Le partage de la valeur entre artistes et producteurs a fait l'objet de nombreuses controverses, les rapports se sont empilés, car le débat a été mal posé. L'émergence du modèle de streaming, avec sa consommation titre par titre et non plus par album, bouleverse tout. Le partage des rémunérations au prorata des titres consommés concentre les revenus. Notre diagnostic est que l'artiste-interprète sera le grand gagnant de ce système : dans un secteur hyperconcurrentiel, les producteurs se battent pour signer avec un artiste prometteur. Conseillé par des avocats, des managers, des agents, l'artiste n'est pas une victime exploitée de façon éhontée. Les contrats d'exclusivité prévoient une rémunération qui n'est jamais inférieure à 8 % et peut aller jusqu'à 90 % comme Fauve ; de plus en plus d'artistes se produisent eux-mêmes, un bon tiers d'entre eux négocient des contrats-licences : le contrat en exclusivité n'est plus la norme.
Le streaming rémunère mal : il faut 10 000 écoutes pour générer 62 euros, à partager entre le producteur et l'artiste. L'association WIN (Worldwide international network), que nous avons créée pour revoir contractuellement nos relations avec les artistes, dans un contexte de défiance sur les abattements et les rémunérations, a publié une Fair Digital Deals Declaration en juillet 2014 faisant état de notre position d'ouverture.
Les accords Schwartz représentent une avancée considérable, mais si beaucoup reste à faire, la convention collective aussi, malgré les critiques dont elle est l'objet, car elle détermine le principe d'une rémunération minimale des musiciens, unique au niveau européen. Ne cédons pas à la désinformation. La gestion collective des droits voisins est un outil et non une fin en soi ; nous ne sommes pas contre, mais nous sommes opposés à l'idée de la rendre obligatoire. Je regrette que le Gouvernement ait déposé, sans étude d'impact, un amendement sur les webradios, symptomatique d'une croyance selon laquelle les artistes seraient mieux rémunérés avec une licence légale qu'avec un droit exclusif, alors que c'est l'inverse qui est vrai.