Le présent amendement a pour objet de revenir sur la modification que la commission des lois du Sénat a apportée à un aspect essentiel du dispositif relatif au contentieux de l’asile en rétention.
Si le droit pour les personnes placées en rétention de présenter une demande d’asile empêche que la France éloigne des personnes qui méritent sa protection, il est nécessaire que nous disposions des outils adaptés pour assurer l’exécution des mesures d’éloignement légalement prononcées et pour parer aux demandes dilatoires. Soucieux d’assurer cet équilibre, le Gouvernement a prévu trois mesures.
Tout d’abord, l’autorité préfectorale devra procéder, pour maintenir un demandeur en rétention, à un examen individuel destiné à vérifier que la demande d’asile a pour seul but de faire échec à une mesure d’éloignement.
Ensuite, si l’OFPRA considère que la demande d’asile nécessite un examen approfondi, l’étranger sera libéré et autorisé à se maintenir sur le territoire jusqu’à ce qu’il ait été définitivement statué sur sa demande.
Enfin, en cas de rejet de la demande d’asile, l’étranger pourra saisir le tribunal administratif d’un recours suspensif en urgence. Le juge administratif sera alors le juge de l’évidence : s’il considère que la demande d’asile n’a pas pour seul but de faire échec à la mesure d’éloignement, la personne retenue sera libérée ; s’il estime que la demande d’asile est dilatoire, l’éloignement pourra se poursuivre.
Toutefois, la commission des lois du Sénat a modifié ce dispositif d’une manière qui n’est pas anecdotique : elle a prévu que la décision de maintien en rétention pourrait être contestée dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification. En d’autres termes, que l’OFPRA ait statué ou non sur la demande d’asile, la personne concernée pourrait saisir quasi immédiatement le président du tribunal administratif de la seule décision de maintien en rétention.
Le Gouvernement est tout à fait hostile à cette disposition, et cela pour deux raisons. D’une part, elle est frontalement contraire à l’article 46 de la directive Procédures de 2013, qui prescrit un recours effectif après que l’OFPRA a statué. D’autre part, elle me semble très peu opérationnelle, dans la mesure où elle risquerait d’entraîner un enchevêtrement redoutable des procédures juridictionnelles en l’espace de quelques jours, voire une paralysie totale de l’action administrative, à rebours de l’objectif auquel répond le projet de loi. J’ajoute que le juge administratif se trouverait dans une position difficile, privé de l’éclairage de l’OFPRA au moment de statuer sur le recours formé contre la décision de maintien en rétention.
Dans ces conditions, le Gouvernement propose de rétablir le texte initial du projet de loi, qui est seul conforme au droit de l’Union européenne ; s’il n’était pas entendu, la France se trouverait en infraction par rapport à des dispositions impératives de la directive Procédures, sans compter que le dispositif imaginé par la commission des lois compromettrait la fluidité de l’action de l’administration en matière d’éloignement.