Intervention de Jacques Muller

Réunion du 8 octobre 2009 à 15h00
Engagement national pour l'environnement — Vote sur l'ensemble

Photo de Jacques MullerJacques Muller :

… nous concentrant strictement sur le contenu du texte. Nous sommes même venus à votre secours, madame la secrétaire d'État, pour préserver la loi littoral, menacée par vos troupes présentes au Sénat.

Quel bilan dresser de la discussion de ce projet de loi ? Nous sommes extrêmement déçus devant le contenu final.

Dans le domaine des transports, la transposition des directives européennes. On nous a dit qu’il n’était pas nécessaire d’aller aussi loin... Vous avez notamment refusé de protéger les zones sensibles en montagne par des droits régulateurs.

En matière d’énergie, le texte issu de nos travaux est plombé par le tabou du nucléaire, indûment privilégié par le biais des dérogations quant aux normes d’isolation des bâtiments. Et il a fallu un vibrant plaidoyer des Verts pour arracher, contre l’avis du Gouvernement et celui de la commission, l’inscription dans le texte d’un plan de développement de l’éolien.

En ce qui concerne les déchets, les propositions restent prisonnières d’une logique industrielle, qu’il s’agisse des incinérateurs ou des technologies de tri mécano-biologique. Elles témoignent d’une approche frileuse au regard des mesures prises dans les pays voisins. Le refus d’instituer l’obligation de justifier le dimensionnement des unités de tri mécano-biologique ou des incinérateurs, avec un objectif de réduction à échéance de quinze ans, me paraît tout à fait emblématique.

S’agissant de la biodiversité, nous n’avons pu que nous étonner du refus de la compatibilité entre les schémas de cohérence territoriale, les schémas de cohérence régionale écologique de l’environnement et les plans Climat territoriaux.

Nous avons également dû profondément regretter que le Gouvernement et le Sénat, dans sa majorité, refusent de se positionner sur un sujet représentant un enjeu planétaire, à savoir le pillage des ressources génétiques dans le monde et des savoir-faire des populations autochtones ; une disposition affirmant notre volonté de lutter contre cette bio-piraterie avait sa place dans un texte fondateur tel que celui-ci.

Mais plus préoccupants encore sont les reculs sur la question de la biodiversité. L’un des plus graves concerne ce qu’il faut bien appeler le « recyclage » de la notion d’agriculture raisonnée. Ce concept, qui ne repose pas sur des exigences de résultat, a fait un véritable « flop » commercial auprès des consommateurs. Or il se voit attribuer une certification environnementale applicable aux exploitations et aux produits concernés.

Je veux également dénoncer la trahison dont on s’est rendu coupable au sujet des préparations naturelles peu préoccupantes. Là, le recul est indéniable !

Enfin, je citerai l’introduction de la traçabilité génétique dans la filière agroalimentaire, sans utilité pour les consommateurs, mais qui intéresse les firmes au plus haut point.

Sur le thème santé-environnement, je relève la frilosité dont il a été fait preuve quant au marquage des téléphones mobiles et à la nomenclature des nanomatériaux.

Pour ce qui est de la gouvernance, je regrette la responsabilité au rabais qui a été retenue à l’encontre des maisons mères dont les filiales ont occasionné des dégâts.

Surtout, je déplore la volte-face opérée sur la question de l’« éco-blanchiment », ou . C’est un vrai retour en arrière par rapport au Grenelle I. Le refus de faire clairement figurer ce concept dans la loi nous contrarie franchement. Et pourtant, des exemples d’éco-blanchiment, nous en avons d’évidents sous les yeux, et qui ne sont nullement remis en question par ce projet de loi, qu’il s’agisse de l’agriculture raisonnée ou du nucléaire. Ainsi, AREVA, dans sa communication, définit le nucléaire comme « l’énergie au sens propre » ! Si le texte avait indiqué que l’éco-blanchiment n’est pas acceptable, AREVA aurait eu quelques soucis !

Force est de constater que les groupes d’intérêts ont pesé constamment sur les débats et favorisé les reculs dans le domaine de la biodiversité.

Au final, les sénateurs Verts sont embarrassés. Sur le fond, les reculs graves que comporte ce texte nous inciteraient à voter contre. Pour autant, il comporte aussi un certain nombre d’avancées. Nous ne jetterons donc pas le bébé avec l’eau du bain, fût-il bien chétif et malade à sa naissance. En conséquence, nous nous abstiendrons, tout en ajoutant que nous sommes très sceptiques quant aux suites qui seront données à cette loi. Le « bébé Grenelle »

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