Intervention de Alain Duran

Réunion du 27 octobre 2015 à 21h30
Surveillance des communications électroniques internationales — Article 1er

Photo de Alain DuranAlain Duran :

Au début du mois de juin dernier, dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif au renseignement, j’ai déposé un amendement visant à restreindre le champ des communications pouvant être rattachées au régime de la surveillance internationale, au motif que ce régime international comprenait moins de garanties et était imprécis concernant les contrôles des activités des services de renseignement. C’est sur ce dernier point que l'article du projet de loi relatif au renseignement a été censuré par le Conseil constitutionnel. Il revient aujourd’hui sous la forme de cette proposition de loi. Je tiens dès lors à effectuer quelques remarques avant l’examen des amendements.

Tout d’abord, il ne s’agit aucunement d’empêcher les services de renseignement de mettre en œuvre des techniques de surveillance lorsqu’ils ont des raisons légitimes de le faire. Il est indispensable qu’ils en aient les moyens, et cela ne saurait être remis en question lorsque les intérêts fondamentaux de la nation sont menacés. Il s’agit néanmoins, au regard de l’importance de l’atteinte à la vie privée que le texte autorise, à la fois de promouvoir les garanties permettant de s’assurer d’une stricte proportionnalité dans l’usage de ces techniques et de prévenir les usages dévoyés qui pourraient en être faits. En effet, tous les citoyens français sont concernés par cette loi. À partir du moment où ils se connectent à un site hébergé à l’étranger ou échangent un mail avec une personne installée dans un autre pays, leurs communications peuvent être surveillées sous ce régime international. Seules les communications et navigations sur internet strictement franco-françaises ne seront pas concernées par ce texte.

Ensuite, ce régime international est caractérisé par un contrôle allégé, qui ne s’effectue qu’a posteriori, c'est-à-dire après l’atteinte à la vie privée et au secret des correspondances.

Par ailleurs, les personnes qui exercent un mandat ou une profession sensible – les parlementaires, les journalistes, les avocats et les magistrats – peuvent faire l’objet d’une surveillance sous ce régime de contrôle allégé. Certes, le texte prévoit un principe général protecteur, mais il n’empêche pas les autorisations de surveillance très problématiques. Nous y reviendrons lors de l’examen des amendements.

Enfin, et c’est là la principale nouveauté de ce texte par rapport à la loi relative au renseignement, l’utilisation des algorithmes, ces fameuses « boîtes noires », n’est plus limitée à la seule lutte contre la menace terroriste. Elle devient possible pour toutes les autres finalités. Ce point mérite d’être souligné et débattu avec attention, compte tenu du changement de paradigme qu’il instaure. En effet, ce dispositif permet la recherche de comportements suspects sur la base de traitements automatiques par analyse de régularités statistiques dans les données de citoyens qui ne sont pourtant pas identifiés comme présentant une menace.

Les amendements que plusieurs de mes collègues et moi-même présenterons viseront à discuter de ces problématiques.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion