Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 2 juin 2015 à 14h30
Renseignement et nomination du président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Nous avons aussi présenté un amendement tendant à assurer à la commission un accès aux renseignements « direct, complet et permanent ».

La commission des lois a longuement débattu de la centralisation des données, à laquelle certains sont attachés. M. Cazeneuve, en particulier, a fait valoir qu’une centralisation de l’ensemble des données était impossible, pour des raisons liées aux techniques mises en œuvre, qui sont multiples et complexes. En réponse à un certain nombre d’interrogations, nous avons donc voulu, quelle que soit la réalité géographique – encore que le terme ne convienne pas très bien –, que la commission ait un accès direct aux données, sans intermédiaire, complet, exhaustif, permanent, 365 jours par an et vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Je remercie M. le ministre Jean-Yves Le Drian d’avoir accepté ce contrôle complet, y compris sur l’ensemble des éléments techniques : plateformes, pôles, etc. Je tiens à le dire publiquement, car trop souvent par le passé on s’est réfugié derrière le secret-défense. Si celui-ci doit bien évidemment être respecté, dès lors que l’on crée une commission de contrôle qui a d’amples pouvoirs, il faut que celle-ci puisse les exercer dans toute leur plénitude.

Pour ce qui concerne les algorithmes, qui suscitent des réactions d’extrême méfiance, vous savez qu’il existe des sites d’apologie du terrorisme très sophistiqués, très cryptés et très décryptés. Ces sites sont dangereux, parce qu’ils recrutent des jeunes et des moins jeunes pour ces activités d’horreur et de mort. Or les algorithmes permettront justement aux services d’identifier les personnes qui se connectent fréquemment à ces sites. Est-ce une atteinte aux libertés ? Une telle atteinte – si atteinte il y a – est nécessaire si l’on veut lutter contre le terrorisme. Néanmoins, ces algorithmes doivent avoir un objectif précis et ne pas ressembler aux dispositifs qui existent dans d’autres pays, qui consistent à capter des milliards et des milliards de données sans aucune finalité.

Nous avons déposé un amendement, j’espère qu’il sera retenu, visant à interdire toute reproduction durable, provisoire, transitoire ou accessoire des informations ou documents traités par algorithmes. Autrement dit, veillons à assurer la sécurité de manière efficace, mais soyons rigoureux, stricts, vigilants et intransigeants en ce qui concerne le respect des libertés publiques ! Les interceptions et les intrusions ne pourront donc avoir lieu qu’en cas de nécessité absolue, justifiée et motivée.

Par ailleurs, nous préconiserons, à travers l’un de nos amendements, que l’inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes se fasse uniquement à la suite d’une décision de justice. Nous proposerons également de supprimer l’alinéa qui vise à inscrire dans ce fichier les personnes ayant fait l’objet d’une décision d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. Les associations qui s’occupent des personnes ayant des troubles psychiques y tiennent. En effet, ce n’est pas parce qu’un citoyen a des troubles psychiques qu’il doit être considéré comme un terroriste en puissance. Nous devons débattre de ce point, car il s’agit d’une question de fond.

Pour terminer, …

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