Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai beaucoup de plaisir à intervenir ce matin, dans mes nouvelles fonctions de secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, pour examiner une proposition de loi relative aux groupements européens de coopération territoriale, les GECT, émanant de M. Marc-Philippe Daubresse et plusieurs de ses collègues et adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale.
Je dois le dire d'emblée, ce texte important est au service de l'Europe des citoyens, une Europe incarnée dans des projets concrets et des réalisations qui ne le sont pas moins.
Aujourd'hui, c'est en quelque sorte l'Europe de la coopération au service de nos collectivités territoriales qu'il s'agit, à travers ce texte de loi, de mettre en oeuvre.
Le groupement européen de coopération territoriale sera l'instrument de droit commun de la coopération transfrontalière, transnationale ou interrégionale sur le territoire de l'Union européenne. Il permettra des coopérations inédites dans des domaines comme les transports, la santé, l'éducation ou la gestion des espaces protégés.
Vous le savez, en juillet 2004, la Commission européenne a souhaité inclure ce nouvel instrument de coopération dans la réforme de la politique régionale.
Trois raisons ont ainsi présidé à la création du groupement européen de coopération territoriale.
Tout d'abord, les instruments juridiques existants, à l'instar du groupement européen d'intérêt économique, le GEIE, s'étaient en fait révélés quelque peu inadaptés pour organiser une coopération efficace sur la période de programmation 2000-2006.
Ensuite, compte tenu notamment de l'augmentation du nombre de frontières terrestres et maritimes de l'Union européenne à la suite de son élargissement, il était nécessaire de faciliter le renforcement de la coopération transfrontalière au sein de l'Union européenne.
Enfin, les structures juridiques en matière de coopération transfrontalière étaient multiples et reposaient sur des accords internationaux bilatéraux.
Cette multiplicité de statuts était alors souvent source de complexité et de confusion et constituait, en réalité, un frein à l'aboutissement des projets de coopération transfrontalière.
Ainsi, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à rappeler particulièrement ce point devant vous, pour la première fois, le GECT permettra non seulement à des collectivités territoriales, mais aussi à des organismes de droit public d'États membres de l'Union européenne de passer des conventions directement avec des États étrangers en dehors du cadre de l'État d'origine.
La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui modifie l'article L. 1115-5 du code général des collectivités territoriales, afin de permettre aux collectivités territoriales et à leurs groupements de déroger, uniquement dans le cas de la création d'un GECT, à l'interdiction expresse de passer des conventions avec des États étrangers. Cela va de soi, la signature de telles conventions doit être préalablement autorisée par le représentant de l'État dans la région.
Je tiens toutefois à préciser que l'entrée en vigueur du règlement GECT, effective depuis le 1er août 2007 sur le territoire de l'Union européenne, n'affecte pour autant ni la validité des accords existants ni la possibilité pour les États membres qui le souhaitent de négocier des accords internationaux visant la coopération transfrontalière.
J'insiste sur ce point, un tel outil demeure une option offerte, qui ne substitue pas aux outils existants.
Madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, s'engager sur la voie de la coopération transfrontalière, c'est s'engager sur la voie de la coopération effective et concrète entre les populations ainsi que sur celle de la cohérence des projets frontaliers.
Par ailleurs, je le précise, ce texte ne doit, en aucun cas, servir à l'exacerbation des irrédentismes régionaux, qui pourrait menacer la cohésion de certains États.
Aussi, le Gouvernement est favorable à une adoption rapide de cette proposition de loi, et ce pour deux raisons principales.
D'une part, la Commission européenne veille à la bonne mise en oeuvre du règlement GECT, qu'il nous appartient d'appliquer de manière directe et immédiate, comme le stipulent d'ailleurs les actes de cette nature. Le Gouvernement français, de son côté, veillera à ce que cette mise en oeuvre soit conforme à l'esprit du texte et au respect de notre souveraineté nationale.
D'autre part, de nombreuses collectivités territoriales françaises se sont d'ores et déjà engagées dans des projets GECT. Je pense ici, par exemple, à l'Eurométropole Lille-Courtrai-Tournai, due à l'initiative de l'ancien Premier ministre Pierre Mauroy et officiellement lancée le 28 janvier dernier. Elle devrait être suivie rapidement d'autres initiatives, telles que celle qui devrait associer, pour certains projets communs, les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées et les communautés autonomes de Catalogne et des Baléares. Je citerai également le programme franco-luxembourgeois « Alzette-Belval 2015 », qui associera quatre communes luxembourgeoises à la communauté de communes du pays Haut-Val d'Alzette.
D'une façon générale, tout en encourageant de telles initiatives, je souhaite que l'État, au travers des préfets, soit présent dans les GECT, afin d'assurer la bonne cohérence de ces projets.
Aujourd'hui, une nouvelle étape peut, me semble-t-il, être franchie, avec la mise en place des bases juridiques qui permettront la coopération entre des collectivités et des organismes publics en faveur d'un bassin de vie, d'emplois ou, encore, d'infrastructures.
Il nous faut en effet oeuvrer au profit des intérêts mutuels des territoires.
Dans le cadre de cette discussion parlementaire, le Gouvernement, soutenant cette démarche, approuve les conclusions de la commission des lois du Sénat tendant, sur le rapport de Mme Catherine Troendle, que je tiens à féliciter pour la qualité de son travail, au vote de cette proposition de loi telle qu'adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 29 janvier dernier, et il en souhaite l'adoption dans les mêmes termes.