Faute d’établir un diagnostic commun sur le service public, compte tenu du contexte dans lequel nous examinons cette proposition de loi, il paraît difficile de parvenir à un consensus.
La question qui est posée, c’est celle de la vérité des prix, celle des moyens dont on se dote pour mener une politique.
La dernière fois que nous avons eu un grand et long débat sur l’audiovisuel public dans cet hémicycle, c’était à l’occasion de l’examen de la loi voulue par Nicolas Sarkozy pour supprimer la publicité après vingt heures, loi qui a cassé l’équilibre financier qu’avait retrouvé France Télévisions bien des années auparavant.
Cet équilibre reposait sur deux piliers bien distincts : les ressources propres – les recettes commerciales – et les ressources issues de la contribution à l’audiovisuel public. De cette façon, le groupe public était indépendant de l’État sans dépendre de ses recettes publicitaires.
Depuis lors, il n’est jamais parvenu à retrouver cet équilibre.
Le financement public de France Télévisions reste soumis chaque année – on l’a vu – aux aléas de la conjoncture financière et au vote du budget ; pour autant, le groupe ne peut compter sur la seule redevance, personne n’ayant fait le choix d’imiter le modèle anglais, celui de la BBC, ou allemand d’un financement entièrement public de l’audiovisuel.
Par conséquent, France Télévisions doit trouver de nouvelles ressources propres.
À droite, j’ai toujours entendu la même chose : « Il y en a marre des assistés, du service public, qu’on doit alimenter ! Qu’ils aillent donc chercher des ressources propres ! » Et quand le service public s’efforce de trouver ces ressources, on lui retire 10 millions d’euros !
On pourrait tenter l’expérience pendant quelques années et étudier ainsi le réel impact de cette suppression. Je suis prêt à dire banco, si l’on m’explique comment compenser. Or, tant en Suède qu’au Canada, on n’a observé aucun impact…
Selon nous, le débat doit porter pour l’essentiel sur la manière de protéger l’enfance et la jeunesse à l’heure de la révolution numérique et des mass media. C’était d’ailleurs l’objet de mon rapport de 2009, dans lequel je formulais douze propositions, dont certaines ont été mises en œuvre. Je soulevais dans ce travail d’autres problématiques qui continuent de se poser, comme la violence et la santé.
Surtout, c’est le contenu pédagogique des émissions elles-mêmes qui doit retenir notre attention. À cet égard, seul le service public permet d’exercer une influence sur les programmes produits. Dans le privé, c’est d’abord l’Audimat et la rentabilité commerciale qui fixent les règles.
Pourquoi fragiliser le service public, alors même qu’il accorde la plus grande attention à la protection et à l’éducation des jeunes, et qu’il a adopté une charte propre dont les prescriptions s’imposent à lui en sus des dispositions de la loi de 1986 et des règles auxquelles est soumis le privé ?