Intervention de François Pillet

Commission spéciale croissance, activité et égalité des chances économiques — Réunion du 24 mars 2015 à 21h10
Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission spéciale, amendement 967

Photo de François PilletFrançois Pillet, rapporteur :

L'article 11 du texte remplace la procédure d'injonction structurelle, ouverte en cas d'abus de position dominante et jamais utilisée à ce jour, par une nouvelle procédure pouvant être lancée par l'Autorité de la concurrence en cas de position dominante d'un opérateur soulevant des « préoccupations de concurrence ». Les pouvoirs d'enquête et de sanction du régulateur sont à cette fin significativement accrus : l'injonction structurelle pourrait être émise même en l'absence d'infraction, une préoccupation de concurrence suffit ; et l'Autorité pourrait imposer la cession d'une partie des activités, ce qui n'est pas nouveau mais assez exorbitant du droit commun. Les demandes de suppression totale de ce nouveau pouvoir sont nombreuses. Encadrons-le, plutôt, et renforçons le caractère contradictoire de la procédure et la protection des agents économiques. Le cabinet du ministre y a semblé favorable.

D'abord, écartons le critère des prix élevés, qui n'est en rien à lui seul un indice de défaut de concurrence. Les critères de position dominante et de part de marché supérieure à 50 % seraient plus utilement complétés par un critère de marges nettes anormalement élevées. Ensuite, précisons le déroulement de la procédure : formalisons les « préoccupations » de l'Autorité dans un rapport dûment justifié, soumis à l'entreprise, puis le cas échéant dans une décision motivée définitive. Une telle procédure existe dans d'autres domaines. Le président de l'Autorité de la concurrence m'a dit son accord sur ce point.

Rendons également les délais plus raisonnables pour l'entreprise à qui l'on demande de céder une partie de son activité dans un marché où l'offre serait singulièrement faussée de ce fait : deux mois pour formuler des observations sur les premières préoccupations de concurrence, trois mois au lieu de deux pour présenter des engagements - mais pouvant être portés à quatre -, six mois au moins et non plus trois pour résilier des accords et actes commerciaux, et six mois au moins pour céder des actifs. Excluons l'utilisation des informations obtenues par l'Autorité à l'occasion de cette procédure sans infraction dans le cadre d'une procédure ultérieure pour pratique anticoncurrentielle. Enfin, interdisons l'utilisation de cette procédure lorsque l'Autorité, dans les trois années passées, a dû clore une procédure pour abus de position dominante sans parvenir à prouver l'infraction.

Si le recours n'est pas suspensif (il ne l'est jamais pour les décisions en matière de concurrence), l'entreprise pourrait, en cas de conséquences manifestement excessives de la décision de l'Autorité, saisir le premier président de la cour d'appel de Paris pour demander le sursis à exécution.

Tels sont les éléments qu'introduit l'amendement n° 967.

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