Intervention de Pierre Laurent

Réunion du 21 octobre 2015 à 21h30
Suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Pierre LaurentPierre Laurent :

Nous considérions – et considérons toujours – que la publicité est particulièrement nocive pour les enfants et les adolescents, au regard notamment des enjeux de santé publique qui ont été évoqués, sans parler, de manière plus large, du fait que la publicité appréhende les enfants comme des prescripteurs d’achat, les enrôlant ainsi, très tôt, au service d’une société d’hyperconsommation.

Prenant appui sur les législations en vigueur dans d’autres pays, ce travail avait abouti, comme je viens de l’indiquer, au dépôt d’une proposition de loi en 2010. Le texte qui nous est présenté aujourd’hui relève à mon sens davantage d’une dénaturation que d’une simplification de cette proposition de loi, contrairement à ce qui a pu être dit précédemment.

Bien plus complète et ambitieuse, celle-ci s’articulait selon quatre axes.

Premièrement, elle prévoyait la sanctuarisation des programmes pour enfants et adolescents, en les exonérant de publicité. Cette interdiction s’appliquait – c’est l’une des questions cruciales – tant aux chaînes publiques qu’aux chaînes privées. À nos yeux, une telle interdiction globale était seule légitime, puisqu’il s’agissait de répondre à des impératifs d’intérêt général et de santé publique qui concernent tous les enfants.

Par ailleurs, notre proposition de loi traitait également des autres plages horaires, puisque, malheureusement, la plupart des enfants regardent la télévision bien au-delà des seuls programmes destinés à la jeunesse. Nous limitions plus clairement l’influence des contenus publicitaires, en interdisant par exemple le recours à des personnages de programmes dédiés à la jeunesse dans des publicités ou en renforçant les dispositions du code de la santé publique relatives à la publicité pour les boissons sucrées.

Deuxièmement, la proposition de loi de 2010 prévoyait un renforcement du contrôle et des sanctions.

Troisièmement, elle comportait un volet relatif à l’éducation et à la sensibilisation des enfants et des adolescents par la mise en œuvre d’un programme pédagogique de lecture de l’image et des médias à destination des élèves.

Enfin, quatrièmement, des dispositions visaient à défendre la production de l’animation audiovisuelle en France, dont la qualité est reconnue, y compris à l’international, au travers de mesures propres à engendrer des ressources nouvelles pour le Centre national du cinéma et de l’image animée.

Or, dans le texte qui nous est soumis aujourd’hui, l’ambition éducative de ces propositions a disparu, au profit d’objectifs très limités. C’est la raison pour laquelle j’ai parlé d’une « dénaturation », et non pas d’une « simplification », comme l’a fait notre collègue André Gattolin.

Ainsi, seul l’audiovisuel public est concerné, alors que la version initiale de la proposition de loi renvoyait à un décret en Conseil d’État les mesures à prendre concernant l’audiovisuel privé.

Avant même l’examen du texte en commission, nous avions regretté cette limitation, estimant que réduire le champ du dispositif à l’audiovisuel public le rendait bancal. Les enfants qui regardent les chaînes privées seraient-ils moins vulnérables ? Nous pensons plutôt le contraire !

Pour autant, nous étions prêts à soutenir cette proposition de loi, considérant qu’il s’agissait d’un premier pas en vue de la protection de l’enfance et de la jeunesse. Malheureusement, la commission a fini de vider le dispositif de son contenu, le privant ainsi de toute effectivité.

L’interdiction de la publicité commerciale ne concerne désormais que l’audiovisuel public, toute perspective de renforcement de la réglementation applicable aux chaînes privées ayant disparu.

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