L’exercice est pour moi difficile.
En effet, dans un premier temps, en tant que président du groupe d’études sur la gestion des déchets, j’ai souhaité déposer des amendements répondant aux mêmes préoccupations que celles que vous avez exprimées, mes chers collègues. Mais je me suis vite rendu compte que les mesures que vous proposiez n’étaient pas réalistes.
La première objection tient au nombre de points de collecte qu’il faudrait créer, puisque les amendements tendent à imposer cette obligation à tous les commerces vendant des produits alimentaires : ainsi, le moindre épicier serait obligé d’installer un dispositif de collecte. C’est matériellement impossible : les auditions m’ont permis d’évaluer le nombre de points de collecte supplémentaires à 32 000 !
J’ai essayé d’envisager des solutions plus optimales. Si l’obligation était imposée aux seuls magasins d’une surface supérieure à 500 mètres carrés, il ne faudrait plus créer que 7 000 points de collecte supplémentaires et si la barre était fixée à 2 500 mètres carrés, ce chiffre tomberait à 2 000. Limitée à ces deux catégories d’établissement, la création d’un dispositif de collecte devient envisageable, pour un volume de déchets collectés suffisamment important.
Mais la deuxième objection que soulèvent ces amendements, la plus essentielle, je tiens à le souligner solennellement, mes chers collègues, tient à la remise en cause du monopole des collectivités territoriales sur les éco-contributions : demain, si vos amendements étaient adoptés, il faudrait qu’elles en partagent le produit.
Il faut donc bien y réfléchir, car je ne suis pas du tout sûr que nous soyons tous d’accord pour renoncer, même partiellement, à ces financements. Je me souviens très bien des diatribes d’Alain Vasselle, lors des réunions du groupe d’études sur la gestion des déchets ou au sein de cet hémicycle, estimant scandaleux que les éco-contributions ne couvrent pas le différentiel existant entre le coût d’une collecte normale des déchets et celui d’une collecte sélective. En adoptant ces amendements, vous allez supprimer une source de financement des collectivités territoriales.
Face à ce problème, ma communauté d’agglomération a mis en place des berces pour les bouteilles en plastique et des containers pour les suremballages, mais elle a agi sur sa propre initiative et avec ses propres moyens, pour éviter tout transfert du produit des éco-contributions vers d’autres partenaires. Je vous le dis, mes chers collègues, il vaut mieux que nous agissions pour notre propre compte plutôt que d’ouvrir une brèche dans le monopole des collectivités locales sur la perception des éco-contributions. Il faudrait au moins recueillir l’avis préalable de l’Association des maires de France ! Je ne nie pas la réalité du problème, mais les collectivités territoriales peuvent mettre elles-mêmes en place un dispositif de collecte d’emballages – je précise au passage à notre collègue Alain Vasselle que la réglementation applicable aux éco-organismes n’établit pas de distinction entre suremballages et emballages.
De grâce, n’ouvrons pas de brèche dans le monopole de perception des éco-contributions, à un moment où il va falloir défendre les collectivités locales, nos collègues du groupe d’études sur le traitement des déchets le savent ! Après les travaux de la mission commune d’information sur le traitement des déchets demandée par le groupe centriste, le groupe d’études va se pencher sur les éco-organismes.
Si la Haute Assemblée décide d’adopter ces amendements, je m’en remets à sa sagesse. Toutefois, ayant parcouru le même chemin que vous, mes chers collègues, j’ai également cherché à trouver des solutions au problème de l’élimination des emballages. Mais j’ai eu l’occasion d’organiser des auditions, de rencontrer des professionnels qui m’ont rappelé un certain nombre de réalités. Comme je le disais tout à l’heure, l’enfer est pavé de bonnes intentions !