Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame, messieurs les secrétaires d’État, mes chers collègues, l’urgence écologique était une vérité qui dérange ; c’est aujourd’hui une exigence partagée.
Le film de l’ancien vice-président des États-Unis Al Gore et l’attribution à ce dernier du prix Nobel ont indéniablement marqué une étape importante dans la prise de conscience écologique à l’échelle internationale.
« Nous allons exploiter l’énergie du soleil, du vent et du sol pour faire marcher nos voitures et nos usines. » Ces mots, prononcés il y a une semaine seulement par le président Obama lors de sa cérémonie d’investiture, ont, par leur évidente simplicité, concrétisé le changement d’orientation de l’administration américaine, dont nous devons nous réjouir.
Je n’oublie cependant pas que cette prise de conscience a été longue à se dessiner, tant sur le plan mondial que dans notre pays, et que certains doivent encore être convaincus. Je n’oublie pas non plus les textes, les discours et les écrits de ceux qui, en France, ont été les premiers militants de l’urgence écologique, en particulier dans les années soixante-dix. À l’époque, ils étaient bien seuls.
C’est dire si le texte qui nous est présenté aujourd’hui vient de loin. Pour cette raison, il laissera sans doute une trace dans notre histoire législative, mais, pour qu’il marque vraiment, il faut aussi qu’il soit suivi d’effets.
Or, de ce point de vue, les incertitudes sont grandes. Peut-être partagez-vous d’ailleurs, monsieur le ministre d’État, certaines de nos inquiétudes. Elles portent sur le financement des engagements du Grenelle, le recul des services publics, l’influence des lobbies.
Sans anticiper sur nos débats ni sur le vote final du groupe socialiste, je peux vous dire que nous nous engagerons dans cette discussion avec le même état d’esprit que nos collègues de l’Assemblée nationale, c'est-à-dire avec responsabilité et pragmatisme.
Oui, nous approuvons la démarche visant à établir un diagnostic partagé pour faire bouger les consciences et pour infléchir la courbe des certitudes concernant la lutte contre l’effet de serre.
Oui, nous approuvons la démarche concertée, élargie, coproductrice de pratiques nouvelles et de solutions innovantes du Grenelle, avec ses comités opérationnels, les COMOP.
Oui, nous approuvons également l’idée d’un compromis du possible, car il serait présomptueux de notre part de donner des leçons à quiconque sur un sujet aussi complexe.
Oui, nous sommes pour le volontarisme en matière d’économies d’énergie.
Ce texte vient de loin, ai-je dit ; j’aurais aussi pu dire qu’il revient de loin, car son parcours parlementaire a déjà été pour le moins chaotique.
Des voix se sont élevées, à l’Assemblée nationale, pour en amoindrir la portée, sinon en dénaturer le contenu. Cela risque de se produire également dans notre assemblée.
En tout état de cause, j’ai déjà entendu quelques apartés, au sein de notre commission, pouvant donner à penser que ce texte pourrait essuyer quelques déboires au cours de nos discussions…
Le parcours risque encore de se compliquer puisque, vous l’avez confirmé, monsieur le ministre d’État, la navette parlementaire sur le présent texte ne sera pas achevée que nous devrons déjà aborder l’examen du projet de loi dit « Grenelle II ».
Il a fallu d’ailleurs toute la ténacité de nos collègues députés socialistes pour conserver sa force au texte et en améliorer la portée sur certains points. Ainsi, 150 amendements de notre groupe ont été adoptés à l’Assemblée nationale, où le projet de loi a été voté à la quasi-unanimité. On pourrait dire, en forçant un peu le trait, que c’est la gauche qui a sauvé votre texte, monsieur le ministre d’État !
À mes yeux, cela montre d’une part la possibilité du consensus entre nous, d’autre part l’utilité du droit d’amendement parlementaire. Au moment où nous nous apprêtons à débattre du projet de loi organique relatif à l’organisation de nos travaux, il n’est pas superflu de rappeler la valeur de ce droit constitutionnel.
Ce texte revient également de loin du point de vue gouvernemental. Le moins que l’on puisse dire, c’est que son portage ministériel a connu quelques soubresauts ! À quelques jours près, monsieur le ministre d’État, vous vous présentiez au Sénat pour défendre ce texte sans secrétaire d’État chargé de l’écologie. Heureusement, le Président de la République a pourvu au remplacement de Mme Kosciusko-Morizet, et je veux saluer la nomination de Mme Jouanno, dont je connais les compétences puisqu’elle a occupé des fonctions opérationnelles à Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l’ADEME, dont le siège social se trouve dans ma ville !