Cet article 19 quater, introduit par la commission des lois, est, comme je l’ai expliqué dans la discussion générale, inadmissible – comme d’ailleurs tous ceux qui sont relatifs aux déboutés –, dans la mesure où il refuse aux étrangers dont la demande d’asile a été définitivement rejetée l’hébergement d’urgence.
À travers le texte issu des travaux de la commission, la majorité sénatoriale de droite a rédigé le parfait manuel de gestion des demandeurs d’asile déboutés : création de centres pour les enfermer, refus de l’hébergement d’urgence et – c’est le point d’orgue ! – interdiction de réclamer un titre de séjour sur un fondement autre que celui du droit d’asile, tel que la situation familiale ou médicale, ce qui est d’ailleurs anticonstitutionnel.
Au nom des libertés, du respect de nos valeurs, de la Constitution, ainsi que des conventions signées et adoptées par la France, nous ne pouvons pas mettre en place de tels dispositifs, qui abîmeraient notre pays et notre histoire.
Les personnes déboutées du droit d’asile doivent avoir accès au dispositif d’hébergement d’urgence. Cela n’est absolument pas négociable et ne devrait même pas faire l’objet d’une discussion dans nos assemblées.
Sur la forme du débat, soulignons qu’un seul amendement, le nôtre, avait été déposé en première lecture – nous avons été rejoints cette fois-ci – sur ce dispositif visant à mettre purement et simplement les personnes déboutées à la rue, dans l’attente d’une expulsion. C’est une honte pour notre République ! Nous regrettons qu’un sujet aussi grave soit traité de manière aussi peu approfondie.
Combien de ces déboutés produits industriellement par la « machine », qui seront toujours plus nombreux si cette réforme venait à être adoptée en l’état, n’ont pas de chemin de retour, même organisé, vers leur pays d’origine ? Ce retour est impossible aujourd’hui, il le sera toujours demain. Je pense notamment à la Somalie, à l’Érythrée, au Soudan, à la Libye, à la Syrie, à l’Afghanistan, à l’Irak, à l’Iran ou encore au Bangladesh, tous pays interdisant, de par la nature de leur régime, des retours organisés.
Si certains ont noté la gravité du drame syrien, cause d’un grand nombre d’accords en Europe, ces mêmes politiques ont-ils une simple idée de la nature des récits de ces réfugiés, lesquels détaillent leurs craintes et les persécutions qu’ils ont subies ?
Pour ces raisons – mais il y aurait encore beaucoup à dire ! –, je vous invite, mes chers collègues, à voter notre amendement de suppression. Ainsi, vous assumerez vos responsabilités et vous ferez preuve, sinon d’humanisme, du moins d’un peu de lucidité et de bon sens.