Intervention de Philippe Bas

Réunion du 23 juin 2015 à 14h30
Renseignement — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, rapporteur :

La disposition adoptée en commission mixte paritaire aurait de toute façon soulevé de solides interrogations quant à sa constitutionnalité.

Nous sommes également parvenus à conserver les apports du Sénat sur la composition de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, qui comprendra neuf membres et non treize, ainsi que sur la différenciation des missions de ses membres. Ainsi, coexisteront une formation restreinte et une formation plénière et certains membres – qui sont tous des magistrats ou des conseillers d’États – disposeront de pouvoirs propres, de sorte que le système retenu soit intégralement préservé.

Nous avons souhaité que la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement obtienne de très larges pouvoirs. À cet effet, nous avons même créé un délit d’entrave dans l’hypothèse où une administration s’opposerait à l’exercice de ses pouvoirs. Nous avons également voulu préserver l’indépendance de cette commission en lui accordant les moyens de cette indépendance ; c’est pourquoi son président nommera lui-même ses collaborateurs, et non le Premier ministre.

Tous ces points ont été intégralement préservés par le travail de la commission mixte paritaire.

À nos yeux, le point le plus crucial de nos échanges était surtout d’assurer la réalité du contrôle juridictionnel des autorisations de mise en œuvre des techniques de renseignement. Or le texte dont nous étions saisis, s’il prévoyait bien la possibilité d’un recours devant le Conseil d’État, le faisait dans des conditions tellement restrictives que l’on pouvait craindre que ce recours n’ait jamais lieu. Désormais, le dispositif prévoit des conditions de recours très souples, puisque trois membres de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement suffiront pour saisir le Conseil d’État.

Lorsque nous voterons ce texte, nous aurons la garantie de l’effectivité du contrôle du Conseil d’État. Nous pourrons en outre avoir confiance dans la manière dont il exercera ce contrôle, dans la mesure où il a maintes fois démontré au cours de son histoire sa qualité de défenseur des libertés publiques. Gageons qu’il le prouvera de nouveau dans le cadre de l’application de la loi relative au renseignement.

Je ne reviendrai pas sur nos débats sur les techniques de recueil du renseignement. Nous avons apporté de nombreuses garanties supplémentaires, technique par technique, de sorte que l’on ne puisse pas abuser des techniques de renseignement dans des situations qui ne seraient pas celles strictement prévues par la loi. Ces garanties ont été intégralement conservées.

Un certain nombre de dispositions relatives au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes ont en outre été reprises. Pour qu’un individu soit inscrit dans ce fichier, il faudra, à chaque fois, une décision du juge ou du procureur.

Vous le voyez, mes chers collègues, nous sommes parvenus à un texte qui devrait pleinement satisfaire le Sénat, tant il ressemble au texte que nous avons adopté il y a peu.

Je voudrais également souligner le renforcement des prérogatives de la délégation parlementaire au renseignement, que préside notre collègue Jean-Pierre Raffarin. Sur son initiative, le contrôle de la délégation parlementaire au renseignement sera élargi aux services de renseignement appartenant à ce qu’on appelle couramment le « second cercle », c’est-à-dire aux services de renseignement que le Premier ministre viendra ajouter par décret. De surcroît, la délégation parlementaire au renseignement recevra des statistiques détaillées sur la mise en œuvre des techniques de renseignement, à la fois par finalité et par technique. À l’avenir, si nous constatons un recours exagéré à certaines techniques ou un recours exercé dans des conditions qui ne nous satisfont pas, nous pourrons saisir le Gouvernement de la nécessité, ou en tout cas de l’opportunité, de modifier les pratiques ou les textes.

Enfin, la commission mixte paritaire a maintenu la clause de « rendez-vous » que nous avions tenu à inscrire dans ce texte, afin de pouvoir dresser le bilan des nombreuses dispositions sensibles qu’il contient. Nous pourrons réaliser un tel bilan à la lumière non seulement des travaux de la délégation parlementaire au renseignement, mais aussi à celle du rapport annuel de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

En définitive, si ce texte est adopté, il sera tout à fait exemplaire de notre volonté d’inscrire pleinement la mise en œuvre des mesures de police administrative, que sont les techniques de renseignement contemporaines, dans la tradition de l’État de droit français. C’est la raison pour laquelle je tiens à exprimer ma satisfaction par rapport au texte auquel a abouti la commission mixte paritaire et que je vous invite à l’adopter à une large majorité.

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