Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, en pleine période de renouvellement des assemblées régionales, les sondages réalisés sur les enjeux et les compétences des régions démontrent que les transports constituent, avec l’emploi et le développement économique, l’une des premières préoccupations des Français.
Cela est aisément compréhensible, tant, à cet égard, les difficultés sont grandes, aussi bien dans les régions très urbaines comme l’Île-de-France, que dans de nombreux territoires enclavés, qui souffrent de l’absence de dessertes ferroviaires, aériennes et même routières de qualité.
Je prendrai l’exemple d’un territoire cher à notre collègue Jacques Mézard, président de notre groupe : celui de l’arrondissement d’Aurillac. Il est desservi par une seule route nationale, la RN 122 – laquelle comporte des tronçons limités à 30 kilomètres par heure, ainsi qu’un grand nombre de radars –, par des lignes ferroviaires lentes et par de rares liaisons aériennes qui laissent à désirer.
Les transports ferroviaires, service public qui devrait être garanti à tous nos concitoyens, ont un coût que la collectivité peine à assumer, en particulier dans le contexte budgétaire actuel.
En 2013, les régions participaient à hauteur de près de 4 milliards d’euros au financement du transport ferroviaire régional, qui est visé par la présente proposition de loi. Elles ont, depuis 2002, permis de faire repartir à la hausse la fréquentation des TER, par les investissements qu’elles ont consentis sur les réseaux, les gares et les matériels roulants.
Alors que l’autonomie financière des régions est plus fragile qu’elle ne devrait l’être, la loi NOTRe du 7 août 2015 a procédé au renforcement de leurs compétences en matière de transports. La compensation de ce transfert de compétences aura lieu, mais le manque récurrent de ressources pérennes ne laisse pas d’inquiéter.
Nous regrettons une nouvelle fois les errements du Gouvernement sur le dossier de l’écotaxe poids lourds. Celle-ci devait garantir une meilleure visibilité à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, dont les projets, essentiels à la réduction des fractures territoriales, sont soumis chaque année aux aléas budgétaires.
Si nous partageons le diagnostic des auteurs de la présente proposition de loi, nous sommes en revanche plus circonspects quant aux solutions préconisées.
Premièrement, ce texte entend revenir sur la libéralisation des liaisons de transport par autocar prévue par la loi Macron, qui vient à peine d’être votée et est entrée en vigueur en août dernier.
Le bilan encore très provisoire de cette mesure peut être considéré comme positif : la nature ayant horreur du vide, elle a notamment conduit au développement d’une offre de services là où il n’en existait pas. Ceci s’est fait dans l’intérêt des usagers, les prix proposés permettant à un grand nombre d’entre eux, dont une forte proportion de jeunes qui n’auraient jamais pris le TGV ni le train Intercités, de voyager sur de longues distances. Il s’agit incontestablement d’un progrès.
Mes chers collègues, nous devons réfléchir en termes de complémentarité des modes de transport qui participent au droit à la mobilité. Cette complémentarité est essentielle dans les zones mal desservies.
Bien que nous soutenions le maintien et le développement des lignes ferroviaires, qui sont essentielles à l’aménagement du territoire, nous constatons, sur certains trajets, qu’à défaut d’un service de qualité, nos concitoyens se replient sur la voiture individuelle, ce qui est contraire à nos objectifs en matière de limitation des émissions de gaz à effet de serre.
Il y a là un véritable effet pervers : l’existence de liaisons ferroviaires dont la qualité est insuffisante favorise le recours à la voiture, décourageant les efforts d’amélioration du réseau ferré.
Quant aux autocars, ils participent – certes faiblement – à l’entretien des routes, par le biais des péages qu’ils acquittent auprès des sociétés concessionnaires.
Deuxièmement, l’article 2 crée, en vue de pallier l’insuffisance chronique des financements, un versement transport régional. Sa composante « versement transport additionnel » reviendrait à taxer deux fois une même assiette, et donc les mêmes redevables. Cela ne nous semble pas acceptable !
Nous étions majoritairement favorables, en revanche, au versement transport interstitiel, applicable sur les territoires situés hors du ressort territorial des autorités organisatrices de la mobilité. Ce versement avait été créé ici même, lors de l’examen de la loi portant réforme ferroviaire, avant d’être supprimé par la majorité gouvernementale lors de l’examen de la loi de finances pour 2015.
Nous ne pouvons toutefois pas souscrire à l’augmentation de la fiscalité des entreprises telle qu’elle est envisagée par les auteurs de la présente proposition de loi. Les entreprises se trouveraient en effet doublement pénalisées, puisque le gage financier de l’article 4 consiste en une réduction du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
Troisièmement, la réduction de 10 % à 5, 5 % du taux de TVA applicable aux transports publics urbains, prévue par l’article 3, ne serait pas conforme au droit européen, comme l’a expliqué le Gouvernement. En outre, cette disposition nous semble relever davantage du ressort d’une loi de finances.
Enfin, cette proposition de loi ne nous semble pas directement concourir à l’amélioration de la qualité des dessertes ferroviaires. Il conviendrait d’aller de l’avant, plutôt que de revenir sur des dispositions qui viennent seulement d’être approuvées par le Parlement.
Ainsi, comme vous l’aurez compris, les remèdes proposés par les auteurs de ce texte n’ont pas convaincu les membres du RDSE. C’est pourquoi nous ne pouvons pas approuver la présente proposition de loi.