Intervention de Dominique de Legge

Réunion du 30 septembre 2015 à 14h30
Accord france-russie relatif à des bâtiments de projection et de commandement — Adoption définitive en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Dominique de LeggeDominique de Legge, rapporteur pour avis :

En outre, dans un tel contexte, si la perspective d’une revente à l’Égypte tombe à point nommé, cela ne peut se faire sans une opération vérité des prix. Monsieur le secrétaire d’État, il faut jouer cartes sur table ! C’est pourquoi j’ai été quelque peu étonné, pour ne pas dire choqué, par la réponse que j’ai reçue du secrétaire d’État chargé du budget au questionnaire que je lui ai adressé voilà une dizaine de jours pour y voir plus clair : « J’ai pris bonne note de votre correspondance et ai prescrit un examen attentif de ce dossier. Je ne manquerai pas de vous apporter une réponse dans les meilleurs délais. » §

Une autre question essentielle se pose : la procédure retenue est-elle sécurisée ?

Le versement à la Russie de 949, 7 millions d’euros a été opéré à partir du programme 146 « Équipement des forces », comme l’a rappelé le rapporteur. Reconnaissons que cette imputation budgétaire est assez étonnante au regard de la LOLF, puisque le versement d’une indemnité à un État étranger n’a rien à voir avec l’objet de ce programme, d’autant que les BPC restent la propriété de DCNS et n’ont pas été affectés à la Marine.

En d’autres termes, si le budget de la défense reçoit 893 millions d’euros, il supporte en revanche l’avance de 56, 7 millions d’euros correspondant au remboursement des frais que la Russie a engagés.

Je tiens à le rappeler, pour le budget des armées, nous sommes toujours sous le régime de la loi de finances initiale pour 2015 et, comme nous en sommes d’ailleurs convenus avec le Gouvernement, 2, 2 milliards d’euros de recettes exceptionnelles ne se feront pas et seront donc transformées en crédits budgétaires lors du collectif de fin d’année. Aussi, il ne faudrait pas que ces 56, 7 milliards d’euros passent dans l’épaisseur du trait du règlement des recettes exceptionnelles en fin d’année. Je nous invite donc tous à être vigilants sur ce point.

Plus étonnante est l’analyse que le Gouvernement fait de l’article 53 de la Constitution. Dans l’exposé des motifs du projet de loi, il précise que cet accord est soumis au Parlement en vertu de l’article 53 de la Constitution, lequel dispose que les engagements internationaux « qui engagent les finances de l’État […] ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi » et qu’« ils ne prennent effet qu’après avoir été ratifiés ou approuvés ».

Or, dans cet exposé des motifs, le Gouvernement précise également que le présent accord a été signé à Moscou le 5 août 2015 et qu’il est entré en vigueur à la date de sa signature, d’où le versement de 949, 7 millions d’euros à la même date.

Le présent accord comporte donc une stipulation contraire à la Constitution et la validité de son entrée en vigueur immédiate est évidemment contestable, les normes constitutionnelles restant, en droit interne français, supérieures aux conventions internationales.

Or, bien qu’il le prévoie, l’accord n’a pu prendre effet avant son approbation. Le paiement effectué au profit de la Russie était donc dénué de fondement légal. Je m’interroge sur le fait qu’un comptable public ait pu accepter de procéder à un paiement de près de 1 milliard d’euros sur le fondement d’un accord international qui ne pouvait constitutionnellement pas produire d’effets de droit !

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