Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 26 juin 2015 à 9h30
Modernisation du droit de l'outre-mer — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à souhaiter un prompt rétablissement à Mme la ministre des outre-mer.

Depuis 2012, le Président de la République et le Gouvernement n’ont eu de cesse d’adresser aux Ultramarins ce message fort : la République ne les a pas oubliés.

Après plusieurs années marquées par une diminution des crédits, l’effort financier consacré aux outre-mer a progressé entre 2012 et 2015, si l’on tient compte des dépenses budgétaires et fiscales, de 1, 7 milliard d’euros, soit 10, 36% !

Malgré un contexte économique défavorable, cette évolution conséquente illustre bien la volonté du Gouvernement de tenir les engagements du Président de la République envers des territoires où les besoins sont immenses, notamment en matière d’emploi, de logement, d’éducation et d’investissements nécessaires au développement.

Le Gouvernement a également marqué sa mobilisation à travers plusieurs lois symboliques destinées, entre autres choses, à trouver une solution à la crise qui a frappé les Antilles en 2009, Mayotte et la Nouvelle-Calédonie en 2011, et donné lieu à des manifestations sans précédent contre la vie chère.

La spécificité des économies ultramarines rendait nécessaire l’adaptation de la réglementation de la concurrence à la réalité des outre-mer.

La loi relative à la régulation économique outre-mer, promulguée en novembre 2012, a prévu les outils pour corriger les situations de monopole ou d’oligopole et pour renforcer la transparence des prix.

Un certain nombre de dispositifs comme la défiscalisation, la surrémunération des fonctionnaires, ou encore la signature des plans « logement outre-mer » ou « Mayotte 2025 » sont venus appuyer cette impulsion positive.

Très récemment, le Président de la République a chargé Victorin Lurel de travailler sur l’égalité réelle économique entre les outre-mer et l’Hexagone. Son rapport, très attendu, devrait être remis à l’automne.

À titre personnel, je voudrais saluer les nombreux engagements que le Premier ministre, M. Manuel Valls, a annoncés pour le département de Mayotte lors de son déplacement des 12 et 13 juin 2015 : je pense notamment à l’arrivée d’un peloton de gendarmerie supplémentaire dès le mois d’août pour faire face à l’insécurité, à l’affectation de quarante-quatre agents de la police de l’air et des frontières en septembre pour lutter contre l’immigration clandestine, ou encore à la mise en place à partir de juin 2016 de liaisons directes entre Paris et Mayotte pour favoriser le tourisme et désenclaver l’île.

Aujourd’hui, le Gouvernement poursuit cette démarche en faveur de nos territoires en nous présentant pour examen le projet de loi de modernisation du droit outre-mer.

Ce texte contient des mesures relatives au développement économique et social, aux transports, à l’aménagement du territoire, mais aussi à la fonction publique et aux collectivités territoriales, ainsi que des mesures en matière de sécurité intérieure et de sûreté aérienne. Il procède également à des mises à jour pour tenir compte des évolutions statutaires de plusieurs collectivités d’outre-mer.

Le caractère hétéroclite, composite, ou encore disparate des dispositions contenues dans ce texte, caractère que vous dénoncez, monsieur le rapporteur, est cependant à l’image des douze territoires d’outre-mer que compte la France.

En effet, avec des statuts institutionnels qui sont très souvent des modèles uniques en leur genre, et des spécificités géographiques, climatiques, historiques, sociales et économiques aussi diverses, comment pouvait-il en être autrement? C’est d’ailleurs pour tenir compte de la singularité de ces territoires que le ministère de l’outre-mer est devenu, le 16 mai 2012, le ministère « des » outre-mer.

Il est néanmoins regrettable que le ministère des outre-mer ne soit pas davantage associé en amont à la rédaction des projets de loi. Cela permettrait de ne pas recourir aussi souvent aux ordonnances et donnerait au Parlement les moyens de se prononcer sur les extensions et les adaptations de la législation outre-mer prévues pour chaque projet de loi.

Malgré ce bémol, le projet de loi répond à des demandes fortes émanant de ces territoires lointains.

Il prévoit notamment l’extension du bouclier qualité-prix et la création d’un observatoire des prix à Saint-Martin.

Il tend aussi à faciliter l’accès des agents non titulaires de Wallis-et-Futuna aux trois fonctions publiques, ainsi qu’à favoriser la titularisation des agents contractuels des communes polynésiennes et la mobilité vers les trois fonctions publiques des agents territoriaux.

Si ce texte va dans le bon sens, les dispositions qu’il contient pour répondre aux enjeux auxquels les outre-mer sont confrontés ne sont néanmoins pas exhaustives. L’intitulé du texte permettant de faire figurer dans ce dernier des mesures concernant des sujets très différents, nous n’avons pas manqué une telle occasion !

Mes collègues interviendront pour vous présenter des amendements relatifs à leurs départements. Je voudrais pour ma part, et sans entrer dans les détails, évoquer rapidement ceux qui concernent l’île de Mayotte.

Je suis tout d’abord heureux que la commission des lois ait adopté mon amendement visant à rendre obligatoire la création d’établissements publics d’État compétents en matière de portage foncier et d’aménagement en Guyane et à Mayotte. Suffisamment d’études et de discussions ont souligné les difficultés rencontrées par ces deux départements en la matière et ont examiné quelle était la solution la plus adaptée pour y remédier pour que nous puissions maintenant considérer que le temps est non plus à l’incantation, mais à l’action.

Par ailleurs, il m’est apparu important de prévoir le règlement de la situation des agents publics mahorais qui aspirent légitimement à l’égalité républicaine. Je pense aux 3 600 agents et ouvriers territoriaux de Mayotte et aux surveillants pénitentiaires qui n’ont pas le droit à une revalorisation de carrière alors même qu’ils contribuent à assurer le service public à Mayotte depuis de longues années.

Il m’a également semblé indispensable de permettre la mise en place à Mayotte, département fortement touché par le chômage, de leviers existants en métropole de nature à favoriser l’emploi. Le travail intérimaire et l’économie sociale et solidaire constituent à cet égard des outils précieux.

Enfin, je vous proposerai – il s’agit là sans doute d’une déformation professionnelle – d’adopter un amendement visant à assouplir la procédure des requêtes en nullité devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, compétente pour Mayotte.

Au cours de l’examen de ce texte, je reviendrai plus précisément sur ces amendements, et j’espère, mes chers collègues, qu’ils recueilleront votre approbation, ou tout du moins qu’ils susciteront un débat constructif.

En conclusion, le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui marque une fois de plus l’engagement pris par le Gouvernement de soutenir les outre-mer et l’intérêt que ce dernier porte aux difficultés qu’ils connaissent. C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera ce texte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion