Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, nous sommes à quelques jours de la COP 21. Alors que la question du réchauffement climatique fera l’objet de négociations internationales, nous avons voté lundi une proposition de résolution affirmant le rôle déterminant des territoires pour la réussite d’un accord mondial ambitieux sur le climat.
Aujourd’hui, nous examinons une proposition de loi liée à ces questions globales et à la protection des forêts face à l’évolution du risque incendie dans un contexte de changements climatiques.
À mesure que la température de la planète grimpe, le risque incendie augmente. C’est ce que confirme un rapport de l’administration américaine, selon lequel « le réchauffement planétaire induit par les activités humaines a amplifié un grand nombre de phénomènes météorologiques extrêmes en 2014 » et « augmentera encore la probabilité d’incendies de forêt ».
Sans vouloir être alarmiste – le bilan annuel français permet de constater une réduction constante des surfaces brûlées grâce aux efforts déjà accomplis et à l’organisation existante –, je crois qu’une vigilance accrue s’impose face à ce risque sur notre territoire, qui est largement couvert par la forêt.
Celle-ci s’étend et s’accroît chaque année de près de 50 000 hectares. Elle est souvent morcelée, car elle appartient, à hauteur de 75 %, à des propriétaires privés. Ils sont en effet plus d’un million à détenir plus d’un hectare. L’incendie se propage d’autant plus vite que cette forêt n’est pas gérée durablement, ni exploitée, ni entretenue. Elle est malheureusement difficile d’accès, faute de dessertes adaptées aux engins de lutte contre l’incendie.
Le texte présenté par notre collègue Pierre-Yves Collombat, dont je salue le travail, va dans le sens d’une meilleure prise en compte de ces réalités. Il vise à permettre à nos territoires de s’organiser pour prévenir les risques d’incendie auxquels ils seront de plus en plus exposés dans les années à venir, et y faire face.
Comme cela a été dit en commission, cette proposition de loi constitue « une rustine de la loi NOTRe », laquelle, en supprimant la clause de compétence générale des départements, a remis en cause leur capacité juridique à poursuivre les actions déjà conduites pour la protection des forêts.
Ce texte vise donc à réparer un tort, en prévoyant explicitement la faculté, pour les départements, d’intervenir dans le cadre de la défense des forêts contre l’incendie.
En outre, cher collègue Pierre-Yves Collombat, vous avez déposé un amendement visant à étendre le champ du texte, originellement destiné aux territoires réputés particulièrement exposés aux risques d’incendie, à l’ensemble des départements, ainsi qu’un amendement tendant à permettre aux régions de France de concourir au financement des opérations de prévention des incendies.
Ces extensions nous semblent bien évidemment cohérentes avec la volonté d’agir, en matière de prévention des risques d’incendie, là où c’est nécessaire, tout en permettant à ceux qui ne poursuivent pas encore d’actions en la matière de pouvoir mettre en place des dispositifs.
C’est d’autant plus indispensable que les phénomènes de réchauffement climatique redessinent d’ores et déjà – les forestiers le savent – la carte des risques pour les massifs forestiers. Je pense notamment aux dépérissements anticipés pour cause de sécheresse ou de problème sanitaire, qui fragilisent des zones jusque-là considérées comme peu sensibles.
Le groupe UDI-UC soutiendra donc cette initiative, qui va dans le bon sens, et permet aux départements d’organiser des actions d’aménagement, d’équipement et de surveillance des forêts, malgré l’absence d’une clause de compétence générale.
Pour autant, la question du financement de ces actions reste entière, tout comme celle du niveau de portage administratif pertinent.
S’agissant de protection et de sécurité, dans une logique de solidarité nationale, et alors que bon nombre de départements sont exsangues, l’État se doit de tenir toute sa place aux côtés des collectivités pour le financement de ces missions d’intérêt général, dont le coût s’avérera très certainement élevé dans les années à venir.
Alors que bon nombre de massifs forestiers s’étendent bien au-delà des limites des départements, il est également essentiel de travailler à une échelle cohérente, celle des massifs. En ce sens, nous devons privilégier, cela a été dit, les modèles d’organisation globale de lutte contre l’incendie, à l’instar des plans de protection des forêts contre les incendies ou de l’Entente pour la forêt méditerranéenne, qui regroupe vingt-neuf collectivités et à laquelle adhérent des régions, des départements, des SDIS et des EPCI.
Pour conclure, je vous rappelle que, à l’heure où nous parlons, l’Indonésie s’embrase encore, victime d’incendies de forêt qui asphyxient une bonne partie de l’Asie du Sud-Est. Le bilan est le suivant : entre 2 et 3 millions d’hectares brûlés et autant de puits de carbone en moins, 500 000 cas d’infection respiratoire, 43 millions d’habitants sinistrés et un épais brouillard qui s’étend au-delà des frontières jusqu’aux Philippines, à la Thaïlande et à la Malaisie.
Les pronostics les plus pessimistes estiment que la quantité de gaz à effet de serre émise par ces feux est supérieure à celle de l’activité économique des États-Unis.
Toutes proportions gardées, l’emballement de ces phénomènes nous donne la mesure des enjeux et de l’urgence d’une bonne organisation de la lutte contre les incendies de forêt, en métropole comme dans nos territoires ultramarins.
L’objectif des dispositions proposées est bien de mieux prévenir et maîtriser les dérèglements de la nature, souvent favorisés, voire provoqués par la main de l’homme, qu’il s’agisse des feux dévastateurs ou des inondations meurtrières que nous avons connues voilà encore quelques semaines.