ministre. Voilà pourquoi nous avons prévu certaines mesures, qui vont plus loin.
Depuis quelques années – le problème ne date pas de 2012, il résulte d’une situation internationale compliquée dans un grand nombre de pays, de la grande pauvreté qui règne sur le continent africain et de phénomènes qui échappent à la France, mais qui sont bien réels ! –, nous sommes passés de 30 000 demandes d’asile par an voilà sept ou huit ans à 60 000 en moyenne aujourd’hui. Or, excusez-moi de vous le dire, monsieur le ministre, mais ces 60 000 personnes ne viennent pas toutes de pays où elles sont persécutées. Toutes ne sont pas en danger du fait de leurs convictions politiques, philosophiques, religieuses ou humaines. Un grand nombre d’entre elles sollicitent le droit d’asile parce que des réseaux mafieux, comme l’a très bien souligné notre collègue François-Noël Buffet, les incitent à l’immigration pour fuir la pauvreté dans leur pays. Ces personnes partent pour la France ou d’autres pays d’Europe et se servent de la procédure du droit d’asile, qui offre un certain nombre de garanties, pour ne pas dire d’avantages, car je ne veux pas exagérer. Mais cela existe !
Depuis deux ou trois ans – et vous n’y êtes pour rien, monsieur le ministre ! –, avec la guerre en Syrie, les difficultés en Irak, les persécutions des chrétiens d’Orient et tous les migrants venus de Méditerranée, le système européen – pas uniquement français ! – explose. M. le rapporteur l’a souligné précédemment, l’Allemagne ne sait plus où elle en est. Ce pays a accueilli 130 000 demandeurs d’asile en 2013, 200 000 en 2014, et le ministre allemand de l’intérieur Thomas de Maizière en annonce 400 000 en 2015. Vous rendez-vous compte, 400 000 demandeurs d’asile en 2015, contre 130 000 voilà à peine deux ans ? L’État allemand réquisitionne les casernes et les écoles parce qu’ils ne savent plus comment faire.
Monsieur le ministre, le problème, ce n’est pas que votre texte ne va pas dans le bon sens – votre conception du droit d’asile n’est pas en question –, mais, en réalité, le système explose.
Dans l’urgence liée à cette explosion, votre texte est certes conforme aux directives européennes. Il va évidemment dans le bon sens puisqu’il vise, comme le rapporteur l’a très bien expliqué et comme le président de la commission des lois le rappelle régulièrement, à réduire les délais de la CNDA et à créer des postes à l’OFPRA. Je le reconnais, c’est le Gouvernement en place depuis 2012 qui crée ces postes ; les précédents gouvernements ne l’avaient pas fait ; ils avaient sanctuarisé les budgets.
Mais à quoi bon créer 20 % ou 25 % de postes supplémentaires à l’OFPRA quand il y a 100 % de demandeurs d’asile supplémentaires par an ? C’est une course infinie ! D’un côté, vous créez des postes mais, de l’autre, les demandes ne cessent d’augmenter. C’est, je le répète, une course sans fin. Certes, il faut réduire les délais. Mais comment voulez-vous faire ?
L’Allemagne, qui est débordée par l’afflux des demandes d’asile, vient de décider la création de plusieurs centaines de postes au sein de l’Office fédéral des migrations et des réfugiés, qui est l’équivalent de l’OFPRA.
On vous dit qu’il y a urgence, non pas parce que vous n’êtes pas conscient des réalités, mais parce que l’urgence à laquelle nous vous appelons est liée à la réalité internationale, à tout ce qui se passe, notamment en Orient, et vous en êtes parfaitement informé. Nous avons d'ailleurs toujours soutenu vos positions, que ce soit concernant le djihad islamique ou Daech. Les gens fuient l’Afrique, qui est de plus en plus pauvre ; les réseaux d’immigration se multiplient, et notre système a atteint ses limites.
Monsieur le ministre, vous évoquez les directives européennes, mais – et c’est là peut-être une différence entre nous ! – nous sommes tentés de vous dire que nous n’avons pas la capacité qui est la vôtre d’inciter l’Europe à prendre les choses à bras-le-corps. L’Europe doit se demander si sa politique en matière de droit d’asile et d’immigration correspond aux réalités d’aujourd’hui. Cette politique, qui a été définie voilà cinq ou dix ans dans bien des textes, a été mise en place à une période où on n’était pas dans l’urgence.
Ce qui se passe à Lampedusa, en Italie, les morts en Méditerranée, c’est inacceptable ! On renforce Frontex et Triton. Mais, en réalité, que fait-on en matière d’immigration et de droit d’asile ?
Je vous entendais dire ce matin que l’Union européenne allait probablement proposer des quotas. Je comprends la situation, mais ce n’est pas une révision de la politique en matière d’immigration et de droit d’asile qu’il faut mettre en œuvre. Face au mur, comment agit-on ? Instaurer des quotas parce que l’Italie ou la Grèce ne peuvent pas intégrer tous les réfugiés ? Mais ce n’est pas ainsi qu’on redéfinit la politique en matière d’immigration et de droit d’asile. Je sais que vous êtes déterminé à avancer sur ce point, mais vos collègues européens me semblent un peu lents, pour ne pas dire très réticents…
Or, à force d’être réticents, ils mettent les pays d’accueil, comme l’Allemagne et la France, dans des situations impossibles.
Sans reprendre ce qu’a excellemment dit mon collègue François-Noël Buffet, j’aimerais aussi parler un peu d’argent, si vous le permettez, car il faut bien malgré tout en parler.
J’attends les conclusions définitives, mais la Cour des comptes avance le chiffre de 2 milliards d’euros pour ce qui concerne le coût du droit d’asile. Elle prend sans doute en compte un certain nombre d’effets induits, car j’ai estimé, dans le rapport pour avis que j’ai établi, que le coût direct se situe aux alentours de 600 millions d’euros, à savoir le double de ce qu’il était il y a trois ou quatre ans.
Certains effets induits sont liés au fait qu’un certain nombre – pour ne pas dire un nombre certain ! – de déboutés deviennent des clandestins. Cela aussi a un coût. Tout a un coût ! Comment la Cour des comptes arrive-t-elle à 2 milliards d’euros ? Attendons qu’elle nous l’explique.
En tout cas, s’il est certain que le coût du droit d’asile est élevé, celui-ci pourrait être maîtrisé s’il concernait les 12 000 ou 15 000 personnes acceptées.
En réalité, le nombre de demandes acceptées n’a guère évolué : quand on comptait 30 000 ou 35 000 demandeurs d’asile, un peu plus de 10 000 personnes étaient acceptées ; aujourd'hui, il y a 65 000 demandeurs et le nombre des demandes acceptées oscille entre 10 000 et 15 000. Cela veut dire que le nombre des demandeurs relevant en réalité du droit d’asile n’a que très peu évolué, mais que le nombre des demandeurs a explosé. Il existe donc une dérive de l’immigration économique, qui est détournée, avec, bien sûr, un coût supplémentaire.
Je le reconnais bien volontiers, monsieur le ministre, c’est sur l’initiative du gouvernement auquel vous appartenez qu’ont été créées, par le législateur, des places supplémentaires en CADA, qui devaient permettre d’accueillir tous les demandeurs d’asile. Cela devait être simple, rationnel, encadré. Il a été décidé de créer 4 000 places et, en l’espace de deux ou trois ans, on est passé de 20 000 à 24 000 places. Le problème, c’est qu’il y avait 20 000 places pour 35 000 demandeurs et qu’il y a aujourd’hui 24 000 places pour 65 000 demandeurs !
Il est vrai que vous faites un effort, mais, dans nos régions – vous avez évoqué l’Île-de-France et la région Rhône-Alpes entre autres –, on ne sait plus comment faire : les CADA sont pleins ; tout comme le sont les centres provisoires d’hébergement– avec 1 060 places en France, ce n’est pas ainsi que vous allez régler le problème du droit d’asile ! – ; les hôtels une étoile à Paris et dans la proche couronne sont aussi quasiment pleins, et cela ne suffit toujours pas. Vous ne pouvez nier qu’un grand nombre de demandeurs d’asile sont dehors.
Il est à présent question d’accepter un quota au niveau européen. Comprenez que la représentation nationale puisse s’en inquiéter ! Est-ce à dire que nous devrons accueillir entre 10 000 et 15 000 demandeurs supplémentaires cette année ?...
Je comprends que vous ne me disiez pas qu’il y en aura 10 000, mais on verra ce qu’il en sera après mercredi... Je vous demande seulement de m’indiquer quels moyens seront déployés pour faire face à ce quota supplémentaire.
La réalité, c’est, comme l’a souligné mon collègue François-Noël Buffet, entre 300 millions et 600 millions d’euros pour le coût direct et entre 1 milliard et 2 milliards d’euros si l’on tient compte des effets induits. Vous nous dites, monsieur le ministre, qu’on va réduire la voilure en raccourcissant les délais. C’est effectivement ce que vous prévoyez dans ce texte, mais, en même temps – l’équilibre est difficile à trouver ! –, vous augmentez les capacités de recours. Aussi, vous le savez, ces délais ne seront pas respectés. Des recours seront engagés. L’OFPRA et la CNDA n’auront d’ailleurs peut-être pas la capacité de tenir ces délais eu égard à leurs moyens en personnels face au nombre de demandes à traiter. Or, je le souligne, aucune sanction n’est prévue si le délai que vous avez fixé n’est pas respecté.
On dit qu’il faut aller plus vite. Je ne doute pas du fait que vous ayez envie, monsieur le ministre, que la procédure soit plus rapide, qu’il y ait moins de situations aberrantes, comme celles que nous avons connues dans les centres d’accueil de demandeurs d’asile, dans les centres d’hébergement d’urgence ou dans les centres provisoires d’hébergement où l’on a du mal à faire partir ceux qui étaient déboutés du droit d’asile et, donc, à intégrer les nouveaux arrivants. C’est pourquoi un certain nombre d’amendements visent à accélérer le départ de ceux qui sont déboutés, de ceux qui sont violents.
L’élément financier est, certes, important – un tel coût est énorme pour la collectivité nationale ! –, mais on a surtout le sentiment qu’il n’est pas maîtrisé. Ce n’est pas, je le répète, de votre fait, car je sais combien vous êtes attaché à la maîtrise des coûts, mais les conditions internationales ne vous aident pas. Vous n’y pouvez rien.
Que vous demandent la droite et le centre, monsieur le ministre ? Franchement, en tant que membre de la commission des finances, on me fait la même demande. Chaque fois, je réponds que je ne peux pas donner plus.
D’un côté, on donne beaucoup d’argent à l’OFPRA, à la CNDA, aux structures d’accueil, aux structures d’hébergement qui vont, enfin – c’est bien ! –, bénéficier d’un statut législatif. De l’autre, vous transférez à l’OFII la gestion de l’allocation temporaire d’attente. Je suis favorable à la barémisation de cette allocation, je l’ai d'ailleurs demandée dans les différents rapports d’information. Mais l’OFII se retrouve dans une situation particulièrement difficile : il récupère les indus de Pôle emploi, qui, soyons francs, distribuait l’allocation plus ou moins bien – tous les rapports montrent qu’il y aurait 20 % d’indus, ce qui est quand même considérable. Et, au-delà, Pôle emploi lui transfère 60 millions d’euros à régulariser. Comment va-t-on régler ce problème ?
Tout cela finit par coûter relativement cher – c’est même cher ! –, et tout cela est très difficile à maîtriser en raison des recours, des délais non sanctionnés, des problèmes pour créer davantage de places en CADA ou dans les centres d’hébergement. Vous le savez, la situation dans nos villes est extrêmement compliquée ; et je ne parle pas que de l’Île-de-France : les élus de gauche comme de droite sont nombreux à dire qu’ils ne parviennent plus à gérer ces situations.
Un autre élément me gêne depuis que je m’intéresse à ce dossier, c’est la faiblesse des moyens alloués à l’accompagnement de ceux qui obtiennent le statut de réfugiés.
Sincèrement, les personnes qui obtiennent ce statut sont appelées, à terme, à devenir citoyens français. Elles devraient donc être mieux traitées, mieux formées, davantage intégrées à la société.
Les moyens octroyés à l’OFII pour favoriser l’intégration au travers de l’instruction civique ou des cours de langue, par exemple, sont insuffisants. Voilà des années que je présente, en commission des finances, un amendement visant à renforcer les moyens dévolus à l’OFII. Mais, chaque année, pour une raison que j’ignore – tout le monde devrait adopter un tel amendement ! –, on le rejette.
Les 15 000 personnes qui, chaque année, obtiennent le statut de réfugiés vont un jour obtenir la nationalité française et devenir des citoyens français. Ces personnes doivent être traitées différemment, pour deux raisons principales : d’abord, parce qu’elles sont venues sur notre territoire, non par le détournement de filières d’immigration économique, mais en raison des persécutions ou des malheurs qu’elles subissaient et, ensuite, parce qu’elles sont capables d’intégrer la société française et d’acquérir la citoyenneté.
Monsieur le ministre, vous êtes confronté à une telle explosion du nombre de demandes que la situation, je le reconnais bien volontiers, surtout dans le contexte international insupportable que nous connaissons actuellement, est très difficile à gérer. Mais vous êtes aussi un parfait républicain. Obtenez donc de l’Europe un changement ou, en tout cas, une clarification de la politique d’immigration et du droit d’asile ! Et rassurez les Français, pas ceux de gauche ou de droite, mais tous les Français dans leur ensemble ! Les gens sont excédés, ils ont le sentiment que n’importe qui peut entrer en France et demander le droit d’asile.
Tous les républicains peuvent se retrouver sur un plan d’urgence, sur un nouveau plan européen. Quel bonheur ce serait alors de venir à cette tribune pour vous faire part de notre entier soutien !
Applaudissements sur quelques travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Françoise Cartron.