Intervention de Estelle Grelier

Réunion du 18 février 2016 à 14h30
Modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle — Article 2 ter, amendements 16 2

Estelle Grelier, secrétaire d'État :

Monsieur Sueur, j’ai bien entendu vos arguments ; j’ai entendu aussi ce que je ne devais pas répondre, et j’en ai pris l’inspiration. Je vous rappelle simplement que l’Assemblée nationale n’a pas souhaité inscrire à l’ordre du jour de ses travaux en séance publique la proposition de loi sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral, ni l’intégrer par voie d’amendement dans le texte que nous examinons cet après-midi.

Le Gouvernement émet des doutes sur la constitutionnalité de la présente proposition de loi au regard du principe de liberté de la presse, la notion de « sujets liés, de manière directe ou indirecte, au débat électoral » pouvant être interprétée de manière démesurément large.

En outre, d’un point de vue pratique, la définition du sondage figurant à l’article 2 ter nous inspire quelques réserves, dans la mesure où elle prévoit le caractère nécessairement représentatif de l’échantillon interrogé. En d’autres termes, si une enquête devait reposer sur un échantillon non représentatif, elle serait exclue du champ de l’encadrement par la loi.

Une autre difficulté doit être levée sur la conventionnalité de ces dispositions, puisque le texte proposé pour l’article 1er de la loi du 19 juillet 1977 modifiée étend le champ d’application de cette loi aux « organes d’information qui font état, sous quelque forme que ce soit, d’un sondage […] publié ou diffusé depuis un lieu situé hors du territoire national ». En effet, en plus d’être d’application complexe, cette disposition pourrait rendre délicat le respect de l’article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui protège la liberté de communication. La poursuite pénale d’un organe d’information pour non-respect de l’interdiction de diffusion d’un sondage publié à l’étranger paraît donc fragile sur le plan juridique. Du reste, elle ne permettrait pas de poursuivre les sites internet diffusant des sondages illégaux.

Enfin, des problèmes pourraient résulter du même article 11 pour l’application de certaines dispositions de l’article 2 ter en outre-mer et aux opérations électorales des Français de l’étranger, du fait des décalages temporels.

Néanmoins, comme j’ai bien entendu les arguments présentés par M. Sueur sur le fondement du rapport d’information qu’il a établi avec M. Portelli et parce que le Gouvernement est favorable à certaines des propositions qu’ils y ont formulées, je retire l’amendement n° 16 visant à réécrire l’article 2 ter, tout en souhaitant que les deux interrogations dont je viens de vous faire part en ce qui concerne l’application pratique de certaines dispositions de cet article puissent être levées à la faveur d’une concertation, que j’imagine constructive et fructueuse, entre le Sénat et l’Assemblée nationale.

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