Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il est nécessaire d’aborder ce débat en le replaçant pleinement dans son contexte.
Combien de fois avons-nous indiqué que l’approche fractionnée de cette réforme privait celle-ci de toute la cohérence qui était souhaitable !
Comment ne pas évoquer le véritable saccage qu’a constitué le découpage des cantons, totalement déconnecté des principes évoqués dans le projet de loi : respect des bassins de vie et des découpages intercommunaux ?
Comment ne pas évoquer le découpage administratif des régions, alors que son aspect primordial – les ressources et la fiscalité – n’est même pas abordé ?
Au moment de discuter en deuxième lecture de ce projet de loi NOTRe, fondamental pour l’avenir de nos institutions, je pense qu’il est utile d’en revenir à quelques idées basiques, de bons sens, trop souvent occultées, et de tordre le cou à certains poncifs.
D’abord, le « millefeuille » serait à l’origine de toutes les dérives financières et la France serait en retard dans le concert européen. C’est faux : les dérives financières, mes chers collègues, sont aussi imputables à l’insuffisance de rigueur, aux erreurs de ceux qui ont en charge la gestion des collectivités.
Autre poncif : l’idée que les regroupements tentaculaires et la recherche d’une taille critique sont les seules solutions. Je viens, dans mon département, comme vous tous, je l’imagine, de me livrer à une analyse extrêmement fine de la situation des collectivités locales. Les preuves affluent de partout démontrant que la taille ne rime pas du tout avec économies et efficacité.
Autre poncif : l’idée que, même d’une façon déguisée, la diminution du nombre de communes ou leur disparition est une nécessité, voire un gage de modernité.
La France, de par sa culture politique, a su protéger et faire vivre ses territoires. Donner aujourd’hui des signes d’abandon du réseau communal, c’est porter atteinte à l’engagement au service des autres, de milliers de citoyens, élus ou acteurs, constructeurs de l’équilibre sociétal français.
Autre poncif : l’idée que le découpage administratif, normé et imposé, peut supplanter la volonté des hommes et des femmes de se rassembler sur leurs propres points communs et sur leurs projets.
Enfin, s’agissant des méthodes employées, il faut dénoncer l’attitude consistant à systématiquement passer outre les points de vue et la volonté des acteurs locaux, totalement mis hors-jeu lors des découpages cantonaux.
Il s’agit aujourd’hui de redonner un rôle à ces élus locaux, une responsabilité, notamment au travers du fonctionnement de la commission départementale de la coopération intercommunale – CDCI.
Les décisions que nous prendrons sur la taille des intercommunalités sont extrêmement importantes. Il est maintenant acquis qu’une règle unique et générale, valable pour chacun de nos territoires, est inadaptée. Il est évident que la règle doit pouvoir s’adapter aux réalités locales, que la notion de projet partagé et de volonté des acteurs locaux doit s’inscrire dans la loi.
Pour ces raisons, nous approuvons certains principes évoqués : utilisation de dérogations dans certaines conditions, notamment de densité démographique ; fixation d’un seuil à un niveau acceptable, à condition toutefois que les CDCI puissent, dans des limites précises et dans certains cas, aménager ce seuil, lorsque les contours géographiques des futures communautés l’exigent. Il s’agit là de répondre à un principe de réalité, lorsque, à l’évidence, la nature des projets communautaires est un bon indicateur des périmètres.
Il s’agit donc de donner aux élus, au travers des CDCI, la possibilité d’exercer leurs responsabilités. Je le dis une nouvelle fois à nos chers préfets : ils ne sont pas investis de la clause de compétence générale.
Je conclurai en évoquant un point que j’avais déjà abordé maintes fois en première lecture : les compétences futures des départements, ainsi que leur rôle.
Au regard du surdimensionnement des régions et de la stagnation ou de la diminution des ressources, le renforcement du couple communes-département s’inscrira dans le paysage. La loi NOTRe doit favoriser ce partenariat, notamment dans le domaine économique – à travers des conventionnements –, dans le domaine touristique – au nom du principe de réalité –, dans le domaine de l’aménagement du territoire, dans la détermination des services au public.
Enfin, la place des départements et des collectivités locales dans l’élaboration des différents schémas régionaux sera fondamentale, et ce sera sans doute le chantier qui nous occupera dans le futur.