Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame le rapporteur, mes chers collègues, l’objectif de la proposition de loi de notre collègue André Gattolin est à la fois louable – tous les orateurs qui m’ont précédé l’ont reconnu – et presque consensuel.
Ce texte est louable, car il tend à protéger les enfants et les adolescents, public particulièrement sensible et vulnérable, de messages publicitaires susceptibles d’abuser de leur crédulité, de leur jeunesse, pour forcer un acte d’achat vers des produits dont les effets pourraient être néfastes à leur santé ou, tout simplement, à leur équilibre.
Il est, aussi, consensuel – au vu des débats de ce soir, je le qualifierai plutôt de « quasi-consensuel » –, si j’en crois le sondage évoqué par André Gattolin. Selon ce sondage, publié par l’IFOP voilà quinze jours, 71 % de la population française est favorable « à la suppression de la publicité commerciale dans les émissions destinées à la jeunesse et aux enfants sur les chaînes de la télévision publique ».
J’ajoute – mais cela a également été souligné – qu’un grand nombre de pays ont déjà soit légiféré, soit réglementé sur la publicité diffusée dans le cadre des émissions destinées à la jeunesse. Ces pays ayant été cités, je n’entends pas revenir sur la corrélation, assez complexe, entre messages publicitaires et obésité. Je précise néanmoins que l’obésité n’est pas seule concernée et qu’il faut aussi songer à certaines influences pouvant être néfastes aux enfants.
Pour louable et consensuel que soit l’objectif visé par la proposition de loi, celle-ci a été substantiellement modifiée par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, sur proposition de son rapporteur, Mme Corinne Bouchoux, que je félicite pour son travail, ainsi que pour son esprit d’ouverture et son souci d’équilibre.
Ainsi, l’article 1er du texte, qui tendait à prévoir une réglementation par décret en Conseil d’État des messages publicitaires diffusés à la jeunesse par l’ensemble des chaînes de télévision, a été réécrit par la commission, afin que soit inscrit dans la loi le principe d’autorégulation du secteur de la publicité s’agissant précisément de cette publicité à destination de la jeunesse.
L’autorégulation sera mise en œuvre sous la supervision du CSA, à qui l’on demandera de produire un rapport annuel au Parlement, faisant état des efforts effectués par les chaînes dans le cadre de la charte alimentaire. Cette charte, qui existe depuis 2009, est effectivement peu connue. Le travail est réalisé, on le sait, mais la communication et les rapports sur ce point précis sont par trop discrets.
L’article 2, quant à lui, a subi deux modifications importantes.
La première modification porte sur la définition de ce que l’on appelle la « jeunesse ».
En effet, le concept de jeunesse est sans doute un peu flou pour que l’on puisse légiférer sur cette base. Pour ceux qui, comme nous, se croient toujours jeunes malgré leur âge ou ceux qui, toujours comme nous, pensent que la jeunesse est un état d’esprit, il faut être un peu plus précis.
C’est pourquoi le texte cible désormais un public âgé de moins de douze ans. Les programmes destinés à ce public se verront donc interdits de publicité sur les chaînes de l’audiovisuel public et sur les sites dédiés à ces émissions, avec un élargissement d’un quart d’heure prévu avant et après la plage horaire concernée.
La deuxième modification concerne le principe d’une compensation financière à la perte de ressources envisagée, que certains évaluent à 5 ou 7 millions d’euros, et d’autres à 15 millions.
Ce concept de compensation financière a été supprimé et l’application de la loi reportée au 1er janvier 2018, à l’occasion de la mise en œuvre d’une réforme globale du financement de France Télévisions. Celle-ci s’appuiera sur les propositions qui ont été avancées dans le rapport élaboré, durant huit mois, par André Gattolin et moi-même et que, mes chers collègues, vous n’êtes pas sans connaître.
Je tiens à profiter des quelques minutes dont je dispose encore pour revenir sur un argument développé par David Assouline et repris par Sylvie Robert. Il eût fallu, selon nos deux collègues, étendre la mesure à l’ensemble des chaînes publiques et privées.
Évidemment, considéré sous un certain angle, cet argument ne nous laisse pas insensibles. Mais j’y vois tout de même un paradoxe, monsieur Assouline. Dans votre discours, qui, en définitive, rejoint le nôtre, vous indiquez qu’il s’agira aussi de différencier le service public dans le paysage audiovisuel. Comment ne pas utiliser, pour ce faire, des mesures tendant à améliorer le discours public, en le concentrant sur l’environnement, la santé et la protection des enfants ?
J’ai entendu sur d’autres travées, particulièrement les nôtres, qu’il revenait aux parents de transmettre le message à leurs enfants. J’en conviens, mais nous avons justement là une opportunité d’expliquer aux parents que, s’ils veulent protéger leurs enfants, ils doivent leur faire regarder les émissions matinales du service public, diffusant des messages publicitaires propres.