J’en viens à l’immigration irrégulière, à propos de laquelle une discussion sur l’éloignement est engagée, nous le savons tous.
Monsieur le ministre, je n’ai jamais dit à cette tribune – pas plus que n’importe où ailleurs ! – que le nombre d’éloignements avait diminué. J’ai simplement dit qu’il n’avait pas augmenté et qu’il était constant depuis plusieurs années. C’est la seule chose que j’ai dite !
Il faut savoir que le taux d’exécution de nos mesures d’éloignement est, en réalité, très faible. Il s’établit, en moyenne, à 15 % pour les ressortissants des pays tiers et à 50 % pour les pays de l’Union européenne.
Le tableau qui figure au rapport de la commission des lois prend sa source à la Direction centrale de la police aux frontières, la DCPAF, et à la Direction générale des étrangers en France, la DGEF. C’est un document tout à fait officiel, qui mentionne des chiffres eux-mêmes tout à fait officiels.
Ce qu’on y lit, ce n’est pas que vous avez fait moins bien que les autres. Simplement, on y lit que vous n’avez pas fait mieux §et que, depuis 2010 jusqu’à maintenant, le taux d’exécution des mesures d’éloignement prononcées est constant. En 2010, nous étions à 23, 3 %, toutes mesures d’éloignement confondues ; en 2011, ce chiffre s’établissait à 24, 4 % ; en 2012, il était de 29, 5 % ; en 2013, il était de 23, 4 % et en 2014, il était de 22, 3 %.
Comment interpréter ce tableau ? Je pense, pour ma part, que l’on n’éloigne pas suffisamment. Car l’immigration irrégulière est, quant à elle, très importante. Nous savons qu’elle est de l’ordre de 400 000 à 450 000 personnes. Elle est évidemment assez difficile à chiffrer avec précision. Toutefois, force est de constater que, depuis 2010, le nombre d’éloignements n’évolue pas – en tout cas, le pourcentage est à peu près constant. C’est la raison pour laquelle je demanderai que l’on modifie le texte qui nous est proposé pour renforcer les mesures d’éloignement.
À peine ai-je terminé ces constats rapides que mon temps de parole est presque écoulé. Je ne pourrai donc pas répondre aux propos que vous avez développés il y a quelques instants à cette tribune, monsieur le ministre.
Je mentionnerai quand même que la commission a adopté 120 amendements. Elle a estimé nécessaire de prévoir la possibilité d’un débat annuel au Parlement sur les orientations pluriannuelles de la politique d’immigration et d’intégration afin de disposer de la meilleure information sur cette question.
Les conditions d’accès à la carte de séjour pluriannuelle ont été, en outre, restreintes, en excluant en particulier de son bénéfice les salariés titulaires d’un contrat à durée déterminée et les étrangers faisant l’objet d’une admission exceptionnelle au séjour. La commission a également renforcé les conditions dans lesquelles l’administration peut exercer un contrôle afin de vérifier que les bénéficiaires remplissent toujours les conditions pour en bénéficier. En outre, elle a précisé les circonstances dans lesquelles le titre peut être refusé ou retiré. Par ailleurs, les conditions relatives à la durée de présence régulière sur le territoire national pour pouvoir bénéficier du regroupement familial ont été étendues de dix-huit à vingt-quatre mois. Le titre pluriannuel cesse d’être un principe pour devenir une exception. Le principe, c’est le titre annuel.
De plus, le pouvoir d’appréciation du préfet pour délivrer les titres de séjour a été rétabli. La commission des lois n’a pas souhaité que des titres soient obtenus de plein droit, elle a voulu préserver en la matière le pouvoir d’appréciation du préfet.
Enfin, la commission a maintenu le critère actuellement applicable pour délivrer une carte de séjour à un étranger malade, fondé sur l’existence des soins nécessaires dans le pays, et non sur l’accès effectif à ceux-ci par l’étranger concerné.
Je me souviens du débat de 2011 et des propos qui ont été tenus. En tous les cas, je n’ai pas le sentiment d’être moins respectueux de la santé des étrangers malades en situation irrégulière. J’ai simplement souhaité – et nous avons souhaité – répondre à des circonstances en respectant les principes de droit de notre pays tout en prenant en compte la maladie des étrangers qui doivent être éloignés.
Soucieuse d’améliorer les mécanismes proposés dans le projet de loi pour renforcer l’effectivité des mesures d’éloignement, la commission des lois a précisé les dispositions relatives à l’assignation à résidence par l’harmonisation des sanctions pénales, mais aussi en demandant des garanties de représentation qui n’étaient pas prévues dans le texte d’origine, à savoir la validation du maire pour une attestation d’hébergement et la mise en place d’un cautionnement qui garantit la représentation.
Nous avons également modifié la réglementation sur les obligations de quitter le territoire français, OQTF, en abaissant le délai de départ volontaire de trente à sept jours et en allongeant la durée maximale des mesures d’interdiction de retour à cinq ans. Nous avons modifié la procédure d’obligation de quitter le territoire français pour les déboutés du droit d’asile afin de disposer d’une procédure efficace à l’endroit de ceux que l’on doit absolument éloigner après qu’ils ont été définitivement déboutés.
Il y a bien sûr d’autres procédures. Vous avez parlé de l’intervention du juge des libertés et de la détention à partir de quarante-huit heures. Nous souhaitons rester sur le dispositif de 2011, lequel prévoit l’intervention du juge au bout de cinq jours.