Intervention de Alain Lambert

Réunion du 1er décembre 2009 à 14h30
Loi de finances pour 2010 — Compte spécial : avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres

Photo de Alain LambertAlain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances :

Les crédits demandés en 2010 pour la mission « Écologie, développement et aménagement durables » s’élèvent à 10, 29 milliards d’euros en autorisations d’engagement, les AE, et à 10, 15 milliards d’euros en crédits de paiement, les CP, soit 0, 7 % de plus qu’en 2009, évolution conforme à la loi de programmation que nous avons adoptée.

Le programme 203 – programme majeur au sein de la mission – couvre les infrastructures et les services de transports. En 2010, il mobilise 4, 44 milliards d’euros d’AE et 4, 35 milliards d’euros de CP. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, les moyens en personnel seront réduits d’environ 300 emplois en 2010.

Nous déplorons toujours, monsieur le ministre, que cette politique soit majoritairement financée par des crédits extérieurs ou extrabudgétaires, notamment par des dépenses fiscales, à hauteur de 803 millions d’euros, et des fonds de concours provenant des collectivités territoriales et de l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.

Ce constat conduit la commission des finances à poser, pour la seconde fois – voire la troisième –, la question du rôle de l’AFITF, dont les circuits de financement demeurent complexes. Le rapport public annuel de la Cour des comptes, auquel vous ne pouvez pas être indifférent, monsieur le secrétaire d'État, souligne qu’elle est « une agence de financement aux ambitions limitées, privée de ses moyens, désormais inutile », qui « voit circuler des crédits qui partent du budget général avant d’y retourner ». Cette agence n’apporte pas de réelle valeur ajoutée puisqu’elle n’est pas devenue l’instance d’évaluation et de décision qui aurait conforté sa légitimité. Il nous sera très utile de savoir ce que vous en pensez, monsieur le secrétaire d'État.

Son budget devrait être consacré aux transports non routiers pour près de 62 %, conformément au redéploiement modal prévu par le Grenelle de l’environnement. La subvention de l’État diminue de 6, 7 %, à périmètre constant, mais elle demeure importante. Elle s’élève à 980 millions d’euros. Je redoute, monsieur le ministre, que cette subvention, qualifiée de « provisoire », ne devienne durable. En effet, la taxe poids lourds sera sans doute reportée à 2012 et ne prendra que partiellement le relais.

J’évoquerai maintenant Réseau ferré de France, RFF. L’établissement public change de modèle économique avec l’entrée en vigueur de la réforme de la tarification. Les concours de l’État sont désormais affectés aux activités ferroviaires dont les péages ne couvrent pas le coût complet. Cette réforme permet de diminuer la subvention de 3, 1 %, qui atteindra malgré tout 2, 37 milliards d’euros.

Cette évolution vise à une relative amélioration de la situation financière de RFF, qui demeure fragile, sa dette ayant augmenté de 800 millions d’euros en 2008 pour atteindre 28, 2 milliards d’euros. Il s’agit là d’un grave motif d’inquiétude, car la rénovation nécessaire du réseau va conduire à alourdir encore cette dette.

Le secteur ferroviaire connaît actuellement d’importants bouleversements. À cet égard, je souhaite vous poser trois questions, monsieur le secrétaire d'État.

Tout d’abord, est-on bien sûr que l’engagement national pour le fret ferroviaire ne sera pas un énième et désespérant plan de relance ? J’ai en effet déjà présenté à plusieurs reprises du haut de cette tribune l’« ultime » plan de relance du fret ferroviaire ! Les priorités paraissent multiples et les financements peu clairs... Je ne doute pas que vos explications seront limpides, monsieur le secrétaire d'État.

Ensuite, comment le Gouvernement accueille-t-il les propositions de la SNCF sur les trains d’aménagement du territoire, qui présentent un déficit d’exploitation récurrent et dont les voies sont menacées d’obsolescence ? Doit-on, comme le souhaite la SNCF, mettre en place une société distincte pour les matériels roulants dédiés à ces dessertes et prévoir une compensation financière dans le cadre d’un contrat de service public ? Si oui, selon quelles modalités ? C’est avec une grande attention que j’écouterai vos réponses, monsieur le secrétaire d'État.

Enfin, le dernier rapport de la Cour des comptes sur les TER, sévère, suggère dans certains cas le remplacement des dessertes par des autocars. Êtes-vous favorable à une telle solution, monsieur le secrétaire d'État ? Portez-vous la même appréciation que la SNCF sur ce sujet ?

Quant à Voies navigables de France, la rationalisation de son organisation se poursuit. Elle se traduit notamment par un recentrage sur le réseau magistral. La subvention de l’État s’élèvera à 58, 9 millions d’euros. Elle inclura une dotation supplémentaire de 4 millions d’euros au titre du Grenelle de l’environnement. Au fond, la situation financière de VNF demeure assez confortable.

Pour terminer sur ce programme, je relève deux priorités et une lacune budgétaires. Le soutien au transport combiné devrait bénéficier d’une enveloppe supplémentaire de 8 millions d’euros au titre de l’engagement national pour le fret ferroviaire. Nous proposerons un amendement visant à augmenter ce montant de 1, 5 million d’euros par transfert de crédits.

Les crédits d’entretien et d’exploitation des grands ports maritimes sont accrus de 5, 85 millions d’euros.

Le taux de renouvellement des couches de surface du réseau routier devrait redescendre à 6 % en 2010, ce qui demeure insuffisant pour garantir une durée de vie optimale des chaussées. Ce n’est pas là un mince sujet ! La tendance générale à la dégradation du réseau routier national n’est donc pas encore enrayée, ce qui nous inquiète.

J’aborde à présent le programme 205, « Sécurité et affaires maritimes », que vous connaissez si bien, monsieur le secrétaire d'État. Il sera doté en 2010 de 133 millions d’euros en AE et de 135, 5 millions d’euros en CP, soit une hausse de 0, 7 % à périmètre constant. Cette dotation est plus que doublée par la masse salariale des 3 228 ETPT, équivalents temps plein travaillé. Les dépenses fiscales concourent également pour 244 millions d’euros. L’évaluation du système optionnel de taxe au tonnage reste approximative. Nous en surveillerons de très près l’évolution.

La principale réforme est la réorganisation des services déconcentrés des affaires maritimes. Elle vise à réaliser des économies de gestion et à rationaliser les implantations. Je regrette que le ministère n’ait pas fourni une évaluation des bénéfices escomptés de cette réforme. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce sujet, monsieur le secrétaire d'État ?

Les effectifs diminueront de 57 ETPT en 2010. Une réforme des écoles nationales de la marine marchande est en cours. Leur gestion sera confiée à un établissement public unique. Nous approuvons cette mesure de bonne gestion.

Trois priorités budgétaires sont mises en œuvre : la poursuite de la modernisation des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, les CROSS, et de leurs systèmes d’information ; la protection de l’emploi maritime, avec une augmentation des aides à la flotte de commerce sous pavillon français, qui comptait seulement 296 navires à la fin de 2008 ; un dispositif de contrôle et de surveillance des pêches enfin revalorisé.

Le programme 113, « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité », mobilise d’importantes ressources humaines – 15 222 ETPT – et prend appui sur des opérateurs puissants, aux ressources extrabudgétaires considérables. Ainsi, les ressources fiscales et les ressources propres des agences de l’eau atteignent 2, 3 milliards d’euros, comparées aux 350 millions d’euros du programme. Les écarts sont tout à fait considérables !

En 2010, ce programme se résume en deux mots : Grenelle et RGPP.

Il porte la marque du Grenelle de l’environnement : 61 millions d’euros – soit 24 millions d’euros de plus qu’en 2009 – sont consacrés à sa mise en œuvre dans les domaines de l’urbanisme, de l’eau et de la biodiversité.

Il est en outre porteur de plusieurs réformes issues de la RGPP. La principale d’entre elles est la cessation progressive des activités d’ingénierie publique concurrentielle exercées actuellement par les directions départementales de l’équipement, les DDE, et les directions départementales de l’équipement et de l’agriculture, les DDEA. Cette réforme se traduit par un plan de suppression d’environ 3 300 ETP entre 2009 et 2011. Il en résultera une économie dont le montant est estimé à 48 millions d’euros en 2010. La mutualisation des effectifs des polices de l’eau et de la nature se poursuit également.

Enfin, pour 4 millions d’euros en 2010, des actions de formation des agents sont engagées dans le cadre de la refonte de la fiscalité de l’urbanisme et du mode de traitement des actes d’urbanisme, domaines dans lesquels il y a beaucoup à faire. Cette refonte devrait permettre des gains de productivité équivalant à 1 000 ETPT en 2011 et, à terme, une économie budgétaire de l’ordre de 40 millions d’euros par an.

Monsieur le secrétaire d'État, j’écouterai avec beaucoup d’attention les réponses que vous apporterez aux questions que je viens de poser. Elles sont importantes pour la commission des finances. Vous rappeler les crédits dont vous avez demandé l’inscription ne vous apporterait rien ; en revanche, écouter les réponses à vos questions nous permettra quasiment d’atteindre le nirvana ! §

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