Intervention de Françoise Férat

Réunion du 16 février 2016 à 21h30
Liberté de création architecture et patrimoine — Article 24, amendement 273

Photo de Françoise FératFrançoise Férat, rapporteur :

En ce qui concerne l’amendement n° 273, la mise en place d’un nouveau régime se substituant à celui des secteurs sauvegardés, des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, ou ZPPAUP et des aires de valorisation de l’architecture et du patrimoine, ou AVAP, devrait se traduire par une simplification des règles relatives aux espaces protégés et contribuer à rendre la politique patrimoniale plus lisible pour nos concitoyens. Il serait donc particulièrement regrettable de revenir sur le principe même de cette réforme. J’émets donc un avis défavorable.

L’amendement n° 447 rectifié vise à remplacer l’appellation « site patrimonial protégé » par celle de « cité et paysage protégés ». Lorsque nous avons examiné ce texte en commission, nous nous sommes félicités de l’amendement adopté par l’Assemblée nationale qui a permis d’élargir le périmètre du nouveau régime d’espace protégé aux espaces ruraux et aux paysages. C’est l’une des raisons pour lesquelles il nous a paru nécessaire de modifier l’appellation « cité historique ». Néanmoins, il faut souligner que le texte du projet de loi n’accorde aux espaces ruraux et aux paysages une protection au titre du nouveau régime qu’en tant qu’ils forment un tout cohérent avec les villes, villages et quartiers dont le patrimoine culturel est protégé.

Est-il souhaitable que les espaces ruraux et les paysages puissent bénéficier d’une protection indépendante au titre de ce nouveau régime ? Cela reviendrait alors sur l’esprit même de cette réforme, qui met en place un nouvel outil de protection du patrimoine, en particulier des immeubles, qu’ils soient bâtis ou non, et vise à distinguer plus clairement les régimes de protection qui relèvent du code du patrimoine de ceux qui relèvent du code de l’environnement – c’est toute la difficulté lorsque l’on associe les deux codes. Cela brouillerait finalement le message du texte, jusqu’ici très clair, que de permettre aux paysages de bénéficier par eux-mêmes de ce nouveau régime.

En revanche, les paysages sont tout à fait légitimes à bénéficier de l’inscription ou du classement en tant que sites dès lors qu’ils revêtent un intérêt général au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque ou à faire l’objet de directives de l’État en matière de protection et de mise en valeur des paysages. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.

Sur l’amendement n° 446 rectifié, l’avis de la commission est également défavorable pour les raisons que je viens de donner. Il ne paraît pas souhaitable de faire figurer en tant que telle la notion de paysage dans l’appellation du nouveau régime.

Les amendements identiques n° 195 rectifié, 391 et 445 rectifié visent à obliger les sites patrimoniaux à se doter d’outils de médiation et de participation citoyenne. Il me semble que prévoir une obligation en la matière peut être source de difficultés. Si l’objectif des auteurs de ces amendements est de prévoir une affiliation obligatoire des territoires couverts par un site patrimonial protégé aux réseaux des villes et pays d’art et d’histoire ou aux petites cités de caractère, il ne paraît pas souhaitable que la loi s’immisce dans cette question, qui relève de la libre volonté de chaque commune ou de chaque EPCI.

Par ailleurs, en matière d’outils de médiation, le texte prévoit déjà l’institution d’une commission locale et, en ce qui concerne la participation citoyenne, il prévoit aussi plusieurs dispositions visant à faciliter la participation du public, notamment via des enquêtes publiques. De ce fait, l’introduction d’une telle disposition ne paraît pas nécessaire, car tout cela me semble satisfait. La commission émet donc une demande de retrait et, à défaut, un avis défavorable.

L’amendement n° 527 du Gouvernement vise à remettre en cause, me semble-t-il, l’élaboration conjointe du plan de sauvegarde et de mise en valeur et il tend à supprimer l’avis de la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture sur le document d’urbanisme et la mise en place d’une commission locale. Pour ce qui concerne les autres modifications que vous proposez, madame la ministre, certains collègues ont déposé des amendements qui devraient tendre à les satisfaire. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 151 rectifié, il paraît souhaitable qu’une commune qui serait membre d’un EPCI puisse être à l’initiative d’une décision de classement au titre des sites patrimoniaux protégés dès lors que le projet de classement concerne une zone située intégralement ou partiellement sur son territoire.

En revanche, cet amendement ouvre la possibilité d’un classement au titre des cités historiques sans avoir recueilli au préalable l’accord de l’EPCI, alors même qu’il pourrait être chargé de la mise en œuvre de cette servitude au titre de ses compétences en matière de documents d’urbanisme. Cette modification n’est donc pas souhaitable. L’avis de la commission est par conséquent défavorable.

L’amendement n° 152 rectifié est intéressant sur le fond. L’élaboration d’un premier diagnostic patrimonial permettra d’identifier les principaux éléments à protéger, à conserver et à mettre en valeur sur le périmètre du site patrimonial protégé. En revanche, il impose une charge, sans préciser à qui devrait incomber le financement de ce diagnostic ; c’est ce qui me trouble un peu. Il paraît donc souhaitable de recueillir l’avis du Gouvernement à ce titre, madame la ministre, de manière à savoir si cette nouvelle obligation peut s’opérer à moyens constants.

Les amendements n° 274 rectifié et 275 rectifié visent à faire remonter dans le code du patrimoine les dispositions relatives à la procédure d’élaboration, de révision et de modification du plan de sauvegarde et de mise en valeur.

La commission a déjà prévu de rétablir l’élaboration conjointe entre l’État et la commune ou l’EPCI des plans de sauvegarde et de mise en valeur. Elle a également prévu un avis de l’architecte des Bâtiments de France et de la commission nationale préalablement à toute modification d’un plan de sauvegarde et de mise en valeur – c’est l’article 36 du projet de loi.

Il ne paraît donc pas utile de complexifier la rédaction de l’article L. 631-3 du code du patrimoine en y insérant des dispositions qui relèvent du code de l’urbanisme. La commission émet donc un avis défavorable.

L’amendement n° 56 rectifié quater vise à modifier l’intitulé du PMVAP en « plan de valorisation du patrimoine et des paysages ».

Cette proposition ne me paraît pas conforme au périmètre couvert par ce document. En effet, les paysages ne sont concernés par le classement au titre des sites patrimoniaux protégés qu’en tant qu’ils forment un tout cohérent avec les villes, les villages et les quartiers dont le patrimoine culturel est protégé. Nous l’avons déjà vu à l’occasion de l’examen d’un précédent amendement.

Dans le dispositif des sites patrimoniaux protégés, c’est avant tout l’insertion paysagère des constructions qui est recherchée et la protection des paysages qui contribue à la mise en valeur de ce patrimoine culturel bâti.

Dès lors, il me semble que la proposition aurait pour conséquence de réintroduire une certaine confusion entre les différents types de protection. La commission sollicite donc le retrait de l’amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Si la commission souscrit pleinement au principe visé à l’amendement n° 153 rectifié, elle se demande s’il n’aurait pas été plus approprié d’intégrer directement ses dispositions au sein des articles qui prévoient les procédures respectives d’élaboration, de révision et de modification des plans de sauvegarde et de mise en valeur et des plans de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.

La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat à son sujet.

Les amendements identiques n° 197 rectifié, 293 et 393 tendent à prévoir la participation de l’architecte des Bâtiments de France à l’élaboration et à la révision du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine. Ces amendements ont toutefois un champ plus étroit que l’amendement n° 153 rectifié, dont le dispositif couvre également le cas de la modification de ce document, ainsi que celui de l’élaboration, de la modification et de la révision du plan de sauvegarde et de mise en valeur.

C’est pourquoi la commission demande à leurs auteurs de bien vouloir les retirer ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 457 rectifié vise à ce que les recommandations et orientations que la commission nationale peut formuler portent sur des mesures de gestion du site patrimonial protégé. Néanmoins, cette précision pourrait avoir pour effet de réduire le pouvoir de recommandation de la commission nationale, en obligeant celle-ci à se limiter à la question de la gestion du site, alors qu’elle pourrait tout à fait être amenée à formuler également des orientations sur d’autres sujets, relatifs, en particulier, à la protection.

Par conséquent, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, madame Jouve ; à défaut, elle y sera défavorable.

L’amendement n° 154 rectifié, dont l’adoption aurait pour effet de rendre facultative l’institution de la commission locale, soulève, à mon sens, deux questions.

Premièrement, en l’absence de commission locale, qui serait chargée d’assurer le suivi du site patrimonial protégé ? Faire reposer le suivi du site patrimonial protégé sur la seule commission nationale n’est-il pas risqué ?

Deuxièmement, comment comprendre les mots « autorité locale compétente » ? S’agit-il de la ou des communes partiellement ou intégralement couvertes par le périmètre du site patrimonial protégé ou de l’EPCI, lorsque celui-ci est compétent en matière d’urbanisme ?

En l’état actuel de sa rédaction, la commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement n° 155 rectifié s’inscrit dans la logique des modifications qui ont été apportées par l’Assemblée nationale à la composition des commissions consultatives nationale et régionales dans le domaine du patrimoine. Il paraît cohérent de les reproduire s’agissant des commissions locales.

La commission est donc favorable à cet amendement.

L’amendement n° 295 rectifié tend à modifier la rédaction des éléments qui doivent figurer au sein de la partie « règlement » du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, de manière à mieux le distinguer du contenu du plan local d’urbanisme dit « patrimonial ».

Sur le fond, il ne paraît pas changer particulièrement la substance du texte adopté par la commission, raison pour laquelle celle-ci s’en remet à la sagesse du Sénat.

L’alinéa que visent à modifier les amendements identiques n° 305 rectifié, 394 et 481 rectifié quater traite de la qualité architecturale. Il s’agit donc bien de rénovation. Or les questions relatives à la restauration sont abordées à l’alinéa suivant du texte.

Dans ces conditions, la commission sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Pour ce qui concerne les amendements identiques n° 306 rectifié, 395 et 482 rectifié quater, la rédaction de l’alinéa 99 est intimement liée à celle de l’alinéa 98, qui comporte lui-même l’idée de requalification, et non de restructuration. L’objectif est bien de permettre d’identifier les parcelles susceptibles de faire l’objet d’une requalification, par exemple, en espaces verts, de manière à ouvrir une perspective sur un bâtiment historique.

La commission sollicite le retrait de ces amendements, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

Les amendements identiques n° 190 rectifié bis et 307 rectifié ter visent à obtenir l’accord de la ou des communes sur le projet de plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine élaboré dans un cadre intercommunal – nous sommes bien dans ce cadre précis.

Le transfert des compétences en matière d’urbanisme à l’échelon intercommunal fait craindre, au sein de plusieurs intercommunalités, que les projets patrimoniaux de certaines communes soient traités a minima, dès lors qu’il s’agirait d’une problématique intéressant une minorité de communes membres de l’EPCI. Ces amendements ont pour objet de surmonter cette difficulté, en s’assurant que la ou les communes concernées par le projet de PMVAP sont consultées au moment de l’élaboration au niveau de l’EPCI.

L’avis de la commission est donc favorable.

En revanche, monsieur Bouvard, la commission sollicite le retrait de l’amendement n° 396, au profit des amendements identiques n° 190 rectifié bis et 307 rectifié ter, qui ont été rectifiés conformément à sa demande. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 59 rectifié ter n’aura plus d’objet si nous maintenons la dénomination du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.

L’amendement n° 189 rectifié bis, qui a le même objet, vise à permettre à un EPCI de déléguer à la commune concernée ses compétences en matière d’élaboration du PMVAP.

Son adoption ne paraît pas indispensable, puisque, une nouvelle fois, l’élaboration d’un tel document est de droit sur le périmètre du site patrimonial protégé classé en l’absence de plan de sauvegarde et de mise en valeur. L’avis de la commission régionale et l’accord du préfet avant l’adoption de ce document peuvent apparaître comme des verrous suffisants.

Par ailleurs, autoriser l’EPCI à déléguer cette compétence risquerait de créer un appel d’air, en ce sens qu’il pourrait être conduit à la déléguer systématiquement, de manière à reporter les coûts de l’élaboration du plan sur la commune concernée.

La commission sollicite le retrait de l’amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

Le II de l’amendement n° 308 rectifié et les amendements n° 299 rectifié, 309 rectifié et 398 visent à confier à la commission régionale du patrimoine et de l’architecture le suivi de l’élaboration du plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine.

Madame Cayeux, je partage bien évidemment le souhait des auteurs de l’amendement n° 308 rectifié de s’assurer que le contenu de ce document soit le plus favorable possible à la protection du patrimoine. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la commission a fait le choix d’instituer, sur le périmètre du site patrimonial protégé, une commission locale.

En outre, il est déjà prévu que la commission régionale soit consultée sur le projet de plan de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine. Compte tenu des arguments développés, cette mention ne suffit-elle pas à lui assurer un droit de regard sur l’élaboration du plan ?

Il convient d’éviter les lourdeurs administratives excessives. Nous parlons de simplification depuis le début de l’examen du projet de loi ; le moment est venu de passer aux actes ! C’est pourquoi la commission sollicite le retrait de l’amendement ; à défaut, elle devra émettre un avis défavorable.

La commission est favorable à l’amendement n° 397, identique à l’amendement n° 507 de la commission, qui vise à corriger une erreur matérielle.

Pour les raisons que j’ai indiquées en m’exprimant sur l’amendement n° 308 rectifié, la commission sollicite le retrait des amendements identiques n° 299 rectifié, 309 rectifié et 398 ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 429 rectifié ter vise à préciser que la protection des parties intérieures des immeubles bâtis, dans le périmètre des sites patrimoniaux protégés couverts par un plan de sauvegarde et de mise en valeur, porte sur les éléments d’architecture et de décoration qui ont le caractère d’immeubles par nature ou d’immeubles par destination.

La protection des intérieurs constitue l’une des principales caractéristiques du régime des secteurs sauvegardés, caractéristique qui le distinguait des régimes de protection de la ZPPAUP et de l’AVAP. Elle doit permettre de protéger les escaliers, les cheminées, les plafonds peints, les stucs ou encore les boiseries.

La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

L’amendement n° 349 rectifié tend à prévoir que, dans les cas où l’autorité compétente en matière d’autorisation en appellerait à l’autorité administrative pour trancher un désaccord avec l’ABF, comme dans le cas où un demandeur formerait un recours contre une décision de refus d’autorisation de travaux auprès de l’autorité administrative, le silence de celle-ci, au terme du délai fixé par décret en Conseil d’État, vaudrait refus, et non accord.

Il nous a semblé que cette disposition avait été introduite dans le projet de loi dans un souci d’accélérer les délais de traitement des autorisations de travaux. Il s’agit d’une simplification utile pour nos concitoyens.

Pour cette raison, nous sommes défavorables à cet amendement, dont l’adoption complexifierait le texte du projet de loi, alors qu’il nous semble particulièrement clair sur ce point.

L’amendement n° 335 rectifié vise à transformer l’avis conforme des ABF en avis simple pour une liste de travaux fixée par décret en Conseil d’État sur le périmètre des espaces protégés au titre du code du patrimoine.

Les auteurs de l’amendement mettent en avant le fait que cette procédure ne concernerait que les travaux ayant un impact limité sur l’aspect extérieur des bâtiments.

Monsieur Fouché, dans l’exposé des motifs de votre proposition de loi, dont cet amendement reprend les dispositions, il est suggéré que soient concernés les portes, les fenêtres, les volets et coffrets de volets intégrés à l’intérieur, les travaux d’isolation thermique ou les murs rejointés, de manière à faciliter la généralisation du PVC ou des volets roulants.

Il semble que cette évolution n’aille malheureusement pas dans le sens des enjeux de protection du patrimoine que nous cherchons à défendre.

La commission a donc émis un avis défavorable.

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