Intervention de Philippe Bas

Réunion du 4 juin 2015 à 21h45
Renseignement et nomination du président de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement — Articles additionnels après l'article 1er

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, rapporteur :

La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements, qui portent d’ailleurs sur une matière dont nous avons déjà débattu.

Des règles imposent de purger les fichiers des renseignements que l’administration n’aurait pas le droit de conserver. En outre, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, dont les moyens d’investigation sont très étendus, peut avoir accès à tout renseignement conservé par les différents services appartenant à la communauté du renseignement. J’ajoute qu’un délit d’entrave pourra être retenu contre tout agent qui refuserait de transmettre une information demandée par la CNCTR.

Comme, de surcroît, il existe aussi la possibilité, dans des conditions très libérales, de faire un recours devant le Conseil d’État, le dispositif de contrôle sera extrêmement puissant, caractéristique d’ailleurs de notre État de droit et s’inscrivant dans notre tradition, en évitant de sortir du droit commun du contrôle exercé sur les activités de police administrative.

Ces amendements ont en commun de vouloir introduire la Commission nationale de l’informatique et des libertés dans ces contrôles, mais cela supposerait que puissent intervenir, dans les services de renseignement, deux institutions administratives indépendantes différentes, exerçant leur contrôle sur des objets différents. Certes, la Commission nationale de l’informatique et des libertés peut bénéficier, pour certains de ses membres, de l’habilitation au secret de la défense nationale. Cependant, il ne faut pas confondre l’habilitation au secret et la nécessité ou le besoin d’avoir accès à tous les secrets.

La mission de la Commission nationale de l’informatique et des libertés est d’une tout autre nature que celle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. D’ailleurs, elle ne vise pas, dans ses contrôles, à faire en sorte que les renseignements soient légalement détenus par les services ; c’est une appréciation qu’elle ne peut pas porter, en vertu de la loi de 1978. Il semble donc que ce contrôle ne soit pas opportun du point de vue de la surveillance de l’activité des services spécialisés.

Par ailleurs, il risque de se produire des conflits entre, d’une part, les contrôles plus approfondis destinés à vérifier la légalité de l’utilisation des techniques de renseignement et de la conservation des données qui en sont issues et, d’autre part, le contrôle de la CNIL visant simplement à déterminer si des données ont été conservées plus longtemps que la loi ne le prévoit et si les gestionnaires de fichiers ont correctement assumé leur obligation de « nettoyer » régulièrement leurs fichiers pour que n’y figurent pas des données qui ne pourraient plus être conservées parce qu’elles auraient été recueillies depuis trop longtemps.

Pour éviter ce conflit entre une institution qui garantit des droits, notamment le secret de la vie privée, comme la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, et une autre institution qui garantit également des droits, mais pas les mêmes, à savoir ceux qui ont trait à la conservation de données personnalisées, il vaut mieux rester dans le cadre de la CNCTR.

C’est la raison pour laquelle nous recommandons le rejet de ces amendements.

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