Ce mécanisme s’est reproduit à plusieurs reprises – Mme Des Esgaulx en a bien décrit le cheminement –, tout d’abord en raison de contradictions au sein de la société entre des écoles de pensée, des groupements sociaux et des intérêts entre lesquels il fallait arbitrer, dans une situation où l’État était, selon l’expression consacrée, juge et partie. On a ainsi considéré que l’octroi à un collège, non à une autorité hiérarchique unique, de pouvoirs relevant indiscutablement de l’État constituait une bonne réponse à ces problèmes de société.
Ont ensuite émergé – j’en dirai un mot lors de la discussion des articles – des enjeux économiques, relatifs notamment à l’ouverture à la concurrence ou à la pluralité de domaines traditionnellement régulés par l’État, selon des schémas hérités principalement du Front populaire et de la Libération, et dans lesquels figuraient des entreprises nationales dominantes.
Le cadre un peu spécifique qui s’est établi au sein de l’Union européenne depuis tout juste soixante ans, auquel il faut tout de même que l’on s’accoutume, a naturellement conduit à la nécessité de garanties d’indépendance des régulateurs de marchés. D’où l’Autorité des marchés financiers ou l’Autorité de la concurrence, laquelle, il y a trente ans, était encore une simple commission ministérielle. Je pourrais d’ailleurs poursuivre cette liste avec, par exemple, l’autorité relative aux communications électroniques ou encore celle de l’énergie.
Il était donc cohérent d’en arriver là. Je veux saluer l’évolution de pensée ayant conduit certains de nos collègues de la demande d’une commission d’enquête avec des motivations parfois voisines du soupçon – certains des titres et intertitres du rapport d’enquête rappellent ainsi cette époque maintenant éloignée – à la reconnaissance de la nécessité de confier la régulation ou l’équilibrage de secteurs à des collèges. Après avoir salué de façon conviviale le cheminement de pensée des auteurs de la proposition de loi, je veux maintenant appeler mes amis du Gouvernement à parcourir encore un peu de chemin.