Intervention de Jean-Jacques Filleul

Réunion du 10 décembre 2015 à 15h00
Transport ferroviaire régional — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Jean-Jacques FilleulJean-Jacques Filleul :

En effet, l’occasion se présentera forcément, puisqu’il existe une seule usine de construction d’autocars, sous licence italienne.

Enfin, cette réforme du transport par autocar est à l’évidence une réforme propre, dans l’esprit et dans la lettre.

Certes, à première vue, l’autocar est un mode de transport plus polluant que le ferroviaire. La réalité est pourtant bien plus complexe : 50 % des trains régionaux roulent toujours au diesel ; 25 % des liaisons TER sont réalisées par autocars. Il faut également prendre en compte le taux de remplissage : en dessous d’un certain seuil de fréquentation, le rapport pollution émise par personne transportée par train peut être très élevé.

Par ailleurs, un autocar vaut mieux que cinquante véhicules sur la route, chacun comprend cela, M. le secrétaire d’État l’a rappelé, et l’impact carbone serait négatif si les voyageurs qui prennent habituellement le train se reportaient tous sur l’autocar, ce qui n’est pas possible.

J’ajoute que l’article 2 de la loi Macron prévoit que les pouvoirs publics aient, en la matière, un certain niveau d’exigence environnementale. Les autocars doivent, en effet, relever le défi d’une véritable alternative à la voiture particulière. Un arrêté du 22 septembre 2015 prévoit que seuls les autocars de norme Euro V, jusqu’au 31 décembre 2017, et les autocars de norme Euro VI à partir du 1er janvier 2018, sont, et seront, autorisés à circuler.

Madame la rapporteur, je suis sensible aux critiques relevées dans l’exposé des motifs quant au rapport de la commission sur les trains d’équilibre du territoire. Cette sensibilité à vos propos tient à ma participation active à l’élaboration de ce rapport. Celui-ci constate, en effet, une offre très dégradée, nous en convenons tous, qui ne correspond plus aux besoins des usagers, avec un déficit d’exploitation en forte augmentation ces dernières années. La conjonction de ces facteurs pouvait à terme menacer l’existence même de ces lignes. Le développement du TGV, du transport aérien à bas coût, du covoiturage, remet en cause la pertinence de certaines dessertes des TET, jamais repensées.

Certaines lignes sont surexploitées, d’autres sont très faiblement fréquentées. Cette inadaptation frappe particulièrement les lignes de nuit, confrontées au développement d’autres offres de transport et dont le niveau de confort est surtout très en deçà de ce que les usagers sont en droit d’attendre.

Le rapport pose donc la question de la survie de ces lignes et propose des pistes pour permettre de développer une offre de TET pertinente, en prenant en compte les besoins des usagers. Plutôt que « l’abandon des lignes », comme j’ai pu le lire, le rapport Duron propose une redynamisation et une adaptation de l’offre des trains d’équilibre du territoire.

L’objectif n’est pas, comme vous l’écrivez, d’aboutir à une hyper-régionalisation de l’offre en dehors du TGV, nous n’y souscririons pas. Les TER, dont on connaît le succès, sont bien de la compétence régionale et le resteront. La commission a procédé à une analyse précise, ligne par ligne, de l’offre des TET. Sur les lignes fortement fréquentées, il est proposé de renforcer l’offre, en augmentant la fréquence des dessertes et en les rendant plus attractives. Par ailleurs, le développement de la tarification flexible et la mise en place du cadencement sont d’actualité.

Comme tous mes collègues siégeant à la commission sur les TET, j’ai observé avec satisfaction que le secrétaire d’État aux transports a répondu positivement aux conclusions du rapport. La feuille de route qu’il a présentée en juin 2015 exprime l’ambition que l’État prenne pleinement sa place dans l’organisation des TET : elle nous convient.

Puis, alors que les gouvernances des nouvelles régions seront établies dans les mois à venir, j’attends que les préfets interlocuteurs des régions engagent, au nom de l’État, les négociations visant à revoir le maillage, à revitaliser les TET et à signer les conventions avec la SNCF. L’État stratège prendra alors toute sa valeur comme autorité organisatrice de transport de plein exercice et en renforçant sa capacité d’expertise, élargissant le champ de ses décisions, notamment sur l’offre de transport.

Toujours d’après la feuille de route, pour pouvoir jouer pleinement ce nouveau rôle, les moyens des services chargés des missions d’AOT au sein du ministère des transports sont renforcés. Un conseil consultatif des trains d’équilibre du territoire est créé, afin de permettre un dialogue régulier de haut niveau sur leur évolution, en présence des autorités organisatrices régionales.

Ce positionnement nouveau sur les TET doit s’accompagner d’acquisitions de matériels roulants performants, neufs et adaptés aux besoins des usagers. Un investissement de 1, 5 milliard d’euros nous a été promis à ce titre. C’est l’ensemble de ces conditions et moyens qui permettront aux TET de retrouver toute leur utilité entre les TGV et les TER.

Dans l’article 2 de votre proposition de loi, madame la rapporteur, vous préconisez la mise en place d’un versement transport régional. Convenons ensemble que cette revendication a pu nous paraître justifiée, en particulier dans le cadre de la réforme ferroviaire de 2014. Nous avons alors déposé un amendement tendant à instaurer un versement transport interstitiel dans les secteurs hors périmètre de transport urbain, ou PTU, lequel nous paraissait de nature à fournir de nouveaux moyens financiers aux régions. Le Gouvernement ne nous a pas suivis à l’époque, M. le secrétaire d’État vient de nous le confirmer encore, nous l’avons regretté et compris.

Vous proposez, dans cet article 2, la mise en place d’un versement transport mixte interstitiel et additionnel. Nous ne soutiendrons pas cette mesure, qui diffère de ce que nous avons défendu en 2014 et qui ferait peser de nouvelles charges sur les entreprises.

Pour conclure sur ce point, il vient d’être rappelé que le Gouvernement s’est engagé à compenser en totalité les conséquences de la modification de seuil de neuf salariés à onze salariés prévue par l’article 4 du projet de loi de finances pour 2016.

J’ajoute que, par l’article 39, non rattaché, de ce projet de loi de finances pour 2016, le Gouvernement s’engage à compenser les transferts de compétences des départements vers les régions, notamment en matière de transport scolaire et interurbain. L’objectif est de compenser financièrement ces transferts en attribuant aux régions une ressource équivalente : 25 % du produit de la CVAE des départements au 1er janvier 2017, soit l’équivalent d’un produit fiscal d’environ 3, 9 milliards d’euros.

L’article 3 prévoit la mise en place d’un taux réduit de TVA à 5, 5 % sur les transports publics. Nous avons proposé cette mesure à de multiples reprises, et nous ne sommes pas les seuls. Toutefois, une proposition de loi est-elle le bon véhicule pour modifier un taux de TVA ? Non, évidemment. Une telle réforme a sa place dans un projet de loi de finances.

Monsieur le secrétaire d’État nous a précisé que le Gouvernement est toujours défavorable à cette mesure au regard de l’état des finances publiques dans les circonstances actuelles. M. le ministre des finances en a d’ailleurs exposé les raisons dans un récent courrier adressé à l’Union des transports publics et ferroviaires, suggérant que cette mesure ne serait pas conforme au droit européen – vous l’avez rappelé à l’instant, monsieur le secrétaire d’État. Cette baisse de TVA ne s’appliquerait en effet qu’aux seuls transports du quotidien. Eu égard à tout ce que nous avons entrepris dans ce domaine, nous nous abstiendrons sur cet article.

En revanche, comme nous l’avons fait en commission, nous voterons contre cette proposition de loi.

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