Intervention de Marc Massion

Réunion du 29 juin 2011 à 14h30
Exercice du droit de préemption — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Marc MassionMarc Massion :

Aujourd'hui, les opérations d’aménagement, notamment quand il s’agit de logements ou de transports en commun, sont entravées du seul fait des estimations des propriétaires privés qui spéculent sur la valeur future de leur bien. Les logements, équipements et services nécessaires pour que la vie de tous soit confortable ne peuvent se faire sans investissements ni constructions nouvelles. Si elles profitent à tous, ces réalisations coûtent cher et rapportent surtout aux propriétaires d’immeubles ou de terrains qui ont les moyens de les empêcher ou de spéculer sur ce que la collectivité ou les grands investisseurs pourraient faire de leurs possessions.

De nouvelles règles sont nécessaires pour réaffirmer la primauté de l’intérêt général sur les intérêts particuliers. La spéculation est devenue à ce point banale que les juges de l’expropriation qui fixent les prix en cas de préemption ne respectent pas toujours l’esprit de la loi. Ils ont pour souci principal le dédommagement des propriétaires et prennent rarement en considération l’intérêt public qu’il y aurait à construire un équipement, mais aussi à payer un juste prix pour acquérir le sol ou l’immeuble nécessaire. Pis encore, le service des domaines, devenu France Domaine, anticipe souvent l’évaluation spéculative des terrains et surévalue de nombreuses propriétés en prenant en considération les variations de prix parfois très fantaisistes qui reposent sur des changements de destination des sols supposés, des anticipations des décisions des élus, ce qui est tout à fait contraire à l’esprit républicain.

C’est pourquoi nous avons choisi de donner corps à l’une des idées qui figurera dans nos propositions, à savoir que le territoire est un patrimoine commun dont l’exploitation privée ne doit pas empêcher les réalisations d’utilité publique. Nous proposons de préciser le sens de la première phrase de l'article L. 110 du code de l’urbanisme qui dispose que « le territoire français est le patrimoine commun de la nation » en indiquant que le moyen de préserver l’intégrité de ce patrimoine est de faire en sorte que, dès lors que l’intérêt général est l’objectif visé et l’utilité publique dûment reconnue, la priorité est d’estimer la valeur des biens non pas sur le prix futur et souvent fantasmé des propriétaires, mais sur la destination du sol au meilleur des intérêts de la collectivité.

« La destination prioritaire des sols est de servir l’intérêt général. Les documents d’urbanisme ont pour vocation de préserver la durabilité de ce patrimoine commun. Ils servent de référence à l’évaluation de la valeur des biens. » Après qu’un tel article aura été inséré dans le code de l’urbanisme, les services de l’État comme les juges seront conduits à produire des évaluations réalistes en rapport avec les capacités contributives des collectivités.

Le sol de la nation n’est pas un bien comme les autres. Sans rogner le droit de propriété, nous estimons qu’il est devenu incontournable de réguler les appétits illimités de spéculateurs qui pensent que s’enrichir en spéculant sur le prix des sols ne fait de mal à personne. Or c’est tout à fait le contraire.

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