En outre, l’un des objectifs du projet de loi est que le demandeur obtienne une réponse au maximum en huit mois. Par conséquent, au bout de neuf mois, nous sommes censés savoir si la demande a été acceptée ou non. Nous ne prenons guère de risque en pariant sur notre réussite !
Je crois à l’intégration par le travail. À mon sens, il faut permettre l’application de la directive, quand bien même la procédure ne serait pas terminée au bout de neuf mois, dans des conditions lisibles et claires. Évitons la bureaucratie !
L’article 15, dans sa rédaction actuelle, multiplie les conditions d’accès au marché du travail, en imposant notamment la délivrance d’une autorisation préalable de travail et en prévoyant l’opposabilité de la situation de l’emploi. C’est donc un vrai parcours du combattant pour avoir le droit de travailler qui se dissimule derrière la formule selon laquelle le demandeur d’asile est « soumis aux règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers pour la délivrance d’une autorisation de travail ». C’est renvoyer à la situation des personnes étrangères en situation régulière sur notre territoire. En l’occurrence, ce n’est pas justifié.
Dans leur grande majorité, en effet, ces personnes étrangères disposent d’un titre de séjour leur permettant d’exercer une activité professionnelle salariée sans effectuer de demande d’autorisation de travail préalable. Les titulaires d’un titre de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », « salarié » ou « étudiant », ainsi que les bénéficiaires d’une carte de résident peuvent tous travailler sans démarche préalable. Pour les étudiants, il y a seulement une limite : le nombre d’heures hebdomadaires est plafonné à vingt.
En l’espèce, les demandeurs d’asile ne pourront travailler que parce qu’ils seront demandeurs d’asile. S’ils sont déboutés, ils ne le pourront plus.
Mes chers collègues, la formule « règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers » renvoie en réalité à la procédure applicable aux demandes d’autorisation de travail essentiellement destinées à l’introduction en France d’un travailleur étranger.
Cela n’a donc rien à voir avec la situation des demandeurs d’asile qui sont déjà présents depuis neuf mois sur notre territoire. Ces derniers ne pourraient pas accepter un emploi, s’ils en trouvaient un, faute de disposer d’une autorisation de travail.
En outre, la demande peut prendre plusieurs semaines, voire plusieurs mois avant d’être traitée par l’unité territoriale compétente de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE.
Et c’est l’employeur qui est l’interlocuteur de cette dernière. Il doit fournir une grande quantité de documents et s’engager au versement d’une taxe à l’OFII. La liste des documents diffère selon les régions, mais l’on demande souvent le Kbis et les statuts de la société, un avis d’imposition, le dernier bordereau déclaratif adressé à l’URSSAF, deux formulaires CERFA dûment remplis, une lettre explicative de l’employeur, un CV du demandeur, des photos… Oui, un véritable parcours du combattant ! Tout cela pour que le droit au travail – rassurez-vous, monsieur Karoutchi ! – ne soit pas effectif.
La directive Accueil exige un droit au travail effectif. Le deuxième alinéa de son article 15 dispose : « Les États membres décident dans quelles conditions l’accès au marché du travail est octroyé au demandeur, conformément à leur droit national, tout en garantissant que les demandeurs ont un accès effectif à ce marché. » En l’occurrence, ce ne serait pas le cas, puisque les demandeurs d’asile sont régulièrement sur le territoire.
En outre, une communication de la Commission européenne précise que, si des conditions d’accès à l’emploi peuvent être imposées, elles ne doivent pas, en pratique, être limitatives au point d’entraver concrètement l’accès à l’emploi.
Je demande donc à l’ensemble de nos collègues soucieux du bon respect des directives d’adopter cet amendement, qui assure le respect effectif des droits des demandeurs d’asile, permet de réaliser des économies d’allocation temporaire d’attente et favorise, par le travail, la meilleure intégration des personnes dans notre pays !