À la tribune, ma parole est libre, madame la présidente.
D’autres avancées, disais-je, proposées à l’origine, ont été rognées par la commission des lois du Sénat.
Cependant, la mise en œuvre de ces mesures dépendra largement des moyens qui seront alloués pour garantir un hébergement et une allocation à tous les demandeurs. Nous attendons des précisions de la part du Gouvernement sur ce point.
De plus, plusieurs dispositifs d’amélioration sont porteurs de limitations, voire de contradictions qui vident les droits de leur substance. Il en est ainsi du droit d’être assisté par un tiers, fortement mis en cause. Nous vous proposerons de faire de cette mesure une véritable avancée pour l’accueil des demandeurs d’asile, en permettant à l’avocat ou à un représentant d’association de prendre la parole et des notes au cours de l’entretien.
Il en est de même du droit au maintien sur le territoire. Les dérogations prévues par la présente réforme sont plus étendues que celles qui sont définies dans la directive européenne dite « Procédures », pourtant d’interprétation stricte.
En cet instant, je souhaite rappeler que le législateur ne doit pas se borner à transposer les directives du « paquet asile », mais que chaque État est libre d’ajouter un certain nombre de mesures qu’il estime utiles pour régler sa propre situation. Gardons à l’esprit que les principes régissant l’asile sont garantis par la Constitution.
Par ailleurs, un certain nombre des dispositions préconisées sont pour nous source de grande préoccupation, à commencer les nouvelles missions confiées à l’OFII. Ces mesures laissent à penser que des considérations liées à la gestion des flux migratoires prendront le pas sur les besoins de protection des demandeurs d’asile.
Ainsi, au regard des travaux de l’Assemblée nationale en première lecture et de ceux de la commission des lois du Sénat auxquels nous avons assisté, nous sommes très inquiets d’un certain discours teinté d’humanisme, mais qui masque mal le choix d’une politique du chiffre inavouée et de préoccupations de gestion des flux.
À cet égard, nous sommes vivement opposés à la procédure d’asile accélérée, dès lors qu’elle repose sur l’idée selon laquelle le détournement du droit d’asile serait aujourd’hui la règle. Son champ d’application, bien trop élargi par rapport à la procédure prioritaire déjà existante, permettra, d’une part, à l’OFPRA de traiter de manière expéditive l’essentiel des demandes d’asile et, d’autre part, de faire juger par un juge unique, devant la CNDA – dans un délai également expéditif –, l’essentiel des demandes rejetées par I’OFPRA. Ainsi, le principe deviendra assurément la procédure accélérée à juge unique en méconnaissance flagrante de toutes les garanties procédurales et de fond prévues par le droit européen, national et international des droits de l’homme.
De plus, le texte soumis à notre examen à l’issue des travaux de la commission est empreint de l’amalgame – croyez bien que je le regrette – entre demandeurs d’asile et immigrés. Pis encore, entre demandeurs d’asile et fraudeurs. Un article entier a été inséré pour écarter les « étrangers déboutés de leur demande d’asile » de l’hébergement d’urgence. Il s’agit là d’une vision scandaleuse de l’asile qui repose sur des chiffres par ailleurs inexistants et ne résiste à aucune analyse. Nous nous opposerons fermement à ces nouvelles dispositions inhumaines, tout comme à d’autres mesures directives ou discriminatoires.