Monsieur le ministre, je connais suffisamment votre sens de l’État pour ne pas avoir de doute sur le fait que les mesures que vous nous proposez sont indispensables à la sécurité des Français. Je m’interroge en revanche sur le climat dans lequel ce débat s’inscrit et se poursuit.
Dans le contexte particulièrement difficile dans lequel nous nous trouvons, la façon dont nous nous adressons aux Français, la façon dont l’exécutif s’adresse aux Français, est évidemment décisive.
La France est un superbe et grand pays, dont l’énergie et la vigueur ont parfois besoin d’être stimulées. Notre pays a, aux tréfonds de lui-même, foi dans ses valeurs, mais il ne les mobilise avec enthousiasme que s’il les sent partagées.
C’est à cette France-là, celle qui croit que, au fond, elle peut venir à bout de tous ses adversaires sans jamais remettre en question ses valeurs et ses principes, qu’il faut s’adresser. Il y a au fin fond de notre pays, liée à notre histoire, une force qui nous permet chaque fois qu’elle est mobilisée d’écarter les trahisons, les reniements, les menaces, les petitesses et les mesquineries qui accompagnent parfois le débat public. Oui, c’est à cette France-là qu’il faut s’adresser.
En disant cela, je n’ai pas le sentiment d’exprimer une conviction personnelle. Je pense qu’elle est partagée dans cet hémicycle et qu’elle est le fruit de notre histoire, cette histoire qui nous dit que la France de 1914 n’est pas celle de 1940, celle que ses dirigeants surent mobiliser grâce à une foi républicaine et patriotique, celle qui sut emporter la victoire, dans des circonstances douloureuses, quand celle de 1940 s’effondra, avec des dirigeants qui, au fond, ne surent être à la hauteur ni de l’événement ni de la France qu’ils étaient censés diriger.
Comment expliquer que la France de 1959 ait su se redresser, alors que celle de 1958 apparaissait au bord du précipice ? Sans doute est-ce parce que le général de Gaulle a su parler à la France de toujours