Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le texte de la proposition de loi consacrée à la surveillance des communications électroniques internationales, tel qu’élaboré par la commission mixte paritaire. Ce texte, déposé au début du mois de septembre, pourra donc être définitivement voté aujourd’hui, une dizaine de jours à peine après son adoption par le Sénat en première lecture.
Je déplore cet examen expéditif et l’absence d’un véritable débat de fond, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. La procédure accélérée engagée par le Gouvernement y a évidemment contribué.
La commission mixte paritaire s’est réunie ce mardi 3 novembre, et le texte final qu’elle a adopté n’a été porté à notre connaissance qu’hier soir, tout comme le rapport de nos collègues, Mme Adam et M. Bas. La volonté d’adopter rapidement ce texte l’a incontestablement emporté sur la qualité du travail de fond que nous, parlementaires, devons effectuer, autant que faire se peut.
Je voudrais, en outre, souligner que le choix a été fait de ne tenir compte ni des critiques formulées par les associations ni des réserves émises par le Défenseur des droits. Pis encore, les craintes du Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe sont restées lettre morte.
Quelles garanties ce texte apporte-t-il aux citoyens, s’agissant des conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés ? Aucune !
Le texte finalement adopté par la commission mixte paritaire supprime les faibles avancées que le Sénat était pourtant parvenu à intégrer. Ainsi, la CMP a rétabli une durée de douze mois pour la conservation des données de correspondances interceptées. Le Sénat avait, quant à lui, choisi une durée de dix mois, témoignant du souci, si minime soit-il, de protéger nos libertés publiques.
La CMP a néanmoins réaffirmé l’impossibilité pour le chef du Gouvernement de déléguer à un collaborateur la décision de désigner des réseaux de communications électroniques internationales sur lesquels l’interception est autorisée. Le fait que des personnes déléguées puissent être à l’origine d’une telle autorisation aurait entraîné une déresponsabilisation des autorités politiques. La disposition qui fait du Premier ministre la seule autorité compétente pour accorder ce type d’autorisation satisfait le groupe écologiste.
Nous dénonçons toutefois la mise en place de systèmes d’écoute massive de communications, pour lesquels les services de renseignement français disposent d’une marge de manœuvre excessive. Ces derniers pourront en effet collecter massivement des données de connexion et des communications émises ou reçues à l’étranger, aux motifs notamment des intérêts majeurs de la politique étrangère, des intérêts économiques ou industriels de la France, ou encore de la prévention du terrorisme.
Cette proposition de loi instaure officiellement la mise en place d’une surveillance de masse, que nous avions pourtant tous dénoncée après les révélations d’Edward Snowden, voilà moins de trois ans.
Protéger la sécurité de nos concitoyens et leurs libertés, mais aussi respecter leur vie privée : tout cela paraît aujourd’hui relever de l’utopie, et c’est fort regrettable. La lutte contre le terrorisme nous conduit un peu plus à menacer la sauvegarde de nos libertés et à faire de chacun d’entre nous un suspect potentiel. Ce texte en est la preuve tangible. C’est donc sans surprise que les écologistes ne voteront pas ce texte.