Intervention de Martine Pinville

Réunion du 28 janvier 2016 à 15h00
Réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Martine Pinville :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai le plaisir de vous présenter le projet de loi de ratification de l’ordonnance relative à la réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées.

Cette ordonnance a été prise en application de l’article 23 de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises. Cette mesure est issue des travaux du Conseil de la simplification pour les entreprises. Elle a pour objet de diminuer le nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées pour le faire passer de sept à deux, et ainsi d’aligner ce régime sur la règle de droit commun prévue à l’article 1832 du code civil.

En effet, jusqu’à présent, les sociétés anonymes devaient, en application de l’article L. 225-1 du code de commerce, réunir au minimum sept actionnaires. Historiquement, cette exigence a été introduite en droit français par la loi du 23 mai 1863, sous l’influence du droit britannique.

Toujours est-il que cette exigence est depuis longtemps contestée, le chiffre de sept ne reposant sur aucune justification économique ou juridique. En outre, elle est en décalage avec la pratique des sociétés familiales et des petites et moyennes entreprises, dans lesquelles les parts sont souvent réunies entre les mêmes mains. Elle n’est pas davantage adaptée à la pratique des groupes de sociétés au sein desquels les filiales sont parfois détenues à 100 % par la société mère.

Ainsi, cette obligation, qui ne trouve aucune justification ni juridique ni économique, conduit de nombreuses sociétés à avoir recours à des actionnaires de complaisance et réduit l’intérêt de cette forme sociale, par ailleurs jugée trop lourde.

La présente ordonnance a pour finalité de renforcer l’attractivité de la société anonyme, laquelle, en raison de la stabilité et de la prévisibilité de ses règles de fonctionnement, assure une meilleure protection des associés, plus particulièrement des associés minoritaires, que sa rivale, la société par actions simplifiée.

Elle a également pour objectif de renforcer la compétitivité de la France à l’échelle européenne, dans la mesure où notre pays est le seul en Europe à avoir établi et maintenu cette règle des sept actionnaires. Au Royaume-Uni, en Belgique et en Italie, il suffit de deux actionnaires pour créer une société anonyme, au Luxembourg et en Allemagne, un seul suffit, tandis que, en Espagne, aucun seuil minimal n’est imposé.

Le Gouvernement a prévu de fixer le nombre minimal d’actionnaires au plus bas, à deux, suivant en cela les recommandations des praticiens et des théoriciens du droit.

Si certains des praticiens consultés militaient pour la création d’une société anonyme unipersonnelle, cette option, qui impliquait une modification des compétences, des règles de composition, d’organisation et de fonctionnement des organes de direction, n’entrait pas dans le champ de l’habilitation.

Ainsi, il est apparu que la réduction à deux du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes, en ce qu’elle aligne le régime de ces sociétés sur le droit commun, organisé par l’article 1832 du code civil, constituait une simplification attendue.

La commission sénatoriale a complété utilement les dispositions contenues dans l’ordonnance du 10 septembre 2015 en étendant cette diminution du nombre d’actionnaires à deux aux sociétés d’exercice libéral à forme anonyme, extension que le texte de l’habilitation ne permettait pas.

Elle a également procédé à la rectification d’une erreur de coordination à l’article 32 de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, ainsi qu’à une coordination avec une disposition issue de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Elle a enfin, pour une meilleure clarté du droit, précisé le périmètre des sociétés cotées qui étaient exclues du dispositif.

Je tiens naturellement à remercier le rapporteur, André Reichardt, de la qualité de son rapport et de ses propositions désormais inscrites dans le texte.

Enfin, je connais l’attachement du Sénat aux exigences de simplification et de modernisation du droit des sociétés qui dépasse la seule question du nombre d’actionnaires. La commission des lois a d’ailleurs engagé un travail législatif plus approfondi et minutieux, sous la direction de Thani Mohamed Soilihi, qui a élaboré une proposition de loi de simplification, de clarification et d’actualisation du code de commerce portant principalement sur le droit des sociétés. Le travail de fond de votre assemblée se poursuivra donc.

Cela dit, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite à voter cette mesure de simplification et de bon sens.

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