Au moment où nous commençons l’examen de l’article 4 du projet de loi, il importe que j’interroge M. le ministre sur l’interprétation qu’il convient de donner à deux dispositions, afin que les tribunaux soient éclairés.
Près de huit cents perquisitions ont été menées en sept jours dans le cadre d’un régime de police administrative ; le présent article précise opportunément qu’on ne peut procéder à de telles perquisitions que s’il y a des raisons sérieuses de penser que le lieu perquisitionné est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics.
Le pouvoir judiciaire n’est pas totalement absent de cette procédure, puisque le Gouvernement et l’Assemblée nationale ont bien voulu approuver la suggestion que je leur ai faite de confier à l’officier de police judiciaire le soin de procéder, le cas échéant, à la saisie de ce que j’appellerai, pour simplifier, une pièce à conviction. De sorte que l’officier de police judiciaire ne sera pas un simple témoin de la perquisition administrative ; il en sera aussi, dans ce cas-là, un acteur.
Moyennant quoi deux doutes subsistent, que M. le ministre voudra bien dissiper.
En ce qui concerne les perquisitions administratives de nuit, je fais, pour ma part, une interprétation très claire de l’article 4 du projet de loi : dès lors que la perquisition a été régulièrement ordonnée, l’officier de police judiciaire, à qui il appartient d’opérer les saisies et d’en rendre compte au procureur de la République, peut valablement y procéder indépendamment de l’heure. En d’autres termes, la règle, prévue à l’article 59 du code de procédure pénale, selon laquelle un officier de police judiciaire ne peut procéder à une perquisition qu’après six heures du matin ne s’applique pas dans le cadre de ce régime, sans qu’il soit nécessaire, ni même utile, d’inscrire cette précision dans la loi.
S’agissant des endroits où une perquisition peut être menée, je considère que l’expression « en tout lieu », qui autorise les forces de l’ordre à perquisitionner ailleurs qu’au domicile de la personne visée, couvre les véhicules.
Sur ces deux questions, monsieur le ministre, votre interprétation rejoint-elle la mienne ?
Plus généralement, il me paraît important que les pouvoirs exceptionnels que le Gouvernement tire de la mise en œuvre de l’état d’urgence conservent un caractère temporaire. Ainsi, la commission des lois n’a pas souhaité inscrire à titre permanent dans notre droit un certain nombre de mesures relatives à l’assignation à résidence, au maintien dans le domicile, aux perquisitions et aux interdictions de réunion. Ces pouvoirs exceptionnels, monsieur le ministre, vous les exercez et les préfets les exercent sous votre autorité dans le cadre de l’état d’urgence, mais il ne saurait être question, de mon point de vue, de les rendre permanents.