J’ai aussi été maire de ma petite ville natale et j’ai moi aussi, monsieur Perrin, eu à respecter la réglementation qui interdit, parce que l’église de Tullins est classée, de construire dans un rayon de 500 mètres. C’est tant mieux d’ailleurs pour la protection du patrimoine, même s’il y a parfois des excès de la part des fameux ABF. Nous sommes donc tous d’accord sur le constat et, tous, nous partageons la même volonté d’agir.
Les gouvernements successifs, là encore de droite comme de gauche, ont essayé d’agir, mais j’ai plutôt tendance à défendre celui auquel j’appartiens, et c'est la raison pour laquelle je vais vous dire que l’actuel gouvernement agit, peut-être pas mieux que les autres, mais en tout cas beaucoup plus que ce n’était le cas depuis une quinzaine d’années, à l’instigation et sous la pression, au bon sens du terme, du Sénat, notamment des membres de la délégation sénatoriale présidée par Jean-Marie Bockel.
L’action résolue engagée par le Gouvernement s’inscrit dans le cadre du choc de simplification voulu par le Président de la République, comme l’a rappelé Mme Gatel.
Le dispositif repose sur le Conseil national d’évaluation des normes, présidé par votre ancien collègue Alain Lambert, ainsi que sur deux circulaires, l’une du 17 juillet 2013, l’autre du 9 octobre 2014.
Un premier bilan des effets de la nouvelle impulsion qu’a donnée le Gouvernement à la lutte contre les normes peut être dressé, en premier lieu sur le flux. Je sais que les chiffres sont toujours sujets à contestation, notamment dans ce domaine, et je n’en citerai donc pas. Je tiens simplement à dire que la DGCL, qui assure le secrétariat du CNEN, est formelle : l’objectif de « zéro charge nouvelle » a été atteint en 2015. Chaque fois qu’une norme a été créée ou que l’« aggravation » d’une norme existante a été décidée, l’administration a été tenue d’obtenir un allégement d’un montant équivalent.
La tendance est donc claire et le résultat net. On ne doit bien sûr pas s’en satisfaire : il faut aller plus loin. Pour accentuer encore en 2016 cette tendance favorable, que personne ne conteste au CNEN, nous allons, à la demande notamment d’Alain Lambert, améliorer les évaluations des conséquences financières des textes présentés au CNEN, car celles-ci ne sont pas suffisamment détaillées. Je disais hier à cette tribune que les administrations centrales se contentent encore trop souvent, en guise de concertation avec les associations d’élus, d’une note d’information ou d’un message électronique.
Cela doit changer, et des directives ont été données en ce sens. Une circulaire a été envoyée par le Premier ministre le 12 octobre dernier à tous les membres du Gouvernement pour leur rappeler que les évaluations financières doivent être aussi précises que possible.
Après le flux, le stock fait lui aussi l’objet de toute notre attention. Une mission d’inspection a d’abord été mandatée en 2015 pour faire ressortir les normes les plus contestables et discuter de leur bien-fondé. Elle a rendu son rapport, avec une liste de 76 propositions regroupées par thématiques, dont celle de l’urbanisme.
J’ai en outre réuni à six reprises des ateliers thématiques à mon cabinet avec les associations d’élus, auxquelles j’avais demandé de nous envoyer des « praticiens » au quotidien de la norme, c'est-à-dire des DGS, les directeurs généraux des services, et des DST, les directeurs des services techniques. Les élus sont évidemment très compétents et dénoncent à juste titre la prolifération des normes, mais ce sont les DGS et les DST qui ont à appliquer celles-ci, avec difficulté, au jour le jour.
À la suite de ces ateliers thématiques, une dizaine de propositions ont été formulées après chaque réunion et deux séries de simplification ont été actées ces derniers mois.
Tout d’abord, comme M. Vandierendonck l’a rappelé, la loi NOTRe a intégré seize mesures de simplification, dont douze étaient issues du rapport de votre collègue Éric Doligé, à qui j’ai rendu hommage hier, ce que je fais de nouveau volontiers cet après-midi. Je ne les citerai pas, mesdames, messieurs les sénateurs, car vous les connaissez.
Ensuite, M. Vandierendonck et Mme Bataille l’ont dit, le 14 septembre dernier, lors du comité interministériel aux ruralités qui s’est tenu à Vesoul, dix-huit mesures de simplification de normes existantes ont été annoncées, notamment dans le domaine de la gestion des bâtiments publics et l’urbanisme.
Pour aller plus loin en 2016, deux évolutions importantes ont été décidées par le Premier ministre.
La première concerne le renforcement du dispositif gouvernemental. Nous avons obtenu qu’une équipe du SGMAP, le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, soit dédiée au suivi de l’allégement des normes. Des fonctionnaires – il en faut, bien sûr, y compris pour simplifier – sont désormais chargés de suivre la mise en œuvre des simplifications.
En effet, une chose est de dire que l’on va alléger et simplifier une norme et l’acter dans un comité interministériel, ou même dans une loi comme la loi NOTRe, une autre chose est de vérifier que l’allégement et la simplification ne se perdent pas dans les sables de l’administration centrale. Grâce à la SGMAP, notre équipe de suivi est donc renforcée.
La seconde évolution, qui est importante, découle d’une demande formulée par Jean-Marie Bockel et Rémy Pointereau dans la proposition de loi simplifiant les conditions de saisine du Conseil national d’évaluation des normes. Le 20 mai dernier, je vous avais expliqué, mesdames, messieurs les sénateurs, que cette proposition de loi ne convenait pas parce qu’elle visait à modifier un décret, mais j’avais pris l’engagement devant vous que j’obtiendrais la modification de celui-ci.
Cela a pris beaucoup de temps, j’en conviens, mais je puis vous dire que pas une semaine ne s’est passée sans que ne m’inquiète de savoir où en était le décret modifié. Il est resté longtemps dans certains bureaux ; il est ensuite resté très longtemps au Conseil d'État ; enfin, la semaine dernière, nous avons obtenu la publication de ce décret : alors que, auparavant, il fallait réunir cent maires, ce qui est beaucoup, même si ces derniers sont désormais 35 945 en France, désormais, un seul maire peut saisir le CNEN d’une modification, d’un allégement, voire d’une suppression de norme s’il le souhaite.
Après le flux et le stock des normes en vigueur, tous deux trop importants, j’en viens au troisième point, que j’ai déjà évoqué hier après-midi et qui est peut-être le plus important : les conditions d’application des normes. Les élus locaux, quand on les interroge, se plaignent bien évidemment de l’excès de normes, mais surtout de la difficulté qu’ils ont à les appliquer, du manque de conseils…