Intervention de Philippe Duron

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 28 mai 2015 à 8h30
Audition de M. Philippe duRon député sur son rapport au nom de la commission « avenir des trains d'équilibre du territoire »

Philippe Duron, député :

Le Gouvernement a mis en place le compte d'affectation spéciale en 2010 en donnant par ailleurs à la SNCF une plus grande souplesse de tarification sur ses TGV et en lui apportant des fonds issus de la taxe d'aménagement prélevée sur les autoroutes. C'est une solution un peu déresponsabilisante car la SNCF bénéficie d'un système lui permettant de pallier une éventuelle dérive de ses coûts. Ce système permet également d'effectuer une péréquation entre les TGV et les TET. Aujourd'hui, le modèle du TGV se tend et l'excédent dégagé se réduit. Cependant, lorsqu'il y aura des concurrents sur les lignes LGV, ces lignes seront soumises aux deux taxes. Nous avons toutefois pensé qu'il pourrait être plus pertinent de faire peser les taxes sur le billet plutôt que sur les résultats de l'entreprise ferroviaire. Cette évolution priverait l'État d'une recette de 300 millions d'euros, ce qui n'est guère dans l'air du temps. La première solution est en réalité de réduire les pertes et les déficits.

Quant aux délégations de service public et l'ouverture à la concurrence, nous pensons que si la SNCF n'est plus en mesure d'exploiter efficacement certaines lignes, il ne faut pas s'interdire de les ouvrir à la concurrence, avec un véhicule législatif. Nous avons recommandé de le faire pour les trains de nuit. Même lorsque ces trains sont pleins, la SNCF peine à atteindre un taux de couverture de 40 %, et perd ainsi beaucoup d'argent. Un quart des pertes des TET vient des trains de nuit, alors que ces derniers représentent une part marginale du trafic. Mais nous pensons qu'il y a des besoins en matière de train de nuit comme la ligne Paris-Briançon, pour laquelle il n'existe pas de solutions alternatives. Un opérateur comme Thello, qui a repris des trains de nuit franco-italiens, est parvenu à équilibrer ces lignes, alors que la SNCF y perdait de l'argent. Le pragmatisme suggère ainsi d'ouvrir à la concurrence ces trains de nuit, et éventuellement certains trains de jour. Les expériences étrangères d'ouverture à la concurrence montrent en effet qu'elle est toujours source de difficultés pour l'opérateur ferroviaire et pour l'État. Une expérimentation permettrait à chacun de mesurer les difficultés qui seront rencontrées lors de l'ouverture à la concurrence, qui n'est pas un choix mais un horizon inévitable. L'Allemagne a permis aux Länder d'ouvrir à la concurrence les transports régionaux, et Deutsche Bahn n'a pas perdu de chiffre d'affaires ni d'emplois. Affronter dès à présent la concurrence permettrait de mieux la maîtriser. L'ouverture du fret illustre les risques de l'impréparation : la SNCF a perdu 30 % du trafic. Il faut se préparer à ce qui sera nécessairement un choc.

En 2004, nous nous étions battus contre le transfert aux régions des « déficits et des investissements ». Aujourd'hui, le transfert de services n'est pas indispensable. Il s'agit d'abord d'harmoniser la gestion des trains. Sur une ligne comme Caen-Tours, moins de 30 personnes font la liaison de bout en bout. En revanche beaucoup de personnes font Caen-Le Mans ou Tours-Le Mans en TER, qui sont loin d'être pleins. En articulant mieux la correspondance au Mans, on améliorerait le remplissage des TER et on supprimerait un TET qui est trop déficitaire. Dans d'autres cas, le service doit être maintenu en heure de pointe et l'État doit alors compenser le transfert aux régions. Nous proposons également que dans le grand bassin parisien on améliore l'organisation des transports. Aujourd'hui, trois autorités organisatrices de transport coexistent : le STIF, les régions périphériques et l'État. Cela favorise une disharmonie contre-productive. Les régions devraient se rapprocher de l'État pour être chefs de file et assurer à la place de l'État le rôle d'autorités organisatrices de transport, dans un dialogue avec le STIF. Cela permettrait d'apporter un service plus adapté aux personnes venant travailler en Ile-de-France.

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