Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à cette heure tardive et à l’orée de ce débat sur le projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, vous ne m’en voudrez pas de m’éloigner de mes notes pour vous parler avec mon cœur de la conception de l’environnement qu’entretiennent les populations ultra-marines.
Dans nos lointaines contrées, parler d’environnement, c’est parler de l’homme, de la création, de l’innocence et de la beauté originelle, du jardin d’Éden, de la Genèse, et pas de l’Apocalypse ! C’est le sentiment qu’éprouvent les habitants des collectivités – régions et départements – d’outre-mer de cette partie assez reculée du monde qu’est le Pacifique : ils ont en leur possession un joyau terrestre, mais cela les met devant des difficultés. C’est le sujet de ce soir et des jours prochains.
Oui, parler d’environnement, c’est parler avec ses tripes, avec son cœur ; je ne cherche pas à tenir des propos choquants ou excessifs, je veux simplement vous interpeller. Dans l’outre-mer, qu’il soit français, anglais, ou américain, on ne fait pas de distinction conceptuelle entre l’environnement et l’identité. Nous ne comprenons pas qu’une loi ou un règlement puisse parler du premier sans prendre en compte le second.
C'est la raison pour laquelle il convient de rappeler avec clarté dans le projet de loi, dès le début, que, parmi les spécificités locales des départements et collectivités d’outre-mer, figurent en premier lieu l’interaction et le lien fusionnel entre l’individu et l’environnement naturel dans lequel il a toujours évolué. Cette observation est d’ailleurs aussi valable pour toutes les collectivités de l’hexagone.
Il ne serait donc pas conforme aux valeurs traditionnelles des collectivités ultramarines d’envisager une séparation conceptuelle, voire législative, entre l’homme et la nature, car c’est toute leur richesse.
Cette spécificité de l’outre-mer a été internationalement actée dans un document intitulé Pacific Appeal, annexé à la résolution n°31.COM/11C adoptée en juillet 2007 par le Comité du patrimoine mondial de l’UNESCO lors de sa 31e session à Christchurch, en Nouvelle-Zélande. Cette résolution porte justement sur la nécessaire implication des collectivités locales dans les processus d’inscription de sites du Pacifique sur la liste du patrimoine de l’humanité.
Si elle est respectée, cette spécificité ultramarine, dont je vous entretiens avec autant d’emphase, est susceptible de représenter une source d’enrichissement et d’épanouissement interculturel durable entre la France hexagonale et ses régions ultramarines. Dans le cas inverse, la législation ne sera pas bien comprise.
Dans cette optique, et afin de promouvoir une politique environnementale globale pour l’ensemble du territoire de la République à laquelle nous aspirons, il paraît incontournable de voir reconnaître ce paramètre majeur qu’est la spécificité ultra-marine parmi les principes directeurs de ce projet de loi. Gardons à l’esprit que les phénomènes climatiques – réchauffement, montée des eaux, intempéries – ne sont pas vécus de la même façon dans l’hexagone que dans les collectivités d’outre-mer, qui aspirent à obtenir la même protection législative.