Oui, c’est évident !
Née voilà soixante-dix ans d’une grande idée de solidarité nationale pour répondre au désir de sécurité de la population meurtrie par la guerre, la sécurité sociale est aujourd’hui considérée comme un acquis, et personne ne conçoit qu’elle puisse ne pas exister. Comme vous l’avez rappelé à l’occasion de la célébration de ce soixante-dixième anniversaire : « Sa préservation et sa modernisation tiennent autant du devoir que du besoin », ce qui n’est pas chose aisée dans le contexte économique actuel.
Pour autant, alors qu’en 2010 le déficit avait atteint un niveau abyssal et mettait en péril la survie du modèle social dont nous sommes très fiers, depuis 2012, nous sommes sur la voie du rétablissement des comptes sociaux. Vous prévoyez de ramener le déficit à 9, 3 milliards d’euros en 2016, soit 3, 1 milliards d’euros de moins qu’en 2015 et 9, 9 milliards d’euros de moins qu’en 2012, et ainsi de suite.
Nous regrettons toutefois que le retour à l’équilibre, initialement prévu pour 2017, soit renvoyé, au mieux, à 2021, si l’on en croit les prévisions de la Cour des comptes. Celle-ci juge ce report préoccupant et rappelle que l’objectif ne pourra être atteint qu’au moyen d’efforts plus ambitieux et d’économies structurelles. La persistance des déficits, notamment de l’assurance maladie, menace la pérennité de notre système de protection sociale.
Lors de la présentation à la presse du rapport sur la sécurité sociale pour 2015, le Premier président de la Cour des comptes a reconnu que des progrès avaient été faits, mais que les déficits résistaient obstinément, nécessitant d’aller plus loin et plus vite.
Madame la ministre, ces réformes sont indispensables et ne peuvent être différées. Pour autant, ce PLFSS contient un certain nombre d’avancées que nous saluons.
Je pense, bien sûr, à l’instauration d’une véritable protection universelle maladie. Comme vous l’avez très justement rappelé, « depuis la création de la couverture maladie universelle, chacun a le droit, en théorie, à une couverture pour ses soins [...], mais, dans les faits, ce droit n’est pas toujours effectif ».
Ainsi, chaque année, un million de Français engagent des démarches administratives complexes pour changer de caisse ou bénéficier de la CMU. Ce dispositif permettra d’éviter des situations de rupture de droits en cas de changement de situation professionnelle, familiale, résidentielle, de caisse ou de régime. Désormais, tous les assurés qui travaillent ou résident en France de manière stable et régulière bénéficieront pleinement du droit à la prise en charge de leurs frais de soins.
Le statut d’ayant droit sera supprimé pour les majeurs, et les enfants auront leur propre carte vitale dès l’âge de douze ans, si leurs parents le souhaitent.
Autre avancée : la généralisation du dispositif de garantie des impayés de pensions alimentaires, qui avait été mis en place à titre expérimental dans vingt départements par la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Ce dispositif permet le versement d’une allocation de soutien familial dès le premier mois d’impayé. C’est une très bonne chose. En effet, dans 40 % des cas de séparation, la pension alimentaire n’est pas versée ou l’est irrégulièrement, ce qui place souvent les parents isolés dans des situations très difficiles.
Nous nous félicitons également que vous renforciez l’accès des mineures à la contraception, que vous mettiez en place la gratuité des actes de dépistage du cancer du sein pour les femmes présentant un risque particulier, et que vous pérennisiez et étendiez l’expérimentation conduite en matière de permanence des soins ambulatoires.
S’agissant de la lutte contre l’obésité, ce PLFSS introduit la possibilité de mener des expérimentations pour améliorer la prise en charge et le suivi des enfants de trois à huit ans. Nous ne pouvons que souscrire à cette mesure, même si nous pensons que le dispositif devrait être ouvert aux professionnels libéraux qui souhaiteraient s’investir dans ce travail de prévention.
Enfin, madame la ministre, je souhaite vous poser deux questions précises.
Premièrement, sur les 375 000 patients qui sont, chaque année, opérés de la cataracte, près de 35 000 d’entre eux bénéficient d’implants de technologie avancée, qui font l’objet d’un « copaiement » de la part des patients, avec l’accord de l’assurance maladie. Le risque existe aujourd’hui que les futurs patients soient privés de ces implants en raison de l’absence, à ce jour, de décision de la Haute Autorité de santé sur leur évaluation. Savez-vous où en est ce programme d’évaluation ?
Deuxièmement, le Parlement a autorisé, voilà deux ans, les pharmaciens à substituer à un médicament biologique de référence un médicament biosimilaire dans un cadre sécurisé. Or, le décret d’application qui doit préciser les modalités et proposer une liste de référence n’a toujours pas été publié. Pensez-vous que sa publication interviendra prochainement ?
Pour conclure, madame la ministre, la majorité des membres du RDSE sera particulièrement attentive au débat qui va s’ouvrir et à la discussion des amendements. Vous pouvez considérer, pour l’instant, que nous faisons preuve d’une neutralité positive…