Madame la secrétaire d’État, la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, plus couramment appelée « loi ALUR », a introduit, par son article 134, un changement dont ni le Gouvernement ni le législateur ne semblent avoir pris la véritable mesure.
En effet, dès le 1er juillet 2015, c’est-à-dire dans six semaines, les communes qui font partie d’une intercommunalité de plus de 10 000 habitants et qui se sont dotées d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu ne disposeront plus du service que l’État leur rend gratuitement pour l’instruction des autorisations du droit des sols, ou ADS. Il en ira de même, à compter du 1er juillet 2017, pour les communes membres d’une communauté de communes de moins de 10 000 habitants.
En tant que représentant des collectivités territoriales, j’ai naturellement tendance à me réjouir de l’abandon d’une compétence de l’État au profit de ces dernières. Toutefois, la manière dont ce transfert est opéré soulève de graves questions, sur lesquelles je me devais de vous alerter.
En premier lieu, la mission de l’instruction des ADS est considérée non comme une compétence mais comme un simple service. En conséquence, son transfert par l’État n’est pas accompagné, comme pour les transferts de compétences au sens strict, d’une compensation financière des charges.
Dès lors, un premier problème apparaît clairement : les collectivités devront recruter et payer un personnel spécialisé. Quant aux logiciels spécifiques, outre l’inconvénient de leur prix, ils ne seront peut-être pas compatibles avec le logiciel unique utilisé par les directions départementales des territoires. Surtout, ils ne permettront pas la consultation des archives de ces DDT.
Au surplus, il semble que toutes les DDT n’adoptent pas la même attitude au sujet de la mise à disposition de l’application ADS 2007. Or cette solution aurait eu l’avantage de la simplicité et du moindre coût.
En second lieu, ce changement aura des conséquences non négligeables sur le budget de l’État. L’exemple du Haut-Rhin suffit à l’illustrer. La DDT de ce département emploie 75 fonctionnaires spécialisés dans l’instruction des ADS. À l’échelle du pays, on peut estimer à près de 10 000 le nombre total de ces spécialistes.
Or la loi ALUR n’a organisé ni le détachement de ces fonctionnaires ni leur mise à disposition des collectivités territoriales, et encore moins leur transfert vers la fonction publique territoriale. Alors que les collectivités territoriales vont devoir recruter un personnel qu’il leur faudra former, l’État conservera des agents dont la compétence lui sera devenue inutile et qui seront en sureffectifs dans la fonction publique de l’État.
À l’heure de la simplification et des économies à tous les étages, admettez que ce manque d’anticipation aboutit à un gâchis matériel, financier et humain – et je passe sur les complications induites !
Bien que les délais soient très courts, pouvez-vous encore harmoniser la position des directeurs départementaux des territoires en leur demandant de se mettre en conformité avec les instructions ministérielles transmises, le 3 septembre 2014, quant à la mise à disposition de l’application ADS 2007 ?
Surtout, pouvez-vous nous éclairer sur le devenir des fonctionnaires des DDT en sureffectifs qui ne rejoindraient pas volontairement une collectivité territoriale ?