Pour garantir un recours contre cette OQTF automatique, la commission des lois, qui a bien vu qu’il y avait un loup dans cette affaire, a proposé qu’elle soit contestable devant le juge administratif. Cela a été précisé, le recours sera suspensif dès lors qu’il est ouvert devant le juge administratif. C’est – les services du ministère de l’intérieur avaient d’ailleurs appelé mon attention sur ce point – le seul moyen de faire en sorte que la disposition soit conforme à tous les principes de droit constitutionnel et conventionnel qui nous obligent devant les plus hautes instances.
Et dès lors tout devient extraordinairement compliqué dans ce dispositif ! Le demandeur d’asile débouté est placé sous OQTF automatique, qu’il contestera devant le tribunal administratif – écoutez bien, mesdames, messieurs les sénateurs ! –, lequel deviendra en quelque sorte juge de la CNDA, ce qui est tout de même totalement baroque ! Car cela signifie qu’on va saisir le juge administratif pour contester une décision d’OQTF alors que la CNDA joue le rôle que l’on sait. C’est juridiquement baroque et abscons !
Cette OQTF, pour être juridiquement exécutoire aux termes de la directive Retour, devra être impérativement complétée par d’autres décisions. Ces dernières doivent être prises par le préfet après un examen individuel de la situation de l’étranger – le délai de départ, volontaire ou non, la décision fixant le pays de renvoi, l’interdiction de retour sur le territoire français, qui appelle, là encore, une appréciation au cas par cas, ainsi que d’éventuelles mesures de surveillance. Dans tous les cas, c’est au préfet d’agir. Ce nouvel arrêté préfectoral devra être systématiquement pris et pourra lui aussi faire l’objet d’un recours contentieux.
Bref, pour une même procédure, par laquelle la commission prétend tout simplifier, la rédaction retenue entraîne l’intervention de deux autorités distinctes, deux recours contentieux successifs devant la juridiction administrative, l’un contre l’OQTF résultant du rejet de la demande d’asile, l’autre contre les mesures prises par le préfet pour rendre l’OQTF exécutoire ! Bonjour la rapidité en matière de reconduite à la frontière !